Delta intérieur du Niger

Delta intérieur du Niger

14°37′00″N 4°30′00″O / 14.616667, -4.5

Le delta intérieur du Niger vu par satellite en novembre 2007. À cette époque, la végétation du delta, puissamment arrosée par les crues de fin d'été-automne, est en plein essor. On aperçoit bien le sillon créé par le Niger venu du sud-ouest et celui, plus léger, tracé par le Bani au sud.
Le delta à l'intérieur du bassin du Niger.
Bateaux de pêche à Mopti sur le Bani

Le delta intérieur du Niger est une région naturelle du Mali s'étendant sur 64 000 km2, entre les 4e et 6e degrés Ouest et les 13e et 16e degrés Nord, entre Djenné et Tombouctou.

Sommaire

Géographie

Le delta est formé essentiellement par le fleuve Niger et son affluent le Bani. On y trouve aussi le canal du Sahel.
Il s'étend sur 390 kilomètres entre Djenné et Tombouctou avec le lac Débo en son centre. Le delta est en fait un énorme réseau de canaux, de marécages et de lacs. Il se trouve dans une cuvette plane et sablonneuse située à 250-270 mètres d'altitude environ. Jadis lors d'une période plus humide, il constituait un vaste lac alimenté par le haut Niger.

De nombreux lacs sont présents dans la région : le lac Korientzé, le lac Débo, le lac Niangay, le lac Dô, le lac Haribongo, le lac Kabara, le lac Tanda, le lac Fati, le lac Horo, le lac Télé et le lac Faguibine.

Chaque année les crues simultanées des deux grands cours d'eau inondent de vastes surfaces de cet énorme delta, le niveau de l'eau augmentant, suivant l'intensité des crues, de 4,5 à 7 mètres par rapport à l'étiage. On estime que le maximum annuel des surfaces inondées varie entre 35 000 km2 en année humide et 7 000 km2 en année sèche[1].

Hydrologie

Lors du passage par le delta, suite à la très faible déclivité du terrain, le fleuve Niger et le Bani perdent près de la moitié de leurs eaux par infiltration et évaporation. Cette dernière est intense dans la région et est estimée entre 2 000 et 2 500 millimètres par an[2].

Les débits en amont du delta

Le Niger à Kirango aval

Le débit du fleuve a été observé pendant 67 ans (1925-1992) à Kirango aval, station située juste en amont du delta[3].

Le débit annuel moyen ou module observé à cet endroit durant cette période a été de 1 290 m³/seconde pour un bassin versant de plus ou moins 137 000 km², soit la quasi totalité de la partie du bassin alimentant le delta.

La lame d'eau écoulée dans cette partie du bassin atteint ainsi le chiffre de 297 millimètres par an.

Débits moyens mensuels du Niger (en m³/seconde) mesurés à la station hydrométrique de à Kirango aval
Données calculées sur 67 ans

Le Bani à Douna

Le débit de la rivière Bani a été observé pendant 63 ans (1922-1984) à Douna, localité située près de la ville de Zinzana, peu avant l'irruption du Bani dans le delta intérieur du Niger, située à plus ou moins 150 kilomères du confluent avec le Niger à Mopti[4].

Le débit annuel moyen ou module observé à Douna sur cette période était de 513 m³/seconde pour un bassin versant de plus ou moins 101 600 km², soit la quasi totalité du bassin de la rivière alimentant le delta.

La lame d'eau écoulée dans ce bassin atteint ainsi le chiffre de 159 millimètres par an.

Débits moyens mensuels du Bani (en m³/seconde) mesurés à la station hydrométrique de Douna
Données calculées sur 63 ans

Débits cumulés du Bani et du Niger en amont du Delta

Les débits annuels moyens cumulés des deux cours d'eau observés ainsi de 1922 à 1992 a été de 1 803 m³/seconde pour un bassin versant de plus ou moins 238 600 km².

Ce débit constitue plus ou moins 90% des apports moyens en eau du delta intérieur du Niger, le solde étant dû à quelques rares affluents secondaires du Niger dans la zone du delta ainsi qu'aux précipitations locales.

Débits moyens mensuels de l'ensemble Niger-Bani (en m³/seconde) en amont du delta
Données observées de 1922 à 1992

Les débits du Niger à Diré en aval du delta

Le débit du fleuve a été observé pendant 67 ans (1924-1992) à Diré, ville située dans la région aval du delta, à quelque 80 kilomètres au sud-ouest de Tombouctou[5].

Le débit annuel moyen ou module observé à cet endroit durant cette période a été de 1 003 m³/seconde pour un bassin versant de plus ou moins 340 000 km².

Débits moyens mensuels du Niger (en m³/seconde) mesurés à Diré en aval du delta
Données calculées sur 67 ans

Les deux graphiques précédents ont été construits à peu près à la même échelle. On remarque que la période de crue maximale en aval du delta se produit avec un retard de deux mois environ par rapport à l'amont (septembre-octobre en amont et novembre-décembre en aval), temps nécessaire pour inonder puis franchir le delta. Il en va de même pour la pérode d'étiage ou de basses eaux. Il faut se rappeler que la période de pluie maximale (saison des pluies) a lieu en juillet et en août dans l'ensemble du Sahel, donc dans le bassin du Bani comme dans celui du haut Niger. En aval du delta, la crue correspondante à ce maximum des précipitations se produit donc avec quatre mois de retard.
En aval du delta, les crues sont largement écrêtées, le delta agissant comme un vaste tampon modérateur. De ce fait, la période de crue y est nettement plus longue. La décrue est lente et s'étale sur de nombreux mois : en mars, au pire de la saison sèche, le fleuve roule encore pas moins de 663 m³/seconde, alors qu'en amont l'étiage est presque maximal (118 m³ en mars et 75,3 en avril).

Enfin, environ la moitié des eaux ont été perdues lors du passage par le delta. Le débit observé en amont (uniquement les apports du Niger et du Bani) passe de 1 803 m³/seconde à 1 003 m³. En fait, la ville de Diré n'étant pas située complètement en aval du delta, le débit baisse encore nettement entre cette ville et la région de Tombouctou, toujours par infiltration et évaporation. Une perte de débit importante a notamment lieu suite à la sortie du lit du Niger des effluents alimentant le système du lac Figuibine (marigots de Kondi, de Tassakane et de Goundam).

Articles détaillés : Lac Figuibine et Marigot de Goundam.

Évaporation dans la zone du delta

L'évaporation sur nappe d'eau libre dans la zone du delta a été estimée au niveau des stations hydrologiques de Mopti et de Tombouctou. On a constaté que la différence entre années humides (1962-1966) et sèches (1982-1986) est peu importante, calculée annuellement : les valeurs moyennes seraient de 2 260 millimètres pour les années humides et de 2 360 mm. pour les années sèches.

Évaporation sur nappe d'eau libre dans le delta intérieur du Niger (en millimètres/an)
Données calculées sur les périodes humide (1962-1966) et sèche (1982-1986)

Pluviométrie

L'importance des pluies décroît du sud vers le nord dans le delta intérieur du Niger. Le cumul annuel des précipitations passe de plus ou moins 550 millimètres à Mopti (confluent du Niger et du Bani) à 320 millimètres à Niafunké. La saison des pluies dure de juin à septembre et la variabilité interannuelle du volume des précipitations est élevée.
Les hauteurs moyennes de précipitations mensuelles calculées à partir des observations de neuf stations de la zone du delta (Ké-Macina, San, Tenenkou, Sofara, Mopti, Sah, Saraféré, Niafunké et Diré) donnent les résultats suivants : 490 millimètres pour la période humide 1962-66, et 330 mm pour la période sèche 1982-86, soit une moyenne générale, toutes années confondues, de plus ou moins 410 millimètres par an[6] se répartissant mensuellement comme suit :

Niveau moyen mensuel des précipitations dans la zone du delta intérieur du Niger (en millimètres/an)
Données calculées sur les périodes humide (1962-66) et sèche (1982-86)
Moyenne annuelle de 410 millimètres

Biologie

Le lamantin d'Afrique de l'Ouest ou Trichechus senegalensis

L'intensité de l'ensoleillement combinée avec l'abondance de l'eau et la richesse des sédiments font du delta intérieur du Niger une des écorégions biologiquement les plus productives de la planète. La richesse biologique de la zone du delta est extrêmement importante, aussi bien pour sa flore que pour sa faune. Les pâturages, envahis chaque année par quelque cinq millions de têtes de bétail lors de la saison sèche, offrent une biomasse record : de 5 à 20 tonnes de matière sèche par hectare.
On recense en outre 130 espèces de poissons et environ 350 espèces d'oiseaux, soit sédentaires, soit des migrateurs interafricain ou paléarctique comme la sarcelle d'été, le canard pilet ou encore le canard souchet.

La flore

On retrouve en bordure du Delta, les espèces sahéliennes tyiques comme l' Acacia albida (appelé balanzan en bambara), l' Acacia seyal (en), le Guiera senegalensis (en), le Boscia senegalensis (en) (ou Aizen), le Combretum aculeatum, le Cenchrus biflorus, le Leptadenia pyrotechnica. La savane inondée comporte une série d'espèces liées aux milieux humides : Crataeva religiosa, Andropogon gayanus, Vetiveria nigritiana. Les régions inondées plus de six mois par an, sont le domaine de la formation typique du delta : le borgou constitué d'Echinochloa pyramidalis et d'Echinochloa stagnina. On trouve aussi des forêts inondables d'Acacia kiirki, celles-ci constituant le refuge des hippopotames et des lamantins, aujourd'hui devenus fort peu nombreux.

Parmi les espèces vulnérables ou menacées d'extinction au niveau du delta, il faut citer le Borassus aethiopium (dont le bois a servi pour la construction de la mosquée de Djenné), le palmier doum d'Égypte, l'Andropogon gayanus, la Vetiveria nigritiana, l'Echinochloa stagnina et l'Echinochloa pyramidalis, l'Acacia albida et plusieurs espèces de Combretum.

La faune

Les oiseaux

Le delta intérieur du Niger fait partie des zones humides les plus riches d'Afrique de l'Ouest du point de vue ornithologique. C'est la plus grande zone d'hivernage de l'Afrique de l'Ouest. 132 espèces d'oiseaux d'eau ont été répertoriées. Le delta est aussi un lieu de rassemblement pour les espèces éthiopiennes qui viennent s'y reproduire.
On constate la présence de plusieurs espèces vulnérables, menacées ou rares. Ces espèces sont notamment l'Aigrette ardoisée (Egretta ardesiaca), l'Ibis sacré (Threskiornis aethiopicus), la Spatule d'Afrique (Platalea alba), l'Ouette d'Égypte (Alopochen aegyptiacus), l'Anserelle naine (Nettapus auritus), le Talève sultane (Porphyrio porphyrio), la Glaréole grise (Glareola cinerea), la Bécassine double (Gallinago media) et la Sterne naine (Sterna albifrons). Il en va de même pour des espèces comme le Marabout (Leptoptilos crumenuferus) et la Grue couronnée (Balearica pavonina) qui se raréfient suite notamment au braconnage.

Parmi les oiseaux d'eau, on a recensé un nombre important de combattants variés (Philomachus pugnax), de guifettes leucoptères (Chlidonias leucopterus) et de cormorans africains (Phalacrocorax africanus).

Les reptiles

Comme dans bien des espaces aquatiques tropiquaux, le delta intérieur du Niger possède une faune reptilienne abondante. On remarque particulièrement le python de Seba (Python sebae) et le varan du Nil (Varanus niloticus). Les cobras (dont le Naja haje) et les vipères dont la très dangereuse vipère heurtante (Bitis arietans) sont nombreux sur certains sites.
Certains reptiles ont eu et ont toujours une grande importance économique, tels les varans. D'après les observations de la DNAER (Direction nationale de l'aménagement et de l'équipement rural) datant de 1996, 300 000 à 500 000 varans sont capturés annuellement et les peaux expédiées à Bamako pour y être travaillées ou exportées.
Parmi les reptiles devenus rares : le crocodile du Nil (Crocodylus niloticus) et la tortue terrestre sillonnée (Geochelone sulcata). Cette dernière est considérée comme espèce menacée.

Les poissons

L'ichtyofaune du delta est nombreuse et variée. On a recensé près de 140 espèces de poissons dans le fleuve, dont 24 sont endémiques. On y trouve plusieurs espèces des genres Alestes (dont l’Alestes baremoze soudaniensis), Bagrus (en) (des poissons-chats dont le Bagrus bayad), Clarias (en), Citharinus, Heterobranchus (en), Poisson tigre goliath, Lates, Mormyrus, ainsi que le Distichodus rostratus, le Distichodus brevipinnis, le Labeo senegalensis, le Synodontis batensoda, les Tilapia galileo et nilotica.

Économie

Les trois grandes activités dans le delta sont la pêche, l'élevage (bovins, ovins et caprins) et l'agriculture. À cela s'ajoutent la cueillette, et aussi le tourisme et l'artisanat.

La pêche

Le delta intérieur du Niger est la principale zone de pêche du Mali, représentant 80 à 90 % de la production nationale. Les bonnes années lorsque l'inondation est maximale, le niveau annuel des prises peut s'élever à 130 000 tonnes. En cas d'année sèche (comme 1984), elles se limitent à 40 000 tonnes, voire moins.


Notes et références

Articles connexes

Liens externes



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