Anna Visscher

Anna Visscher
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Anna Visscher
Reproduction d’un portrait d’une fille, dessiné par Hendrick Goltzius, illustrant que, pour longtemps bien que sans arguments solides[1], ce portrait fut considéré comme représentant Anna Visscher
Reproduction d’un portrait d’une fille, dessiné par Hendrick Goltzius, illustrant que, pour longtemps bien que sans arguments solides[1], ce portrait fut considéré comme représentant Anna Visscher

Autres noms Anna Roemersdochter Visscher
Activités Calligraphe
Écrivaine
Graveuse sur verre
Poétesse
Traductrice
Naissance 1584[2]
Amsterdam
Provinces-Unies Provinces-Unies
Décès 6 décembre 1651[2]
Alkmaar
Provinces-Unies Provinces-Unies
Langue d'écriture néerlandais
Mouvement Littérature néerlandaise de la Renaissance
Littérature néerlandaise aux XVIIe et XVIIIe siècles
Genres Poésie
Traductions

Anna Roemer[sdochter] Visscher, née en 1584 à Amsterdam et décédée le 6 décembre 1651 à Alkmaar (Provinces-Unies), est une poétesse, traductrice, calligraphe et graveuse sur verre du XVIIe siècle[2].

Sommaire

Prolégomènes

Elle est surtout connue de nos jours pour sa technique de gravure sur verre au diamant. Sur les traces de son père, elle publia des livres d'emblèmes[2] ; en outre elle traduisit en néerlandais, d’après la troisième édition de 1602, les treize épigrammes de 1584 de l’écrivaine huguenote Georgette de Montenay intitulées Emblèmes, ou devises chrestiennes[3]. Elle composa certains poèmes du recueil de Jacob Cats, intitulé Silenus Alcibiadis, Sive Proteus, ou indifféremment Emblemata, Minnebeelden de Maegdenplicht, ou encore Sinne- en Minnebeelden (1618)[2]. Ghenoegh is meer (Assez vaut plus) était sa devise[1].

Biographie

Enfance & éducation

Anna Roemers Visscher était la fille aînée du négociant en grains et poète amateur Roemer Visscher[2] et de Aefgen Jansdochter Onderwater, la fille d’un brasseur[4]. La fortune de sa famille lui permit de suivre des études classiques à Amsterdam. Elle apprit en outre les techniques de la calligraphie, de la broderie, du dessin et de la peinture[2].

Anna Roemer grandit dans un environnement artistique. Au Geldersekade à Amsterdam se fit inviter une pléiade d’écrivains, dont Coomhert, Bredero, Hooft et Vondel. Son choix pour Georgette de Montenay (poétesse protestante voire anti-catholique), ses mises en rimes de psaumes selon le modèle de Petrus Dathenus usité dans l'Église réformée et, incontestablement, le contenu de ses poèmes religieux[2], indiquent fortement qu’Anna Roemer reçut une éducation imprégnée de religion reformée[5]. D’ailleurs, une note faite par Ernest Brinck en 1612 lors de sa visite à la maison des Roemer, confirme qu’Anna et ses jeunes sœurs Geertrui et Tesselschade, avaient reçu une éducation générale et qu’elles excelleraient dans des disciplines différentes telles que la musique, la peinture, la gravure sur verre, les refrains (une forme poétique proche de la ballade), l’invention d’emblèmes, la broderie et la natation, apprise dans le jardin de son père où se trouvait un canal d'eau[2]. De plus, elle apprit le français et l’italien[5].

Si l’on n’a conservé aucun de ses refrains, il existe tout de même un exemplaire des Cent emblèmes chrestiens (1602), de la poétesse Georgette de Montenay, dans lequel Anna Roemers écrivit les traductions qu’elle avait faites des légendes rimées[2]. L'intérêt qu'elle porta aux emblèmes se reflète aussi dans l’édition dont elle s’était occupée en 1620 des Sinne-poppen de 1614 de son père, en complétant les explications en prose au-dessous des images par ses propres distiques, des épigrammes de deux lignes[3]. Parfois, elle ajouta un poème plus long de son cru[2].

Littérature et amis

Wat ist anders als fray, emblème commentarié par Anna Roemersdochter Visscher dans son poème publié dans la réédition d’un recueil de son père Roemer Visscher, Sinne-poppen de 1614.

Anna Roemer caressait, apparemment, des ambitions littéraires : dans une lettre poétique, ornée des références classiques usuelles, datée vers 1615 et adressée à Janus Gruterus, chef de la bibliothèque palatine de Heidelberg, elle fait sous-entendre qu’elle était occupée à traduire les emblèmes de De Montenay et elle demande au célèbre savant de lui aider à obtenir un exemplaire de l'ouvrage de cette écrivaine française[2].

La lettre précitée constitue la première preuve connue de ses efforts à créer un réseau de connaissances. Anna Roemers finira par compter Anna Maria van Schurman, Rubens, Hooft et Huygens parmi ses amis. Pour ce dernier, elle grava sur un verre ballon actuellement conservé au musée d’état d’Amsterdam. Dès 1615, elle entretint des contacts avec le professeur et poète Daniel Heinsius, qui incorpora des poèmes dithyrambiques sur la poésie d’Anna dans son recueil Nederduytsche poemata de 1616. Le poème réticent et moqueur par lequel Anna répondit sur ces vers élogieux trouva également sa place dans le recueil de Heinsius. Grâce à cette qualité extraordinaire d’être à la fois femme et poétesse, elle put se faire un nom par ce modeste début littéraire. Pour le mariage de Heinsius en 1617, elle écrivit un poème nuptial autant spirituel que savant qui fut publié séparément[2].

Les disputes théologiques entre arminiens et gomaristes ne l'intéressaient guère et, en effet, suscitèrent même sa colère ; de surcroît, elle entretint des relations d’amitié dans les deux camps[2]. Pourtant, sur l'évasion de Hugo Grotius du château de Loevestein, Anna avait écrit un poème que le dédicacé trouva si beau qu’il le traduisit en latin. Auparavant, elle avait déjà exprimé son sympathie pour le savant emprisonné et pour sa femme Maria van Reigersberch, qui partagea sa captivité avec lui : elle avait écrit un petit poème, adressé au militaire qui commandait à Loevestein, pour lui demander de transmettre, sans l’endommager, un livret à l’épouse de Grotius. Il s’agit sans doute d’un exemplaire de son adaptation des Sinne-poppen de son père. Enfin, Jacob Cats, un véritable admirateur de la poétesse, dédia son Maechden-plicht de 1618 à elle dans un poème à sa louange. Dans l’introduction de son livre d'emblèmes Silenus Alcibiadis, également de 1618, elle jouait un rôle clé : à nouveau, Cats la mentionne de façon élogieuse. De plus, d’Anna un éloge sur le livre fut enchâssé dans les préliminaires ; en littérature néerlandaise, il s’agit du premier poème liminaire composé par une femme et publié[2].

La relation amicale qu’elle entretint avec Cats[2] l'amena en Zélande en 1622, où elle rencontrera également Simon van Beaumont chez qui elle logea la même année à Middelbourg[5], et où elle fut accueillie comme une vraie héroïne de la poésie par des littérateurs locaux tels que Johanna Coomans. Leurs poèmes à la louange d'Anna, ainsi que certains des travaux de cette dernière - des versifications de psaumes autant que des poèmes plus libres - ont été publiés en 1623 dans le recueil Zeeusche nachtegael[2],[5].

Le mariage et la conversion

En 1624, la vie d’Anna subit plus d’un grand changement : ayant accepté une proposition de mariage d’un homme âgé d’une quarantaine d’années, Dominicus Boot van Wesel (1585-1651) qui était un paysan aisé du Wieringerwaard, agriculteur nanti, comte des digues[5] et bailli[6], elle se convertit, apparemment en conséquence de son mariage, à l'Église catholique correspondant à la confession de son mari. Son mariage eut lieu le 11 février 1624 à Amsterdam et le couple aura deux fils[5],[2]. Son second fils fut baptisé à l’église catholique de La Haye en 1626. Vers la même époque, elle écrivit des paroles élogieuses sur les Lof-sanghen van de heyligen (Louanges des saints) de Stalpart van der Wiele[4],[5], prêtre catholique hollandaissur qui elle écrira encore en 1630 une épitaphe[4]. Sa conversion au catholicisme est encore confirmée par une lettre en latin de 1642 à Erycius Puteanus, dans laquelle Caspar Barlæus remarque qu’Anna professait la même religion que l’adressé (dans ses mots : Religionis vestrae est)[1]. Après qu’elle eut quitté Amsterdam, la littéraire était reléguée à l'arrière-plan, bien qu’elle écrivît de temps à autre des poèmes de circonstance. Elle habita dorénavant la maison de Queldam au Wieringerwaard ; à partir de 1633, elle séjournait souvent à Bellevue, une maison juste en dehors d’Alkmaar[2]. En 1625, un fils, Romanus, naquit à Alkmaar[1] et un autre, Johannes (qui mourut en 1647), en 1626 à La Haye[2]. Prendre soin de sa famille après la mort de sa mère en 1619, exigea d’Anna tout son temps, et apparemment, dans le ménage c’était bien elle qui portait les culottes[5]. C’est aussi elle qui amena ses deux garçons à un pensionnat jésuite à Bruxelles[3]. Elle passa d’ailleurs beaucoup de temps aux Pays-Bas espagnols vers cette époque, et elle y fit, entre 1640 et 1645, connaissance avec différents porteurs de culture catholique[2], comme le poète Erycius Puteanus, le directeur de l'imprimerie de Plantin Balthasar Moretus[3], le juriste Pieter Roose et plusieurs ecclésiastiques. À la ville d'Anvers, elle offrit un verre ballon gravé portant la devise Attrita resurget (piétinée, elle se relève). Dans plusieurs poèmes, elle nourrissait l'espoir qu’une fin serait mise à la guerre dans les plus brefs délais. Quelques années plus tard, par le biais d’une lettre versifiée, elle introduira son fils auprès du recteur de l'Université de Leyde (1645-1646)[2],[3],[1]. Même son mari fut inscrit pour étudier les lettres, car une inscription permit de bénéficier de l’exemption des taxes sur la bière et le vin[1].

Notoriété

Même si Anna, tout au long de sa vie, avait été admirée en tant que poétesse[2] par, entre autres Vondel, Huygens, Cats et qu’on l’appela une seconde Sappho, la dixième muse ou une quatrième Grâce[3], sa poésie n’en demeurait, selon toute vraisemblance, pas moins peu diffusée, car ses poèmes parurent uniquement dans des recueils d’autres auteurs tels que son père, que Heinsius et que Cats, ainsi que dans un recueil d’intérêt local, le Zeeusche Nachtegael (Le rossignol zélandais). Elle n’avait pas pris elle-même l'initiative de publier ses créations, bien que ses poésies soient conservées dans de beaux manuscrits calligraphiés, dont un seul est conservé. Un copiste, sans doute un certain David de Moor, avait pris la peine de copier ses poèmes. Son fils Romanus van Wesel ayant sauvegardé les œuvres de sa mère ainsi que celles de sa tante Tesselschade, jugea leur qualité insuffisante pour les publier sans apporter des modifications[2].

Un auteur anonyme du XVIIIe siècle s’était fâché du fait que les autrices auraient gagné beaucoup d'admiration pour cette seule raison d’avoir été des écrivaines : « Nous ne voulons pas faire mention de Mademoiselle Anna Roemers Visscher, de Tesselschade [...] ni de beaucoup d'autres, car leur vers ne doivent leur succès qu’à leur sexe » (cité de Boekzael der geleerde werelt, 1719)[2].

Au XIXe siècle, elle fut redécouverte, comme d’ailleurs sa sœur Maria Tesselschade. Le sentiment patriotique fut flatté par l'existence de ces deux femmes aux esprits élevés : on se vantait d’avoir découvert que les Pays-Bas - aussi - comptaient parmi les littérateurs déjà très tôt des poétesses importantes. Anna fut considérée comme l'amie de Cats, apparemment en raison des aspects didactiques de l'œuvre de ce dernier : on se souvenait surtout de ses poèmes à tendance pieuse et docte. À peine son esprit d'autodérision fut remarqué et ce fut en partie pour cette raison qu'elle est longtemps restée à l'ombre de sa sœur Tesselschade[2].

Œuvre

Publications

  • Anna Roemersdochter Visscher, Epithalamium, ofte bruydlofs-gedicht, ter eeren van [...] Daniël Heinsius, ende [...] Ermgaert Rutgers, s.l., s.d. [1617]
  • Roemer Visscher, Sinne-poppen; alle verciert met rijmen, en sommighe met proze: door zijn dochter Anna Roemers, Amsterdam, s.d. [1614]

Éditions

  • Anna Roemers Visscher, Gedichten. Nicolaas Beets (éd.), 2 vol., Utrecht, 1881
  • Gedichten van Anna Roemers Visscher, ter aanvulling van de uitgave harer gedichten door Nicolaas Beets, Fr. Kossmann (éd.), La Haye, 1925 [sur sa date de naissance et le recueil manuscrit dans lequel furent compilés de nombreux poèmes de sa main]
  • Anna Roemers Visscher, Letter-juweel, Amsterdam, 1971 [édition en fac-similé, avec introduction de C.W. de Kruyter]
  • Gedichten van Anna Roemersdochter Visscher, Riet Schenkeveld-van der Dussen & Annelies de Jeu (éd), Amsterdam, 1999 [avec introduction et commentaires]

Verres ballons gravés

Liens

Lien interne

Lien externe

Sources

  • (nl)W.J.C. Buitendijk & P.J.Verkruijsse, Visscher, Anna Roemers, in : G.J. van Bork & P.J. Vekruijsse (réd.), De Nederlandse en Vlaamse auteurs, De Haan, Weesp, 1985, p.  601-602
  • (nl)J.G. Frederiks & F.Jos. van den Branden, Anna Roemers Visscher, in Biographisch woordenboek der Noord- en Zuidnederlandsche letterkunde, L.J. Veen, Amsterdam, 1888-1891, p.  830-831
  • (nl)Schenkeveld-Van der Dussen, Riet, Visscher, Anna Roemersdr., in : Digitaal Vrouwenlexicon van Nederland (Lexique numérique des femmes néerlandaises), version du 25 août 2011
  • (nl)Sterck, Visschersdr. (Anna Roemer), in : Dr. P.C. Molhuysen & Prof. Dr. P.J.Blok (réd.), Nieuw Nederlandsch biografisch woordenboek. Deel 5, A.W.Sijthoff, Leyde, 1921, p.  1031-1034

Références


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Anna Visscher de Wikipédia en français (auteurs)

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