Histoire Du Territoire De Belfort

Histoire Du Territoire De Belfort

Histoire du Territoire de Belfort

Depuis les temps les plus reculés, la Trouée de Belfort, correspondant approximativement au département du Territoire de Belfort, qui fait communiquer les deux grandes vallées du Rhin et du Rhône, a été le chemin naturel des invasions. Celtes, Barbares, Impériaux, Allemands déferlent successivement, pour le plus grand dommage des malheureuses cités et villages qui se trouvent sur leurs passages.


Sommaire

Préhistoire

À la fin de la dernière glaciation, il y a 8 à 10 000 ans, le paysage devait plutôt faire penser à la Sibérie actuelle. Plus tard, vers -4500 ans, l’homme néolithique est présent dans la région comme en attestent les vestiges découverts à la fin du XIXe siècle dans la grotte funéraire dite de Cravanche. Le matériel mis au jour lors des fouilles qui ont suivi la découverte de la grotte est au Musée Historique de la ville de Belfort.

D’autres sites néolithiques ont été étudiés autour de Belfort. Celui du Haut-du-Mont, tout proche de la grotte de Cravanche, semble avoir été un atelier de fabrication de haches en aphanite, vu le nombre d’éclats qui ont été mis au jour. Cette roche particulière n’existait pas sur place, la matière première pourrait avoir été transportée depuis Chagey. Ce site, en bordure de plateau et fortifié, s’apparente à celui du Col-du-Bramont qui se trouve de l’autre côté de la Savoureuse, sur la crête où se dresse la tour de la Miotte. Il s’agit là aussi d’un enclos protégeant un habitat et pouvant servir de parc à bétail.

Dans le sud du département, près de Beaucourt, le plateau du Grammont a été choisi par nos lointains ancêtres pour établir une enceinte fortifiée d’environ deux hectares dans laquelle ont été fouillées à la fin du XIXe siècle de nombreuses sépultures (coffres sous tumulus)

La période gallo-romaine

Avant la conquête romaine, la partie Est du Territoire de Belfort faisait partie de la Rauracie, le pays des Rauraques, dont le siège était à Augusta-Rauracorum (Augst, près de Bâle) puis à Bâle. Belfort et les autres localités (Giromagny, Chaux...) appartenaient à la Séquanie. En 58 avant JC, Arioviste et ses Germains, qui dominaient notre région, furent battus en un lieu que les historiens ne parviennent pas à situer, malgré la description qu’en fait Jules César dans ses Commentaires sur la guerre des Gaules. Ce pourrait être d’ailleurs dans la plaine occupée par Belfort. Sous la domination romaine, la Trouée de Belfort, lieu de passage entre le bassin du Rhône et la vallée du Rhin, est traversée par deux voies romaines importantes. La plus au sud passe par Mandeure, Delle, Florimont en direction du Rhin, tandis que la plus au nord (Langres-Strasbourg) serpente au pied des Vosges. Des chemins secondaires quadrillent l’actuel Territoire de Belfort et l’un d’eux relie Mandeure, Bavilliers, Belfort, Offemont, Les Errues et rejoint la voie Langres-Strasbourg vers Rougemont-le-Château ou Leval.

Le Moyen Âge

Pendant la période des invasions (250-500) la région de Belfort vit passer beaucoup de monde : Francs, Vandales, Alamans, Burgondes... Le sud de l’Alsace, espace frontière entre les royaumes burgonde et alaman ne connut guère la tranquillité avant que Charlemagne ne restaure l’ordre qui avait disparu avec l’Empire romain. Les morcellements successifs de l’Empire de Charlemagne firent échoir la région successivement à Lothaire Ier, Lothaire II, Louis le Germanique (+876) et Charles le Gros. En 923, Henri l'Oiseleur, roi de Germanie reprend l’Alsace au Royaume de France.

Vers le milieu du XIe siècle, Louis de Mousson et de Bar fut le premier comte de Montbéliard et de Ferrette. Ses petits-enfants se partagèrent la région : Thierry II devint comte de Montbéliard et Frédéric II comte de Ferrette. Notre département était alors coupé en deux, la partie est (seigneuries de Rougemont, du Rosemont, de Florimont) faisant partie du domaine de Ferrette. Les deux comtes ne s’entendaient pas au mieux puisque Frédéric fit construire sur la hauteur de la Miotte le château de Montfort (dont la 'Miotte' serait une « miette ») en face du château de Belfort-sur-la-Roche. Heureusement, le traité signé en 1226 à Grandvillars et le mariage entre Thierry, fils aîné de Richard de Montbéliard, et Alix, fille de Frédéric de Ferrette mit fin à la dispute.

Au moment de l’affranchissement de la ville, en 1307, la seigneurie de Belfort comprenait trois districts découpés en mairies, chaque district possédant un tribunal qui rendait justice au nom du seigneur :

  • Prévôté de Belfort : Bavilliers, Belfort, Botans, Buc, Cravanche, Offemont, Lagrange et Pérouse.
  • L’Assise : Andelnans, une partie de Bessoncourt, Chévremont, Danjoutin, Dorans, Fontenelle, Leuppe, Moval, Petit-Croix, Sévenans et Trétudans.
  • Prévôté d’Angeot : Angeot, Autrage, Eschêne, Larivière, Novillard, Rechotte, Saint-Cosme et Vauthiermont.

Au début du XIVe siècle, les six principales seigneuries sont : Belfort, Delle, Florimont, Montreux, Rougemont et la Seigneurie du Rosemont. Elles ne tardent pas à se regrouper. Delle s’agrandit de Florimont et de Montreux avant d’être rattachée, ainsi que le Rosemont, à Belfort. À la fin du siècle il ne reste plus que Rougemont et Belfort.

La période autrichienne

Ce qui deviendra un département français est d’abord partagé entre le comté de Montbéliard et celui de Ferrette. Renaud de Bourgogne, comte de Montbéliard, chercha à préserver son indépendance vis à vis du Saint Empire, allant jusqu’à se rallier au roi de France, Philippe le Bel. Sa fille, Jeanne de Montbéliard, épousa Ulrich de Ferrette puis la fille aînée de cette dernière, Jeannette de Ferrette, en se mariant avec l’Archiduc d’Autriche Albert I (comte de Habsbourg), apporta à la maison d’Autriche le domaine du Rosemont dont elle avait hérité. Belfort et son château constituaient alors un bastion marquant les limites de l’Empire face à la Bourgogne et à la puissance française par la suite.

En 1425, le servage a pratiquement disparu mais en tant que « porte de Bourgogne » et terre autrichienne, le futur Territoire de Belfort eut encore à subir, au cours du XIVe siècle et XVe siècle, la peste de 1349, les méfaits des bandes de routiers (1365 à 1375) et d’Écorcheurs (1439 et 1444-1445), des Bourguignons (1424 à 1431), Suisses (1468).

De 1469 à 1474, l’Alsace est provisoirement vendue à Charles le Téméraire, duc de Bourgogne. La Guerre de Trente Ans, qui dura ici de 1610 jusqu’aux traités de Westphalie en 1648, fut une période de misère, de brigandage, d’épidémies (peste vers 1628) de mouvements de troupes diverses : Suédois, Français, Lorrains, Croates, Impériaux, Suédois de nouveau et enfin Français. Ces derniers n’en sont plus repartis.

Rattachement à la France

Pendant la guerre de Trente Ans, en 1638, la ville de Belfort est prise par les Français. Le comte de la Suze, parti de Montbéliard, enlève la nuit, par un coup d'audace inouïe, les formidables fortifications. Suze nommé gouverneur de Belfort par Richelieu, est resté célèbre dans les annales locales par les instructions qu'il avait données au commandant de la garnison. Elles ne comportaient que trois mots : « Ne capitulez jamais ». La conquête est ratifiée par le traité d'Aix-la-Chapelle en 1648.
Louis XIV fit don du fief du Rosemont au comte de la Suze puis, en 1659, au cardinal de Mazarin.
Louis XIV ordonne à Sébastien Le Prestre de Vauban de faire de Belfort et de sa région une place imprenable. Le grand ingénieur y déploie tout son génie et réalise sans doute là son chef-d'œuvre. En effet, grâce à ses fortifications, la ville de Belfort soutiendra, victorieusement, 3 sièges commémorés par le monument de Bartholdi.
En 1792, lors de la confiscation des biens des émigrés, le propriétaire était Honoré-Maurice Grimaldi, comte de Valentinois.
La région de Belfort fut alors intégrée au département alsacien du Haut-Rhin, dont la préfecture était Colmar formant un district puis un arrondissement.

Le Premier Empire

1813-1814 Depuis la fin de la guerre de Trente Ans, Belfort n'avait plus eu à subir de siège. Le reflux de la Grande Armée après la retraite de Russie fut suivi de l'arrivée devant Belfort d'une division autrichienne qui investit la place de Belfort commandée par le lieutenant-colonel Jean Legrand. La ville résista pendant 113 jours dans des conditions très éprouvantes pour les habitants.
Le retour de Napoléon de l'île d'Elbe provoqua à nouveau une levée de boucliers de la part des Alliés et en 1815 la région eut à subir une nouvelle invasion. Cette fois c'est le général Claude Jacques Lecourbe qui, en tant que commandant du 1er corps d'observation du Jura, dirigea la résistance. Arrivé à Belfort le 1er mai 1815, il commença par faire renforcer les défenses en avant des fortifications en faisant construire une ceinture de redoutes bien placées sur les hauteurs :

  • La Miotte
  • La Justice
  • Les Perches
  • Bellevue (route de Lyon)

complétées par d'autres défendant l'accès par les routes principales :

  • Route de Paris (vers l'ouest, à l'entrée d'Essert)
  • Route de Bâle, à Pérouse

Malgré une écrasante infériorité numérique, les troupes de Lecourbe défendirent le terrain pied à pied en s'appuyant sur la place de Belfort, organisée en camp retranché.

Le 22 juin, Napoléon avait abdiqué pour la seconde fois. Les Autrichiens, dont le but était atteint et mesurant les énormes sacrifices qui seraient nécessaires pour venir à bout des Français solidement retranchés, acceptèrent le 8 juillet de signer une suspension d'armes avec le général Lecourbe. Ce cessez-le-feu se transforma en armistice à Bavilliers le 11 juillet. Le 27 juillet, en militaire discipliné, le général Lecourbe faisait hisser le drapeau blanc de la Seconde Restauration.
Les aménagements défensifs de Lecourbe servirent de base aux travaux de fortification menés par François Nicolas Benoît Haxo dans les années qui suivirent et qui firent de Belfort un camp retranché redoutable. La ville est ceinturée de fortifications érigées pour la plupart à partir de 1871 et destinées à fermer la trouée de Belfort aux envahisseurs.

Le XIXe siècle et le XXe siècle

Le XIXe siècle vit la ville de Belfort se développer en tant que place militaire, et la construction de grands axes routiers et de chemins convergeant vers la ville. La ville était alors le chef-lieu d’un arrondissement du Haut-Rhin comprenant les villes de Cernay, Dannemarie, Delle, Giromagny, Masevaux, Saint-Amarin et Thann.
Pendant la guerre de 1870, la ville est assiégée par les Allemands. La garnison de 15 000 hommes du colonel Denfert-Rochereau tint tête aux 40 000 Prussiens durant 103 jours. En raison de cette résistance héroïque, et parce que l'arrondissement de Belfort était francophone, la moitié sud-ouest de l'arrondissement (avec Belfort, Delle et Giromagny, mais sans Cernay, Dannemarie, Masevaux, Saint-Amarin et Thann) ne fut pas annexée par l'Allemagne, contrairement au reste du département du Haut-Rhin : les Allemands quittèrent la ville en 1873.

Le futur Territoire de Belfort garda après 1871 le nom d'« arrondissement subsistant du Haut-Rhin », et eut donc un statut spécial jusqu'à la récupération de l'Alsace par la France après la Première Guerre mondiale : il avait alors à sa tête un administrateur faisant fonction de préfet et une commission départementale ayant les pouvoirs d'un conseil général.

Après 1918 cependant, il ne fut pas réintégré dans le Haut-Rhin. Il ne devint département à part entière qu’en 1922, et prit alors le nom de Territoire de Belfort, préféré aux dénominations de "Savoureuse" ou "Mont Terrible".

Le 14 novembre 1944, la 1re Armée française, stoppée depuis deux mois devant le bouchon de Belfort, hérissé de défenses, déclenche l'offensive qui doit lui ouvrir la porte de la Haute Alsace et le chemin sur le Rhin.
Le fort du Salbert, au Nord-Ouest de la ville, barre la route.
Le 19 novembre, une attaque est montée contre lui.
À la nuit, 1 500 hommes des Commandos d'Afrique, mitraillettes au poing, grenades à la ceinture, se glissent en file indienne dans la forêt du Salbert, supprimant silencieusement sur leur passage les postes de garde allemands.
Les fossés sont descendus à la corde, les remparts escaladés à l'aide d'échelles démontables. Après cinq heures de marche, sans avoir donné l'éveil à l'ennemi, la colonne surprend la garnison du fort et la maîtrise rapidement.
Le 20 novembre, au petit jour, dévalant les pentes du Salbert, les commandos, bientôt suivis des chars, pénètrent dans Belfort.
Après deux jours de combats de rues, Belfort est enfin libre, le 22 novembre 1944[1].

Liens internes

Sources et références

  1. Guide Vert Michelin 1951-1952
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