Bande dessinée

Bande dessinée
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La bande dessinée (BD ou bédé) est un art, souvent désigné comme le « neuvième art » d’après une série d’articles Neuvième Art, musée de la bande dessinée parue sous la signature de Morris dans le Journal de Spirou entre 1964 et 1967. Cette classification a été reprise et popularisée par Francis Lacassin dans son livre Pour un neuvième art, la bande dessinée[1].

La bande dessinée est aussi un medium[2],[3], véhiculant le neuvième art et le matérialisant au travers d’un ensemble sémiotique et iconique défini. Il permet de raconter des histoires au moyen d’un enchaînement signifiant de dessins. Selon Will Eisner, « actuellement, la bande dessinée constitue la principale application de l'art séquentiel au support papier »[4].

Treizième planche de l'Histoire de Monsieur Cryptogame de Rodolphe Töpffer, une des premières bandes dessinées.

Sommaire

Définitions

Il est de coutume de distinguer « la » bande dessinée et « les » bandes dessinées. Cette distinction est mise en lumière par Francis Lacassin[1]. « La » bande dessinée est le concept, c'est-à-dire l’Art — le 9e — et la technique permettant la réalisation de cet art. « Les » bandes dessinées sont les media par lesquels est véhiculé cet art[2],[3]. Cela implique de donner une double définition, celle de la bande dessinée et celle du médium bande dessinée.

Définition de la bande dessinée

Puisque la bande dessinée est un art, il existe deux grandes perceptions de cet art. La première perception considère la bande dessinée comme un art mineur, la bande dessinée est de l’art. L'autre perception fait de la bande dessinée un art à part entière.

La bande dessinée est de l’art

Si la bande dessinée est de l’art, il faut alors que cet art se rattache à toutes les formes picturales qui l’ont précédé. C’est la position de Scott McCloud[5]. Cette façon de percevoir la bande dessinée oblige à la replacer dans le grand courant artistique et culturel qui commence avec les premiers dessins, ceux de l’art pariétal[Note 1], comme à la grotte de Lascaux, même si aujourd'hui un tel rapprochement est artificiel. A priori les spécialistes s'accordent sur le fait qu'il ne s'agit pas de suites de dessins. De plus, la qualité narrative de ces peintures reste à prouver, de nombreux archéologues, comme le professeur Norbert Aujoulat responsable du site, penchent pour une interprétation chamanique (les dessins auraient une fonction magique)[7].

Il n'y a donc pas de raison de rattacher les peintures rupestres à la bande dessinée plutôt qu'aux autres arts graphiques au même titre que les bas reliefs des temples égyptiens[8], les codex précolombiens[9] et les Biblia pauperum[10] de la fin du Moyen Âge[Note 2]. Il faut encore ajouter à cette liste : la Tapisserie de Bayeux[11], le Rouleau de Josée de la bibliothèque vaticane[12] et les 182 collages de Max Ernst Une Semaine de bonté[13]. Ces références artistiques ont toutes en commun la volonté de raconter une histoire comme le fait une bande dessinée ou encore les frises du Parthénon à Athènes, la colonne Trajane à Rome, les bas reliefs du temple d'Angkor au Cambodge.

« L'histoire de l'art ne pouvait donc pas reconnaître dans la dimension narrative de ces œuvres le critère d'une discipline autonome au sein des arts visuels[14]. » Cette vision d'un grand courant artistique qui parcourt l’histoire de l’art pour donner ses lettres de noblesse à la bande dessinée est de moins en moins retenue depuis la mise en avant de la bande dessinée, neuvième art.

La bande dessinée est un art

Dans ce deuxième cas, il faut évidemment définir en quoi la bande dessinée est « un » art, il ne suffit pas de l'affirmer. Là encore deux perceptions s’affrontent :

  • La bande dessinée est un art à la croisée de l’écriture littéraire et de l’écriture graphique[15]. C’est la vision de l’inventeur de la bande dessinée Rodolphe Töpffer : « Ce petit livre est d’une nature mixte. Il se compose de dessins autographiés au trait. Chacun des dessins est accompagné d'une ou deux lignes de texte. Les dessins, sans le texte, n’auraient qu’une signification obscure ; le texte, sans les dessins, ne signifierait rien. Le tout ensemble forme une sorte de roman d’autant plus original qu’il ne ressemble pas mieux à un roman qu’à autre chose[16]. » Ce que R. Töpffer appellera « Littérature en estampes » dans son Essai de Physiognomonie[17] et Will Eisner Sequential Art, « l’Art séquentiel »[18] ou Visual Narrative, « La Narration visuelle »[19].
  • Si la bande dessinée n'est que graphique regroupant texte et dessin, le texte doit s’inscrire obligatoirement sous une forme graphique dans le dessin au sein d’une bulle : selon H. Filippini, « la bande dessinée est une suite de dessins contant une histoire ; les personnages s’y expriment par des textes inscrits dans des bulles[20]. » Cette définition rejette les auteurs de bandes dessinées appelées alors « histoires en images » comme les Français J-P. Pinchon (Bécassine), Louis Forton (Les Pieds nickelés et Bibi Fricotin), le Néerlandais Marten Toonder (Tom Poes/Tom Pouce), les Américains Rudolph Dirks (Katzenjammer Kids/Pim Pam Poum) et Gustave Verbeek (Upside-downs/Sans dessus-dessous). Cette définition rejette aussi, peut être moins catégoriquement, les bandes dessinées sans texte comme celles de l'Américain Otto Soglow (Little King/Le Petit Roi) qui en 1975 ne comportaient toujours pas de texte.

Les spécialistes de la bandes dessinée défendent avec de moins en moins de vigueur cette deuxième vision restrictive de la bande dessinée, même H. Filippini intègre tous les auteurs cités ci-dessus dans son Dictionnaire de la bande dessinée (cf. bibliographie).

Toutefois ce débat ne peut pas rester celui de spécialistes, ce serait un paradoxe au regard de la popularité du genre... Par exemple la « BD » (une abréviation d'usage précisément populaire mais peu appréciée des amateurs) est maintenant considérée comme un genre au sein de l'art contemporain, lorsque sur un plan uniquement esthétique (mais pas narratif) elle résulte d'une démarche artistique ; cette reconnaissance conduit des auteurs à exposer et à vendre leurs planches originales, mais nous sommes là dans une démarche artistique dérivée de la bande dessinée considérée comme un art en elle même puisque nous ne parlons dans ce cas que de fragments de bande dessinée.

Définition du médium bande dessinée

Si la définition du concept de bande dessinée partage encore les critiques et les spécialistes de la bande dessinée, les amateurs de bandes dessinées n’ont aucune difficulté à définir dans la pratique le medium bande dessinée.

  • Bande dessinée : succession d'images organisées pour raconter une histoire et présentées de façons diverses (en planche, en illustré, en petit format, en album, etc.).
  • Histoire en images : distinction faite par certains spécialistes pour différencier les suites d'images organisées pour raconter une histoire mais dont le texte est disposé en récitatif sous les images. Se présente aussi sous diverses formes. C'est le cas des fameuses images d'Épinal de l'imagerie Pellerin.

Dans la pratique, il est arrivé aux deux genres de coexister chez le même auteur : pour des raisons de format et de qualité d'impression, Marten Toonder fut publié sous forme d'histoire en images dans la presse régionale française ainsi que dans le quotidien La Croix, mais en bande dessinée chez Artima. L'hebdomadaire pour la jeunesse Cœurs Vaillants imposa quelque temps à Hergé un format double (bande dessinée de Tintin en Amérique dont chaque case avait une légende sous-jacente), puis y renonça au soulagement du dessinateur[réf. nécessaire].

Aux États-Unis

  • Funny : à la fin du XIXe dessin d’humour paraissant dans la presse quotidienne. Au début du XXe siècle synonyme de strip.
  • Strip, aphérèse de comic strip : dessin d’humour en deux ou trois cases disposé horizontalement et paraissant avec le supplément du dimanche d'un journal, appelé aussi sunday strip dès qu'il regroupe les daily strips sur une page, avant de devenir une véritable histoire avec des personnages récurrents plutôt pour les adultes.
  • Comic, apocope de comic strip : appelé aussi daily strip, dessins d'humour en deux ou trois cases disposés horizontalement paraissant tous les jours et organisés pour raconter une histoire plutôt pour les adultes.
  • Comic book : à l’origine les huit pages de comic strip du supplément dominical repliées en quatre, soit 32 pages, revêtues d’une couverture en couleur. Ensuite un livre de 64 ou 96 pages spécialement édité pour raconter les histoires des super-héros à destination de la jeunesse.
  • Graphic novel : livre relié pouvant comporter jusqu’à une centaine de pages et racontant une histoire unique.

En Europe

  • Journal illustré, abrégé en illustré : journal édité dès la fin du XIXe siècle et comportant des histoires dessinées à destination de la jeunesse.
  • Fumetto : pour les Italiens les phylactères ressemblent à des petits nuages de fumée. C'est donc le phylactère qui définit, ici, la bande dessinée.
  • Tebeo : c'est le nom de la première revue de bandes dessinées espagnole (TBO, en 1917) qui a donné son nom aux bandes dessinées en Espagne. On les désigne aussi couramment par les termes « cómic » (d'origine anglophone) et historieta, ce dernier étant plus usité pour les comic strips, qui sont, littéralement, une « petite histoire » d'une seule bande ou d'une seule page.
  • Tegneserie ou Petit format : nom français des comic books reprenant souvent des aventures venant des États-Unis.
  • Album : livre relié à couverture souvent rigide proche du format A4 comportant à l’origine une quarantaine de pages puis 46 planches (environ 50 pages) généralement en couleurs. Au fur et à mesure du développement de la BD la pagination devient libre et va à plus de 150 pages pour des suites d’histoires.

Un album fait généralement partie d’une série, dans le cas contraire les professionnels utilisent un anglicisme pour désigner un album unique : One shot (coup unique), à rapprocher de l’américain graphic novel.

En Occident

Beaucoup de pays ont simplement traduit « bande dessinée » dans leur langue vernaculaire comme les Portugais qui parlent de banda desenhada, ou utilisent le terme américain comic. D’autres comme les Brésiliens utilisent un terme plus imagé et parlent de história em quadrinhos (histoire en petits tableaux). En Argentine, au Chili, en Uruguay, on utilise, comme en Espagne, le terme historieta (historiette). Les jeunes dessinateurs préfèrent souvent utiliser le terme américain comic.

En Asie

Des mangas
  • Manga : au Japon, terme inventé par Gakyōjin Hokusai, « le Fou de dessin » en 1814 et qui s’applique à tout ce qui s’approche de près ou de loin aux bandes dessinées japonaises. Manga (漫画) qui est généralement traduit par « images dérisoires », (man signifiant originellement en chinois « déborder, à son gré »), « dessins libres » dans le sens d'interprétation libre. À noter que le manga-ka Shōtarō Ishinomori utilisait également la graphie 万画, qui signifie alors « dix mille images ».
  • Amekomi : au Japon, traduction de l'américain american comic, pour désigner les bandes dessinées d'importation généralement américaines et traduites en japonais.
  • Lianhuanhua (连环画 « images enchaînées ») : bandes dessinées chinoises composées de petits livres ne contenant qu’une seule image par page accompagnée d’un récitatif, très rarement de phylactères.
  • Manhua : désigne les bandes dessinées d’importation japonaise et traduites en chinois.
  • Manhwa (만화, prononcer man-h'oua) : désigne en Corée la deuxième production de bandes dessinées d’Asie après le Japon.

Anatomie de l'objet bande dessinée

Les amateurs s'entendent sur un certain nombre de mots et de définitions pour décrire les différents éléments dont sont composées les bandes dessinées :

  • Les récitatifs sont des panneaux généralement situés au bord des vignettes et servant aux commentaires en « voix off  », notamment pour donner des indications de temps et de lieu ou pour fournir des informations permettant une meilleure compréhension de l'action. Le style ligne claire a beaucoup utilisé le récitatif comme Edgar P. Jacobs, l'auteur de Blake et Mortimer. Les « histoires en images » sont caractérisées par l'usage exclusif du récitatif.
  • Les bulles, appelées à l'origine phylactères (terme — moins utilisé aujourd'hui que bulle dans la BD — qui désignait les banderoles supportant les textes dans les enluminures du Moyen Âge) ou en anglais balloon (ballon, plus rare en français que bulle). Généralement rondes ou elliptiques (plutôt rectangulaires dans le style ligne claire), elles contiennent les dialogues des personnages auxquels elles sont rattachées. Pour les pensées ou les rêves, elles ont souvent une forme de nuage.
  • Les onomatopées sont des mots ou des icônes suggérant un bruit, une action, une pensée par imitation phonétique, graphique ou icônique. Les mangas utilisent des onomatopées pour suggérer des sentiments.
  • La case est une image ou une vignette contenant un dessin et généralement encadrée. À noter qu'une bande dessinée ne comporte pas nécessairement de case, dans ce cas la case se confond avec la planche.
  • La bande (de l'anglais : strip) ou bandeau est une suite de cases, disposées sur une ligne.
  • La planche est une superposition de bandes, à noter qu’une planche n’est pas obligatoirement constituée de bandes et même quelquefois de cases.
À l’origine le mot planche était réservé au document original dessiné par l’auteur. Celui-ci numérote souvent sa planche discrètement dans un coin de celle-ci. La numérotation des planches n'est pas nécessairement, pour ne pas dire jamais, identique à la numérotation des pages de l'album dans lequel elles paraissent.
  • Un album est un recueil de planches qui racontent une aventure. Elles peuvent appartenir à une même série, à un même auteur, ou à un même thème (albums collectifs).
À l’âge d’or des illustrés, les aventures des héros de bandes dessinées étaient publiées sous forme de feuilletons appelés « histoires à suivre », puis éditées en albums.
Depuis la quasi-disparition des magazines de bandes dessinées, les histoires sont quelquefois pré-publiées dans toutes sortes de médias, magazines, fanzines, hebdomadaires, quotidiens, etc. avant d’être éditées en albums.

Le reste du temps, les histoires sont directement éditées en albums, cette pratique a tendance à se généraliser.

  • Une série est un ensemble d'albums reliés par un thème ou un personnage, organisé de façon chronologique quand l'histoire se déroule tout au long de la série.

Histoire

Article détaillé : Histoire de la bande dessinée.

Apparue en Suisse au début des années 1830 avec la parution des premiers albums de Rodolphe Töpffer (voir l'Histoire de monsieur Jabot), la bande dessinée se diffuse au cours du XIXe siècle dans le monde entier via les revues et journaux satiriques (voir notamment en France le Savant cosinus de Christophe). Popularisée à la toute fin de ce siècle dans les journaux américains sous la forme du comic strip, la bande dessinée devient alors un médium de masse, assez diversifié aux États-Unis, de plus en plus restreint à l'humour et aux enfants en Europe.

Dominant de plus en plus la presse enfantine mondiale, via des périodiques spécialisés à partir des années 1930, la bande dessinée touche également les adolescents et certains adultes, dans le cadre du comic book et de strips de qualité aux États-Unis, des « petit format » en Europe. À partir des années 1950, elle connaît un troisième foyer de développement majeur lorsque le Japon se met à en créer massivement sous l'influence d'Osamu Tezuka. Les trois foyers sont alors relativement indépendants, tant dans les œuvres publiées que dans les structures éditoriales, seul le foyer américain pénétrant les deux autres.

Dans les années 1960, la bande dessinée commence à chercher à se légitimer en quittant les champs de l'enfance et du genre. Les créations de Jean-Claude Forest, du mouvement gekiga et de l'underground américain conduisent à de nombreuses remises en question qui permettent l'apparition d'un premier discours critique en Europe et aux États-Unis. Dans les années 1970, les expérimentations se poursuivent derrière Mœbius, tandis que la revendication de la paternité littéraire, de plus en plus patente, explose à la fin de la décennie avec le succès du terme « roman graphique » de Will Eisner ou le concept des « romans en bande dessinée » lancé pour promouvoir Corto Maltese d'Hugo Pratt.

Si les séries classiques de divertissement dominent toujours les marchés à la fin des années 2000, la bande dessinée a exploré depuis les années 1980 tous les champs abordés par les autres arts narratifs, et s'est vue de plus en plus légitimée, malgré les récriminations récurrentes de ses acteurs sur la lenteur de cette reconnaissance.

Technique

Processus de création

Bien que les étapes de la création d'une bande dessinée dépendent des artistes et des œuvres, un cheminement général peut être évoqué :

  • synopsis : histoire ou idée originale ou inspirée d'une œuvre existante (littéraire ou cinématographique, par exemple).
  • scénario : traitement détaillé de l'histoire. Il précise, planche par planche, le découpage de l'action, la position des personnages, et présente les dialogues.
  • recherche graphique : Le dessinateur travaille au style général. Il crée les personnages principaux et l'environnement dans lequel ils évoluent.
    Si le lieu et l'époque existent, ou ont existé, un travail de recherche de matériel typographique et iconographique est effectué. Si l'univers de l'histoire sort de l'imaginaire de l'auteur, les recherches sont beaucoup plus orientées vers du design graphique.
  • mise en page : choix des points de vue, des cadrages et de l'agencement des vignettes dans la planche.
  • crayonné : première ébauche proprement dite du dessin. À partir de cette étape, le travail s'effectue généralement sur un support plus grand (format A2) que celui de la planche imprimée (format A4).
  • encrage : opération consistant à redessiner à l'encre les contours du crayonné et les ombres afin de donner au dessin un trait définitif. Au final, seul ce tracé sera imprimé. Les décors et les phylactères sont aussi ajoutés et positionnés lors de cette étape. Ils ne sont pas toujours présents, où alors de manière succincte, dans le crayonné.
    Certains auteurs encrent directement sur le crayonné, qu'ils éliminent ensuite en gommant. Perdant ainsi toutes traces de cette étape. D'autres utilisent un calque transparent placé par dessus le crayonné.
  • mise en couleur : opération qui consiste à choisir et appliquer la couleur aux différentes zones délimitées par les traits encrés (personnages, décors, vêtements), tout en respectant la continuité des couleurs au fil des planches. Le coloriste doit aussi définir les lumières et les ombres du dessin. La mise en couleur dite traditionnelle est effectuée sur un tirage particulier de la planche, appelé "bleu", où les traits noirs de l'encrage sont imprimés en bleu-gris clair.
    Par le passé cette tâche était faite à l'aquarelle appliquée au pinceau et à l'aérographe ; de nos jours elle est souvent effectuée par informatique. Les couleurs sont de plus en plus réalisées par des professionnels, les coloristes et parfois par le dessinateur lui-même.
  • couleur directe : l'encrage et la mise en couleur peuvent être réalisés lors d'une étape unique, à la manière d'un peintre.

Le champ graphique est vaste en fonction de la technique utilisée qui va des premiers dessins gravés à la pointe sèche jusqu'à l'utilisation de la peinture à l'aérographe par certains auteurs tels Juan Gimenez. Cette dernière méthode (maintenant souvent même remplacée par l'infographie) permet des réalisations qui sont plus proches visuellement de la photo que du dessin avec la totale élimination du trait.

  • lettrage : le texte des dialogues et commentaires est encré en l'alignant dans les espaces laissés à cet effet lors de l'encrage de la planche. L'opération est répétée pour chaque langue dans laquelle l'histoire est publiée.

En fonction de l'œuvre et de l'artiste, la même personne peut réaliser tout ou une partie du travail de création : scénario, dessin, encrage. Le plus souvent le travail est partagé entre un scénariste et un dessinateur. Certaines étapes plus spécifiques, telles que le lettrage et la mise en couleur, peuvent être laissées à des spécialistes.

Enki Bilal, par exemple, est un artiste complet. Scénariste et dessinateur, il travaille en couleur directe. Il a aussi la particularité de dessiner les cases sur des feuilles séparées, ce qui lui permet de les agencer à loisir sur la planche.

Économie

Le marché du neuf

En 2007, le marché de la bande dessinée en France représentait 33,6 millions d'albums pour 320 millions d'euros, soit 6,5% du chiffre d'affaires de l'édition[21].

Le marché de l'occasion

Le marché de l'occasion de la bande dessiné est un marché dynamique, porté par les différents festivals et par des librairies spécialisées (en Belgique particulièrement).

Le marché des éditions originales, dédicaces, planches originales, ...

Une dédicace est un dessin original exécuté par l'auteur d'une bande dessinée et généralement dédicacé à un lecteur. Cette dédicace est souvent dessinée sur une des pages blanches qui commencent ou finissent l'album. Les festivals de bandes dessinées prévoient souvent des stands de dédicace nombreux ; la popularité des auteurs est un facteur d'attrait important pour les visiteurs. La planche originale est la planche (généralement en format A2) sur laquelle l'auteur a exécuté son dessin. Les premiers auteurs de bandes dessinées accordaient peu d'importance à ces documents dès lors que l'album était imprimé. Aujourd'hui, les passionnés se disputent ces planches à prix d'or. Les éditions originales sont les albums (en nombre limité) édités une première fois. Lorsque l'album a du succès, il peut être réédité de nombreuses fois ; les collectionneurs accordent une valeur parfois très importante aux albums de l'édition d'origine. La valeur varie selon la rareté de l'édition originale, l'état de l'album et la présence d'une dédicace.

Ce marché est actif sur les festivals mais également lors de ventes aux enchères.

Il faut noter que les artistes bénéficient rarement des montants parfois importants auxquels leurs œuvres sont échangées.

Le marché des produits dérivés

Les bandes dessinées les plus fameuses inspirent la création de nombreux produits dérivés (figurines, posters, ...). Certains héros de bandes dessinées sont également utilisés sur des articles dits "avec licence" : vêtements, articles de papeterie, personnages ou même reconstitution de scènes d'une bande dessinée à succès tels les personnages de Walt Disney depuis fort longtemps ou, plus récemment de ceux de Tintin, d'Astérix et bien d'autres ...

Les éditeurs

Un classement rapide permet de distinguer, parmi les éditeurs de langue française :

Les musées, archives, bibliothèques

La bande dessinée, comme tout art parvenu à maturité, possède ses institutions spécialisées. On citera les plus importants centres:

En Europe

  1. En Belgique, le centre belge de la bande dessinée, à Bruxelles
  2. En France, la cité internationale de la bande dessinée et de l'image à Angoulême
  3. En Suisse, le fonds patrimonial du service Bibliothèque & Archives de la Ville de Lausanne et le Cartoon Museum de Bâle

En Amérique du Nord

  1. Aux États-Unis, le National Cartoon Museum de New-York City

Les festivals

Voir l'article plus complet sur les Festivals de bande dessinée.

Un art longtemps mal considéré et déprécié

Au même titre que la musique pop ou le roman policier, la bande dessinée connut le plus grand mal pour acquérir une véritable reconnaissance. D'abord considérée comme un simple outil de divertissement destiné à la jeunesse, la bande dessinée dut s'émanciper de son statut de comic pour asseoir un moyen d'expression artistique nouveau. Certains auteurs contribuèrent largement à cette émancipation, cette reconnaissance, tel Hugo Pratt. Remarquons toutefois que, contrairement au cinéma (qui a bénéficié du combat mené par les cinéastes-critiques de la Nouvelle Vague), la bande dessinée reste largement méconnue comme art à part entière, et souvent vue comme de la littérature pour illettrés et pré-adolescents (on peut se demander dans quelle mesure le succès de la bande dessinée franco-belge, Hergé en tête, n'a pas contribué à cet état de fait, le public n'en ayant retenu que la ligne claire et l'humour parfois un peu potache, et oublié les innombrables possibilités narratives mises au jour par ce medium).

Ce sentiment semble cependant moins fort aujourd'hui. Ainsi, Vincent Bernière écrit-il en 2008 que « vouloir défendre la bande dessinée japonaise, ou la bande dessinée en général, est un combat d'arrière-garde » [22]. Il exprime ainsi avec confiance son sentiment que l'époque où la BD était considérée comme un sous-art est désormais révolue.

Alors que la BD évoque en premier un art propre aux peintres, tout en étant vendue comme de la littérature (ou du moins comptabilisée comme telle dans les chiffres du secteur de l'édition), plus nombreux sont les liens entre cinéma et bande dessinée tant dans la technique de réalisation que par les moyens artistiques à mettre en œuvre, qui ont interpénétré les deux modes d'expression.

Il en est ainsi pour l'écriture et le rythme de l'histoire, la réalisation des décors, l'utilisation des angles de prises de vues (panoramiques, plongées, contre-plongées, gros plans, plans américains, le dessin seul gardant la possibilité de montrer le personnage prenant appui ou marchant sur le bord de l'écran, voire d'en sortir) les montages, les éclairages (avec des outils électroniques de création ou de colorisation maintenant communs aux deux arts), la limitation du champ visuel par l'écran ou la page, la vision 2D, la sonorisation (subjective pour la BD même si certains auteurs tel Cosey font des suggestions d'accompagnements musicaux) avec voix off ou attribuée à l'acteur, les ellipses, retours en arrière et autres jeux sur l'échelle du temps, ... Mais le dessinateur est, lui, maître de ses acteurs, n'a pas besoin de budget pour des milliers de figurants ou de difficiles décors, et peut refaire toute prise sans limite. Enfin, le dessinateur a la liberté de cadrage (une case peut être horizontale, verticale, etc) quand le cinéaste est tenu au rapport de l'écran.

Pour ce qui est de la dépréciation, on regrettera le manque de rigueur dans la bande-dessinée francophone, où la langue est très souvent maltraitée (fautes de grammaire, d'accord, etc.), ce qui peut à terme soit induire les jeunes en erreur, soit dégoûter les plus âgés. Ce phénomène est cependant assez nouveau, touchant plutôt les séries de BD récentes. La volonté de faire sortir un album de bande dessinée plus rapidement en librairie pourrait être pointée du doigt comme ce manque de rigueur, néanmoins cela n'équivaut pas toujours à un "bâclage" de la bande dessinée avec des intentions commerciales ou négatives. Certains auteurs partagent ainsi la passion des lecteurs de bande dessinée (notamment ceux de bandes dessinées "spécialisées"), qui se transforme souvent en attente plus ou moins impatiente avec l'introduction de cliffhangers (fin à suspense) comme à la télévision. Cela les incite à terminer au plus tôt le ou les album(s) et se révèle donc plutôt négatif en termes de correction de la langue française.[réf. nécessaire]

La BD sur Internet

L'essor de la BD sur internet a permis à cet art de sortir du format classique qu'on lui connaît. Le processus de création s'est démocratisé comme en témoigne la production sur des sites internet comme grandpapier et notamment grâce aux logiciels de graphisme sur ordinateur qui permettent à de plus en plus d'auteurs de réaliser l'ensemble des étapes par eux-mêmes. Le mode d'édition peut lui aussi être différent sur Internet: des séries sont désormais publiées sur des sites internet qui propose des abonnements avec des nouvelles planches a échéances hebdomadaire, mensuelle ou quotidienne. Cette façon de procéder copiée sur la diffusion d'épisodes de séries télévisées permet de subventionner la création en même temps que celle-ci se fait. On peut citer par exemple lesautresgens, réalisés par une trentaine d'auteurs et qui grâce au succès rencontré sur Internet publient désormais une version papier des planches déjà disponibles sur leur site.

Les femmes et l'art de la Bande dessinée

Plusieurs études récentes attestent de la place des femmes dans la Bande dessinée et presque tous ses métiers[23] comme en témoignent les recherches et les écrits d'Annie Pilloy[24].

Notes et références

Notes
  1. En 1942, une exposition organisée par l'American Institute of Graphic Arts et intitulée La Bande Dessinée, son histoire et sa signification présente les dessins pariétaux de la grotte de Lascaux, qui venait d'être découverte deux ans plus tôt, comme étant aux sources de la bande dessinée[6].
  2. Le philosophe et missionnaire catalan Raymond Lulle fait exécuter, au XIVe siècle des histoires en images juxtaposées mettant en scène ses aventures notamment en terres musulmanes. Les séquences d'images sont dialoguées à l'aide de phylactères (G. Blanchard (1969), p.28). Dans la tradition catalane, les aucas constituaient des séries d'images, accompagnées de textes rimés racontant une histoire.
Références
  1. a et b F. Lacassin (1971)
  2. a et b D. Dupuis (2005), p.6
  3. a et b A. Baron-Carvais (1985), p.5
  4. Will Eisner, premier ouvrage de la trilogie Comics and Sequential Art, (1997)
  5. S. McCloud (1999), pp.10-11 et 14-19
  6. W. Fuchs et R. Reitberger (1971)
  7. N. Aujoulat, (2004)
  8. S. McCloud (1999), pp.14-15
  9. S. McCloud (1999), pp.10-11
  10. A. Baron-Carvais (1985), p.7
  11. G. Blanchard (1969)
  12. B. Galimard Flavigny (1981), p.19
  13. S. McCloud (1999), p.19
  14. T. Groensteen (2005), p.4
  15. M. Alessandrini (1979)
  16. R. Töpffer (1837) préface
  17. R. Töpffer (1845)
  18. Will Eisner (1997)
  19. Will Eisner (1998)
  20. Henri Filippini (1989), p.IX
  21. Source: chiffres IPSOS, rapportés dans l'article "La bande dessinée, un secteur en bonne santé", Le Monde des Livres, 29 janvier 2009.
  22. Beaux Arts magazine hors-série : Qu'est-ce que le manga ? Dans le même magazine, on peut lire qu'« il semble aujourd'hui évident de posséder des BD dans son salon. »
  23. Cf. art. « Les femmes de la bande »
  24. Cf. Annie Pilloy, « Les femmes dans la BD ... » et son livre Les compagnes des héros de BD : des femmes et des bulles, Paris, l'Harmattan, coll. Logiques sociales, 1994. Voir aussi les activités et conférences de l'Association Artémisia /

Bibliographie

Principale
  • Annie Baron-Carvais, La Bande dessinée, PUF, coll. « Que sais-je ? », première édition 1985, cinquième édition revue et augmentée 2007
  • Dominique Dupuis, Au début était le jaune ..., une histoire subjective de la bande dessinée, PLG, Montrouge (2005)G, Montrouge (2005)
  • Will Eisner, La Bande dessinée, art séquentiel, Vertige Graphic, 1997, traduit de Comics and Sequential Art
  • Will Eisner, Le Récit graphique : narration et bande dessinée, Vertige Graphic, 1998, traduit de Graphic Storytelling and Visual Narrative
  • Patrick Gaumer, Larousse de la BD , Larousse, 2004
  • Thierry Groensteen et Benoît Peeters, Töpffer, l’invention de la bande dessinée, Hermann, Paris, coll. « Savoirs sur l'art », 1994
  • Thierry Groensteen, Système de la bande dessinée, PUF, Collection Formes sémiotiques, 1999
  • Thierry Groensteen, Un objet culturel non identifié, Éditions de l'An 2, 2006
  • Scott McCloud (trad. Dominique Petitfaux), L’art invisible, comprendre la bande dessinée, Vertige Graphic, 1999. Understanding Comics, the Invisible Art, Édition originale Harper Collins, 1999.
  • Harry Morgan, Principes des littératures dessinées, Éditions de l'An 2, 2004
  • Morris, « Neuvième art, musée de la bande dessinée » dans le Journal de Spirou, de décembre 1964 à juillet 1967
  • Benoît Peeters, Lire la bande dessinée, Flammarion, Collection Champs Flammarion, 2003
Complémentaire
  • Marjorie Alessandrini, Marc Duveau, Jean-Claude Glasser, Marion Vidal, L'Encyclopédie des bandes dessinées, Albin Michel, 1986
  • Norbert Aujoulat, Lascaux, le geste, l'espace et le temps, Seuil, Paris, 2004
  • Gérard Blanchard, La bande dessinée, histoire des histoires en images de la préhistoire à nos jours, Marabout, coll. « Marabout Université », 1969
  • Alain Chante, 99 Réponses Sur La Bande Dessinée, Montpellier, Crdp, 1996
  • Bernard Duc, L'Art de la BD, tome 1 : du scénario à la réalisation, Glénat, Collection Art et technique, 1993
  • Bernard Duc, L'Art de la BD, tome 2 : la technique du dessin, Glénat, Collection Art et technique, 1993
  • Henri Filippini, Dictionnaire de la bande dessinée, Bordas, 2005
  • Francis Lacassin, Pour un neuvième art, la bande dessinée, éd. 10x18, Paris, 1971, rééd. Slatkin, Paris, 1982
  • Benoît Mouchart, La Bande dessinée, coll. Idées reçues, éditions Le cavalier bleu, 2004 (ISBN 2-8467-0071-0)
  • Jean-Bruno Renard, Clefs pour la bande dessinée, Seghers, collection Clefs, 1978
  • Pierre Fresnault-Deruelle et Jacques Samson (ouvrage collectif, dirigé par), Poétiques de la bande-dessinée, éditions de l'Harmattan, 2007
  • András Tóth, L'hyperbédé et la métabédé, Interactivité et jeux avec le médium en bande dessinée
  • Annie Pilloy, Les compagnes des héros de BD : des femmes et des bulles, Paris, l'Harmattan, coll. Logiques sociales, 1994.

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