Salut (religion)

Salut (religion)
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Le salut est une notion religieuse complexe. Il peut s'entendre comme une délivrance et une libération : le fidèle se trouve ainsi, après sa mort, préservé des maladies, des infortunes diverses, de sa disparition ou de celle d'autrui ; le salut libère aussi du péché, ou de l'emprise d'un monde jugé mauvais. Dans un sens positif, le salut est le seul bien désirable, unum necessarium, la vie éternelle.
« Mais le salut ne peut pas toujours être repoussé jusqu'à la destruction de la terre et la fin de toute vie en ce bas monde ou à la vie après la mort ; le croyant doit pouvoir le sentir en lui de son vivant et tous les jours dans sa vie quotidienne. C'est ce qui permet au croyant d'avoir la certitude d'une vie après la mort[1] ».

Si la notion du salut après la mort occupe une place centrale dans le christianisme, on la trouve également présente dans d'autres religions, comme le judaïsme, l'islam voire l'hindouisme.

Sommaire

La délivrance dans l'hindouisme et le bouddhisme

Dans l'hindouisme et le bouddhisme, le salut est défini comme la fin, pour l'adepte, du cycle des renaissances, le samsâra.

L'hindouisme qualifie ce résultat de moksha, libération finale de l'âme individuelle (appelée jivātman par l'école la plus représentative, celle du Védanta).

Le bouddhisme, qui refuse le concept d'âme immortelle (concept d'anātman), l'appelle Éveil (bodhi) ou nirvāna, extinction de la soif d'existence, d'inexistence et du désir.

Ces deux religions, dans leur aspect le plus profond (qui ne correspond pas forcément à leurs manifestations populaires), par opposition aux religions théistes de type abrahamique, sont non-duales : opposer l'être individuel à l'Absolu est une erreur, issue d'une ignorance métaphysique (mâyâ, avidyā). L'individu est en quelque sorte "déjà sauvé", ce qui lui manque est la prise de conscience de cette réalité, et la voie de salut qu'il doit suivre consiste à écarter le voile d'ignorance qui le porte à se croire séparé de l'Absolu.

Le salut dans l'orphisme grec

Le judaïsme

Le Judaïsme ancien ne connait pas la notion de Salut. Il n'y a rien à sauver. Il n'y a rien à délivrer. Le problème du sens de la vie n'est pas là. Le concept central est celui d'Alliance qui, au fond, revient à ceci : le monde (et l'homme au sein du monde) est inachevé et la mission, la vocation, la finalité de l'homme sont de contribuer à cet achèvement, à cet accomplissement. Dieu a besoin des hommes pour ce faire et les hommes ont besoin d'être guidé sur cette voie difficile et immense. La Torah et ses mitzvot sont ce guide. Le Judaïsme ancien ne croit pas en l'immortalité de l'âme individuelle, à une vie personnelle après la mort, à un quelconque jugement assorti de récompense ou de punition éternelles.

Il n'existe pas de sotériologie à proprement parler dans le Judaïsme ancien : les termes de l'Alliance sont collectifs et non individuels. Ils concernent le peuple d'Israël et non telle ou telle personne. Ou bien Israël remplit sa mission de témoin de l'Alliance auprès des Nations, et Israël vivra dans la joie et l'abondance. Ou bien Israël ne tient pas son rang et il dépérira.

La croyance au salut individuel est plus récente et date du pharisaïsme (devenu le judaïsme orthodoxe actuel), lequel triompha après la destruction du second Temple de Jérusalem par les Romains en 70. Dans cette nouvelle interprétation, un salut individuel est possible, et les âmes immortelles peuvent être sauvées.

Le salut éternel d'après le christianisme

Les textes de la Bible

Divers textes de l'Evangile insistent sur l'importance capitale du salut éternel (Jean 3, 16), et sur les moyens d'y parvenir : il n'y a pas d'autre moyen que d'observer les commandements (et Jésus confirme la nécessité d'observer les dix commandements, et ceux qui vont avec ; Jésus avait d'ailleurs précisé qu'il n'était pas venu abolir la loi, mais l'accomplir, la porter à sa perfection) :
- Matth. 19, 16-19 (cf. Luc 10, 25-27) : "Et voici que quelqu'un, l'abordant, dit : " Maître, que dois-je faire de bon pour avoir la vie éternelle? " Il lui dit : " Pourquoi m'interroges-tu sur (ce qui est) bon? Un seul est le bon. Que si tu veux entrer dans la vie, observe les commandements." Il lui dit : " Lesquels? " Jésus dit : " C'est : Tu ne tueras point; tu ne commettras point l'adultère; tu ne déroberas point; tu ne porteras point de faux témoignage; honore ton père et ta mère, et : tu aimeras ton proche comme toi-même. "

Les pères de l'Eglise

Au Ve siècle, l'évêque africain Augustin d'Hippone s'était opposé à ce sujet au moine britannique Pélage. Ce dernier soutenait que l'Homme a en lui la force de vouloir le bien et de pratiquer la vertu, une position relativisant l'importance de la grâce divine.

Augustin refuse cette vision et déclare que Dieu est le seul à décider à qui il accorde (ou non) sa grâce. Les bonnes ou mauvaises actions de l'Homme (sa volonté et sa vertu, donc) n'entrent pas en ligne de compte, puisque le libre-arbitre de l'Homme est réduit par la faute originelle d'Adam. Dieu agit sur l'Homme par l'intermédiaire de la grâce efficace, donnée de telle manière qu'elle atteint infailliblement son but, sans pour autant détruire la liberté humaine[2]. L'Homme a donc un attrait irrésistible et dominant pour le bien, qui lui est insufflé par l'action de la grâce efficace. Mais le salut de l'âme après la mort ne vient que de la seule volonté de Dieu (Sola gratia).

Au Moyen Âge

La théologie médiévale, dominée par la pensée augustinienne, laisse peu de place à la liberté humaine : Thomas d'Aquin tente cependant d'organiser autour de la pensée d'Augustin un système métaphysique permettant de concilier grâce et liberté humaine. Il lui faut tenir à la fois l'affirmation de l'action divine dans chaque action de l'Homme, et l'affirmation de la liberté de ce même Homme.

Le jansénisme

Le jansénisme est issu d'un courant théologique s'inscrivant dans le cadre de la Réforme catholique, apparu dans les années qui suivent le Concile de Trente mais qui puise ses sources dans des débats plus anciens.

S'il tire son nom de Cornelius Jansen, il se rattache à une longue tradition de pensée augustinienne. Jansenius, alors étudiant à l'université puis professeur, entreprend la rédaction d'une somme théologique visant à régler le problème de la grâce en faisant une synthèse de la pensée de saint Augustin.

Ce travail, un manuscrit de près de mille trois cents pages intitulé « Augustinus », est presque achevé lorsque son auteur, devenu évêque d'Ypres, meurt brusquement en 1638. Il y affirme, en conformité avec la doctrine Augustinienne du Sola gratia, que depuis le péché originel, la volonté de l'Homme sans le secours divin n'est capable que du mal. Seule la grâce efficace peut lui faire préférer la délectation céleste à la délectation terrestre, c'est-à-dire les volontés divines plutôt que les satisfactions humaines. Cette grâce est irrésistible, mais n'est pas accordée à tous les hommes. Jansen rejoint ici la théorie de la prédestination de Jean Calvin, lui-même très augustinien.

L'enseignement actuel

Par le péché originel, « l'homme a fait choix de soi-même contre Dieu »[3]. Après sa chute, l’homme n’a pas été abandonné par Dieu : l'homme étant incapable de se rapprocher de Dieu par lui-même, étant incapable de réparer une telle faute, Dieu a envoyé son Fils qui est l'instrument de la réconciliation : sa vie sur terre et son sacrifice sont le moyen pour Dieu de prendre le péché des hommes et de leur accorder possibilité d'accomplir la finalité de l'homme rappelé par Ignace de Loyola :« L'homme est créé pour louer, respecter et servir Dieu notre Seigneur ». Le salut s'obtient par l'acceptation de la Bonté divine et du Sauveur qu'il nous donne.

Les ars moriendi sont des imprimés qui expliquent au croyant comment bien mourir afin de préparer son âme au Jugement qui l'attend et gagner son Salut.

Les doctrines protestantes

Luther

En lisant l'Épître aux Romains, Martin Luther élabore la doctrine de la justification par la foi: « le juste vivra par la foi. Dieu ne réclame rien, au contraire, c'est lui qui donne, sa justice infinie est un don »[4]. Luther prend la formule dans un sens absolu qui l'amène à adopter le doctrine de la prédestination, car « la foi est l'œuvre de Dieu et non de l'homme »[5].

Calvin

Jean Calvin pense qu'en désobéissant à Dieu, l'homme est esclave du péché, il n'a plus qu'un « serf arbitre » ; il a gardé sa volonté, mais il a été dépouillé d'une volonté pour le bien. Citant Bernard de Clairvaux, Calvin déclare : « Vouloir est de l'homme. Vouloir le mal est de nature corrompue. Vouloir le bien est de grâce » [6]. Calvin dénie à l'homme toute volonté de chercher Dieu. Dieu se penche vers les êtres humains et leur ouvre ses bras tel un père miséricordieux. Toute l'œuvre de justice et de justification est en Dieu. Continuant son raisonnement, Calvin pense que la foi elle-même vient de Dieu. Si dieu fait tout et l'homme rien, c'est dieu qui choisit. Les êtres humains ne choisissent rien[7]. A peine mentionnée dans l'édition de 1536 de l'Institution, elle a pris peu à peu une place croissante dans les éditions suivantes. Le chrétien n'a plus aucune responsabilité dans son destin après la mort. Son destin est entre les mains du souverain divin à qui il doit s'abandonner en toute confiance.

Notes et références

  1. Jean Pépin, Article Salut, Encyclopaedia Universalis, DVD, 2007
  2. Louis Cognet, Le jansénisme, Que sais-je ?, p. 8.
  3. Catéchisme de l'Eglise catholique §398
  4. Michel Péronnet, le XVIe siècle, Hachette U, 1981 p 137
  5. Émile Léonard, Histoire générale du protestantisme PUF, Tome 1, p.45
  6. Jean Calvin, Institution de la religion chrétienne, Vrin, Paris, 1957-1963 II, III, 5
  7. André Dumas, Article Calvinisme, Encyclopaedia Universalis, DVD, 2007

Voir aussi

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