Lionel Jospin

Lionel Jospin
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Lionel Jospin
Lionel Jospin 2008.jpg
Lionel Jospin, en février 2008.

Mandats
16e Premier ministre français
(164e chef du gouvernement)
2 juin 19976 mai 2002
(&&&&&&&&&&&017994 ans, 11 mois et 4 jours)
Président Jacques Chirac
Gouvernement Lionel Jospin
Législature XIe législature
Majorité Majorité plurielle
Prédécesseur Alain Juppé
Successeur Jean-Pierre Raffarin
Président du Conseil européen
1er juillet 200031 décembre 2000
Prédécesseur António Guterres
Successeur Göran Persson
Ministre d'État, ministre de l'Éducation nationale
10 mai 19882 avril 1992
Président François Mitterrand
Gouvernement Michel Rocard I
Michel Rocard II
Édith Cresson
Prédécesseur René Monory
Successeur Jack Lang
Ministre de la Jeunesse et des Sports
10 mai 198815 mai 1991
Président François Mitterrand
Gouvernement Michel Rocard I
Michel Rocard II
Prédécesseur Christian Bergelin
Successeur Frédérique Bredin
Premier secrétaire du Parti socialiste
24 janvier 198114 mai 1988
Prédécesseur François Mitterrand
Successeur Pierre Mauroy
14 octobre 19952 juin 1997
Prédécesseur Henri Emmanuelli
Successeur François Hollande
Biographie
Date de naissance 12 juillet 1937 (1937-07-12) (74 ans)
Lieu de naissance Meudon, Seine-et-Oise (France)
Nationalité Française
Parti politique Parti socialiste
Conjoint Élisabeth Dannenmuller (divorcés)
Sylviane Agacinski (depuis 1994)
Diplômé de IEP de Paris
ENA
Profession Diplomate, universitaire

Lionel Jospin, né le 12 juillet 1937 à Meudon (Seine-et-Oise, aujourd'hui Hauts-de-Seine), est un homme politique français.

Élève à l'ENA, il est diplomate et universitaire de profession. D'abord membre de l'OCI trotskiste, il rejoint le Parti socialiste en 1971. Spécialiste en économie, il occupe le poste de premier secrétaire du PS au cours du premier septennat de François Mitterrand (1981-1988). Député de la 27e circonscription de Paris puis de la Haute-Garonne, il est de 1988 à 1992 ministre de l'Éducation nationale, en tant que ministre d'État et avec rang de numéro deux du gouvernement dans les trois gouvernements auxquels il a appartenu.

Élu candidat socialiste à l'élection présidentielle de 1995 lors de la primaire de son parti, il est battu au second tour par Jacques Chirac, puis redevient premier secrétaire du PS en octobre. Deux ans plus tard, la victoire de la gauche aux élections législatives lui permet de devenir Premier ministre, inaugurant ainsi la troisième cohabitation. À la tête de la « majorité plurielle », il contribue à la mise en place des 35 heures et des emplois-jeunes.

À nouveau candidat du PS lors de l'élection présidentielle de 2002, il est éliminé au premier tour, étant devancé par le président sortant Jacques Chirac et par le candidat du Front national Jean-Marie Le Pen, et annonce dans la foulée son retrait de la vie politique. Il démissionne de ses fonctions de chef du gouvernement le 6 mai 2002, au lendemain du second tour du scrutin présidentiel. Son gouvernement est à ce jour le plus long de la Ve République[N 1].

Sommaire

Biographie

Origine et enfance

Né dans une famille protestante[1],[2] et militante de gauche, Lionel Jospin est issu du second mariage de Robert Jospin, enseignant pacifiste membre du parti socialiste SFIO, et de Mireille Dandieu, sage-femme. De son premier mariage, Robert Jospin a eu deux enfants : un fils, Maurice, futur journaliste et jazzman, ami de Claude Luter, et une fille, Hélène. De l'union de Robert et Mireille Jospin naissent quatre enfants : Agnès, Lionel, Olivier et Noëlle, qui épouse le philosophe François Châtelet et devient romancière. De Meudon, où elle occupe un appartement, puis une villa avec jardin, la famille vient en 1948 s’installer à Paris, dans le quartier de la Bastille, boulevard Richard-Lenoir. Deux ans plus tard, Robert Jospin prend la direction d’un centre d'enfants difficiles, à La Ferté-sous-Jouarre, en Seine-et-Marne.

Adolescent, Lionel Jospin a intégré sous le nom de « Langue agile » les éclaireurs unionistes (protestants) de France dans la troupe de Paris-Luxembourg, et à quinze ans, lors d'un camp dans le Jura, a eu pour chef de patrouille Michel Rocard, alias « Hamster érudit ». En 1954, il obtient son baccalauréat au lycée Janson-de-Sailly.

De 1956 à 1959, il est étudiant à l'Institut d'études politiques de Paris et résident à la cité universitaire Jean-Zay à Antony. Il réussit le concours de l'École nationale d'administration en novembre 1961. De 1961 à 1963, il effectue son service militaire comme élève-officier à l'école de cavalerie de Saumur (comme Jacques Chirac avant lui), puis comme officier de chars, chef de peloton d'instruction à Trêves (Allemagne). Il y retrouve le soldat Guy Roux, entraîneur de l'AJ Auxerre[3], et le soldat Jean-Loup Dabadie, futur scénariste et parolier à succès, ainsi que ses copains d'alors : Josselin de Rohan, Jean-Bernard Mérimée et Jean Vidal.

Issu d'une famille de gauche, mais rebuté par le stalinisme et la politique coloniale de la SFIO, il s'engage à la fin des années 1950 à l'UGS avant d'adhérer, à la suite de son organisation, au PSU en 1960. S'éloignant de l'activité politique lors de son service militaire puis de sa formation à l'ENA, il rejoint le mouvement trotskiste au début de 1965 sous l'influence d'une rencontre avec Boris Fraenkel[4].

Il milite d'ailleurs à l'UNEF contre la guerre d'Algérie. Sous l'influence d'un ami éducateur, Michel Lautrec (1937-2000), il fait partie du groupe Lambert, Organisation communiste internationaliste (OCI), où avec l'historien Benjamin Stora il milite sous le pseudonyme de Michel, en hommage à son initiateur.

Lionel Jospin a trois enfants. Après un premier mariage avec Élisabeth Dannenmuller, il épouse en 1994 la philosophe Sylviane Agacinski.

Ascension politique

Lionel Jospin en 1983

De 1963 à 1965, il est élève de l'ENA, dans la promotion Stendhal, dans laquelle se trouvent entre autres : Yves Cannac, Ernest-Antoine Seillière, Jean-Pierre Chevènement, Josselin de Rohan, Alain Gomez, Jacques Toubon, Jean Vidal, Jean-Bernard Mérimée, Tristan d'Albis et Christian Aubin. Il effectue son stage à la préfecture de Bourges et son stage « ouvrier » dans les houillères du Nord.

À sa sortie de l'ENA, en 1965, il entre au Quai d'Orsay comme secrétaire des Affaires étrangères où il est affecté à la direction de la coopération économique et où il travaille avec Ernest-Antoine Seillière.

En 1970, il abandonne sa carrière de diplomate pour devenir professeur d'économie à l'IUT de Sceaux de l'Université de Paris. Après le congrès d'Épinay, il rejoint le Parti socialiste en 1971, à la demande de l'OCI, dont il rencontre régulièrement les responsables, en particulier Pierre Lambert. Lionel Jospin n'en mène pas moins une carrière rapide au PS, devenant un protégé de François Mitterrand[N 2].

D'abord membre d'un groupe d'experts chargé des relations internationales où il s'occupe des relations Est-Ouest[4], il entre en 1973 au Bureau exécutif et devient Secrétaire national à la formation. En 1975, il est chargé de rédiger le rapport qui sera adopté à l'occasion de la Convention nationale sur les relations avec le PC[5] et devient secrétaire national au tiers-monde.

En 1977, Lionel Jospin est élu au Conseil de Paris, dans le XVIIIe arrondissement. Dans le cadre de ses fonctions de secrétaire national au tiers-monde, il représente François Mitterrand, au Liban, à l'occasion des funérailles de Kamal Joumblatt. C'est l'occasion pour lui de rencontrer discrètement Yasser Arafat alors pleinement impliqué dans la guerre civile libanaise[4].

En 1979, au congrès de Metz du Parti socialiste, il déclare « l'objectif du PS n'est pas de moderniser ou de tempérer le capitalisme mais de le remplacer par le socialisme ». Il devient secrétaire national aux relations internationales, chargé de la coordination au Parti socialiste.

En 1980, à l'occasion des 60 ans du Congrès de Tours, il se confronte à Georges Marchais sur le plateau de l'émission Les Dossiers de l'écran. On retiendra de ce face à face, préparé avec une équipe comprenant Philippe Robrieux, sa réplique au leader communiste : « Vous n'avez pas mis les pieds dans une usine depuis 30 ans et moi, ce matin, je donnais mes cours »[4].

En janvier 1981, à l'occasion du Congrès de Créteil qui désigne François Mitterrand comme candidat à l'élection présidentielle, Lionel Jospin est élu Premier secrétaire du parti conformément au souhait de son prédécesseur qui lui avait proposé le poste en novembre 1980 en cas de victoire[4]. Selon certains, il quitte l'OCI durant cette période, rompant ses contacts avec le lambertisme autour de 1981. L'intéressé lui-même, sans démentir, donne une vision différente de ses relations avec les lambertistes : « À partir du moment où, en 1973, j'accepte des responsabilités nationales au Parti socialiste, j'agis en socialiste. Je garde avec des dirigeants trotskistes des liens, qui sont des liens personnels, qui sont des liens d'échange, mais qui relèvent d'une forme de fidélité maintenu à un passé, d'une sorte de quant-à-soi, presque d'un jardin secret, politique celui-là, et non d'une discipline militante[4]. »

Présidence de François Mitterrand

En 1981, François Mitterrand est élu président de la République. Lionel Jospin assume dès lors, et durant tout le premier septennat, le rôle de premier secrétaire du Parti socialiste.

En juin 1981, il est élu député de la 27e circonscription de Paris (quartiers de la Chapelle - Goutte-d'Or), avec Daniel Vaillant comme suppléant. Alors que Pierre Mauroy discute avec Georges Marchais du nombre et des attributions des futurs ministres communistes, Lionel Jospin prend lui en charge les négociations de l'accord de gouvernement.

Lionel Jospin participe durant la première législature de François Mitterrand aux « petits déjeuners du mardi », une réunion non officielle qui réunit chaque semaine autour du président, le Premier ministre, le premier secrétaire du Parti socialiste, le secrétaire général de l'Élysée et plus tard le conseiller spécial du président, pour aborder les questions politiques en cours[4].

Lionel Jospin connait son « baptême du feu » au congrès de Valence, en octobre 1981. Si sur le fond le congrès adopte une position modérée prônant le changement graduel, dans la forme, les excès verbaux, à l'exemple d'un Paul Quilès déclarant que des « têtes doivent tomber », laisseront le sentiment d'un processus mal maîtrisé par le nouveau secrétaire du Parti socialiste[4].

À l'occasion du tournant de la rigueur, Lionel Jospin cherche à renouveler la thématique de la « pause » employée par les socialiste à l'occasion du Front populaire, en utilisant, en mars 1983, la notion de « parenthèse ».

Aux élections législatives de 1986 (ces élections sont à la proportionnelle départementale), il est à la tête d'une liste PS-MRG sur Paris. Il est élu, avec sept autres députés socialistes, soit autant que le RPR. Mais son élection est annulée par le Conseil constitutionnel. Sollicité par la fédération PS de Haute-Garonne lors d'une élection législative partielle, il se présente et est élu député en septembre 1986.

Il est élu député de la 7e circonscription de la Haute-Garonne en 1988, siège qu'il abandonne pour entrer au gouvernement. Il est battu en 1993, après le raz-de-marée du RPR et de l'UDF, puis retrouve son mandat en 1997, en tant que chef de l'opposition. Suite à la réélection de François Mitterrand, il devient ministre de l'Éducation nationale. En entrant au gouvernement, il quitte le poste de premier secrétaire du PS, mais reste membre du bureau national et du conseil national du PS jusqu'en 1997.

Il se présente alors aux Élections régionales françaises de 1992 en vue de briguer la présidence de la région Midi-Pyrénées mais il est battu par la liste menée par Marc Censi, le président sortant.

Comme ministre, il redessine la carte universitaire, notamment par le plan « Universités 2000 » et fait adopter la Loi Jospin qui, entre autres mesures, réforme la formation des enseignants. Mais la contestation lycéenne l'affaiblit en 1990.

Son éternelle rivalité avec Laurent Fabius, exacerbée lors du congrès de Rennes en 1990, déchire le Parti socialiste. Lionel Jospin s'éloigne de François Mitterrand et doit quitter le gouvernement démissionnaire d'Édith Cresson en 1992. Après sa défaite aux législatives en 1993, n'ayant plus pour seul mandat que celui de conseiller général de Cintegabelle, il quitte ses fonctions au PS et songe à se retirer de la vie politique, notamment en demandant un poste d'ambassadeur, ce à quoi s'opposera Alain Juppé, ministre des Affaires étrangères de l'époque.

Campagne présidentielle de 1995

Après le désistement de Jacques Delors, favori des sondages, il est désigné, face au premier secrétaire Henri Emmanuelli, candidat du Parti socialiste à l'élection présidentielle lors d'une primaire, le 5 février 1995. Après s'être montré critique sur le passé de François Mitterrand (il déclare en septembre 1994 « rêver d'un itinéraire plus simple et plus clair pour celui qui fut le leader de la gauche »), il réclame un « droit d'inventaire » sur le bilan de Mitterrand[6].

Donné perdant dès le début de l'élection, il crée la surprise en arrivant en tête au premier tour, avec 23,30 %, devant les rivaux RPR Jacques Chirac (20,84 %) et Édouard Balladur (18,58 %). Lors du second tour, il obtient 47,36 % des suffrages face à Jacques Chirac.

Lionel Jospin redevient premier secrétaire du PS le 14 octobre 1995 et dirige l'opposition. Il préside ainsi la commission de rénovation du Parti socialiste de juin à octobre 1995. Il fait alliance avec le Parti communiste, les Verts, le Parti radical-socialiste et le Mouvement des Citoyens, pour créer la gauche plurielle qui remporte les élections législatives de 1997, à la suite de la dissolution décidée par Jacques Chirac le 21 avril 1997.

Premier ministre

Article détaillé : Gouvernement Lionel Jospin.
Lionel Jospin aux côtés de Vladimir Poutine, en 2000.

Le 2 juin 1997 le président le nomme Premier ministre : c'est le début de la troisième cohabitation. Il forme un gouvernement d'union centré sur quelques proches : Dominique Strauss-Kahn, Claude Allègre et Martine Aubry. Cette dernière met en place la principale promesse de campagne : les 35 heures. Assez populaire, il doit cependant se séparer du noyau dur de son gouvernement : contesté par les syndicats enseignants, Claude Allègre abandonne l'Éducation nationale, tandis que Dominique Strauss-Kahn, mis en examen, choisit de démissionner. Lors du vaste remaniement ministériel de 2000, il fait alors entrer les « éléphants » du PS, dont Jack Lang, rue de Grenelle, et son rival historique au sein du PS, Laurent Fabius, à Bercy.

Sur le plan économique, jusqu'en 2001, Lionel Jospin bénéficie d'une période d'embellie liée à une forte croissance mondiale, avec notamment l'envol des nouvelles technologies[7]. Sa part de responsabilité dans cette situation est source de débat, mais la croissance du PIB français est durant cette période constamment supérieure de 1 % à la moyenne de la croissance dans l'Union européenne. Il met en œuvre une politique ciblée sur l'emploi (emplois-jeunes, prime pour l'emploi, baisse de la TVA, soutien à la consommation, allègements de charges, réforme sur l'annualisation du temps de travail en contrepartie des 35 h) ; entre 1997 et 2001, le chômage passe du taux record de 12,2 % à un plancher de 8,6 %, mais il repasse la barre des 9 % en 2002. Les lois Aubry auraient permis de créer environ 350 000 emplois[8], mais l'impact de la réforme reste toutefois contesté. C'est pourtant la période où la France a connu le plus grand nombre de créations d'emplois de tout le vingtième siècle[réf. nécessaire], et une baisse sans précédent du chômage malgré l'augmentation de la population active (vérifiée jusqu'en 2005, date du début du départ à la retraite des premiers enfants du baby-boom). En 2001, la conjoncture mondiale se retourne brutalement à la suite des attentats du World Trade Center, puis à l'explosion de la bulle Internet.

Sur le plan social, il met en place la Couverture maladie universelle et l'Allocation personnalisée d'autonomie pour les personnes âgées, et fait adopter la loi Kouchner sur les droits des malades (mars 2002). Il instaure également le PACS (pacte civil, qui permet l'union des couples sans passer par le mariage, qu'ils soient hétérosexuels ou homosexuels), qui voit l'opposition frontale de l'Église et de la droite catholique. Il fait également adopter la loi Besson sur les gens du voyage.

Sur le plan de la sécurité, il met en place la police de proximité, chargée d'« humaniser les jeunes aux yeux de la police et d'humaniser la police aux yeux des jeunes »[citation nécessaire], crée la Commission nationale de déontologie de la sécurité (CNDS), et fait voter la loi Guigou sur la présomption d'innocence. Toutefois, après le 11 septembre 2001, il s'engage pour la loi sur la sécurité quotidienne (LSQ), qui oblige notamment les FAI à conserver les données de connexion de leurs clients, réprime l'occupation des cages d'escaliers ainsi que les rave-parties non autorisées.

Au niveau institutionnel, et avec le président Jacques Chirac, il organise un référendum sur la réduction du mandat présidentiel à cinq ans : le « oui » recueille 73,21 % des suffrages, mais l'abstention s'élève à 69,81 %.

Sur le plan sanitaire, il est confronté à la crise de la vache folle, lors de laquelle son gouvernement est accusé de prendre un certain retard dans la prise de décision en comparaison de la législation britannique. Le 7 novembre 2000, Jacques Chirac réclame l'interdiction immédiate des farines animales, position que rejoint le Premier ministre quelques jours plus tard[9].

De 1997 à 2001, malgré une « déclaration commune » PS-PC du 29 avril 1997 qui promettait « pour France Telecom, Thomson et Air-France, l’arrêt des privatisations »[10], Lionel Jospin entreprend, une fois Premier ministre, une série de privatisations ou d'ouverture aux capitaux privés : France Telecom, Thomson Multimédia, le GAN, le CIC, les AGF, Société marseillaise de crédit, RMC, Air France, Crédit lyonnais, Eramet, Aérospatiale-Matra, EADS Banque Hervet[11]. Il déçoit également de nombreux sympathisants de la gauche à propos de l'usine Renault de Vilvorde en Belgique : bien que s'étant engagé lors de la campagne des législatives de 1997 à remettre en cause la décision de fermeture, il ne peut arrêter le processus[12].

Dans son discours du 5 novembre 1998 à Craonne où il a inauguré la sculpture de Haïm Kern, à l'occasion du 80e anniversaire de l'armistice de 1918, le Premier ministre Lionel Jospin a souhaité que les soldats « fusillés pour l’exemple », « épuisés par des attaques condamnées à l’avance, glissant dans une boue trempée de sang, plongés dans un désespoir sans fond », qui « refusèrent d’être des sacrifiés », victimes « d’une discipline dont la rigueur n’avait d’égale que la dureté des combats, réintègrent aujourd’hui, pleinement, notre mémoire collective nationale ». Dans le contexte de cohabitation, cette initiative est critiquée par le président de la République Jacques Chirac, qui la juge « inopportune »[13]. En 2000, il s'avoue impuissant à empêcher des licenciements dans l'usine Michelin, déclarant « l'État ne peut pas tout »[14]. Cette phrase est souvent analysée comme lui ayant coûté cher sur le plan politique, notamment au moment de l'élection présidentielle de 2002[15].

En 2001, son militantisme passé à l'Organisation communiste internationaliste (trotskiste) est révélé dans des articles de presse (Le Monde, L'Express, Le Nouvel Observateur), puis dans deux biographies. Le Premier ministre reconnaît la véracité de ces informations, bien qu'ayant jusque-là toujours démenti la rumeur, affirmant avoir été confondu avec son frère Olivier Jospin, lui-même militant avoué de l'organisation trotskiste.

Lionel Jospin déclare, quelques années après la fin de la cohabitation, que sa relation avec le président Jacques Chirac fut « correcte voire plutôt cordiale », mais qu'il lui a « toujours été difficile de [lui] faire confiance, même sur les questions touchant aux intérêts essentiels de la France »[16].

Campagne présidentielle de 2002

Lionel Jospin annonce sa candidature à l'élection présidentielle le 20 février 2002. Il gère mal une campagne marquée par le thème de l'insécurité. Ainsi, il n'arrive pas à rassembler sur sa candidature les composantes de sa majorité plurielle, qui présentent chacune un candidat à l'élection présidentielle. Son positionnement politique est sujet à controverse : il affirme au début de la campagne que son « projet n'est pas socialiste », nuançant par la suite ce propos avec des drapeaux rouges lors des meetings. D'autre part, ses attaques personnelles contre le président ont un effet mitigé (« un président vieux, usé, fatigué[N 3] »). Par ailleurs, il s'aliène une partie de l'électorat enseignant, pourtant traditionnellement acquis à la gauche, en raison des réformes Allègre. Enfin, il lui est reproché de ne pas avoir profité des années de croissance économique solide pour affronter les grands problèmes de société, notamment la réforme des retraites.

Le scrutin est marqué par une forte abstention (28,40 %). Le 17 avril, quatre jours avant le premier tour, dans une interview, il juge peu sérieuse l'hypothèse de son absence au second tour. Il est pourtant éliminé au premier tour, en obtenant 16,18 % des suffrages exprimés, derrière Jean-Marie Le Pen (16,86 %) placé en deuxième position derrière Jacques Chirac qui sera élu très largement (82,2 %) après de larges mobilisations, dans toute la France, contre l'extrême droite. Apprenant cet échec, il annonce le soir du premier tour son retrait de la vie politique, en déclarant : « Au-delà de la démagogie de la droite et de la dispersion de la gauche qui ont rendu possible cette situation, j’assume pleinement la responsabilité de cet échec et j’en tire les conclusions en me retirant de la vie politique, après la fin de l’élection présidentielle[17]. »

Depuis 2002

Lionel Jospin dédicaçant son livre à l'Université de Montréal en avril 2009.

Le 27 octobre 2005 sort son livre Le Monde comme je le vois, qui relance les polémiques au sujet de son éventuel retour en politique.

Lionel Jospin affirme sur la radio Europe 1, le 26 novembre 2005, qu'il n'est pas « candidat à la candidature » du Parti socialiste pour l'élection présidentielle en 2007 et qu'il s'est retiré « de la vie politique active » en avril 2002. Il a, à plusieurs reprises, laissé entendre qu'il serait prêt à se présenter si les socialistes le lui demandaient mais sans succès.

Le 26 août 2006, à l'approche de l'élection présidentielle de 2007, Lionel Jospin intervient à l'université d'été du PS, sans toutefois se prononcer au sujet de sa possible candidature à la primaire socialiste. Le 4 septembre 2006, Lionel Jospin déclare être « capable d'assumer la charge de chef de l'État », mais le 28 septembre 2006, il annonce dans une lettre adressée aux militants socialistes qu'il ne sera pas candidat à la candidature pour la présidentielle au sein du PS[18].

Le 16 novembre 2006, au cours du vote de désignation du candidat à la présidentielle, il arrive pour voter vers 16 h 50. « Je n'ai pas voté blanc. Qu'il y ait un deuxième tour serait dans la logique de mon vote », lâche l'ancien Premier ministre à sa sortie. Il révèle plus tard avoir voté pour Dominique Strauss-Kahn[19].

Le 23 février 2007, Lionel Jospin rejoint l'équipe de campagne de Ségolène Royal, aux côtés notamment des deux anciens rivaux de cette dernière, Dominique Strauss-Kahn et Laurent Fabius.

Dans son livre L'Impasse, publié en septembre 2007, Lionel Jospin estime que Ségolène Royal « n'a pas les qualités humaines ni les capacités politiques » nécessaires pour remettre le Parti socialiste en ordre de marche et « espérer gagner la prochaine présidentielle »[20].

Il est membre du club Le Siècle.

Après avoir signé la motion présentée par Bertrand Delanoë au congrès de Reims, il vote, le 20 novembre 2008, pour Martine Aubry candidate au poste de première secrétaire du Parti socialiste. Il déclare également, à propos de Ségolène Royal, « Dans le socialisme, les “néos”, ceux qui ont été contre le vieux et pour le neuf, n'ont pas toujours laissé de très bons souvenirs » : ce commentaire, qui trace un parallèle avec la tendance « néo-socialiste » de Marcel Déat, passé ensuite à la collaboration, entraîne un début de polémique[21].

Synthèse des fonctions et mandats

Fonctions ministérielles

Fonctions parlementaires

Mandats locaux

Fonctions politiques

  • 1971 : après avoir rompu avec la carrière diplomatique en 1969, adhère au Parti socialiste
  • 1973 - 1993 : membre du comité directeur et du bureau exécutif du Parti socialiste
  • 1973 - 1975 : secrétaire national du Parti socialiste, chargé de la Formation
  • 1975 - 1979 : secrétaire national du Parti socialiste, chargé des relations avec les pays du Tiers-Monde
  • 1979 - 1981 : secrétaire national du Parti socialiste, chargé des relations internationales
  • 1981 : directeur de campagne de François Mitterrand pour l'élection présidentielle
  • 1981 - 1988 : premier secrétaire du Parti socialiste (quitte la direction en 1988)
  • Secrétaire national aux relations internationales, chargé de la coordination au Parti socialiste; de mission auprès du premier secrétaire du PS, chargé des assises de la transformation sociale ; membre du bureau exécutif et du conseil national
  • 1987 : président de la commission de préparation de la campagne électorale du candidat socialiste à l'élection présidentielle
  • 1993 : démission du comité directeur et du bureau exécutif du Parti socialiste ; membre du conseil national du PS
  • 1995 : président de la commission de rénovation du Parti socialiste, de juin à octobre
  • 1995 - 1997 : premier secrétaire du Parti socialiste ; membre du bureau national et membre du conseil national du PS

Décorations


Divers

Lionel Jospin a également fait une apparition de quelques minutes à l'écran dans son propre rôle[22] dans le film Le Nom des gens de Michel Leclerc sorti le 24 novembre 2010.

Œuvres

Notes et références

Notes
  1. Le record du temps de présence personnelle à l'Hôtel Matignon est néanmoins détenu par Georges Pompidou, qui a dirigé quatre gouvernements successifs. Le gouvernement Jospin a connu plusieurs remaniements, mais ceux-ci ne sont pas considérés comme des changements de gouvernement, Lionel Jospin n'ayant pas donné sa démission pour former une nouvelle équipe.
  2. Ce dernier, informé des années plus tard par Loïk Le Floch-Prigent de la double appartenance de Lionel Jospin, aurait répondu : « Ne vous en faites pas, je sais ! Je m'en charge. C'est moi qui le retournerai. »
  3. Ces mots sont en fait dits en « off » (pas de trace audio) dans un avion qui le ramène en France, à quelques journalistes qui l'accompagnent. Il s'en est d'ailleurs, par la suite, excusé publiquement auprès de Jacques Chirac.
Références
  1. Origine du patronyme de la famille Jospin
  2. Généalogie de Lionel Jospin
  3. Roux Guy, "Entre nous. Mémoires.", Plon, 2006, pages 237-238.
  4. a, b, c, d, e, f, g et h Lionel Jospin, Lionel raconte Jospin, éditions du Seuil, Paris, janvier 2010, (ISBN 978-2-02-101100-5)
  5. Claude Estier, François Mitterrand et les communistes, point de vue pour l'Institut François-Mitterrand, consultable en ligne.
  6. Journal télévisé de France 2, ina.fr, 13 avril 1995.
  7. « La nouvelle dynamique économique en action est d'abord la conséquence d'un formidable mouvement de progrès technique et d'innovation. L'innovation est restée longtemps la “belle inconnue” de la théorie de la croissance, le progrès technique apparaissant au mieux comme un résidu dans les premiers modèles de croissance. Ils se sont ensuite affinés avec les réflexions sur la croissance endogène. Mais peu importe au fond, si la théorie peine à coller à la réalité. Cette réalité, nous la percevons tous aujourd'hui, dans la vie des entreprises, dans notre vie quotidienne, dans la croissance de nos économies. Nous avons aujourd'hui autour des nouvelles technologies de l'information et de la communication, une dynamique d'équipement et d'investissement chez les ménages et les entreprises, porteuse d'externalités et de progrès pour l'ensemble de l'économie. Elle tire la demande, elle améliore les capacités productives. Elle peut permettre une hausse durable du rythme de croissance soutenable. » (discours de Dominique Strauss-Kahn, ministre de l'Économie, 16 mai 1999, La nouvelle croissance)
  8. P. Charpentier, H. Huyghes-Despointes, N. Hyard, F. Lefresne, M. Lallement, J. Loos-Baroin, « Gestion des temps et régulations sociales : quelles incidences de la loi Aubry II sur l'organisation des entreprises et les conditions de travail des salariés ? », Revue de l'Ires, no 44, vol. 1, 2004, p. 3-37.
  9. « La cohabitation de mal en pis », L'Express, 16 novembre 2000.
  10. L'Année politique, économique et sociale, Evénements et tendances, 1997
  11. Privatisations: les chantiers de Jospin, L'Express, 10 septembre 1998
  12. Pierre Alanche, Renault côté cour: un salarié au conseil d'administration, éditions de l'Atelier, 2007, page 45
  13. Le discret hommage aux mutins fusillés de 1917, Le Figaro, 14 octobre 2007
  14. Jospin: le social à l'ancienne, L'Express, 8 février 2001
  15. Comment limiter la casse sociale, L'Usine nouvelle, 31 janvier 2008
  16. Raphaëlle Bacqué, L'Enfer de Matignon : Ce sont eux qui en parlent le mieux, Points, 2010, p.  89.
  17. Soirée électorale : élection présidentielle 1er tour, France 3, 21 avril 2002.
  18. « Lettre de Lionel Jospin aux militants socialistes expliquant sa décision de ne pas se présenter à la candidature interne au PS », blog de Lionel Jospin, 28 septembre 2006
  19. Rue89, Jospin a voté DSK
  20. Jospin flingue Royal
  21. « Jospin fait-il un parallèle entre Ségolène Royal et des collabos ? », Le Post, 20 novembre 2008.
  22. « Cannes : l'acteur Lionel Jospin attendu sur la Croisette », NouvelObs.com, mis en ligne le 13 mai 2010

Annexes

Sur les autres projets Wikimedia :

Bibliographie

  • Cécile Amar et Ariane Chemin, Jospin et Cie, histoire de la gauche plurielle 1993-2001, Seuil, 2002.
  • Claude Askolovitch, Lionel, Grasset, 2001
  • Claude Estier, Un combat centenaire. Histoire du Parti socialiste (1905-2005), Le Cherche Midi, 2005
  • Gérard Grunberg, « La candidature Jospin ou la construction d’un nouveau leadership », in Pascal Perrineau et Colette Ysmal (dir.), Le Vote de crise. L’élection présidentielle de 1995, collection « Chroniques électorales », Presses de Sciences Po, 1995, p. 60-80
  • Marcela Iacub, Une journée dans la vie de Lionel Jospin, Fayard, 2006.
  • Gérard Leclerc et Florence Murracciole, Jospin, l'héritier rebelle, Jean-Claude Lattès, 1996
  • Christophe Nick, Les Trotskistes, Fayard, 2002
  • Serge Raffy, Jospin secrets de famille, Fayard, 2001
  • René Rémond, Le Siècle dernier. 1918-2002, éd. Fayard, 2003
  • Jospin, voyage au centre de l'austère, Les Dossiers du Canard enchaîné, 2001

Discours, allocutions

Articles connexes

Liens externes


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