Bataille de Paris (1814)

Bataille de Paris (1814)
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Bataille de Paris
Russparis.jpg
L'entrée des troupes russes à Paris
Informations générales
Date 30 - 31 mars 1814
Lieu Paris
Issue Victoire des coalisés
Belligérants
Drapeau de l'Empire français Empire français drapeau du Royaume de Prusse en 1803 Royaume de Prusse
Flag of Russia.svg Empire russe
Drapeau: Empire d'Autriche Empire d’Autriche
Drapeau de la Bavière Royaume de Bavière
Flagge Königreich Württemberg.svg Royaume de Wurtemberg
Flagge Großherzogtum Baden (1891-1918).svg  Grand-duché de Bade
Commandants
Joseph Bonaparte

Puis :
Auguste Marmont
Joseph Mortier
Alexandre Ier de Russie
Frédéric-Guillaume III de Prusse
Karl Philipp de Schwarzenberg
Gebhard von Blücher
Michel Barclay de Tolly
Prince héritier de Wurtemberg
Forces en présence
33 500 hommes[1] 130 700 hommes[2]
Pertes
6 000 morts, blessés ou prisonniers 18 000 morts ou blessés
Sixième coalition
Batailles
Campagne de Russie (1812)

Mir — Moguilev — Ostrovno — Kliastitsy — Smolensk — 1re Polotsk — Valutino — Moskova — Moscou — Winkowo — Maloyaroslavets — 2e Polotsk — Czaśniki — Viazma — Smoliani — Krasnoi — Bérézina


Campagne d'Allemagne (1813)
Dantzig — Lützen — Bautzen — Hoyerswerda  — Gross Beeren — Katzbach — Dresde — Kulm — Dennewitz — Leipzig — Hanau — Sehested


Campagne de France (1814)
Metz —Brienne — La Rothière

Campagne des Six-Jours : Champaubert — Montmirail — Château-Thierry — Vauchamps
Mormant — Montereau — Bar-sur-Aube — Craonne — Laon — Reims — Arcis-sur-Aube — Fère-Champenoise — Paris
Front italien : Mincio

La bataille de Paris qui s'est déroulée le 30 mars 1814 a opposé l'armée française aux forces européennes alliées contre l'Empire de Napoléon. La défaite française marque la fin des opérations militaires de la Campagne de France et conduit à la première abdication de Napoléon puis la Restauration des Bourbons.

Sommaire

Prélude

Après la bataille de Leipzig, Napoléon Ier rentre en France avec une armée battue. L'Europe tout entière est à ses trousses : 700 000 Russes, Prussiens, Autrichiens, Suédois, Bavarois, Wurtembergois, Hollandais, Allemands, et même Suisses franchissent le Rhin et marchent sur Paris pendant qu'Anglais, Espagnols et Portugais franchissent les Pyrénées. Trois armées coalisées forment la menace principale sur le Rhin :

  • La Grande Armée de Schwarzenberg qui franchit le Rhin par la Suisse et marche sur Paris par Langres, Troyes et la rive gauche de la Seine.
  • L'Armée de Silésie de Blücher qui franchit le Rhin à Mayence et marche sur Paris par la Lorraine, Reims et la rive droite de la Marne
  • L'Armée de Suède de Bernadotte qui traverse le Rhin en Hollande et marche sur Paris par la Belgique, Laon et la rive gauche de l'Oise.

Au terme d'une brillante mais désespérée Campagne de France, Napoléon Ier ne parvient pas à repousser les coalisés hors de Paris. Après la bataille indécise d'Arcis sur Aube, Napoléon décide d'abandonner la défense de la capitale pour marcher plein Est afin de rallier les nombreuses troupes en garnison dans les places alsaciennes mais aussi pour couper la route de la Suisse à la grande armée coalisée et celle de Mayence à l'armée de Silésie. Mais contrairement aux plans de Napoléon, les coalisés ne le poursuivent pas dans sa marche vers l'est. Au contraire, ils marchent droit sur Paris et franchissent la Marne à Meaux. Car il leur reste la ligne de Belgique par laquelle est venue l'armée de Suède.

Face aux armées coalisées réunies, Napoléon a laissé les faibles corps des maréchaux Marmont et Mortier pour couvrir la capitale. Il y a aussi les troupes en formation dans les dépôts de Meaux, Paris, Fontainebleau et Versailles. Et enfin la garde nationale parisienne est là en dernier recours. Mais la défaite de Fère-Champenoise va précipiter la retraite des maréchaux sur Paris qui n'a pas été mis en état de défense.

S'étant aperçu de la marche des coalisés sur Paris à la bataille de Saint-Dizier, Napoléon accours à marches forcées par la rive gauche de la Seine. Mais il a trois journées de marche de retard sur les troupes coalisées. Paris doit tenir sans lui jusqu'au 1er avril.

Plan des forces en présence

Plan des coalisés

Les coalisés n’ont qu’un seul objectif : entrer dans Paris au plus tôt. Ils ont pour cela deux méthodes : forcer les portes de la ville et prendre la ville d’assaut, ou alors battre l’armée française en dehors des remparts puis bloquer les portes afin d’obtenir la reddition de la capitale. Les souverains coalisés, pour des raisons politiques, choisissent la deuxième option, tout en n’écartant pas la première si nécessaire. Delà, Schwarzenberg met en place un plan d’attaque relativement simple puisque il repose essentiellement sur l’énorme disproportion des forces. Il veut envelopper Paris par la rive droite sous ses immenses armées. Blücher, dont les troupes sont au Bourget, est chargé de mener l’attaque par la droite. Langeron doit marcher sur St Denis, Clichy puis sur Montmartre et le bois de Boulogne. York et Kleist doivent prendre Aubervilliers, puis La Villette et la Chapelle. Woronzow reste en réserve pour appuyer l’une des deux colonnes en cas de besoin. Au centre, Rajewski, appuyé par les réserves des gardes russe et prussienne, doit s’emparer des hauteurs de Romainville puis marcher sur Belleville. À gauche enfin, Wurtemberg et Giulay doivent marcher sur Nogent puis se séparer pour l’un marcher sur St-Maur et Charenton, l’autre sur Vincennes et Charonne.

Schwarzenberg espère ainsi qu’avant la tombée de la nuit, il aura contraint l’armée française à se replier dans la capitale, à l’abri des murs. Il est persuadé que la ville se rendra à la première sommation. Il compte lancer ces deux ailes en avant aux alentours de 9 heures, de façon à pourvoir commencer le combat vers les 11 heures sur l’ensemble du front. La pression concentrique des coalisés devrait amener les Français à se replier après quelques heures de combat.

Plan français

Les Français n’ont plus qu’un seul objectif : combattre pour l’honneur[3]. Ils savent que plus rien n’empêchera les coalisés d’entrer dans Paris. Tout le monde ignore que Napoléon est en grandes marches pour sauver sa capitale[4]. Mais même si on l’avait su, il n'est pas certain qu’on ait pu s’opposer aux coalisés pendant les 48 heures nécessaires. Et quand bien même aurait-on pu tenir jusqu’à l’arrivée de Napoléon et sa petite armée, l'armée française resterait en infériorité. Tout était perdu, sauf l’honneur. Car si Paris s’apprête à subir le même sort que les armées françaises ont fait subir à Milan, Rome, Amsterdam, Vienne, Munich, Berlin, Varsovie, Madrid, et Moscou, il ne sera pas dit que la capitale de France sera à son tour tombée sans combats[5].

Dispositions et forces en présence

La bataille se déroule sur la rive droite de la Seine, du bois de Vincennes au bois de Boulogne. L'armée française prend une position défensive, le gros des troupes entre Montreuil et La Villette. L'armée coalisée, ayant franchi la Marne à Meaux, débouche par Rosny, Bondy et Le Bourget.

Total de l'armée française : 18 000 fantassins et 5 500 cavaliers. Les garnisons comptent 2 000 hommes (gardes nationaux et troupes de lignes). La garnison de Paris ne compte que pour 8 000 hommes. Total effectif participant à la défense de Paris : 28 000 hommes, 5 500 cavaliers et 129 pièces d’artillerie de position et environ 30 pièces de campagne.

Total de l'armée coalisée : 103 700 hommes et 27 000 cavaliers dont 63 200 hommes et 20 000 cavaliers en première ligne et 40 500 hommes et 7 000 cavaliers en réserve. À noter que l'extrême droite du général Langeron participera très peu à la bataille en raison du retard dans l'arrivée des ordres de marche.

La bataille

La Barrière de Clichy, toile d'Horace Vernet décrivant la défense de Paris le 30 mars 1814

La bataille de Paris peut être divisée en trois secteurs :

Secteur principal : Marmont

Vers 5 heures[6], les Maréchaux se mettent en marche pour gagner leurs positions. Marmont charge les troupes de Compans, qui sont au pied de la butte Chaumont, de marcher sur Pantin et Romainville pour permettre au 6e corps de se déployer dans ses positions. Il veut que la division Boyer s’empare de Pantin, Ledru vienne au Pré-Saint-Gervais et que Compans s’empare de Romainville.
Pantin et Romainville sont déjà aux mains de la division russe Helfreich depuis la veille. Pantin est occupé par la brigade Roth, Romainville par la brigade Laelin. Elles comptent chacune 1 600 hommes, soit 3 200 Russes pour s’opposer à une attaque de 5 600 Français.
Alors que les coalisés sont trois ou quatre fois plus nombreux que les Français, ils trouvent le moyen de se trouver en infériorité numérique sur le point central de leur dispositif. Le général de Barclay inconscient du danger, ne croyant pas une seule seconde que les Français prendraient l’offensive, applique tranquillement son plan d’attaque. Il n’a que le 6e corps Rajewski de disponible à Noisy-le-Sec et compte bien le déployer selon le plan vers 11H. En urgence, Barclay envoie les deux divisions du prince Eugène de Wurtemberg et la 2e division de cuirassier sur Pantin. Une seconde colonne composée de la division Mezenzow et de la cavalerie de Pahlen est envoyée occuper l’espace entre Bagnolet et Montreuil.

Il est bientôt six heures et les premiers tirailleurs de Boyer font le coup de fusil sur Pantin. Roth est contraint de replier ses voltigeurs derrière les murs du village. Boyer s’empare des premières maisons lorsque le corps d’Eugène de Wurtemberg arrive à la rescousse. Voyant qu’il n’a plus aucune chance de s’emparer du village, Boyer rebrousse chemin et vient se replacer un peu en avant des Maisonnettes, à la droite de la division Michel qui vient juste d’arriver. Il est six heures passées quand l’avant-garde du prince Eugène de Wurtemberg arrive en vue des Maisonnettes, sur la grande route d’Allemagne. Mortier, qui s'y trouve avec l’état-major de la division Michel, fait ouvrir le feu par ses canonniers. La bataille de Paris vient de commencer.

De son côté, Ledru est déjà en position aux Prè-Saint-Gervais. Compans arrive en vue de Romainville. Le russe Laelin appelle aussitôt à l’aide à sa gauche et à sa droite. Mezenzow, arguant ses ordres formels de marcher sur Montreuil, refuse de se porter un peu plus sur sa droite pour soutenir la position de Romainville. Eugène de Wurtemberg de son côté se montre plus coopératif et envoie aussitôt sa 3e division. Elle arrivera à Romainville juste au moment ou le général Compans commençait à prendre ses dispositions pour l’attaque du village. Devant le nombre, le Français est contraint d’y renoncer.

La division Lagrange arrive en colonne de marche sur Romainville par la route de Bagnolet. Déjà on aperçoit les tirailleurs de Mesenzow qui se déploient en vitesse à la droite village. La division Szaszafskoy arrive elle aussi, débouchant en direction du Bois de Romainville où quelques tirailleurs ont déjà pris position. Lagrange est contraint de stopper sa marche pour déployer sa division en ordre de bataille. Cinq minutes plus tard, 8 000 hommes lui font face. Lagrange renonce à engager le combat mais il ne recule pas d’un pouce pour autant. Ce qui permet de gagner le temps nécessaire au restant du 6e corps pour se déployer. La division Arrighi vient à Malassis sur la droite, en avant de Bagnolet. Les deux divisions de cavalerie se déploient encore plus à droite, couvrant Montreuil. La division Ricard reste en réserve au Parc de Bruyères. L’artillerie de campagne du 6e corps (environ une vingtaine de pièces) est en partie déployée sur la butte des Deux-Tourelles.

Il est 7 heures. Mortier a lui aussi pris ses positions. Pour l’instant, l’ennemi n’est en vue que du côté de Pantin et de Romainville. Marmont choisit ce moment pour se lancer à l’assaut de ces deux villages avant que d’autres troupes ne viennent renforcer les forces coalisées. Lagrange et Compans sont chargés de l’attaque de Romainville, le premier par la route de Belleville, le second par le bois de Romainville. Boyer de son côté doit s’emparer de Pantin. La division Lagrange entre donc au contact avec la division Mezenzow, dont une partie seulement est déployée en ordre de bataille. Surpris, les Russes sont contraints de se replier jusqu’au parc de Romainville, en avant du village. Dans le même temps, Compans par une attaque soudaine parvient à repousser la division Szaszafskoy hors des bois. Les Russes se replient au niveau du village de Romainville. De son côté, Boyer a poussé ses tirailleurs sur sa droite pour contourner le village de Pantin pendant qu’il attaque de front avec le restant de sa division. Si l’attaque principale échoue, les tirailleurs parviennent à s’emparer des premières maisons et à s’y maintenir. Refoulé de toutes parts, sans que pour autant sa position soit critique, le général Barclay se décide à la contre-attaque. Les cuirassiers de Kretov sont envoyés balayer la plaine de Pantin. Mais la nature du terrain, faite de vignes, de haies et de ruisseaux empêche une attaque efficace. Les tirailleurs de Boyer suffisent à repousser cette contre-attaque. Pendant deux heures, les combats vont se poursuivre avec acharnement. Vont se succéder attaques françaises, contre-attaques russes, longues périodes de pilonnage de l’artillerie puis de nouveau attaques de part et d’autre. Compte tenu de l’infériorité numérique française, on peut considérer que le combat stationnaire sur cette partie du front tourne plutôt à l’avantage des Français.

Vers 9 heures, les combats redoublent d’intensité. Barclay vient de recevoir de nouveaux renforts. Les réserves russes et prussiennes viennent d’arriver à Bondy. Aussitôt la division de grenadier Paskiewicz est dirigée sur Romainville en appui de Mesenzow. Czoglokow à la tête de la 2e division de grenadiers russe est envoyé en soutien de Szaszafskoy vers le bois de Romainville. La garde prussienne est envoyée sur Pantin. Une demi-heure plus tard, Barclay reprend la main et passe à l’offensive générale. Mesenzow marche sur Montreuil afin de déborder la droite française. Szaszafkoy est chargé de s’emparer une fois pour toutes du bois de Romainville et d’en chasser les Français. Il est appuyé par six bataillons de grenadiers de la division Czoglokow (soit 2 400 hommes). Deux de ces bataillons doivent prendre la route de Romainville, les quatre autres longent le bois. Pisznitski de son côté doit prendre position entre Saint-Gervais et le bois de Romainville. Aussitôt Marmont réagit. Il envoie la brigade Fournier (600 hommes de la division Ricard) contrer la colonne de grenadiers. Il demande également à la division Ledru (qui se trouve à Prè-Saint-Gervais) de venir soutenir Compans dans le bois de Romainville. Ainsi Fournier part à l’attaque, à un contre trois. Il culbute les deux bataillons de grenadiers qui venaient par la route. Il engage ensuite les 4 bataillons sur sa gauche. Il parvient à les stopper sans les refouler pour autant. De son côté Ledru s’est mis en marche. Il tombe nez à nez avec la division Pisznitski que personne n’a vu venir. Heureusement, les Russes sont encore plus surpris que les Français. Ces derniers chargent à la baïonnette et parviennent à refouler les Russes qui se débandent. Ledru se remet aussitôt en marche pour soutenir Compans qui a perdu beaucoup de monde depuis le début de la bataille.

Il est dix heures. L’offensive russe a échoué. Mais la ligne française est fortement affaiblie. Le prince Eugène de Wurtemberg parvient à rallier la division Piznitski et la relance à l’attaque de Prè-Saint-Gervais. Cette position a été évacuée par Ledru qui n’y a laissé que deux faibles bataillons. Les Français sont vite chassés du village. Les Russes viennent d’ouvrir une brèche dans le dispositif français en séparant les corps de Marmont et de Mortier. Marmont réagit aussitôt. Il ne dispose que de la brigade Fabvier (300 hommes de la division Ricard) en réserve. Mais il n’a pas le choix. Il les lance à l’attaque des trois mille Russes. Au même moment, la batterie de 12 pièces de 12 qui se trouve sur la gauche de St-Gervais, celle des 4 pièces de 6 de la butte Beauregard et une demi douzaine de pièces de 12 de la division Ricard crachent leur mitraille sur la colonne russe. Décimés, les Russes tiennent pourtant leurs positions. À ce moment la brigade Fabvier les engage. Les Russes résistent. Nouvelles salves d’artillerie. Les Russes plient. Fabvier entre dans le village. La liaison entre les deux ailes est rétablie. Pendant ce temps, Paskiewciz et la cavalerie de Pahlen avancent toujours sur Montreuil, peu défendu. Seul Arrighi pourrait s’y opposer. Malgré plusieurs tentatives, il ne parvient pas à repousser les Russes. Il ne dispose pas de suffisamment de cavalerie face à celle de Pahlen. Du côté de Pantin, on se bat aussi avec acharnement. Boyer est reparti à l’assaut du village, soutenu cette fois par la brigade Secretant de la division Michel. L’attaque manque de peu de réussir. La garde prussienne débouche en courant au secours de la division Helfreich. Deux bataillons prussiens viennent renforcer la défense du village pendant que quatre autres, marchant par la gauche du canal de l’Ourcq débouchent sur les Maisonnettes, sur les arrières français. Boyer et Secrétant font demi-tour pour parer à cette nouvelle menace. Mais la garde prussienne, dont toute la marche s’est faite sous le feu soutenu de la batterie des Maisonnettes, a subi de lourdes pertes et n’est plus en état d’attaquer. Elle se replie, ayant parfaitement accompli sa mission de diversion. Helfreich tente à son tour de repartir à l’attaque mais les canonniers des Maisonnettes détournent rapidement leur feu sur ces nouveaux assaillants. Russes et Prussiens finissent par se replier à l’abri du village de Pantin.

Il est onze heures. Barclay a fait entrer toutes ses troupes (à part les divisions Rosen, Udom et Duka) sans obtenir d’autres avantages que de fixer le duc de Raguse. Même s'ils sont épuisés et fortement affaiblis, les Français n’ont pas lâché un pouce de terrain. Barclay décide de suspendre ses attaques. En effet, ni Blücher à sa droite ni Wurtemberg à sa gauche ne sont encore entrés en ligne. Si Marmont recevait d’éventuels renforts et qu’il parvenait à bousculer les Russes affaiblis, la grande armée coalisée ne pourrait pas résister. Mais Marmont est bien loin de penser à une contre-attaque. Il n’en a tout simplement pas les moyens. Ses troupes sont harassées et il n'a pas de réserve de troupes. De plus, Langeron est en train de se déployer dans la plaine de Saint-Denis. Mortier va bientôt être engagé. Ce n’est pas le moment de risquer une attaque suicide. D’autant plus que Marmont vient de recevoir l’ordre écrit de Joseph Bonaparte : il doit capituler plutôt que de laisser forcer les portes de Paris[7]. Ce sera la dernière participation de Joseph Bonaparte qui quitte Paris dans la foulée.

Il est midi et demi. On ne se bat plus qu’au sud, du côté de Vincennes. Ailleurs, c’est le calme avant la tempête. Les coalisés n’attendent plus que Langeron arrive devant Montmartre et Wurtemberg devant Bercy pour reprendre l’offensive. Pendant se temps, on réorganise les troupes. Barclay positionne Gorczakow, avec les divisions Mesenzow et Heilfreich à Montreuil. Ils doivent attaquer Charonne dès la reprise de l’offensive. Les deux divisions de grenadiers basées à Bagnolet doivent marcher sur Bellevile et Ménilmontant. Le prince Eugène de Wurtemberg avec Szaszafskoy et Pisznitzky et la division Kretow doivent aussi marcher sur Belleville mais par le bois de Romainville. Enfin, la division Udom et la garde prussienne doivent déboucher de Pantin. Pahlen doit couvrir l’attaque de Charonne. La réserve de cavalerie et la division Rosen restent en réserve, un peu en arrière de Pantin. De son côté Marmont réorganise lui aussi ses troupes. Les combats précédents l’ont conduit à disposer ses divisions en tirailleurs. Les différentes contre-attaques russes ont fini par disperser ses divisions un peu dans tous les sens. Il fait donc rassembler toutes ses troupes, toujours dans les mêmes positions que celles prévues par l’ordre de bataille.

À 13 heures 15, voyant les deux ailes coalisées entrer progressivement en action, Barclay se décide à reprendre l’offensive contre Marmont. Pisznitzky, appuyé par Czoglokow, repousse la brigade Chabert qui défendait le bois de Romainville. Les deux divisions s’avancent vers Belleville. Voyant que l’ennemi avance sur tous les points couverts par ses troupes, le duc de Raguse tente une ultime contre-attaque. Ne disposant plus que de la division Ricard comme seule et unique réserve, Marmont désigne la brigade Chabert pour lancer la contre-attaque sur le centre coalisé, c'est-à-dire sur Pisnitsky. Chabert se met en marche. Mais il est pris en flanc par l’artillerie de la division Czoglokow qui lui cause de grands dommages. Une colonne de grenadiers s’avance à la rencontre des Français. Ceux-ci se mettent en ligne pour faire face à ces nouveaux arrivants. Mais ils se font charger par les cuirassiers de Kretow. La brigade Chabert se débande sous le choc. Marmont, qui se trouvait au milieu de la colonne française a son cheval tué sous lui. Il doit fuir à pied. Chabert n’aura pas cette chance et devra rendre les armes. Les fuyards français entraînent dans leur fuite le restant de la division Ricard. Heureusement Compans lance une attaque sur les arrières des grenadiers russes, immobilisant la colonne. Le colonel Gheneser, qui se trouve au parc des Bruyères avec deux cents hommes, se lance lui aussi contre la colonne, parvenant à la refouler. Les cuirassiers russes sont contraints à faire demi-tour. Pendant ce temps, à Pantin, Secrétant et Boyer sont attaqués par la garde prussienne, la division Udom et la division Klux du corps de Kleist. Les Français abandonnent le village qu’ils occupaient à moitié et se replient sur les Maisonnettes, protégés par l’artillerie. Le général Michel, qui était venu partager le sort de ses soldats, est grièvement blessé. Il doit se retirer, laissant le commandement provisoire à Secrétant. De son côté Arrighi, avec l’aide de la cavalerie, parvient à repousser les attaques des deux divisions de Gorzakow qui tentent de s’emparer de Charonne par la route de Montreuil. Arrighi est également soutenu par la 7e, la 8e et la 9e légion de la garde nationale, soit 600 hommes. Il y a également la batterie de la butte Fontarabie qui pilonne sans relâche les colonnes russes qui s’avancent à découvert.

Il est 14 heures 30. Chassé de ses positions initiales, le duc de Raguse décide de prendre une seconde ligne de défense. Sa cavalerie et Arrighi, qui combattent toujours en avant de Charonne, reçoivent l’ordre de se replier pour ne pas être coupés du restant de l’armée. La cavalerie prend position dans le vallon de Charonne, entre cette ville et Ménilmontant. Arrighi se place au parc Saint-Fargeau, près de Ménilmontant. Il est couvert sur sa droite par la batterie du Mont-Louis. Les 8e et 9e légions sont renvoyées du côté de Bercy. Seule la 7e reste pour défendre la butte Fontarabie et sa batterie qui couvre la route de Charonne à Paris. Ricard, qui a réussi à rallier sa division, est au pied du Télégraphe (devant Ménilmontant). À sa gauche, Lagrange et Ledru couvrent l’espace entre Ménilmontant et Belleville. Compans est devant Belleville, étendant sa gauche jusqu’au Prè-Saint-Gervais. Ce village est occupé par la division Boyer qui s’étend sur sa gauche jusqu’aux Maisonnettes où se trouve la brigade Secrétant. Par ces nouvelles positions, Marmont abandonne définitivement tout son flanc droit. Désormais plus rien n’empêche les corps de Wurtemberg et de Giulay d’arriver aux portes de Bercy. S'ils parviennent à entrer, la ville sera officiellement forcée, c'est-à-dire susceptible d’être livrée au pillage. Dès ce moment là, Marmont sait que la bataille est donc perdue et que seule une convention pourra sauver la ville. Il décide tout de même de poursuivre le combat. Pour son honneur. Pour ce lui de la France. Et il va être servi.

Barclay, qui occupe le parc de Bruyères, Bagnolet et Charonne, profite du mouvement de repli de Marmont pour rallier ses troupes en vue d’une nouvelle attaque. Gorczakow avec ses deux divisions doit attaquer les buttes de Fontarabie et de Mont-Louis. Les grenadiers de Paskiewicz et de Czoglokow doivent quitter Bagnolet pour attaquer respectivement Ménilmontant et Belleville. Le corps du prince Eugène doit avancer sur Prè-Saint-Gervais depuis le parc de Bruyères. Le corps de Yermolow, enfin réuni à Pantin, doit attaquer les Maisonnettes. Cette dernière attaque doit se faire conjointement avec celle de Kleist sur le même point. Une fois maîtresses de ce point, les deux colonnes se sépareront à nouveau. Kleist ira sur la Villette et Yermolow sur les arrières de Prè-saint-Gervais. Ainsi malgré les lourdes pertes essuyées depuis le début de la bataille (Barclay a déjà perdu 8 000 hommes sur 35 000), il reste plus de 27 000 Russes et Prussiens pour refouler les 8 000 Français de Marmont (dont 2 000 cavaliers de peu d’utilité dans ces combats urbains).

Il est 15 heures 30 lorsque Barclay reprend l’offensive. Heilfreich attaque la butte de Fontarabie. La 7e légion se met en tirailleurs et harcèle la colonne ennemie. Les Russes continuent leur progression malgré les boulets qui la transpercent de part en part. Les tirailleurs se replient. Puis la batterie française crache sa mitraille. Les Russes sont stoppés net. Les tirailleurs de la garde nationale reprennent leurs tirs. Les Russes se replient. Au même moment la division Mezenzow attaque la butte Mont-Louis. La colonne russe gravit la butte sous les tirs croisés de l’artillerie et des fusiliers de la division Arrighi. La cavalerie Chastel vient même tenter une charge contre la colonne. Mais elle est repoussée. Mezenzow se remet en marche malgré les 6 pièces qui le bombardent à bout portant. Les Russes vont s’emparer de la butte. Arrighi veut mener une attaque de flanc avec sa division. Mais il est lui-même pris en flanc par les grenadiers de Pasikiewicz qui l’attaquent à Ménilmontant après avoir facilement repoussée la faible division Ricard. Arrighi est contraint de se replier sur Belleville. Il se place, avec les débris de la division Ricard, entre cette ville et les murs de Paris. Mezenzow s’empare de l’artillerie sur la butte Mont-Louis. Heilfreich peut donc reprendre sa marche en avant. Il disperse la 7e légion et s’empare de l’artillerie de la butte Fontarabie. La 7e légion se replie en catastrophe derrière les murs de Paris. La Garde Nationale parisienne s’est couverte de gloire.

Pendant ce temps, Czoglokow attaque Belleville de front. Les divisions Lagrange et Ledru sont contraintes de se déporter sur leur gauche pour couvrir Belleville. Ils luttent vaillamment et parviennent à repousser l’attaque. Au moment où Arrighi se replie de Ménilmontant pour prendre position sur leur droite, les deux généraux français tentent une sortie pour dégager Belleville. Mais les Russes sont trop nombreux. La contre-attaque échoue. De son côté Boyer est submergé par le nombre au Prè-Saint-Gervais. 6 000 Russes l’attaquent de front et 6 000 autres l’attaquent par le côté de Pantin, sur ses arrières. Boyer ne peut sortir du village sans risquer d’être chargé par les cuirassiers de la garde russe. Il se bat, profitant des retranchements du village et de l’appui de plusieurs batteries. Au moment où il allait se trouver encerclé, Compans, qui se trouve sur sa droite, lance une charge de ses lanciers polonais sur les Russes qui se trouvent sur les arrières du village. 150 lanciers parviennent à faire plier plus de trois mille hommes. La route est libre. Boyer quitte le village, faisant canonner l’artillerie qu'il abandonne pour couvrir sa retraite. Il vient se placer du côté de Belleville.

Pendant que Marmont est repoussé de toutes parts, Secrétant, qui tient depuis le matin le centre français, est lui aussi attaqué par une véritable marée humaine. Venant de Pantin mais aussi de la ferme de Rouvroy, les Russes et Prussiens ne sont tenus à distance que par l’artillerie des Maisonnettes qui crache sa mitraille, sans interruption depuis 11 heures. Mais les munitions commencent à manquer. Le dernier caisson de munitions était d’un calibre inférieur, donc inutilisable. L’artillerie française se tait. Les Prussiens partent à l’assaut. Sécrétant, hors d’état de résister, est culbuté vers la porte de Pantin. Le colonel Christophe, de la division Ornano tente une charge pour dégager l’infanterie. La colonne de cavalerie française est à son tour chargée en flanc par la cavalerie de Katzler. Les cavaliers français fuient au milieu de l’infanterie qui se réfugie derrière la porte de Pantin. Yermolow fait occuper les Maisonnettes et s’empare de l’artillerie. Il est bombardé par l’artillerie des buttes Chaumont et Beauregard. Dans la foulée, il se lance à l’assaut de la butte Chaumont, couverte uniquement par la 5e et 6e légion de la garde nationale. Malgré leur défense acharnée, les 400 gardes nationaux sont contraints d’abandonner la butte et son artillerie.


Il est 16 heures trente. Le corps de Marmont est complètement resserré en arc de cercle au tour de Belleville. Le Prince Eugène, débouchant des Prè-Saint-Gervais et refoulant les divisions Compans et Boyer, parvient jusqu’aux premières maisons de Belleville. Au même moment les tirailleurs de Yermolow arrivent sur les arrières de Belleville par la butte Chaumont. Marmont voit le danger : il va se trouver encerclé dans Belleville. Malgré l’ordre formel qu’il a reçu de capituler plutôt que de livrer la capitale au pillage, il refuse pourtant de rendre les armes. Ralliant une poignée de braves (pour la plupart il s’agit de blessés qui se sont réfugiés dans le village ou d’unités qui ont été coupées de leurs divisions), le Duc de Raguse, suivit des généraux Ricard, Pelleport et Boudin, se met à la tête de la colonne. À pied, sabre au clair, il se lance dans une contre-attaque furieuse contre les troupes du Prince Eugène. Avec sa colonne d’environ trois cents hommes, il parvient à refouler les deux divisions russes, permettant à Lagrange et Boyer de reprendre leurs positions en avant du village. Poursuivant sa charge, Marmont se retourne contre les tirailleurs de Yermolow et les chasse de la plaine. Marmont, dont l’uniforme est criblé de balles, chute lourdement et reçoit une contusion. Les généraux Ricard et Pellport sont eux aussi blessés. Les deux tiers de sa colonne sont hors de combat. Mais Belleville est dégagé.

Il est bientôt 17 heures. Marmont, de retour à son QG reçoit les derniers rapports. Il se décide à capituler. Il envoie son aide de camp au Duc de Trévise pour l’informer de ses intentions. Mortier lui fait répondre qu’il n’a aucune autorisation de capituler, que c’est au Roi Joseph de traiter de tels sujets. Marmont lui fait suivre l’autorisation écrite que lui a donné Joseph. Le même ordre a été envoyé à Mortier mais il ne l’a jamais reçu. Mortier, à la lecture de l’ordre du Roi Joseph, donne son accord pour une négociation.

Il est 17 heures 15, on se bat toujours. Marmont envoie un de ses aides de camp au général Barclay demander une suspension d’armes. Mortier fait de même de son côté et envoie un officier à Langeron. Les maréchaux demandent une suspension immédiate des hostilités pour une durée de deux heures, le temps de négocier une convention, fondée sur l’évacuation de la capitale par les forces françaises.

Il est 17 heures 30, l’aide de camp de Marmont revient avec l’accord de Schwarzenberg. On envoie aussitôt des aides de camp sur tout le front pour faire cesser les tirs. Ils ne cesseront qu’aux alentours de 18 heures.

Secteur 2

À 8 heures, Langeron débouche par la route du Bourget. Déjà son avant-garde attaque la brigade Robert (de la division Michel) à Aubervilliers. Robert tient les Russes à distance du village.

À 11 heures 30, de nouvelles troupes sont en vue. Il s’agit des corps de Kleist, York et Woronzow qui débouchent par la route des Petits Ponts, droit sur Pantin. Mortier fait prendre de nouvelles positions à ces troupes. La brigade Secrétant reste à Rouvroy pour aider le Marmont à bloquer Pantin. La division Curial est à la porte de Pantin, en réserve. La brigade Robert de la division Michel est en train de se replier d’Aubervilliers vers La Chapelle. La Chapelle est occupée par Charpentier. La division Christiani est dans les retranchements entre La Chapelle et la Villette. La cavalerie est en première ligne, devant les retranchements. Mortier ne peut plus rien faire pour empêcher le déploiement de l’ennemi dans la plaine de Saint-Denis. Mais les Prussiens ne perdent pas de temps. Déjà, l’avant-garde de Kleist, composée de 3 000 hommes et de 2 000 cavaliers, s’empare de la ferme de Rouvray que la brigade Secrétant à tout juste le temps d’évacuer, prise en flanc. Dans la foulée, les Prussiens franchissent le pont du canal de L’Ourcq et débouchent sur les Maisonnettes. La garde prussienne, toujours réfugiée dans Pantin, en profite pour se porter en avant. Mais une fois de plus la batterie française des Maisonnettes s’en donne à cœur joie. Les Prussiens se font mitrailler à bout portant. Ils doivent renoncer. La garde retourne se mettre à l’abri dans Pantin. Kleist fait replier ses troupes derrière la butte de Rouvray, à l’abri des canons français.

À midi, les deux corps de Kleist et de York sont arrivés à hauteur de Pantin, au nord du canal de L’ourcq. La division du Prince Guillaume et la cavalerie du corps de York restent en position sur la butte Rouvray. Horn et les divisions de Kleist se dirigent sur Aubervilliers où ils doivent franchir le canal de St-Denis puis redescendre sur La Chapelle. Langeron est envoyé sur Saint-Denis. Il doit bloquer la garnison qui s’y trouve (que les coalisés croient forte de 4 000 hommes alors qu’il n’y en a que 500) puis franchir le canal pour gagner Saint-Ouen. Il devra ensuite attaquer Montmartre par le côté de Clichy. Langeron forme son corps en deux colonnes. Rudzewicz à droite et Kapczewicz à gauche.

Il est 12 heures 45. Kleist fait avancer une batterie sur la butte de Rouvroy pour canonner celle des Maisonnettes. La canonnade est terrible et se soutiendra encore longtemps.

À 15 heures, toutes les troupes de Blücher entrent en contact avec le corps de Mortier sur la ligne La Villette - La Chapelle. Seul Langeron, qui aux alentours de Clichy, ne combat pas encore. Le prince Guillaume de Prusse et Woronzow marchent par les deux rives du canal Saint-Denis (à sec en raison de travaux) sur La Villette, défendue par Curial. Après un lourd combat, le prince prussien parvient à forcer le passage du pont du canal, opérant sa jonction avec les troupes de Woronzow. Curial doit abandonner la partie supérieure du village avec toute son artillerie. Les Prussiens en profitent pour s'emparer du pont qui franchit le canal de l'Ourcq. La jonction entre le centre et la droite coalisée est désormais établie Pendant ce temps la division Horn et le corps de Kleist sont devant la Chapelle défendue par la division CHarpentier.

À 15 heures 30, Mortier lance la division Christiani à l'assaut de la Villette. Il doit absolument reprendre ce village pour couper le centre et la droite ennemie. Les grenadiers français, appuyés par la brigade Gros, chargent à la baïonnette, traversent le village, culbutent les Russes qui débouchaient du pont, franchissent le pont au pas de charge. La charge des grenadiers a été si violente et si rapide que la brigade Gros n'a pas pu suivre, occupée à rassembler les prisonniers et à s'étendre sur la rive gauche du canal. Les grenadiers se trouvent encerclés sur l'autre rive du canal, coupés du pont. Sommés de ce rendre, les 500 grenadiers répondent par une charge à la baïonnette et franchissent de nouveau le pont. La brigade Gros parvient, elle aussi à la baïonnette, à forcer les Russes à se replier, abandonnant 4 pièces de canons.

À 16 heures, le Prince Guillaume, qui a rallié ses troupes et a reçu le renfort des gardes russes et prussiennes, décide de contourner la Villette en débouchant par les Maisonnettes (qui a été évacuée par la brigade Sécrétant) sur les arrières de La Villette. Menacé d'encerclement, Mortier donne l'ordre de repli général, de la Villette d'abord, puis de la Chapelle. Les Français se replient en bon ordre, en échiquier, jusqu'aux portes de la capitale.

À 17 heures, le Général Langeron arrive à Saint-Ouen. Il détache le général Emmanuel, une division d'infanterie et l'artillerie à cheval, vers le bois de Boulogne pendant qu'avec le gros de ses troupes il marche sur Montmartre, seulement contrarié par la faible cavalerie d'Ornano et de Roussel.

À 17 heures 30, Langeron reçoit l'avis de cessez-le-feu. Mais cet immigré français au service des armées russes veut être le premier à entrer dans Paris. Pour des raisons politiques évidentes, Paris doit être libéré par un royaliste français, fût il aux ordres des puissances étrangères. Le Général Emmanuel, arrivé à la porte Maillot défendu par la Garde Nationale et la cavalerie d'Orano, déborde la position en marchant sur la barrière de l'Étoile. Les légions de garde nationale qui se trouvaient sur la butte Montmartre descendent dans la plaine pour dégager les barrières menacées. Le maréchal Moncey, chevauchant de barrière en barrière, harangue ses gardes nationales et leur somme de tenir.

Vers 18 heures, les généraux russes de Rudzewicz et Kapczewicz marchent sur Montmartre défendu uniquement par 200 sapeurs pompiers, 100 vétérans et 7 pièces d'artillerie. Chargés à la baïonnette par plus de 10 000 Russes, les Français abandonnent la position et l'artillerie. Un peu plus tard, les Russes tentent de forcer la barrière de Clichy pour entrer dans la capitale. Moncey à la tête de 3 ou 400 gardes nationaux, appuyé par des civils sans armes, repousse l'assaut et fait dresser à la hâte des palissades en bois.

À 18 heures 30, Langeron reçoit un nouvel ordre formel de cesser les combats immédiatement. La bataille de Paris prend fin.


Secteur 3

Un peu après 10 heures et demi, le corps de Wurtemberg fait son apparition à Nogent-sur-Marne. En peu de temps il fait replier sans effort les quelques postes français qui se retirent en partie sur Vincennes, en partie sur St-Maur.

À 11 heures, Wurtemberg a rassemblé son IVe corps et la réserve de Hesse-Hombourg à Nogent-sur-Marne. Il est chargé d’une double mission : il doit chasser les Français de la rive droite de la Marne et attaquer le Duc de Raguse par le côté de Vincennes. La brigade Stockmayer et les grenadiers Weissenwolf doivent marcher à travers le bois de Vincennes pour arriver à Saint-Mandé. La seconde colonne, composée des trois divisions du général Franquemont doivent longer la Marne en direction de Saint-Maur, puis Charenton et enfin prendre Bercy. Pour couvrir le mouvement de flanc de l’armée austro-bavaroise, Barclay, qui commande le centre coalisé à hauteur de Romainville, envoie la cavalerie de Pahlen se déployer dans la plaine de Vincennes. C’est en voyant ces trois mille cavaliers menacer les portes de Paris défendues par les seules gardes nationales que le major Evain, qui commande la réserve d’artillerie de la barrière du Trône, décide de son propre chef de faire canonner cette cavalerie. Avec ses 14 pièces d’artillerie encore attelées, il se porte jusque vers Charonne. Trois pièces sont à peine mises en place que le Major Evain fait déjà ouvrir le feu. Pahlen, surpris, fait avancer sa propre batterie à cheval, et riposte. Mais Pahlen s’aperçoit bien vite que la batterie française n’est couverte par aucune troupe d’infanterie. Il fait charger sa cavalerie. Evain, voyant le danger, fait rembarquer tous ses attelages et tente de fuir. Mais les cosaques sont déjà là. Les canonniers, dont une majeure partie est issue de l’école polytechnique, s’enfuient, mise à part une poignée de braves qui se fait massacrer sur place. Les Russes s’emparent des canons qu’ils rapportent comme des trophées. Soudain, ils sont à leur tour chargés par deux régiments de cavaliers français (les lanciers polonais de la division Chastel et le 30e régiment de dragons de Bordessoulle). Au même moment, la 8e légion de la garde nationale (200 hommes qui étaient à la barrière du Trône) arrivent en renforts. Les cavaliers russes se replient, emportant avec eux quelques pièces. Les canonniers reviennent récupérer la petite dizaine de pièces que les Russes n’ont pas enclouées.

Il est midi. Toutes les troupes coalisées entrent petit à petit en ligne sur l’ensemble du front, creusant sans cesse l’écart numérique. De son côté Franquemont arrive devant Saint-Maur. Cette place est occupée par trois cent gardes nationaux et huit canons. Le village est également protégé par un tambour. Mais les troupes françaises s’attendaient à être attaquées par la rive gauche de la Marne. La veille, plusieurs détachements de cosaques s’étaient montrés par ce côté. Et personne ne les a prévenus que l’armée coalisée débouchait par la rive droite de la Marne. Les gardes nationaux ne se démontent pas pour autant. Comme à l’entraînement, on retourne en vitesse les canons, on se barricade comme on peut derrière le tambour qui se trouve donc à l’envers sur la rive gauche, on se retranche dans les quelques maisons. Mais face à 10 000 hommes, la résistance, bien que héroïque, est de courte durée. La garnison se replie sur la rive gauche, abandonnant une centaine hommes tombés sur le champ d’honneur et 6 pièces. Wurtemberg ne fait même pas poursuivre les survivants. Il préfère continuer sa route au plus vite sur Charenton.

À 14 heures, Wurtemberg arrive devant Charenton avec les divisions de Franquemont. La première colonne (Stockmayer et Weissenwolf) qui est passée au travers du bois de Vincennes arrive au même moment, n’ayant rencontré pour seul obstacle que le mur d’enceinte du bois de Vincennes qui, à lui seul, aura réussi à ralentir les coalisés de près d’une demi-heure. Stockmayer, qui a laissé un bataillon bloquer le château de Vincennes, prend position à mi-chemin entre Charenton et Saint-Mandé. Wurtemberg veut faire attaquer Charenton où se trouvent 450 Français, dont les élèves de la maison Alfort. Il fait longer la Marne par un bataillon de la division Döring. Le restant de cette division attaque de front. Trois bataillons de la division Koch doivent se porter sur leur droite, à hauteur de la route qui relie Saint-Mandé et Charenton. Là ils seront rejoint par quatre bataillons des grenadiers autrichiens de Weissenwolf. Ensuite ils se porteront contre Charenton. Dix mille hommes pour en chasser 450, certes retranchés. Et encore, les retranchements, comme à Saint-Maur, ont été prévus pour faire face à une attaque venue de la rive gauche de la Marne. Le tambour et l’artillerie se trouvent donc à l’envers. En vitesse et à la force des bras, on retourne l’artillerie et on tente de la porter en avant du village. Mais l’ennemi est déjà là. Les Français se battent avec acharnement et parviennent à repousser un premier assaut. Les Autrichiens font à leur tour avancer leur artillerie. Une batterie de 24 pièces réduit les quelques maisons fortifiées en ruines. Les Français évacuent et se retranchent derrière le tambour, à la tête du pont sur la rive gauche. Les cavaliers autrichiens chargent. Mais au moment où l’on veut faire sauter le pont, rien ne se passe. La mèche s’est probablement éteinte. Quoi qu'il en soit les cavaliers autrichiens déboulent au galop et forcent le tambour. Les Français, réduits à 300 hommes sont contraints de se disperser, pour ne pas dire déserter.

À 15 heures, les deux colonnes de Wurtemberg ont fait leur liaison. La cavalerie forme une ligne ininterrompue de Saint-Mandé à Bercy. L’infanterie est en seconde ligne. La division Trautenberg est au blocus de Vincennes. La moitié de la division Doring est restée en arrière pour occuper Charenton, Saint-Maur et Nogent-Sur-Marne. Le corps de Giulay arrive à Nogent. Il est dirigé sur Fontenay-en-Brie où il doit assurer la liaison avec Barclay. Ainsi, 10 000 hommes, 3 000 cavaliers, appuyés par une réserve de 14 000 hommes et 2 000 cavaliers sont aux portes de Paris. Face à eux, seules la 8e et la 9e légion de la garde nationale, soit 350 hommes, sont déployés en avant des barrières, principalement dans les faubourgs de Bercy. Les barrières même (celles du Trône et de Charenton) ne sont défendues que par 500 gardes nationaux et 8 pièces d’artillerie. Wurtemberg fait charger sa cavalerie pour chasser les 8e et 9e légions de Bercy. L’opération n’était pas douteuse et en quelques minutes les deux légions se replient derrière les remparts. Pourtant, Wurtemberg donne l’ordre de ne pas attaquer les barrières.

Il est 15 heures 30, les troupes du Prince de Wurtemberg cessent le combat. Seuls les canons de la garnison de Vincennes se font entendre sur cette partie du front. Contre tous les principes militaires, Wurtemberg ne force pas les portes qui sont pourtant largement à sa portée. Cette inaction ne peut découler que d’ordres formels émanant du Quartier Général pour des raisons politiques.

Bilan de la Bataille

L'armée française perdit, dans la bataille de Paris, 6 000 hommes (3 500 tués, 2 500 blessés et prisonniers). Les coalisés perdirent 18 000 hommes, 8 000 morts et 10 000 blessés, pas de prisonniers. L'armée française assure la garde intérieures des barrières, les alliés la garde extérieure. Le corps Mortier se retira par le Pont d'Austerlitz et la barrière de Fontainebleau jusqu'à Villejuif. Le corps du Marmont (auquel fut réuni celui du général Compans) resta toute la nuit sur les Champs Elysées avant de se mettre en marche à 4 heures du matin.
Les troupes du Prince Royal de Wurtemberg campent devant le bois de Vincennes, celles du centre entre Belleville e Mont-Louis, celles de Blücher à la Vilette, La chapelle et Montmartre enfin les gardes et réserves à Pantin et Romainville. Le Tsar donne l'ordre de doubler tous les feux de campement afin d'impressionner les parisiens. Le Général Barclay de Tolly est fait Feld-Maréchal sur le champ de bataille par le Tsar en personne.
La défaite française entraine la Capitulation de Paris puis l'entrée des armées alliées dans la capitale.

Capitulation de Paris

La veille de la bataille, au matin du 29 mars 1814, deux émissaires alliés (un aide de camp du Maréchal Blücher et un officier d'état major du Tsar de Russie) se présentent aux avant-postes du général Vincent (de la division Compans) dans les environs de Ville-Parisis. Ils se disent chargés par le Tsar et le Roi de Prusse de porter des propositions de paix au gouvernement à Paris. Ils ont également plusieurs courriers privés d'officiers émigrés français servant dans l'armée russe à destination de leurs famille. Soupçonnant ces émissaires de préparer un complot royaliste, le général Vincent, sur ordre du général Compans, fait renvoyer les émissaires et saisir les dépêches.

En fin d'après midi, apprenant la venue des émissaires aux avant postes, le Roi Joseph, Lieutenant Général de l'Empire et à ce titre commandant en chef de toutes les armées françaises, décide, après en avoir référé au conseil de Régence et au Conseil de la Défense de Paris, d'envoyer le Capitaine Ingénieur Peyre comme émissaire auprès des alliés afin d'écouter leurs propositions. Arrivé à Pantin, Peyre est arrêté comme espion par les cosaques car il n'a n'y trompette, ni ordre écrit prouvant son statut de parlementaire. Il passe la nuit en détention et ce n'est qu'au petit matin du 30 mars qu'il est conduit directement auprès du Tsar Alexandre. Ce dernier charge Peyre de réclamer aux autorités françaises la capitulation de la ville de Paris : "N'oubliez pas de dire, puisque [Paris] veut se défendre, que je serais toujours disposé à traiter lors même que l'on se battrait dans les faubourgs mais que si l'enceinte de la ville était forcée l'épée à la main, nous ne serions plus maîtres d'arrêter nos troupes et de préserver Paris du pillage".

Peyre, accompagné cette fois de deux trompettes russes, passe à travers les lignes alliés puis françaises dans les environs de 9 heures, alors que la bataille fait déjà rage. Il se rend directement à Montmartre pour y faire son rapport au Roi Joseph. Celui-ci, qui ne croyait pas avoir devant lui toute l'armée coalisée et le Tsar en personne, est effrayé par la perspective du pillage de Paris. A 10 heures, après consultation du Conseil de défense, il décide de rédiger une autorisation pour les maréchaux Mortier et Marmont d'entrer en pourparlers avec l'ennemi. Cette autorisation sera envoyée aux alentours de midi. Le Maréchal Mortier affirmera même ne pas l'avoir reçue. Vers 11 heures, Joseph et le conseil de Défense décident d'évacuer la capitale.

Vers 15 heures, un nouvel émissaire envoyé cette fois par le Prince Schwarzenberg se présente aux avants postes du général Drouot qui refuse de laisser passer l'émissaire (de peur que celui-ci ne s'aperçoive de la faiblesse de l'armée française) mais donne l'assurance à l'autrichien de transmettre son offre de paix.

Comme vu dans le récit de la bataille, c'est vers 17 heures que Marmont et Mortier se résignent à faire usage de l'autorisation du Roi Joseph pour entrer en négociation avec l'ennemi. C'est à une table du Cabaret Le Petit Jardinet à la Vilette que fut conclu un armistice d'une durée de 4 heures pour l'évacuation de la capitale par les troupes de l'armée active française, c'est-à-dire les corps de Marmont, Mortier et Compans. Les maréchaux, en tant que militaires, n'ont pas la compétence et la légitimité de traiter du sort de la garde nationale parisienne, ni de celui de la ville (occupation militaire, réquisitions, logement des troupes...) et encore moins de celui de la France.

Et c'est précisément ce qui effraya le Conseil de Paris (ancêtre du Conseil Municipal), chargé de défendre les intérêts des parisiens. Une délégation de huit membres (maires, conseillers municipaux, le préfet de la Seine Chabrol, le préfet de Police Pasquier, les généraux de la Garde Nationale Laborde et Tourton) est envoyée au château de Bondy, où le Tsar de Russie et le roi de Prusse ont pris leurs quartiers. Ils n'y arrivèrent qu'à quatre heures du matin en raison des difficultés pour traverser les lignes françaises puis alliés.

Pendant ce temps, une autre délégation est envoyée à l'hôtel particulier du Maréchal Marmont, rue de Paradis Poissonière, où le Maréchal s'est retiré après la signature de l'armistice pour y passer la nuit. Arguant l'absence d'autorité civile ou militaire pour négocier une capitulation, la délégation parvient à convaincre le Maréchal de prendre la responsabilité de signer une capitulation générale pour Paris. Marmont charge son chef d'état-major, le colonel Baron Fabvier, ainsi que son premier aide de camp, le colonel Denys, de négocier la capitulation qu'ils signent à deux heures du matin avec le représentant du Tsar, le comte Orloff et celui du Prince-Maréchal Schwarzenberg, le comte Paar.

Traité de capitulation de Paris
Préambule L'armistice de quatre heures dont on est convenu pour traiter des conditions d'occupation de la ville de Paris et de la retraite des corps qui s'y trouvent ayant conduit un arrangement à cet égard, les soussignés, dument autorisés par les commandants respectifs des forces opposées, ont arrêté et signé les article suivants :
Article 1 Les corps des maréchaux ducs de Trévise et de Raguse, évacueront la ville de Paris le 31 mars, à sept heures du matin
Article 2 Ils emmèneront avec eux le matériel de leur armée
Article 3 Les hostilités ne pourront recommencer que deux heures après l'évacuation de la ville, c'est-à-dire le 31 mars à neuf heures du matin
Article 4 Tous les arsenaux, ateliers, édifices et magasins militaires, resteront dans l'état où ils se trouvaient avant qu'il fut question de la présente capitulation
Article 5 La garde nationale ou garde urbaine est entièrement séparée des troupes de ligne. Elle sera conservée, désarmée ou licenciée selon que les souverains alliés le jugeront nécessaire.
Article 6 Le corps de la gendarmerie municipale partagera entièrement le sort de la garde nationale
Article 7 Les blessés et maraudeurs qui, après sept heures, seront encore à Paris, seront prisonniers de guerre
Article 8 La ville de Paris est recommandée à la générosité des hautes puissances alliées.

Les articles un à trois reprennent les dispositions concernant l'armée prévues dans l'armistice, les autres concernent la capitulation de la ville. Ce traité est plutôt favorable aux armées françaises compte tenu de la situation militaire, car l'armée française est laissée libre de choisir sa ligne de retraite (sur Fontainebleau vers Napoléon alors que les alliés auraient pu exiger qu'elle se retira sur Versailles). L'armée peut emmener toute son artillerie alors que l'usage veut que le vainqueur garde quelques pièces en trophée, la garde Nationale n'est pas faite prisonnière, et aucune réquisition ou pénalité financière ne pèse sur la capitale (même si rien n'empêche les alliés d'en lever plus tard).
Toutefois il faut noter que le Maréchal Marmont a outrepassé ses pouvoirs en signant seul cette capitulation, car ni le maréchal Mortier ni le Maréchal Moncey ne sont représentés, ni aucun représentant du conseil de Paris ou du gouvernement. Pour certains détracteurs du Maréchal Marmont, ce serait la preuve que Marmont aurait commencé à trahir l'empereur dès le 31 mars, 6 jours avant la défection de son corps sur l'Essonne.

Entrée des Alliés dans la capitale

Le 31 mars, à Sept heures, les armées alliées prennent le contrôle des barrières de Paris qu'ils assurent conjointement avec la garde nationale française.
Vers les dix heures, de petits groupes de royalistes français sillonnent les rues désertes de Paris en criant Vive le Roi. Ils sont quelques dizaines mais leur audace et l'absence de réaction de la police font forte impression sur la population parisienne. Sur la place Louis XV, les royalistes font lire la proclamation de Schwarzenberg aux habitants de Paris, datée de Bondy le 29 mars. Cette déclaration du commandant en chef des forces alliées appel le peuple de Paris à se soulever contre Napoléon et implicitement à rallier les bourbons.

Vers midi, le Tsar à l'entrée de la ville du côté de Pantin reçoit l'ensemble des maires d'arrondissement de Paris qui lui remettent les clefs de la ville
A midi et demi, la fanfare allié retenti dans un Paris réduit au silence. A la porte Saint-Martin, l'armée alliée fait son entrée en tenue d'apparats. Les cosaques de la garde impériale Russe en tête suivis des hussards prussiens ouvrent la marche. Derrière, le Tsar avec à sa droite le général Schwarzenberg (en tant que représentant de l'Empereur d'Autriche et non pas comme Commandant en chef de l'armée) et à sa gauche le Roi de Prusse sont à cheval. Ensuite viennent, à pied, un cortège de généraux de l'état major du Tsar et du roi de Prusse. Puis l'infanterie des gardes russes et prussiennes et enfin les réserves. Longeant les boulevards, le cortège est précédé par les royalistes à cheval qui crient Vive le Roi ! La population parisienne se précipite en masse sur le passage du convoi et si quelques cris favorables au roi et au Tsar se font entendre, la majorité reste silencieuse. Aux fenêtres, quelques cocardes blanches sont accrochées ici ou là.
En passant devant la place Vendôme, les royalistes tentent de mettre à bas la statue de Napoléon sans y parvenir.
Enfin la tête du cortège arrive aux Champs-Elysées où les souverains mettent pied à terre et s'installent pour voir défiler leur troupes qui ressortent de Paris par la porte de Neuilly, à l'exception des gardes russes et prussiennes qui campent sur les Champs-Elysées (à l'époque les champs forment une prairie déserte traversée par la célèbre avenue). Le défilé militaire, en fanfare, dure jusque vers 17 heures.
Puis le Roi de Prusse alla prendre ses quartiers dans l'Hotel particulier du Prince eugène, au 82 rue de Lille, le Tsar Alexandre prit les siens chez Talleyrand au n°2 de la Rue Saint-Florentin.

A 19 heures, une conférence regroupant le Tsar, le roi de Prusse, le prince Schwarzenberg, le prince de Liechtenstein, le comte de Nesselrode, Pozzo di Borgo, et le Prince Talleyrand et le Duc de Dalberg, seuls représentants de la France, se tient dans le salon principal de l'Hotel Talleyrand. C'est à la suite de cette conférence que fut affiché dans Paris la Déclaration du Tsar Alexandre : "les souverains proclament qu'ils ne traiteront plus avec Napoléon Bonaparte ni aucun membre de sa famille" et qu'ils chargent le Sénat de nommer un gouvernement provisoire et de donner une nouvelle Constitution à la France. L'abdication de Napoléon devient désormais inévitable.


Notes et références

  1. Chiffres rapportés par Guillaume de Vaudoncourt (Gnrl), Histoire des campagnes de 1814 et 1815 en France, Tome II, Livre V, chapitre VI, pages 305 à 314, éd. A. de Gastel/Ponthieu et Cie, Paris, 1826. Et plus ou moins corroborés (malgré certaines approximations dues à une part non négligeable de troupes irrégulières) par Weil (Cdt), La Campagne de 1814, d'après les documents des Archives impériales et royales de la guerre à Vienne, Tome 4, chapitre XVIII, pages 153 à 159, éd. Librairie militaire de L. Baudoin, Paris, 1892. Ainsi que François-Guy Hourtoulle, La campagne de France, p. 102 à 155, éd. Histoire et Collections, 2006.
  2. D'après Marquess of Londonderry, Narrative of the war in Germany and France in 1813 and 1814", Chap. 15, p.254 mais également Michailovsky-Danilevsky, "History of the campaign in France in the year 1814, translated from the russian, London, 1840, p. 381
  3. « Nous n'avons pas assez de troupes pour résister longtemps aux forces considérables que nous avons combattues ces jours derniers, et qui vont encore s'accroître à chaque instant ; mais aujourd'hui, Messieurs, plus que jamais, nous combattons pour l'honneur. Pensons avant tout à la ville de Paris, ne l'exposons pas à être brulée par l'artillerie ennemie; prenons une position aussi éloignée que possible, battons nous en plaine, loin des murailles, et résistons à l'ennemi aussi longtemps que nous le pourrons » Maréchal Mortier cité par le Baron DE BOURGOING dans ses Souvenirs militaires du Baron de Bourgoing, ed E.Plon, Nourrie&Cie, Paris
  4. « Quoiqu'on n'ait pas de nouvelles de l'Empereur depuis le 26 au soir, et que Sa Majesté n'ait point annoncé la direction qu'elle prendrait, on doit calculer qu'il est impossible que l'Empereur n'arrive pas, sur le dos de l'ennemi qui nous presse, d'ici à trois jours au plus tard » Courrier du ministre de la guerre au maréchal Marmont le 29 mars dans Mémoires du Maréchal Marmont, Duc de Raguse, Livre XX, Ed Perrotin, Paris, 1857
  5. Toutes les capitales européennes ont envoyé des délégations de notables municipaux pour négocier la reddition et la remise des clefs de la ville devant l'avancée des armées françaises. Les lois de la guerre de l'époque autorisent les vainqueurs à livrer au pillage les villes qui résistent à leur avancée. Cette règle non écrite découle des traditions de la chevalerie qui obligent les civils à ne pas participer aux combats. Les villes non fortifiées n'ont donc pas le droit de se défendre face à une armée ennemie sous peine d'être livrées au pillage et sont soumises à la loi militaire (fourniture de réquisitions, logement des officiers, paiement de contributions...). Au cours des guerres de la révolution et de l'Empire les villes de Lubeck (1806), Saragosse (1809) sont les deux plus célèbres villes livrées au pillage par les troupes françaises. Montmirail, Chateau-Thierry, Sens et d'autres villes françaises seront livrées au pillage par les troupes coalisées en 1814 pour des motifs similaires. (on entend par là un pillage militaire ordonné par les autorités militaires comme mesure de rétorsion et non pas les pillages « sauvages » auxquels se livrent toutes les armées, avec ou sans reddition de la ville).
  6. Les heures sont données à titre indicatif. La plupart des relations de la bataille ne mentionnent que 3 moments qui semblent certains : les premiers coups de canons vers 6H, une pause dans les combats entre 11H (départ du roi Joseph) et un peu après midi, puis la fin des combats vers 18H. Les autres heures sont déduites des différentes relations et n'ont pour objet que de dessiner la chronologie des évènements et de comparer la situation des différents secteurs au cours de la bataille
  7. Si M. le Maréchal Duc de Raguse et M. le Maréchal duc de Trévise ne peuvent plus tenir, ils sont autorisés à entrer en pourparlers avec le Prince de Schwarzenberg et l'Empereur de Russsie qui sont devant eux. Signé Joseph » Courrier de Joseph Bonaparte aux maréchaux Marmont et Mortier rédigé à 10h le 30 mars 1814 depuis la butte Montmartre cité dans les Mémoires du Maréchal Marmont, Duc de Raguse ibid

Bibliographie

  • Guillaume de Vaudoncourt (Gnrl), Histoire des campagnes de 1814 et 1815, en France, éd. A. de Gastel/Ponthieu et Cie, Paris, 1826, 362p.
  • François-Guy Hourtoulle, La campagne de France, éd. Histoire et Collections, 2006, 175p.
  • Pierre Miquel, La Campagne de France de Napoléon, éd. de Bartillat, 1991, 244p.
  • Pierre Robin, 1814, La guerre racontée par des témoins, éd. Bernard Giovanangeli, 2004, 256p.
  • Alphone De Beauchamp, Histoire des campagnes de 1814 et 1815, éd. University of Michigan Library, 2009 (rééd.), 570p.
  • P.F Giraud, Campagne de Paris en 1814, éd. Kessinger Publishing, 2010 (rééd.), 114p.
  • Ach. de Vaulabelle, Chute de L'Empire: Histoire Des Deux Restaurations Jusqu'à La Chute de Charles X, Volume 1, éd. Nabu Press, 2010 (rééd.), 482p.
  • Jean-Pierre Mir, La bataille de Paris - 30 mars 1814, éd. Archives & culture, 2004, 360p.
  • M. Molières, Le dossier du mois : 1814 - Napoléon abdique : la bataille de Paris, Revue Gloire & Empire, N°4 janvier - février 2008, pp. 71 - 97.
  • Weil (Cdt), La Campagne de 1814, d'après les documents des Archives impériales et royales de la guerre à Vienne, éd. Librairie militaire de L. Baudoin, Paris, 1892.
  • Henry Houssaye, 1814, éd. Perrin et cie, Paris, 1921.
  • (de) Von Damitz, K., Geschichte des Feldzuges von 1814 in dem Ostlichen und nordlichen Frankreich bis zur Einnahme von Paris, éd. Ernst Siegfiied Mittler, 1842, Berlin.
  • (en) Mikhailofsky-Danielofsky, History of the Campaign in France in the Year 1814, éd. Kessinger Publishing Co, 2009 (rééd.).
  • (en) F. Lorraine Petre, Napoleon at Bay 1814, éd. Arms & Armour Press, Londres, 1977(rééd.).



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