Diffamation en droit français

Diffamation en droit français
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Diffamation
Territoire d’application Drapeau de France France
Incrimination Diffamation publique : art. 29 loi du 29 juillet 1881

Diffamation non publique : art. R621-1 du code pénal

Classification Délit
Amende Diffamation non publique : amende de 1re classe, 38

Diffamation raciale non-publique : 4e classe, 750 €


Diffamation publique : 12 000 € (art. 23)
Diffamation publique envers une personne ou une institution publique : 45 000 (art. 30 et 31) Diffamation publique raciale : 45 000 (art. 32) €

Prescription 3 mois
Compétence Tribunal correctionnel

Tribunal de police

En France, la diffamation est « l'allégation ou l'imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne à laquelle le fait est imputé ». L'absence de faits imputés est une injure (art. 29 de la loi du 29 juillet 1881)[Texte 1].

En France, la diffamation peut être publique ou non publique, raciale ou privée, envers une personne publique ou une institution publique ou même envers la mémoire d'un mort (art. 34 de la loi du 29 juillet 1881).

La diffamation peut aussi être aggravée ou simple. La diffamation non publique en raison de la vie privée est la moins pénalement sanctionnée. La sanction la plus grave est celle pour diffamation publique envers une personne ou une institution publique, ou pour diffamation envers un groupe protégé contre les discriminations[Notes 1]. Diffamation « envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée [...] envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap[1]. ». L'expression diffamation discriminatoire serait peut être plus correcte mais la liste des personnes plus particulièrement protégées est différente de la liste des discriminations interdites. Il suffit de comparer les critères de l'art. 32 de la loi du 29 juillet 1881 et ceux de art. 225-1 c. pénal, article listant les discriminations prohibées.

Le droit de réponse est aussi une possibilité offerte au plaignant, qui s'avère dans certains cas plus adapté.

L'exception de vérité et la bonne foi en droit de la presse sont parmi les moyens de défense au fond, pour le directeur de la publication et le journaliste visés.

"Si les imputations diffamatoires sont réputées faites dans l’intention de nuire, le prévenu peut cependant justifier de sa bonne foi et doit, à cette fin, établir qu’il poursuivait, en diffusant les propos incriminés, un but légitime exclusif de toute animosité personnelle, qu’il a conservé dans l’expression une suffisante prudence et qu’il avait en sa possession des éléments lui permettant de s’exprimer comme il l’a fait", est il par exemple indiqué dans un jugement de la 17ème chambre, ou Chambre de la Presse du Tribunal de grande instance de Paris, datant du 17 mars 2006[2], dans une affaire opposant la mairie de Puteaux à Christophe G., directeur de la publication du site internet accessible à l’adresse www.monputeaux.com[2].

Dans le cas où la diffamation est publique, la prescription est de trois mois. Ce délai est porté à un an dans le cas où la diffamation a été proférée en raison d'une discrimination spécialement interdite.

La prescription de l'action publique est de un an en cas de diffamation non publique (car dans ce cas il s'agit d'une contravention).

Sommaire

Généralités

Il n'est pas nécessaire que le propos soit calomnieux (donc faux) pour tomber sous le coup de la loi. La présentation des faits doit ne pas être trompeuse. (Par exemple: "telle année M. X a eu une affaire de vol de voiture" si la réalité des faits est qu'on avait volé à cette époque la voiture de M. X).

La reproduction ou la citation de propos diffamatoires constitue une nouvelle diffamation susceptible de poursuites.

Un procès en diffamation opposa ainsi Jean-François Kahn à un certain B., directeur d'un grand quotidien, le premier ayant écrit dans son hebdomadaire : « Si les cons volaient, B. serait pilote de Boeing. » Dans son jugement, la Cour rappelle l'étymologie du mot con et le replace dans le contexte d'une société misogyne, puis estime que « la phrase suggère que M. B. serait un con de qualité ; la volonté de nuire est ici évidente. » Le défendeur fut condamné au franc symbolique de dommages-intérêts.

Dans l'affaire « Placid » (Vos papiers ! Que faire face à la police, livre sur les contrôles d'identité), la Cour de cassation rappelle la différence entre l'exception de bonne foi et l'exception de preuve[3].

Spécificités de la diffamation

Articles détaillés : injure et calomnie.

L'invective ou l'expression outrageante qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure.

Ainsi, les termes « traître à la patrie », « repris de justice », « imposteurs », « mafiosos » ont été jugés diffamatoires. En revanche, les termes « couard », « homme vil », « lopette », « larbin » ont été jugés comme constituant des injures en l'absence d'imputation de faits précis[4].

Types de diffamations

La diffamation non publique simple est la moins sévèrement sanctionnée. Elle est prévue par l'article R621-1 du code pénal et sanctionnée par une amende de première classe. Dans l'ancien code pénal, elle était assimilée à une injure non publique et difficile à prouver (car par nature il n'y pas de public ou de témoin).

Diffamation publique ou privée

La diffamation constitue un délit ou une contravention suivant qu'elle est exprimée publiquement ou en privé. Des propos diffamatoires tenus devant un groupe de personnes partageant une même communauté d'intérêts sont considérés comme privés (par exemple, lors d'un comité d'entreprise, assemblée de copropriétaires)[5].

Diffamation raciale ou assimilée

La diffamation raciste (en « raison de leur origine ou de leur appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ») constitue depuis 1881 un délit pénal passible « d'un emprisonnement de un mois à un an et d'une amende de 1 000 F à 1 000 000 de francs »[6]. Depuis la réforme du Code pénal de 1994 et la loi de 2004 portant la création de la HALDE, elle est passible d'un an d'emprisonnement et d'une amende de 45 000 €, ou de l'une de ces deux peines[7].

Exception lors d'une plaidoirie

Il ne peut pas y avoir de diffamation lors de plaidoiries devant un tribunal, ni lors de discussions relatives à l'adoption d'un texte devant l'Assemblée nationale ou le Sénat. L'article 41 alinéa 3 de la loi du 29 juillet 1881 pose :

« Ne donneront lieu à aucune action en diffamation, injure ou outrage, ni le compte rendu fidèle fait de bonne foi des débats judiciaires, ni les discours prononcés ou les écrits produits devant les tribunaux. »

Spécificité de procédure pour la diffamation publique

La procédure de diffamation connaît des règles de procédure très particulières garantissant le respect de la liberté de la presse (prescription de trois mois), ce qui permet, en démontrant que les propos incriminés ne sont pas diffamatoires mais injurieux (ou vice-versa) d'échapper aux poursuites, aucune requalification n'étant possible en droit français[8].

Par ailleurs, le régime de responsabilité civile retenu en matière de diffamation ou de dénonciation calomnieuse est spécifique à cette loi, ne dépendant pas de l'article 1382 du Code civil[9].

Moyens de défense

Parmi les principaux moyens de défense, l’exception de vérité et la bonne foi journalistique.

Dans un arrêt rendu le 6 juin 2007[10], la cour d'appel de Paris rappelle les conditions inhérentes à chacune de ces possibilités d'exonération. Ainsi « la preuve de la vérité des faits diffamatoires doit être parfaite, complète et corrélative aux imputations tant dans leur matérialité que dans leur portée et dans leur signification diffamatoire ».

Quant à la bonne foi journalistique, « quatre éléments doivent être réunis pour que [son] bénéfice [...] puisse être reconnu au prévenu : la légitimité du but poursuivi, l’absence d’animosité personnelle, la prudence et la mesure dans l’expression, ainsi que la qualité de l’enquête ». Cependant, la preuve s'avère souvent difficile à produire, notamment si les faits concernent la vie privée ou un acte répréhensible non encore condamné au moment de l'allégation. La bonne foi s'applique lorsqu'en dehors de toute animosité personnelle, une personne fait état de faits qui bien que faux ou non démontrés, ont précédemment été imputés à une personne sans que l'auteur n'ait connaissance d'éventuels démentis. Les propos doivent être mesurés et poursuivre un but légitime. L'exception de bonne foi ne suppose pas la preuve de la vérité des faits.

Exception de vérité

Article détaillé : exception de vérité.

Bonne foi

Article détaillé : bonne foi.

Notes et références

Notes

  1. On parle dans ce cas là, de diffamation raciste même si les d'autres critères sont prévus

Textes

  1. « Toute allégation ou imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé est une diffamation. La publication directe ou par voie de reproduction de cette allégation ou de cette imputation est punissable, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l'identification est rendue possible par les termes des discours, cris, menaces, écrits ou imprimés, placards ou affiches incriminés.
    C'est une infraction sanctionnée par le Droit pénal de la presse, via une jurisprudence constante, celle de la Loi sur la liberté de la presse du 29 juillet 1881.
    Toute expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne renferme l'imputation d'aucun fait est une injure. »

    -- Article 29 de la loi du 29 juillet 1881

Références

  1. extraits de l'art. 32 de la loi du 29 juillet 1881
  2. a et b (fr)Tribunal de grande instance de Paris 17ème chambre - Chambre de la Presse Jugement du 17 mars 2006 - Commune de Puteaux / Christophe G. le 17/03/2006 : Procèdure sur www.legalis.net. Consulté le 18juillet 2010.
  3. (fr)Arrêt n° 2939 du 17 juin 2008 - Cour de cassation - Chambre criminelle : Cassation sur www.courdecassation.fr. Consulté le 18juillet 2010.
  4. Diffamation et injure, sur le blog du Professeur Alain Alpern
  5. Crim. 7 mars 2000, N° de pourvoi: 98-81650, lire en ligne.
  6. Article 32 de la loi de 1881, version en vigueur de 1881 à 1972 : « La diffamation commise par les mêmes moyens envers un groupe de personnes non désignées par l'article 31 de la présente loi, mais qui appartiennent, par leur origine, à une race ou à une religion déterminée, sera punie d'un emprisonnement de un mois à un an et d'une amende de 1 000 F à 1 000 000 de francs [*10 à 10 000 F*], lorsqu'elle aura eu pour but d'exciter à la haine entre les citoyens ou habitants. »
  7. Article 32, actuelle loi 1881, version consolidée au 7 août 2009.
  8. Journal d'un avocat, Blogueurs et Responsabilité Reloaded sur www.maitre-eolas.fr, 24 mars 2008.
  9. Civ. 1re, 6 mai 2010, n° 09-67.624, obs. S. Lavric, « Abus de la liberté d'expression : spécialité des infractions de presse », Dalloz.fr, 21 mai 2010
  10. CA Paris, 6 juin 2007, mairie de Puteaux/ Christophe G.

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