Kafala

Kafala
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Le couple
Concubinage - Fiançailles
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Développement de la famille
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L'adoption : simple, plénière, internationale
Organisation de la famille
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Desagrégation de la famille
Le divorce - Procédure de divorce
Séparation de corps / de biens
Voir aussi
Le Juge aux Affaires Familiales
La succession
Accouchement sous X - IVG
Procréation médicale assistée
Régime matrimonial
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La kafala est une procédure d'adoption spécifique au droit musulman, qui interdit l'adoption plénière, et s'oppose en général à la procédure d'adoption au nom de la famille, considérée comme pilier de la société. Un enfant, en particulier naturel (né hors mariage, etc.), peut donc être recueilli par une famille adoptive, mais n'aura jamais les mêmes droits d'héritage qu'un enfant légitime: il s'agit d'une tutelle sans filiation, l'adopté gardant son patronyme d'origine. La kafala est reconnue par la Convention relative aux droits de l'enfant de 1989.

Sommaire

Convention des droits de l'enfant

La kafala est expressément citée comme équivalent à l'adoption dans la Convention des droits de l'enfant des Nations Unies de 1989, en rapport avec l'abandon d'enfants, à l'article 20 (al. 3):

« 

  1. Tout enfant qui est temporairement ou définitivement privé de son milieu familial, ou qui dans son propre intérêt ne peut être laissé dans ce milieu, a droit à une protection et une aide spéciale de l'État.
  2. Les États parties prévoient pour cet enfant une protection de remplacement conforme à leur législation nationale.
  3. Cette protection de remplacement peut notamment avoir la forme du placement dans une famille, de la « Kafala » de droit islamique, de l'adoption ou, en cas de nécessité, du placement dans un établissement pour enfants approprié. Dans le choix entre ces solutions, il est dûment tenu compte de la nécessité d'une certaine continuité dans l'éducation de l'enfant, ainsi que de son origine ethnique, religieuse, culturelle et linguistique. »

Variantes et sens de la kafala aux Emirats arabes

Comme toute institution juridique, la kafala connaît des variantes. Certains pays musulmans sont allés jusqu'à légaliser l'adoption plénière, d'autres ont trouvé des procédures intermédiaires ; d'autres, enfin, comme les Émirats Arabes Unis, utilisent la kafala comme une sorte de sponsorship obligatoire avant d'ouvrir une entreprise ou de se faire embaucher sur place (les nombreuses zones franches créées dans les EAU, et notamment à Dubaï, échappent cependant à cette règle de la kafala).

Les dispositifs de substitution à l'adoption

Dans la plupart des pays musulmans, où le droit musulman inspire, à un degré ou un autre, le système juridique, l'adoption n'existe pas en tant que telle (sauf en Turquie, Indonésie, Tunisie [1],[2] ainsi qu'en Somalie et au Liban). Plusieurs dispositifs de substitution existent, dont en particulier la kafala (ou « recueil légal » [1]). Celle-ci a pour effets la tutelle légale, instaurant un rapport de type filial mais sans créer de nouveaux liens de filiation[1]. L'enfant recueilli est reconnu comme enfant légitime, sauf pour ce qui concerne la filiation et l'héritage. Il peut prendre le nom de son tuteur (ou kafil [3]). Toutefois, l'enfant recueilli peut recevoir une part de l'héritage, selon la procédure du tanzil [3].

L'adoption est également utilisée, de façon plus discrète, dans certains pays du Maghreb (Maroc [4], Algérie, etc.), afin d'éviter un abandon d'enfant: la mère ne pouvant garder son enfant accepte qu'un homme marié le reconnaisse comme sien, évitant ainsi à celui-là d'être considéré comme enfant naturel. Il s'agit là d'une pratique à laquelle l'ONG SOS Villages d'Enfants participe activement, permettant de trouver une issue convenable tant à la mère qu'à l'enfant. Utilisant un vocabulaire typiquement « économiste » et « pragmatique », le journal marocain L'Économiste écrivait ainsi, en 2010:

« Déclenchée dès la confirmation de l’abandon, la kafala est donc considérée comme la meilleure option pour l’enfant. Mais en dehors de SOS village habilitée à la solliciter, les autres structures impliquées dans l’accueil d’enfants abandonnés ne sont pas dotées de cette aptitude. Elles peuvent toutefois participer activement à sa promotion. Depuis 2005, le nombre d’affaires relatives à la kafala traitées par la justice est en nette progression. Il est passé de 1 661 en 2005 à 2 261 en 2008[5]. »

Droit international privé: kafala et adoption

Article connexe : Droit international privé.

La différence de régime entre la kafala et l'adoption constitue un casse-tête juridique dès lors qu'on se situe dans le contexte d'une adoption internationale. Si les parents sont nationaux d'un pays adoptant l'adoption, a fortiori l'adoption plénière, et qu'ils « adoptent » un enfant venant d'un pays où seul le régime de la kafala existe, faut-il admettre que cet enfant soit privé d'un lien de filiation légitime avec ses parents adoptants, conformément à la loi du pays où il est né, ou faut-il accepter de rompre avec le régime juridique de son pays natal, pour lui accorder une filiation de plein droit?

La question, loin d'être facile, connaît différentes réponses selon les pays (sachant que malgré une loi de 1972, la différence entre enfant légitime et naturel n'a été définitivement abolie, en France, que par une ordonnance de 2005 faisant suite à une condamnation de la Cour européenne des droits de l'homme; il s'agit là, par ailleurs, d'un conflit typique de normes en droit international privé, qu'on retrouve par exemple pour les « mères porteuses »).

En France

Le sénateur Alain Milon (UMP) a ainsi récemment (mars 2011) déposé une proposition de loi visant à autoriser l'adoption plénière d'enfants adoptés par des Français, et vivant en France, selon la procédure de la kafala, ce qui constituerait ainsi une rupture avec la loi de leur pays d'origine. Il s'est notamment appuyé, pour cela, sur l'exemple de l'Espagne, de l'Italie, de la Belgique et de la Suisse, qui autorisent une telle procédure[6]. La question demeure débattue, et traverse les partis. Ainsi, en 2008, la sénatrice Verte Alima Boumediene-Thiery interpellait le gouvernement au sujet de l'octroi de visas aux enfants recueillis en kafala par des couples français. Le gouvernement répondait alors, par la voix d'Éric Besson:

« Madame la sénatrice, sachez que Mme la garde des sceaux partage pleinement votre souci de mieux prendre en considération la situation des enfants recueillis en France dans le cadre d’une kafala judiciaire marocaine ou algérienne. Cependant, elle appelle votre attention sur le fait que la kafala ne crée pas de lien de filiation. Cette procédure ne peut donc en aucun cas être assimilée à une adoption, les législations du Maroc et de l’Algérie ne reconnaissant pas ce mode de filiation.

Dans ces conditions, vous comprendrez que la loi française ne permette pas l’adoption d’un enfant qui n’est pas adoptable selon sa loi personnelle [allusion à l'art. 370-3 du Code civil préalablement cité par la sénatrice].

Toutefois, dès lors que l’enfant a été élevé pendant cinq ans en France par des Français, la nationalité française peut lui être accordée. La loi française lui étant alors applicable, l’enfant peut être adopté par ceux qui l’ont recueilli. Ce dispositif apparaît tout à fait équilibré.

Mme la garde des sceaux observe d’ailleurs que le rapport sur l’adoption en France remis au Président de la République le 19 mars 2008 par M. Colombani ne prévoit aucune modification législative sur ce point, mais préconise de s’orienter vers des mécanismes de coopération avec les pays d’origine, notamment en vue de faciliter la délivrance de visas au profit des enfants concernés. Ces conclusions rejoignent celles qui ont été formulées par le groupe de travail chargé de réfléchir au statut des enfants recueillis par kafala, mis en place par le ministère de la justice en février 2007, en liaison avec les autres ministères concernés. Elles font actuellement l’objet d’une concertation à l’échelon interministériel[7]. »

Références

  1. a, b et c Vulbeau A., « La kafala ou le recueil légal de l’enfant », Informations sociales 2008/2, N° 146, p. 23-24. [lire en ligne]
  2. Pour la Tunisie, voir (entre autres) la Loi n° 1958-0027 du 4 mars 1958 relative à la tutelle publique, à la tutelle officieuse et à l’adoption
  3. a et b Edwige-Rude Antoine, Conflits de lois entre pays : quand l'adoption devient impossible, CNRS Info, février 2000
  4. Loi n°15-01 relative à la prise en charge des enfants abandonnés, qui a été promulguée par le Dahir n° 1-02-172 du 13 juin 2002. Voir par exemple La kafala en droit marocain, Droit marocain.blogspot, 20 mai 2007
  5. Enfance abandonnée. La kafala, pour désengorger «les stocks», L'Économiste, éd. n°3363, 16 septembre 2010
  6. PROPOSITION DE LOI relative à l'adoption des enfants régulièrement recueillis en kafala, déposée par Alain Milon et enregistrée à la présidence du Sénat le 10 mars 2011
  7. Question au gouvernement d'Alima Boumediene-Thiery, 30 avril 2008

Voir aussi


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Kafala de Wikipédia en français (auteurs)

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