Oblast autonome juif

Oblast autonome juif

48° 29′ 00″ N 132° 07′ 59″ E / 48.4833, 132.133

Oblast autonome juif
(ru) Еврейская автономная область
(yi) ייִדישע אווטאָנאָמע געגנט
Oblast autonome juif Oblast autonome juif
Image illustrative de l'article Oblast autonome juif
Administration
Pays Drapeau de Russie Russie
Région économique Extrême-Orient
District fédéral Extrême-oriental
Statut politique Oblast autonome
Création 7 mai 1934
Capitale Birobidjan
Politique
Chef de l'administation Alexandre Vinnikov
Géographie
Superficie 36 000 km2
Démographie
Population 190 915 hab. (2002)
Densité 5,3 hab./km²
Autres informations
Langue(s) officielle(s) Russe
Fuseau horaire UTC+11
Code OKATO 99
Code ISO 3166 RU-YEV
Site web www.eao.ru

L'oblast autonome juif (en russe : Евре́йская автоно́мная о́бласть, Evreïskaïa avtonomnaïa oblast ; en yiddish : ייִדישע אווטאָנאָמע געגנט, yidishe avtonome gegnt) est un sujet de la Fédération de Russie situé en Sibérie, sur la frontière chinoise. Il est souvent nommé Birobidjan, selon sa capitale.

Cet oblast a été fondé à l’initiative de Staline en 1934, avec le yiddish comme langue officielle (ce qu'elle n'est plus actuellement[Quand ?]). Il a conservé le statut de terre d'accueil pour les Juifs de Russie.

Sommaire

Histoire

Le problème de la répartition

Après la révolution russe de 1917, la Déclaration des droits des peuples de Russie proclame « l'égalité et la souveraineté des peuples de Russie ». Les Juifs sont reconnus comme une nationalité au sein de l'URSS, mais alors que la Constitution fédérale du 31 janvier 1924 garantit un territoire à chaque nationalité soviétique, aucune région ne leur est attribuée. En effet, il n'existe aucun territoire de l'URSS où les juifs représentent une majorité de la population, contrairement aux autres minorités nationales. Une forte minorité juive existe cependant à l'ouest de l'Union, sur les anciens territoires de la Pologne, de l'Ukraine et de la Biélorussie.

Idéologie et assimilation

Durant les années 1920, on tente de détourner les Juifs d'URSS de leurs métiers traditionnels de petits commerçants, de prêteurs et de manufacturiers, jugés absolument contraires à l'idéologie communiste[1]. Depuis la fin du XIXème siècle, les tsars tentent d'organiser, sans succès, un retour des juifs vers l'agriculture. L'URSS poursuivra cette œuvre avec un succès relatif lors des années 1920. Cependant, les paysans déjà présents n'apprécient guère de voir leurs terres spoliées par ces nouveaux venus, ce qui cause des tensions. Il faut donc trouver une terre pour les Juifs, alors que l'émigration vers la Palestine prend de l'ampleur.

La création du Birobidjan

Dès 1928, la région du Birobidjan est réservée par décret à l'établissement des Juifs. Ils sont encouragés à s'installer dans ce territoire, et le décret propose la création d'une « entité administrative territoriale nationale juive » si l'expérience est un succès. C'est chose faite à l'initiative de Joseph Staline, qui crée une « Région autonome juive » en 1934, à Birobidjan à l'extrémité orientale de la Russie, à la frontière avec la Chine. Des primes incitatives sont données au Juifs afin qu'ils partent s'installer dans cette région peu peuplée située à plus de 5000 kilomètres de Moscou. Au début, la région autonome accueille des milliers d'individus, qui devaient y organiser une certaine vie nationale juive. L'oblast a une langue officielle : le yiddish, l'hébreu étant alors une langue liturgique, interdite par le régime soviétique[réf. nécessaire], hostile aux religions et donc à la religion juive. La vie culturelle en yiddish se développe progressivement : un théâtre juif est crée en 1934, et un journal en yiddish, « L'étoile du Birobidjan » parait régulièrement. Des écoles en yiddish se développent pour faire face à l'afflux de nombreux colons avec enfants.

La place centrale de Birobidjan.

Les raisons de la création de l'oblast sont multiples, et ont étés exposées notamment par l'historien Nikolaï Bougaï dans ses nombreux articles et ouvrages sur les déplacements et la déportation des peuples d'URSS :

  • La volonté de permettre aux Juifs soviétiques de disposer d'un territoire pour pouvoir s'y exprimer en tant que nationalité soviétique. Ce projet était conçu comme une alternative au sionisme jugé « nationaliste-bourgeois ». Mais la population juive ne sera jamais majoritaire dans cette Région Autonome qui fut une « entité » politique communiste « pour le peuple juif », à l'opposé du projet officialisé en Palestine par le mandat de la SdN de 1922, sur des bases « capitalistes » (voir histoire du sionisme). La politique des nationalités de l'URSS « prouvait » ainsi que le régime pouvait répondre aux aspirations juives sans soutenir un mouvement que le communisme soviétique réprouvait.


  • Volonté de « renforcer » la zone autour du fleuve Amour, dans l'Extrême-Orient soviétique, historiquement contestée par la Chine. Et donc volonté de peupler cette région de la Sibérie supposée riche en ressources naturelles (bois, charbon, graphite).
  • Volonté d'« éloigner en douceur » les intellectuels juifs du centre de la Russie, communistes ou ralliés, mais jugés peu fiables et « cosmopolites ».

Ce projet politique se poursuit après la création d'Israël en 1948 : on comptait alors 30 000 Juifs dans l'oblast. Dès la mort de Staline le 5 mars 1953, la population juive du territoire ne devait cesser de décroître, tant sous Khrouchtchev que sous Brejnev et en 1959, elle n'était plus que de 9 %, chutant même à 7 % en 1970.

Les limites et les failles du projet

Le projet de la République Autonome Juive contenait, dès son départ, de nombreux points faibles, dont les autorités soviétiques étaient plus ou moins conscientes. Premièrement, la région était très éloignée des lieux historiques de peuplement de la communauté juive russe. Il fallait donc effectuer une transplantation « à froid » du peuple et de sa culture. Deuxièmement, du fait de son éloignement, la région et sa capitale (Birobidjan) étaient quasiment dépourvues d'infrastructures. L'afflux massif de colons prit de court les autorités locales, dépassées. L'insalubrité s'installe dans la capitale, qui n'aura pas d'égouts avant la seconde guerre mondiale. Le long de la rue principale en terre battue s'alignent des baraquements en bois mal étayés qui servent de maisons aux nombreux Juifs ayant choisi de vivre dans un environnement urbain. En effet, le projet de retour à la terre avait lui aussi partiellement échoué : en 1939, seuls 25 % des Juifs[2]de la R.A.J. habitaient à la campagne, car un grand nombre de sols s'étaient révélés marécageux et/ou impropres à la culture. Les colons, issus pour la plupart des villes, rechignaient en outre à apprendre un nouveau métier dans un environnement hostile, préférant se concentrer dans la capitale. De plus, la mystique du retour des juifs à la terre perdit de son importance quand les plans quinquennaux se tournèrent vers l'indutrialisation de l'URSS. Ce n'est donc pas étonnant si, en 1939, la population juive ne correspond qu'à 18000 des 109000 habitants de la région. Comme le reste de l'URSS, la région souffrit des Grandes Purges décidées par Staline, puis du nationalisme patriotique qui s'empara de la Russie durant la Seconde Guerre Mondiale.

Le chant du cygne

C'est paradoxalement la Shoah et les ravages causés par la guerre de 1939-1945 qui redonnèrent vie au projet de la R.A.J. En effet, entre 1945 et 1948, de nombreux Juifs soviétiques qui avaient fui l'avancée allemande ou tout perdu durant la guerre immigrèrent dans cette terre promise soviétique. Près de dix mille d'entre eux s'installèrent dans cette région en trois ans, de 1945 à 1948. Les habitants et les responsables politiques reprenaient espoir de voir la R.A.J. remplir son rôle. Mais la création de l'État d’Israël fit l'effet d'une bombe dans tout l'espace soviétique. Le projet Birobidjan perdit son élan, cette fois définitivement. L'Alya allait commencer, et le Birobidjan se viderait lentement de ses Juifs.

Depuis 2011

Malgré des tentatives d'aide financière sous Gorbatchev, la majorité des Juifs qui restaient dans l'oblast émigra après la chute de l'URSS en 1991. Les traces du judaïsme y sont aujourd'hui bien maigres : en 2002, il ne restait que 2 327 Juifs sur une population de 190 915 habitants, une synagogue, quelques inscriptions en yiddish, et un journal régional Birobidjanèr chtern ou étoile du Birobidjan (ביראָבידזשאנער שטערן, bjraobjdzšan‘r štaren).

Depuis 1996, l'oblast a perdu son caractère officiel d'« Oblast autonome juif » et était d'ailleurs vouée à la fusion avec le kraï voisin de Khabarovsk le 1er mars 2008, après le départ de presque tous ses habitants juifs depuis la la chute de l'URSS en 1991.

Désormais, sa population est russe à 90 % et il ne reste que 1,2 % de Juifs. À présent, seuls quelques 15 vieillards discutant en yiddish sont les derniers témoins de cette histoire de l'oblast.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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Notes et références

  1. Le Birobidjan, 1928-1996 : l'histoire oubliée de l'État juif fondé par Staline
  2. Le Birobidjan, 1928-1996 : l'histoire oubliée de l'État juif fondé par Staline p 48

Bibliographie


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Oblast autonome juif de Wikipédia en français (auteurs)

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