Justinien

Justinien
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Justinien Ier
Empereur byzantin
Image illustrative de l'article Justinien
Justinien, mosaïque de la Basilique San Vitale de Ravenne, avant 547
Règne
1er août 527 - 14 novembre 565
&&&&&&&&&&01398538 ans, 3 mois et 13 jours
Période Justinienne
Prédécesseur(s) Justin Ier
Successeur(s) Justin II
Biographie
Naissance 11 mai 483 - Tauresius (Iustina Prima)
près de l'actuelle Skopje, République de Macédoine
Nom originel Flavius Petrus Iustinianus Sabbatius
Décès 14 novembre 565 (82 ans)
Constantinople
Père Sabbatius
Mère Vigilantia
Épouse(s) Théodora
Liste des empereurs byzantins

Justinien Ier (latin : Imperator Caesar Flavius Petrus Iustinianus Sabbatius Augustus, grec : Φλάβιος Πέτρος Σαββάτιος Ἰουστινιανός) (né le 11 mai 483 en Illyrie - mort le 14 novembre 565) ou Justinien le Grand, fut empereur byzantin de 527 jusqu'à sa mort en 565. Il fut l’une des principales figures de l’Antiquité tardive. Que ce soit sur le plan du régime législatif, de l’expansion des frontières de l’Empire ou de la politique religieuse, il a laissé une œuvre considérable.

Le règne de Justinien fut marqué par l'ambitieux projet de « restauration de l'empire », partiellement accompli. Son héritage eut encore plus de résonance sous l'aspect de l'uniformisation du droit romain, le Corpus iuris civilis, qui est encore la base du droit civil dans de nombreux États modernes.

Son règne fut aussi l'occasion d'un épanouissement de l'Art byzantin, et son programme de construction nous a laissé plusieurs chefs-d'œuvres architecturaux, en particulier la basilique Sainte-Sophie, qui fut le centre du Christianisme oriental pendant plusieurs siècles.

Sa politique fut fortement critiquée par Procope de Césarée, dont les œuvres représentent les sources les plus importantes de l'époque de Justinien. Les auteurs Jean Malalas, Agathias et Ménandre le Protecteur fournissent des sources complémentaires sur le règne de Justinien.

Il est considéré comme saint par l'Église orthodoxe et fêté le 2 août ou les 14 et 15 novembre avec son épouse Théodora[1].

Sommaire

Origines, formation et caractère

Tremissis de l'empereur Justinien
Profil de Justin Ier

Justinien (Flavius Petrus Sabbatius Justinianus) est né en Illyrie le 11 mai 483 à Tauresium (Justiniana Prima), dans une famille Thrace modeste. Sa chance est d’être le neveu d’un soldat à qui une brillante carrière permet d’accéder au trône impérial en 518, sous le nom de Justin Ier, succédant à l’empereur Anastase Ier. Justin adopte son neveu et lui fait donner, alors qu’il est lui-même sans grande culture, la meilleure éducation possible ; l’éducation d’alors se base sur le droit, la rhétorique et la théologie. Devenu empereur, Justin associe rapidement Justinien aux affaires et le nomme patrice, puis consul. Il est rarissime dans l’histoire politique byzantine de voir un homme né aussi loin du trône, à ce point préparé à régner. Quand il accède au pouvoir en 527, à l’âge de quarante-cinq ans, il est un homme mûr à la personnalité contrastée.

La mosaïque de l'impératrice Théodora, Basilique San Vitale de Ravenne.

En effet, Justinien possède d’indéniables qualités : un grand sens de l’État et de l’idée impériale, une forte capacité de travail, une relative simplicité de mœurs assez rare pour l’époque : il est végétarien et ne boit pas de vin, et possède une grande culture. Ses qualités intellectuelles sont cependant parfois gâchées par un caractère soupçonneux, influençable, un autoritarisme qui se change brutalement en pusillanimité, comme lors de la sédition Nika et, surtout après la mort de l’impératrice Théodora en 548, un manque de persévérance dans l’action.

Il sait aussi, et c’est une de ses qualités premières, s’entourer de collaborateurs remarquables, quoique souvent sans scrupule, tels Bélisaire, Narsès, Tribonien, ou le préfet du prétoire Jean de Cappadoce. Justinien n’hésite pas à favoriser les hommes en qui il a confiance. L’exemple de Narsès, eunuque d’extraction modeste, devenu l’un des plus grands chefs militaires de son temps, en est la meilleure illustration.

Enfin, et même s’il ne faut pas exagérer son influence, le rôle de Théodora[2], ancienne actrice de très humble origine (à tel point que Justin Ier fit modifier la loi interdisant à un sénateur d’épouser une actrice pour permettre le mariage de son neveu), épouse de Justinien depuis environ 523, est indéniable. Justinien est l'empereur qui va essayer de reconstruire l'Empire romain.

Politique extérieure de Justinien

Les conquêtes de Justinien
Constantinople
Ville Impériale
Rome
Rome est prise en 536 et reprise en 546
Ravenne
Ravenne est prise en 540
Naples
Naples est reprise en 543
Ad Decimum
Bataille de l'Ad Decimum en 533
Carthage
Bélisaire bat Gélimer à Tricaméron en 533
Taginae
Narsès bat Totila à Taginae en 552
Alexandrie
Red pog.svg
Antioche
Red pog.svg
Jérusalem
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AFRIQUE
ITALIE
ILLYRIE
THRACE
ÉGYPTE
ORIENT
ASIE MINEURE
BÉTIQUE

Les conquêtes de Justinien (en orange) essentiellement sur la moitié ouest de la méditerranée.

Paix avec la Perse sassanide

Article détaillé : Sassanides.

Dès le début de son règne Justinien semble avoir comme objectif de reconstituer l’ancien empire romain autour de la Méditerranée (restauratio imperii). Mais, pour cela, il doit d’abord mettre fin à la lutte contre la Perse, dont les troupes sont aux portes d’Antioche en 529. Bélisaire remporte quelques succès entre 529 et 531 mais, Justinien préfère finalement, en 532, acheter la paix qui lui est nécessaire pour réaliser ses objectifs de reconquête en Occident.

Guerre contre les Vandales

Article détaillé : Royaume vandale.
Royaume vandale vers 455.

Le royaume Vandale apparait comme la menace la plus dangereuse. L’empereur craint que la flotte vandale ne perturbe plus tard ses opérations militaires en Italie, et les liaisons commerciales. Outre cet aspect il y a une raison plus politique: Hildéric, roi des Vandales vient d’être renversé par Gélimer. Hildéric était le représentant de la tendance pro-byzantine, et favorable à un rapprochement. Ses divisions internes récentes rendent le royaume vulnérable et les catholiques persécutés par le roi appellent de leurs vœux une intervention impériale. Ce sont ces faits qui déterminent Justinien à en faire le premier objectif de sa politique d'expansion.

Aussi Bélisaire à la tête d’une forte armée pour l’époque, sans doute 18 000 hommes, débarque entre Sfax et Sousse en 533. La bataille de l’Ad Decimum en 533, puis le 15 septembre 533 la prise de Carthage et du roi Gélimer sonnent le glas du royaume fondé par Genséric. Dans la foulée les armées byzantines s’emparent de la Corse, de la Sicile et de la Sardaigne.

Guerre contre les Ostrogoths

Ivoire Barberini représentant l’empereur Justinien triomphant, probablement vers 540-550, Musée du Louvre

L’assassinat, par son mari Théodat, de la fille de Théodoric le Grand, la reine Amalasonte, est le prétexte évoqué par Justinien pour envahir l’Italie en 535. Deux armées prennent en tenaille les armées des Ostrogoths, l’une venant de Dalmatie, l’autre de Sicile, sous la direction de l’indispensable Bélisaire. Celui-ci s’empare de Naples, puis occupe Rome le 10 décembre 536, et enfin Ravenne en 540, malgré la résistance opiniâtre du nouveau roi Vitigés. Ce dernier est fait prisonnier, et est envoyé à Constantinople, où Justinien le traite avec honneur. Mais l’empereur commet l’erreur, en 540, de disgracier Bélisaire, dont il craint visiblement la popularité, et qu’il avait déjà tenté de contrôler en lui envoyant Narsès comme second, vers 538. L’échec cuisant de cette tentative avait abouti au rappel de Narsès un an plus tard.

Royaume ostrogoth vers 489-553.

En 540, le rappel de Bélisaire dans la capitale, où il se voit confier des missions plus honorifiques que de réels commandements, correspond aussi à une nouvelle offensive de la Perse dans le Caucase et en Syrie. La paix n’est définitivement signée qu’en 562, et aboutit à une progression de l’influence byzantine en Arménie et dans le Caucase. Toujours en 540, la capitale est menacée par les Bulgares dont Justinien ne se débarrasse qu’en lançant contre eux les Avars, qui vont s’établir dans la vallée du Danube. Ces difficultés permettent aux Ostrogoths, dirigés par Totila, de reprendre l’offensive, et de vaincre à deux reprises les Byzantins (Faenza, puis Mugillo en Italie centrale). La ville de Naples est reprise en 543, celle de Rome le 17 décembre 546.

Il faut attendre l’arrivée de Narsès, en 552, pour voir la situation tourner à l’avantage des troupes de Justinien. Narsès, seul commandant en chef cette fois, et pourvu d’une forte armée, se révèle un excellent chef de guerre et inflige aux Ostrogoths la défaite de Taginae (552) en Ombrie, où Totila est tué. Les dernières résistances sont balayées en 553 au mont Lactarus, près du Vésuve, où leur dernier roi, Téias est tué. En 555 Narsès écrase une invasion alamanne près de Capoue. L’Italie est redevenue romaine, mais au prix de la ruine de la péninsule.

Profitant de l’appel à l’aide du roi wisigoth Athanagild, en lutte contre un compétiteur, Agila Ier, Justinien se fait céder pour prix de son soutien l’ancienne province de Bétique (l’actuelle Andalousie) en 554, et impose la suzeraineté byzantine au royaume des Wisigoths.

Justinien est le dernier empereur à avoir tenté de réunir les deux parties de l’ancien Empire romain. Ses successeurs, s’ils ne renonceront pas au titre, prennent acte de la séparation définitive entre l’Orient et l’Occident.

Œuvre législative et administrative

Article détaillé : Institutions de l'Empire byzantin.
Illustration pour les Institutiones Imperiales. Justinien trône au centre de la gravure XVIe siècle

À son accession au pouvoir Justinien trouve une situation économique et financière saine grâce à la sage politique suivie par ses prédécesseur tels Anastase Ier. Cela lui laisse les mains libres afin d’appliquer son programme de restauration et d’unification du monde romain. Dès le début de son règne il s’applique à une grande réforme juridique.

Diverses commissions, dirigées par le juriste Tribonien, compétent mais détesté pour sa vénalité, sont chargées de remettre de l’ordre dans l’ensemble des constitutions impériales publiées depuis Hadrien. Cette réorganisation, le Corpus Juris Civilis[3], est ce que nous appelons le Code Justinien (529) écrit en latin, la langue vernaculaire de l’Empire romain, qui n’était pas compris par la plupart des citoyens de l’empire d’Orient. Une seconde version, le Codex retitae praelectionis, la seule que nous ayons, celle de 529 étant perdue, est publiée en 534. En 529, Justinien ferme l'école néoplatonicienne d'Athènes[4], alors dirigée par Damascios le Diadoque[5], et qui prolongeait l'illustre Académie de Platon, close avec Sylla en 86 av. J.-C.[6] : sept philosophes (Damascius le Diadoque, Simplicios de Cilicie, Priscien de Lydie, Eulamios de Phrygie, Hermias de Phénicie, Diogène de Phénicie, Isidore de Gaza) durent se réfugier chez le roi de Perse, Khosrô Ier, et revinrent en 533.

En 533 est publiée aussi le Digeste (ou Pandectes), qui correspond à une modernisation de toute la législation antique ainsi qu’à une synthèse de la jurisprudence antique. À cela s’ajoute un manuel pour enseigner le droit, les Institutes (533). Enfin les lois nouvelles, voulues par Justinien, les Novelles, sont écrites en grec, la langue véhiculaire de l’empire, après 534. Cette œuvre législative prend une importance fondamentale en Occident car c’est sous cette forme reçue de Justinien que l’Occident médiéval, à partir du XI Ie siècle adopte le droit romain.

Justinien entreprend aussi de nombreuses réformes administratives, contenues surtout dans les grandes Novelles de la période 535-536. Leur objectif est essentiellement de renforcer le pouvoir de l’empereur en démembrant les grands offices, de lutter contre l’inquiétant développement de la grande propriété foncière ainsi que contre la corruption endémique des fonctionnaires impériaux. Aussi, souvent pour des raisons fiscales, Justinien regroupe diverses provinces, considérées de taille insuffisante et, afin de simplifier l’administration locale, supprime un certain nombre de diocèses et regroupe parfois, comme en Égypte agitée par des troubles réguliers, les pouvoirs civils et militaires entre les mains de commandants militaires.

Politique religieuse

Justinien fut un des premiers empereurs à être représenté avec une croix sur la face d’une pièce

Justinien se conçoit comme l'élu de Dieu, son représentant et son vicaire sur la terre. Il se donne pour tâche d’être le champion de l’orthodoxie dans ses guerres ou dans le grand effort qu’il fait pour propager la foi orthodoxe, soit dans la façon dont il domine l’Église et combat l’hérésie[7]. Il veut gouverner l’Église en maître, et, en échange de la protection et des faveurs dont il la comble, il lui impose sa volonté, se proclamant nettement empereur et prêtre[8]. L’action législative de Justinien s’inscrit donc dans la durée, avec une attention toute particulière pour l’Église. En effet, l’empereur est un chrétien sincère et il s’estime, le dirigeant suprême de l’Église. Le christianisme est, d’un point de vue institutionnel et juridique, religion d’État. C’est en cela qu’il règle avec une minutie pointilleuse les conditions de recrutement des membres du clergé, leurs statuts, l’organisation de l’administration des biens ecclésiastiques. C’est lui qui légalise le contrôle des évêques sur les autorités civiles locales, ce qui a comme curieuse conséquence d’atténuer les excès centralisateurs de nombre de ses décisions. En effet, les notables provinciaux qui participent aux élections épiscopales, peuvent ainsi exprimer leur avis, et contrôler en partie l’emploi de certains fonds publics.

Marie (protectrice de Constantinople) avec Justinien et Constantin le Grand.

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Justinien est confronté aux dernières résurgences du paganisme, contre lequel il agit avec vigueur. C’est ainsi qu’il met fin à l’Académie de Platon à Athènes par un décret (529) pour fermer la plus grande université de la Grèce païenne, alors présidée par Damase. Il persécute les Juifs (la contrainte employée ne suscite guère de conversions) et interdit l’adoration des dieux païens, en particulier dans certaines régions reculée de l’Anatolie. C’est aux dissensions internes des Églises chrétiennes que Justinien tente de mettre fin pour maintenir la cohésion de l’Empire. C’est pourquoi il tente un rapprochement avec les monophysites, nombreux dans la partie orientale de l’empire (en Syrie et en Égypte), d’autant que les convictions religieuses de Théodora sont notoirement proches des leurs. L’impératrice, en 537, n’hésite pas à ordonner à Bélisaire, qui combat alors en Italie, de s’emparer du pape Silvère, pour le remplacer par Vigile, réputé moins intransigeant envers ce que la papauté considère comme hérésie. Cependant, Justinien doit aussi composer avec les divers papes dont il a besoin dans son entreprise de reconquête de l’Italie.

Cette politique de bascule s’illustre dans l’affaire dite des Trois Chapitres: sous l'accusation de nestorianisme[9], Justinien fait condamner la mémoire de trois théologiens détestés par les monophysites, (Théodore de Mopsueste, Ibas d’Édesse et Théodoret de Cyr), dans l’espoir de les rallier à l’Église officielle. Le Ve concile œcuménique de 553 qui officialise cette condamnation, voit ses décrets fort mal accueillis en Occident, surtout par le pape Vigile que Justinien fait enlever afin de le contraindre à accepter les Trois Chapitres, sans pour autant rallier les monophysites.

Pour ses actions, Justinien est considéré comme saint par l'Église orthodoxe. Il est fêté le 2 août ou le 14 novembre ou le 15 novembre avec son épouse Théodora[1].

Prospérité commerciale et vie culturelle et artistique

Article détaillé : Premier art byzantin.
Justinien représenté sur une mosaïque de l’église San-Vitale à Ravenne

La destruction du royaume vandale, et la baisse de la piraterie qui en découle, augmentent le dynamisme de l'économie. Les marchands d’Égypte et de Syrie entretiennent un commerce assez dynamique avec l’Occident, dont la Gaule mérovingienne, où ils vendent de l’huile, des fruits secs, des vins réputés, des verreries de Syrie et du papyrus. L’empire est ravitaillé en esclaves par la Mer Noire. Il entretient des relations commerciales avec Ceylan par l’intermédiaire du royaume éthiopien d’Axoum, avec la Chine par la route de la soie[10]. La nécessité d’approvisionner les ateliers byzantins en soie, et la volonté de contourner la Perse des Sassanides, explique en partie la politique entreprise par Justinien pour faire entrer les peuples caucasiens dans la sphère d’influence de l’empire. À partir de 552-553, grâce à l'importation clandestine de vers à soie de Chine, Byzance commence d’ailleurs elle-même à produire de la soie. Il faut noter cependant que l’empire, et ses relations économiques, sont profondément perturbés par une grande épidémie de "peste", à qui d’ailleurs les historiens donnent le nom de peste de Justinien.

La vie culturelle est intense sous Justinien et profondément marquée par la personnalité et les préoccupations de l’empereur. On retrouve chez l’historien Procope de Césarée, qui écrit l’histoire du règne de Justinien, cette recherche de la grandeur romaine qui anime le couple impérial (dont pourtant il médit beaucoup). Les hymnes (poésies religieuses) de Romanos le Mélode (Romain le Mélode)[11] sont un écho fidèle de la foi chrétienne profonde, quoiqu’intolérante, de Justinien et Théodora. Il fait reconstruire Antioche, sous le nom de Théopolis, après sa destruction par un terrible tremblement de terre en 526, et son pillage par les Perses en 538.

Le bâtisseur

Article détaillé : Art byzantin.
La basilique Sainte-Sophie d'aujourd'hui. Les minarets datent d'après la conquête par les Turcs.

Justinien consacre d'abord des moyens importants à la reconstruction de Constantinople, après sa destruction par la sédition Nika, et est aussi un grand bâtisseur. Il fait reconstruire en priorité les édifices de la place de l'Augustaion[12] avec ses portiques, ainsi ceux de la Mésé jusqu'au forum de Constantin sont reconstruits. Les propylées du palais, les portes en bronze, les bains de Zeuxippe, et en particulier Sainte-Sophie. La restauration de la muraille de Théodose II, qui assurera la sauvegarde de la ville jusqu'à sa prise par les croisés en 1204, chef-d'œuvre d'architecture militaire dont les vestiges inspirent, aujourd'hui encore, une impression de puissance et de grandeur. Elle n'est que l'élément principal d'un ensemble comprenant un fossé de 15 à 20 m de large, un glacis, un avant-mur pourvu de 96 tours puis la muraille elle-même qui s'élève jusqu'à 11 m de hauteur et est renforcée de 86 tours. Justinien fit construire, à proximité de Sainte-Sophie, une immense citerne nommée « citerne basilique » sur l'emplacement de la grande cour précédent le « portique impérial », où les juges et les avocats venaient préparer leurs causes. D'une longueur de 138 m sur 65 de largeur, elle contenait 28 rangées de 12 colonnes, soit 336 en tout, sur lesquelles reposaient des voûtes d'arête en brique qui s'élevaient à 8 m au-dessus du sol. Elle alimenta Constantinople en eau jusqu'à l'époque ottomane.

Section du mur de Théodose
Localisation de Sainte-Sophie dans le centre de Constantinople.

Il a fait construire l’église Sainte-Sophie à Constantinople (dédiée à la Sagesse divine, Sophia en grec) avec l'aide de deux architectes, cent maîtres maçons et dix mille ouvriers. Les travaux de construction de la nouvelle église commencent dès 532, dès que les décombres sont dégagés. Elle est achevée en cinq ans et officiellement consacrée le 27 décembre 537. Justinien a confié la conception du monument et la direction des travaux à Anthémius de Tralles et Isidore de Milet. Sainte-Sophie s'inscrit dans un rectangle de 77 sur 71,70 m et comporte, comme toutes les basiliques, trois nefs séparées par des colonnades. Ce qui frappe, c'est l'ampleur inégalée, en surface et en volume, de l'espace intérieur. La première coupole s’étant effondrée en 558, une seconde fut reconstruite en 562. La grande coupole, dont le diamètre atteint 31 m, s'élève au centre de la nef centrale à 54 m au-dessus du sol. Dans tout l’empire, Justinien finance la construction de villes, de ponts, de thermes, et de routes.

Sa fin

Enluminure représentant l'Église des Saints-Apôtres.

Justinien meurt dans la nuit du 14 novembre 565, sans doute dans son sommeil, sans avoir désigné de successeur, mais son neveu, le curopalate Justin, fut immédiatement investi par le Sénat comme successeur (Justin II). Son cercueil fut déposé à la Nécropole impériale de l'Église des Saints-Apôtres (Constantinople), dans un tombeau de marbre revêtu au-dedans de lames d'or : il avait veillé lui-même à son exécution. Précédé par Bélisaire mort quelques mois plus tôt, en mars 565.

Un de ses derniers actes législatifs concerna la date de Noël : il la fixa au 25 décembre alors qu'à Jérusalem et dans les pays voisins on célébrait la naissance du Christ le 6 janvier.

C'est sans doute à la dernière année de son règne que Corippe[13] fait allusion en constatant que « le vieillard ne se souciait plus de rien ; déjà tout glacé, il ne brûlait plus que de l'amour de l'autre vie ; c'était vers le ciel que tout son esprit était tourné ; déjà oublieux de ce corps, il pensait que la figure de ce monde était passée ». Le même auteur soutient qu'« il avait épuisé les avantage du fisc jusqu'à le vider ».

Justinien et Théodora sont représentés dans leurs ornements impériaux, avec les dignitaires de leur cour, par deux fameux panneaux de mosaïque visibles dans la basilique San Vitale à Ravenne.

Références

  1. a et b Forum orthodoxe.com : saints pour le 15 novembre du calendrier ecclésiastique
  2. Vie romancée: Michel de Grèce, Le palais des larmes, Presses Pocket (1990), (ISBN 2266030604)
  3. H. Grotius ; le droit de la guerre et de la paix ;ed. Puf ; 2005
  4. Henri-Dominique Saffrey, "Accorder entre elles les traditions théologiques: une caractéristique du néoplatonisme athénien", On Proclus & his Influence in Medieval Philosophy, (Philosophia Antiqua, vol. LIII), Leiden, E. J. Brill, 1992, pp. 35-50.
  5. Joseph Combès, Études néoplatoniciennes, Grenoble, Millon, 1996, 365 p.
  6. H. J. Blumenthal, "529 and its sequel. What happended to the Academy", Byzantion, 48 (1978), p. 369-385.
  7. Charles Diehl, Histoire de l'Empire byzantin, 1919, disponible sur [1]
  8. Charles Diehl, Histoire de l'Empire byzantin, 1919, disponible sur [2]
  9. Sébastien de Courtois, Chrétiens d'Orient sur la route de la Soie, dans les pas des nestoriens, La Table Ronde, octobre 2007.
  10. Olivier Weber et Reza, Sur la Route de la Soie, Hoebeke, 2007, (ISBN 9782842303006)
  11. J. Grosdidier de Matons, Romanos le Mélode et les origines de la poésie religieuse à Byzance, Paris, 1977
  12. Alexander Kazhdan (éd.), The Oxford Dictionary of Byzantium, 3 vols., Oxford University Press, 1991 (ISBN 0195046528), s. v. Augustaion, vol. 1, 232.
  13. Rhétorique, Poétique, Spiritualité : la technique épique de Corippe dans la Johannide de Vincent Zarini (Paris IV-Sorbonne), Brepols, 2003

Bibliographie

  • Procope, Ernest Renan, et Pierre Maraval, Histoire secrète, Belles Lettres, 1990.(ISBN 2251339043)
  • Procope (Auteur), Philippe Muray (Préface), Guerre contre les Vandales : Guerres de Justinien, livres III et IV, Belles Lettres, 1990.(ISBN 2251339051)
  • Jordanès (Auteur), Olivier Devillers (Traduction), Histoire des Goths, Belles Lettres, 1995.(ISBN 2251339272)
  • Agathias (Auteur), Pierre Maraval (Traduction), Histoires : Guerres et malheurs du temps sous Justinien, Belles Lettres, 2007.(ISBN 2251339507)
  • Procope, Guerres de Justinien.
  • Procope, Traité des édifices.
  • Louis Bréhier, Vie et mort de Byzance, Albin Michel, coll. L'évolution de l'humanité, Paris, 1946, ISBN 2-226-05719-6
  • Charles Diehl, Justinien et la civilisation byzantine au VIe siècle, Paris, 1901.
  • Article « Justinien », Encyclopædia Universalis, tome 13, p. 224-226, édition de 1989.
  • Michel Mourre, Dictionnaire encyclopédique d’histoire, article « Justinien », édition 1996.
  • Guy Gauthier, Justinien, le rêve impérial, France-empire, 1999.(ISBN 2704808503)
  • Georges Tate, Justinien. L'épopée de l'Empire d'Orient (527-565), Paris, Fayard, 2004.(ISBN 2213615160) Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Cécile Morrisson (dir.), Laurent Albaret, Jean-Claude Cheynet, Constantin Zuckerman, Le Monde Byzantain, tome 1 : L'Empire romain d'Orient (330-641), coll. « Nouvelle Clio », PUF, Paris, 2004.(ISBN 2130520065) Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Michel Kaplan:
  • Jacques Lefort, Cécile Morrisson, Jean-Pierre Sodini, et Pierre-Louis Gatier, Les Villages dans l'Empire byzantin (IVe-XVe siècle), Buchet-Chastel, 2005.(ISBN 2283604613)
  • LES DOSSIERS d'archéologie, n° 327 , mai-juin 2008, ROME ET LES BARBARES, exposition au Palazzo Grassi à Venise.
  • Historia, n° 750, juin 2009, BYZANCE ; La plus belle perle de l'Orient, les chefs-d'œuvre d'un âge d'or. Le paradis du négoce et du savoir.
  • Bernard Flusin, La civilisation Byzantine, Coll. Que sais-je n° 3772, éd PUF, 2009.(ISBN 2130575242)
  • D. Roques, La Guerre contre les Vandales, Guerres de Justinien, livres 3-4, La Roue à Livres, Les Belles Lettres, Paris, 1990.
  • Pierre Maraval:
    • Histoire secrète, La Roue à Livres, Les Belles Lettres, Paris, 1989.
    • Empereur Justinien, PUF, Paris, 1999, Que sais-je n° 3515. (ISBN 2130504213) Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Jean-Claude Cheynet:
    • Histoire de Byzance, PUF, Paris, 2010, Que sais-je n° 107.(ISBN 2130583814)
    • Byzance, l'empire romain d'orient, Armand Colin, Paris, 2006, Coll. Cursus.(ISBN 2200346891) Ouvrage utilisé pour la rédaction de l'article
  • Jean Skylitzès:
    • Empereurs de Constantinople, texte traduit par Bernard Flusin et annoté par Jean-Claude Cheynet, éditions P. Lethiellieux, 2003. (ISBN 2283604591)
    • Alexander Kazhdan (éd.), The Oxford Dictionary of Byzantium, 3 vols., Oxford University Press, 1991 (ISBN 0195046528), s. v. Skylitzes, John, vol. 3, 1914.
  • Alain Ducellier, Les Byzantins (1963), Paris, Le Seuil, collection « Points histoire ». (ISBN 2020099195)
Éditions de référence
  • CPG 6865-6893

Articles connexes

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