Wunderwaffe

Wunderwaffe

Wunderwaffe (all. litt. : arme miraculeuse - de wunder: miracle et waffe: arme - au pluriel : Wunderwaffen) est un terme utilisé par le ministère de la propagande nazie, Joseph Goebbels, pour désigner des armes révolutionnaires censées permettre le renversement de la situation militaire catastrophique du Troisième Reich à la fin de la Seconde Guerre mondiale et d'assurer sa victoire ultime.

Sommaire

Illusions et réalités

Le panzer VIII Maus (souris) du musée de Kubinka.
Projet de missile antiaérien Wasserfalle
PzKpfw V Panther F Schmalturm qui ne dépassa pas le stade de prototype

La plupart de ces armes n'ont guère dépassé le stade de projet ou de prototype ou n'ont été utilisées que trop tard et en trop petites quantités par la Wehrmacht pour avoir eu un véritable impact sur les plans militaires et celui du déroulement des opérations.

L'ambition nazie ne connaissant plus de limites et ses compétences techniques étant largement insuffisantes pour de telles ambitions, l'on vit se multiplier sous la férule d'Adolf Hitler tout autant des projets d'une grande audace scientifique que les projets les plus farfelus relevant plus de la science-fiction que de la raison, tels les super-V2 gigognes ou le projet de bombardier stratosphérique Arado Ar E-555 capable en théorie de frapper la côte est des États-Unis en emportant une éventuelle bombe atomique ou celui plus extraordinaire encore de bombardier sub-orbital Silbervogel développé sur papier par l'ingénieur Eugen Sänger [1].

Mais si leur développement tardif n'a pas eu de réelle influence sur l'issue du conflit, ces armes ont suscité après la chute du Troisième Reich l'intérêt de plusieurs des pays vainqueurs. La récupération des avancées technologiques importantes mises au point par le complexe militaro-industriel allemand a notamment pris la forme de programmes structurés menés par les services secrets de nations telles que Opération Paperclip (États-Unis), Département 7 (URSS), T-Force (en) (Royaume-Uni) ou la France.

La capture du centre d’essai de Peenemünde par les Soviétiques, des archives allemandes relatives au programme de missiles tactiques et balistiques du programme Vergeltungswaffen (V-Waffen) et surtout de l’équipe de savants et techniciens de Werner von Braun par l’intermédiaire de Paperclip ont ainsi permis le développement des missiles balistiques US et surtout du programme spatial de la Nasa.

Si la plupart des projets et spéculations paraîtraient irréalistes dans le contexte d'une Allemagne réduite à un champ de ruines par l'issue du conflit, reflet que donnait Berlin le 8 mai 1945, les réalisations récentes des ingénieurs allemands qui avaient dépassé le stade du prototype, tel l'avion Messerschmitt Me 163 Komet, semblaient donner crédit aux envolées lyriques du Dr Goebbels sur la contribution des Wunderwaffen à l'issue de la guerre - les interventions de ce dernier à la radio allemande, destinées à galvaniser une population réduite à vivre sous les abris[note 1], s'éloignaient de plus en plus de considérations concrètes, à mesure que les chars adverses achevaient la conquête du territoire.

De sorte que la frontière est floue entre les modèles effectivement produits industriellement et les Wunderwaffen théoriques ou prototypiques, et seule la situation arrêtée lors de la reddition les sépare.

Guerre terrestre

Article détaillé : Panzerkampfwagen VIII Maus.
Projet de chasseur de char Vk3001 armé d'une canon de 128 mm
  • Armement individuel
  • Supertanks et monstres blindés: les E-serien (Entwicklung : litt. développement)[2].
La « série E » fut à l'origine lancée par Heinrich Ernst Kniekamp dès 1942. Le projet global visait à remplacer les chars et chasseurs de chars (jagdpanzern) alors en service. Ce programme fut accepté par Hitler en 1943, l'ensemble des 6 engins prévus dans le projet utilisant des piéces standardisées afin d'en faciliter la production et la maintenance - souci récurrent et priorité absolue du ministre de l'économie Albert Speer. Le programme « vivota » jusqu'en 1944 c'est-à-dire jusqu'au moment où il devint évident que l'économie allemande en ruine ne pourrait jamais donner suite à ces extraordinaires projets. Le plus « achevé » de ces monstres fut l'E-100 Maus (souris)[3]. quelques exemplaires à l'état d'éléments non-assemblés ayant été capturés par les Britanniques lors de leur progression dans le Nord-ouest et le Nord de l'Allemagne pendant l'opération Varsity entre autres.

Mais le plus improbable de ces programmes de super-blindés est le Landkreuzer Projekt datant de 1942.

  • Flakpanzern Coelian et Kugelblitz
  • Panzer VI Panther F Schmallturm

Guerre aérienne : la défense du Reich et l' Amerika Bomber

Défense du Reich

Articles détaillés : Défense du Reich, Nachtjagd et Heinkel He 162.
  • L'interception à haute altitude: missiles et chasseurs.
  • Un Volkssturm aérien. (s'agissant vraisemblablement d'un terme de propagande)

Amerika Bomber

Articles détaillés : Silbervogel, Junkers Ju 290 et Junkers Ju 390.
Le Schwerer Bomber -Amerika Bomber - Messerschmitt Me 264. Achevé dès 1942, il ne dépassa cependant pas le stade de prototype

Bien qu'ayant d'emblée opté pour une doctrine militaire résolument offensive, les autorités militaires allemandes - à l'inverse de ce qui se fit en Grande-Bretagne et aux États-Unis - n'accordèrent qu'une attention toute relative aux projets de bombardiers stratégiques à long rayon d'action[note 2], favorisant plutôt ceux à moyen rayon - Heinkel He 111, Junkers Ju 88 et variantes ou Dornier Do 17 et variantes - opérant à partir des bases excentriques du Reich et des aérodromes des pays occupés. Le premier appareil « long rayon » mis en service fut en fait une airliner civil militarisé, le Focke-Wulf Fw 200 Condor, affecté à des missions maritimes lointaines. Son successeur désigné, le Heinkel He 177 Greif (Griffon), affligé de vices cachés et de problèmes techniques récurrents et endémiques, ne connut qu'une carrière discrète, sa propension fatale à s'enflammer lui ayant valu le sobriquet de « fliegende Feuerzeug » - le briquet volant - et les quelques rares raids sur Londres - missions Steinbock - auxquels il prit part relevant quasiment de la péripétie.

Autre vue du prototype Me 264 en vol
Un Arado Ar 234B aux mains de l'USAAF. Plusieurs de ces excellents appareils tombèrent aux mains des Alliés et en URSS, il donna naissance au bombardier Iliouchine Il-28.

Bien que deux prototypes aient été construits dès 1942, l'ambitieux et remarquable quadrimoteur Messerschmitt Me 264 - l'authentique Amerika Bomber - n'entra jamais en production, les deux exemplaires existants étant réservés pour une éventuelle fuite de Hitler au Japon. Les projets Junkers et Dornier restèrent également au stade expérimental de prototypes et de bancs d'essai de systèmes d'armes et autre ingénierie aéronautique.

Les développements heureux de la propulsion à réaction allemande et la vindicte exaspérée de Hitler, bien décidé à frapper Londres, Moscou et New York[note 3] relancèrent - mais bien trop tardivement - ces projets, Joseph Goebbels promettant aux Américains - mais surtout au peuple allemand - un nouveau Blitz digne de celui qui frappa Londres en 1940, en représailles aux bombardements des villes allemandes.

Ce soudain regain d'intérêt des dirigeants politiques du Reich pour le bombardement stratégique permit dès lors un développement poussé du programme Arado Ar 234 Blitz (programme pourtant lancé dès 1941), les premiers appareils montant en ligne lors de l'offensive des Ardennes fin 1944. Sa vitesse de Mach 0,8, son plafond de 10 000 m et son rayon d'action de 1 500 km devaient lui permettre en théorie de bombarder Londres impunément. Dans la réalité, son rôle se réduisit essentiellement à vainement tenter d'enrayer le progression alliée à l'Ouest par des bombardements défensifs - le plus célèbre d'entre-eux étant celui contre le pont de Remagen en mars 1945. À l'approche de la fin des hostilités, neuf appareils basés dans le nord de l'Allemagne tentèrent encore quelques raids tout à fait symboliques et à seule fin de propagande contre Londres.

Parallèlement, d'autres projets dormant depuis le début de la guerre furent relancés dans l'intention bien vaine de donner corps à cette propagande vantant une prochaine victoire grâce aux Wunderwaffen. C'est ainsi que les progammes Junkers (Junkers Ju 388, Junkers Ju 488) ou Dornier 317 connurent un semblant de relance tout aussi illusoire que tardive.

Mais le plus extraordinaire resta sans conteste le projet de bombardier stratosphérique Arado Ar-E 555 qui en théorie aurait dû franchir l'Atlantique, bombarder les États-Unis tout en les traversant et atterrir au Japon pour se réapprovisionner, en faisant ensuite le voyage de retour par dessus l'URSS à très haute altitude, hors de portée des faucons de Staline !

Mistel et « Kamikazes » allemands

Voir aussi

Guerre navale : missiles et sous-marins de poche

Missiles balistiques ... et bombe nucléaire

Des Wunderwaffen aux expédients : le « Crépuscule des Dieux »

MP3008 copie allemande de la Sten
L'arme ultime du Führer : des enfants fanatisés et inconscients, mobilisés au sein du Volkssturm.

Le 25 juillet 1944, à peine remis des séquelles de l'attentat du 20 et se méfiant de plus en plus de l'armée, Hitler décréta la « guerre totale » et en septembre mobilisa le « Deutscher Volkssturm », milice populaire chargée de la défense du Vaterland. Les Wunderwaffen promises ne voyant bien sûr pas le jour, cette milice se retrouva équipée de bric et de broc. Des armes prises en 1938 en Tchécoslovaquie ou de vieux fusils hollandais saisis en 1940, des casques italiens pris en 1943 et des mitrailleuses MG15 démontées de bombardiers inutiles furent ainsi distribués à ces soldats improvisés[4]. On vit même ressortir des arsenaux de vieilles Maxim 08/15 de la Première Guerre mondiale, pourtant retirées de première ligne après la campagne de mai 1940 en raison de leur encombrement excessif, d'anciens combattants de la Première Guerre mondiale assurant l'instruction d'arme de leurs concitoyens, de même d'ailleurs que le vieux Stahlhelm M1916. A cause du manque cruel de moyens antichars mobiles, les Panzerjäger - chasseurs de chars - furent équipés de bicyclettes « spéciales » robustes et rudimentaires et conçues pour le transport de plusieurs Panzerfausts. Des canons ATK de 75 ou 88 mm furent sommairement montés sur des châssis chenillés dépourvus de toute protection pour les servants de la pièce (Waffenträger), les fabuleux tueurs de chars équipés de canon de 128 mm lourd ne dépassant pas quant à eux la planche à dessin ou le modèle en bois. Des armes individuelles « basiques » en tôles embouties de fabrication de masse aisée mais de fiabilité douteuse furent aussi distribuées - dont une copie de la Sten britannique fabriquée par Erma. Ce pitoyable arsenal digne d'un musée n'empêcha cependant pas les Volkssturmmänner de se battre avec détermination sur le front de l'est et à Berlin.

Wunderwaffe, projets improbables et science-fiction uchronique

Article détaillé : Uchronie.

Une autre partie de ce sujet concerne les scénarios alternatifs de type What if... ? ("Que ce serait-il passé si... ?") postérieurs au conflit, imaginant des machines diaboliques tirées d'expérimentations scientifiques nazies, ce qui a même fait l'objet d'un sous-genre en cinéma italien dans les années soixante, voire de jeux vidéo aujourd'hui[note 4]. Quoique ces aspects relevant intégralement de science-fiction ou de mondes alternatifs ne soient pas développés dans cet article, une uchronie récemment apparue mérite d'être citée car elle a pour cadre un scénario en Y basé sur la situation en Europe : Block 109. Dans cette uchronie en B.D. la fin du conflit a lieu en 1953, et des armes nouvelles sont montrées, telles des exosquelettes motorisés dans les camps allemands et soviétiques.

Notes et références

Notes

  1. Lire Une femme à Berlin, notamment l'appréciation de l'auteure sur le discours radiophonique de Goebbels, dont les promesses sont interprétées au premier degré par le personnage de Siegismund dans le récit.
  2. Les premiers projets allemands de ce type d'appareil datent de la fin des années 1930.
  3. Ville que que Hitler croyait être la capitale des États-Unis.
  4. Exemple de scénario : invasion de New York par une Europe nazie alternative, à l'aide de Wunderwaffen.

Références

Voir aussi

Bibliographie

  • Denis Baldensperger : Les Armes Secrètes, Collection Histoire pour tous, Éditions Rouff 1969.
  • Ingénieur-Général Walter Dornberger : L'arme secrète de Peenemunde, Collection J'ai lu - leur aventure n°A122/123, Arthaud 1961.
  • Albert Ducrocq : Les armes secrètes allemandes, Berger-Levrault, Paris, 1947.
  • Brian Ford : Les armes secrètes allemandes - l'arsenal de la dernière chance, Collection Histoire illustrée de la Seconde Guerre mondiale n°18, Marabout Gérard & Co 1971.
  • James McGovern : La Chasse aux armes secrètes allemandes , Collection J'ai lu - leur aventure n°A176, Stock 1965.
  • Laurent Tirone & Xavier Tracol : Les armes de terreur du Reich, dossier spécial in Ligne de Front n° 25 (sept.-oct. 2010), pp. 26-59, Caraktère SARL, Aix-en-Provence 2010.
  • Périodiques : Le Fana de l'Aviation, 1939-1945 Magazine

Articles connexes

Liens externes


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