Esclavage aux Etats-Unis

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Esclavage aux États-Unis

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L'histoire de l'esclavage aux États-Unis (1619-1865) débute peu après l'installation des premiers colons britanniques en Virginie et se termine avec l'adoption du 13e amendement de la Constitution américaine. Durant cette période, l'esclavage occupa une position centrale dans l'organisation sociale et économique dans le Sud du pays. Au total, les Treize colonies puis les États-Unis importèrent environ 600 000 Africains, soit 5 % du total des esclaves déportés vers les Amériques, jusqu'à l'interdiction de la traite atlantique en 1808[1].

Sommaire

Origines

Un développement progressif

La première mention d'esclaves africains dans les colonies américaines date de 1619[2]. Après avoir mené une bataille contre un navire espagnol et essuyé une tempête durant le même été, un navire néerlandais, le « White Lion », est contraint à appareiller à Jamestown (Virginie) avec à son bord vingt esclaves[3] dérobés aux marins ibériques. La colonie de Virginie est alors au début de la période connue sous le nom de « Grande migration » durant laquelle sa population passe de 450 à 4 000 résidents. Son taux de mortalité reste toutefois extrêmement élevé, principalement à cause des maladies infectieuses, de la malnutrition et des combats fréquents avec les Nord-Amérindiens. Le manque de main d'œuvre est persistant. Le navire néerlandais présentant de sérieuses avaries, un accord est conclu pour faire des esclaves la contrepartie de la nourriture et des réparations.

Pour faire face à leurs besoins en main d'œuvre, les premières colonies américaines ont recours à un système qui s'apparente à l'engagisme, en particulier pour les tâches domestiques : de nombreux Européens, principalement des Anglais, des Irlandais et des Allemands pauvres arrivent dans les treize colonies britanniques initiales avec un statut de « travailleurs sous contrat » (indentured servants)[4]. C'est ce système que les colons adoptent pour les vingt premiers esclaves débarqués par les marins néerlandais. Conformément à ce statut, ceux-ci sont libérés après une période établie et se voient accorder la jouissance de quelques terres par leurs anciens maîtres [2]. Au moins un de ces esclaves, le dénommé Anthony Johnson, est véritablement devenu un propriétaire terrien lui-même détenteur d'esclaves.

Au delà de cet épisode inaugural, le statut des premiers Africains importés sur le continent américain au XVIIe siècle fait encore aujourd'hui débat. Deux thèses, la thèse d'une progressivité de l'esclavage et la thèse raciale, s'opposent à ce sujet. La thèse de la progressivité insiste sur une évolution du statut des Noirs. Oscar Handlin met en avant que, contrairement aux empires ibériques, les Britanniques n'avaient pas pratiqué l'esclavage avant l'installation de leurs premières colonies américaines au XVIIe siècle. Aux premiers Noirs, on aurait, à l'image de la vingtaine d'Africains débarqués du « White Lion », attribué un statut d'indentured servant, identique à celui des immigrés européens pauvres. Le racisme à l'égard des Noirs n'aurait été dans cette perspective qu'une des conséquences de l'infériorité durable de leur statut[5]. La thèse raciale estime au contraire que les Noirs africains auraient d'emblée été considérés, à cause de la couleur de leur peau et de préjugés raciaux antérieurs, comme des êtres inférieurs, corvéables à merci. L'esclavage américain n'aurait été que l'importation à l'identique d'un système déjà répandu dans les colonies ibériques d'Amérique du Sud et des Caraïbes[6].

Il est certain que l'institutionnalisation de l'esclavage ne peut être établie que de manière approximative. Sur le plan juridique, la première condamnation d'un serviteur noir à l'esclavage est datée de 1640. En 1654, une cour du comté de Northampton se prononce contre John Casor, le déclarant propriété à vie de son maître. Les colons s'engouffrèrent dans un vide juridique : puisque les déportés africains n'étaient pas citoyens britanniques par leur naissance, ils n'étaient pas nécessairement couverts par la loi commune britannique (Common law).

Il faut sur ce point tenir compte de l'extrême diversité locale des premières colonies : éloignées géographiquement, hétérogènes sur le plan de la composition sociale et religieuse, elles ont chacune développé de forts particularismes locaux. À ce titre, il convient de distinguer la situation des premiers Noirs américains du Nord et du Centre, de ceux du Sud. Au Nord, il semble que les maîtres considéraient les Noirs comme les alter ego des travailleurs sous contrat et, à ce titre, les libéraient quand ils estimaient qu'ils avaient, par leur travail, remboursé leur prix d'achat[7]. Dès le XVIIe siècle, des Noirs avaient donc le statut d'homme libre dans les colonies du Nord. Dans le Sud, la population noire restait elle aussi minoritaire bien que proportionnellement plus importante : on l'estime à environ 8 000 en 1680 pour 15 000 colons[8]. Le système des plantations étant à cette époque encore peu répandu, les Noirs exerçaient, en proportion de la pénurie générale de main d'œuvre, des métiers exigeants un certain degré de qualification.

Toutefois, une fois libérés après leur période contractuelle, les anciens engagés noirs parvenaient, comme leurs compagnons d'infortune blancs, rarement à sortir de la misère dans laquelle ils étaient confinés. Les meilleures terres du sud-est de la Virginie étaient déjà entre les mains de riches familles de planteurs dès le milieu du XVIe siècle, et la libération des anciens engagés ne leur permettait pas d'échapper à une extrême pauvreté. La persistance de ces inégalités fut génératrice de tensions sociales importantes.

La révolte de Bacon, où seuls les rebelles noirs furent condamnés, montra que les travailleurs et les fermiers pauvres pouvaient constituer une menace pour les riches propriétaires terriens.

La culture du tabac et l'institutionnalisation de l'esclavage

Le succès du tabac en Europe entraîna dans les années 1660 un développement important de la culture de l'herbe à Nicot et, partant, du système des plantations, d'abord en Virginie puis au Maryland et dans les Carolines. L'explosion de la demande, les profits importants associés à la culture entraînèrent une demande en main d'œuvre que ne parvenait pas à satisfaire le système de l'engagisme.

Dans le même temps, les Britanniques avaient supplanté les Néerlandais dans le domaine maritime et créé en 1672 la Compagnie royale d'Afrique dans le seul but de développer le commerce négrier dans l'Atlantique. Alors que le commerce avec les empires ibériques était saturé, les colonies britanniques représentaient un débouché potentiel important. La conjonction d'intérêt qui s'opère entre les deux parties, planteurs sudistes et négriers, pose les jalons d'un développement rapide de la traite à destination de l'Amérique du Nord.

Esclaves dans une plantation de Virginie. Illustration tirée de The Old Plantation, vers 1790)

À la fin du XVIIe siècle, tous les Noirs déportés sur le sol nord-américain se voient imposer le statut d'esclave. Les codes noirs, adoptés dans l'État du Connecticut dès 1690 et en Virginie en 1705 généralisent explicitement ce statut, en définissant les droits des propriétaires sur des individus considérés comme des biens meubles et donc dépourvus de droits. Durant la période coloniale britannique, toutes les colonies, au nord comme au sud, possédaient des esclaves. Ceux du nord étaient principalement employés à des tâches domestiques, ceux du sud travaillant dès l'origine dans des fermes et des plantations cultivant des plants d'indigo, du riz et du tabac, le coton ne devenant la culture principale qu'au cours des années 1790. En Caroline du Sud en 1720 près de 65% de la population était constituée d'esclaves, principalement utilisés par les riches fermiers et planteurs tournés vers l'exportation[9].

La part dans la production mondiale du coton brut des plantations américaines est ensuite passée brutalement de 5% à 70% en moins de quinze ans, entre 1790 et 1805, les nouveaux États-Unis d'Amérique tentant difficilement de suivre l'explosion de la demande des fabriques de la région de Manchester, dans l'ex-puissance colonisatrice, où le coton est sur cette courte période le ferment de la première révolution industrielle d'Europe[10].

Le prix du coton commence par monter de 50%, de 30 à 45 cents par livre entre 1790 et 1800, avant de revenir progressivement à moins de 10 cents en 1840, avec l'extension des plantations dans l'Ouest, à grande échelle, dans quatre futurs états[10].

De 1776 à 1885

Le second passage

Carte de l'esclavage aux États-Unis vers 1860. En gris, les États où l'esclavage est interdit

La culture du coton, et avec elle l'esclavage, se répandit à l'ouest avec l'expansion des États-Unis[11]. L'historien Peter Kolchin écrit qu'« en brisant des familles existantes et en forçant les esclaves à se ré-installer loin de tous ceux et tout ce qu'ils connaissaient », cette migration « reproduisait (à une échelle réduite) beaucoup des horreurs » de la traité atlantique[12]. L'historien Ira Berlin a donné à cette migration le nom de second passage du milieu (Second middle passage)[13]). Qu'ils aient eux-mêmes vécu ce déracinement ou qu'ils en aient expérimenté la crainte, Berlin considère cette déportation massive comme un traumatisme central dans la vie d'un esclave entre la révolution américaine et la guerre de Sécession[14].

Les statistiques sont lacunaires concernant le nombre exact d'esclaves déplacés : on estime ce chiffre à environ un million entre 1790 et 1860[15]. La majorité des esclaves étaient originaires du Maryland, de Virginie et des Carolines. À l'origine, leur destination était principalement le Kentucky et le Tennessee mais après 1810 la Georgie, l'Alabama, le Mississippi, la Louisiane et le Texas ont reçu la majorité des esclaves déportés. Dans les seules années 1830, presque 300.000 esclaves furent déplacés, l'Alabama et le Mississipi en recevant 100.000 chacun. Il est estimé que de 60 à 70% des migrations interrégionales étaient le résultat de la vente d'esclaves. En 1820, un enfant de l'Upper South avaient 30% de chance d'être vendu dans le sud profond avant 1860[16].

Il est généralement admis que les ventes d'esclaves ont été responsables de la majorité des déplacements d'esclaves vers l'ouest[17]. Les déplacements des familles de propriétaire d'esclaves étaient eux-mêmes minoritaires et seule une minorité d'esclaves a pu suivre les pas de ses maîtres en préservant son unité familiale. Par ailleurs, même si, en vue de créer une force de travail capable de se reproduire, les marchands d'esclaves emportaient généralement un nombre égal d'hommes et de femmes, ils avaient peu intérêt à déplacer des familles entières. La traite devint la plus vaste entreprise du Sud, en dehors des plantations elles-mêmes, et probablement la plus sophistiquée dans son emploi de moyens de transports modernes, de circuits de financement innovants et de la publicité. Cette industrie développa son propre langage composé de termes tels que « première main (prime hands) ou bucks (dollars en argot)..[18].. Le développement de la traite entre les États de l'Union et l'arrêt de la traite négrière en 1808 provoqua une hausse du prix des esclaves qui contribua notamment à relancer économiquement les états côtiers[19].

Une partie des déplacements d'esclaves s'opéraient par la voie maritime, principalement depuis Norfolk (Virginie) jusqu'à la Nouvelle-Orléans mais la plupart des esclaves étaient forcés à se déplacer à pieds. Des routes de migration régulières étaient établies le long d'un réseau d'entrepôts destinés à l'accueil temporaire des esclaves. Chemin faisant, certains d'entre eux étaient vendus, d'autres achetés. La migration occupaient une place centrale dans l'organisation économique et sociale des régions concernées et la grande majorité des habitants du sud des États-Unis, qu'ils soient noirs ou blancs, étaient impliqués, plus ou moins directement, dans le fonctionnement de ce circuit commercial[20].

Le taux de mortalité des esclaves durant la marche, sans commune mesure avec le niveau atteint lors de la traite, dépassait toutefois son taux en période normal. Le second passage du milieu était extrêmement épuisant et débilitant. Un témoin d'époque souligne sa morne apparence en le décrivant comme « une procession d'hommes, de femmes, et d'enfants similaire à une procession funéraire ». En effet, les morts de la marche, les ventes et reventes quotidiennes transformaient non seulement les esclaves en objet marchand mais faisaient surtout de la marche une machine à briser tout lien humain. Les bandits de grand chemin, attirés par le prix croissant des esclaves sur le marché, rendaient le Second middle passage presque aussi dangereux pour les marchands qu'il l'était pour les esclaves. Les hommes étaient enchaînés et placés sous une garde rapprochée. Les convois d'esclaves devinrent des forteresses mobiles où les tentatives de fuite étaient bien plus nombreuses que les révoltes[21].

La vie quotidienne des esclaves dans les plantations

Les conséquences de la migration vers l'Ouest

Les conditions de vie rencontrées par les esclaves déplacés sur la frontière de l'ouest différaient sensiblement de celles qu'ils avaient connues plus à l'est. Le défrichage et l'exploitation d'une terre vierge, combinés à une nourriture insuffisante, une eau insalubre et l'affaiblissement parfois durable provoqué par le voyage engendra de nombreuses blessures et maladies. Les sites de défrichage privilégiés par les planteurs, souvent situés à proximité d'un point d'eau et donc des moustiques, le climat souvent plus humide et plus chaud contribua à augmenter sensiblement le taux de décès des esclaves nouvellement arrivés. À tel point que certains planteurs préféraient dans les premières années d'exploitation louer des esclaves plutôt qu'en acquérir pour leur propre compte[22].

La dégradation des conditions de vie des esclaves tenaient aussi à d'autres facteurs. La culture du coton était plus exigeante que celles du tabac et du blé pratiquées plus à l'est : les maîtres imposaient des rythmes de travail plus soutenus qui laissaient peu de temps pour la culture vivrière que certains esclaves avaient développés chez leurs anciens propriétaires[23]. Les conditions difficiles sur la frontière augmentèrent par ailleurs la résistance des esclaves et conséquemment la violence des maîtres et des surveillants.

En Louisiane, la canne à sucre constituait, de préférence au coton, la principale culture. Entre 1810 et 1830 le nombre d'esclaves passa dans cette région de moins de 10 000 à plus de 42 000. La Nouvelle Orléans devint un port d'esclaves de dimension nationale et dans les années 1840 le plus grand marché d'esclaves du pays. La culture de la canne à sucre, plus éprouvante encore que celle du coton, exigeait de jeunes hommes dans la force de l'âge qui représentaient les deux tiers de la demande en esclaves. Cette population, plus virulente et susceptible de se tourner vers la rébellion, rendit le régime de soumission imposé par les planteurs d'autant plus violent[24].

Le travail

Égrenage du coton en 1869

Deux principaux systèmes de travail, parfois non exclusifs l'un de l'autre, ont coexisté au sein du système des plantations américaines : le task system et le gang system. Typique des vastes exploitations rizicoles rencontrées en Louisiane, le long de la rivière Yazoo et sur la bande côtière de la Caroline du Sud et de la Georgie, le task system consistait à assigner à chaque esclave un travail donné. Une fois sa tâche acquittée, l'esclave était libre de vaquer à ses occupations personnelles. Ménageant une marge d'autonomie aux esclaves, il était toutefois, à l'image des grandes exploitations, largement minoritaire[25]. Plus contraignant était le gang system qui peut être considéré comme l'équivalent du travail à la chaîne dans le domaine agricole. Placés sous l'autorité d'un driver, des équipes d'esclaves, dont chacun se voyait attribuer une fonction spécifique, effectuaient parallèlement une tâche identique[26].

L'encadrement des esclaves était assuré par un régisseur (oversee), représentant de l'autorité du propriétaire sur le terrain et d'un driver, qui conduisait les équipes. Si le régisseur était presque exclusivement un Blanc[27], le driver était lui-même un esclave. Les fonctions de police qui lui étaient confiées impliquaient force physique et capacité de commandement.

Dans les plus grandes exploitations, l'organisation du travail pouvait aboutir à une certaine spécialisation. Forgerons, charrons, serruriers étaient des métiers indispensables au fonctionnement de la plantation dont la charge était souvent héréditaire et réservés aux métis et aux esclaves à peau claire qui, d'une manière générale, étaient mieux considérés que les autres. La clarté de la peau était ainsi un élément d'appréciation de la valeur des esclaves sur le marché et les planteurs choisissaient de préférence des esclaves à peau claire comme concubine (fancy girls)[28].

Outre la distinction entre le task system et le gang system, une des principales lignes de fracture qui organise le monde des esclaves est celle qui distingue les travailleurs des champs et les travailleurs domestiques. Cette ligne n'est pas, elle aussi, inamovible. Une carrière d'esclave pouvait le conduire à exercer l'une ou l'autre des fonctions au gré des changements de culture, des migrations et surtout de son épuisement physique. Il n'existait pas non plus de hiérarchie établie entre esclaves sur la base de l'appartenance à l'un ou l'autre de ces deux types de métiers. Si les domestiques étaient globalement mieux nourris et bénéficiaient de conditions de travail plus clémentes, ils subissaient aussi plus directement l'arbitraire des décisions et des châtiments des propriétaires.

La vie matérielle et sociale

Maison des esclaves de la plantation Kingsley en Floride
Esclaves dansant au son du banjo. Illustration tirée de The Old Plantation, vers 1790

La vie sociale des esclaves nous est connue grâce aux récits autobiographiques et notamment les interviews du « Federal writers' project » qui réunit, dans les années 1930, les témoignages de quelque 2 000 anciens esclaves[29]. Les historiens ont longtemps imaginé les esclaves subissant leur sort sans grande marge d'autonomie, mais l'historiographie a évolué sensiblement depuis les années 1970 sur la base de ses témoignages.

Longtemps considérée comme inexistante chez les esclaves, la famille a vu son rôle considérablement réévalué, sous l'influence pionnière du sociologue Franklin Frazier[30]. Sans existence légale, elle est toutefois souvent consacrée par une cérémonie religieuse et consignée sur des registres. Une grande partie de la vie sociale et matérielle s'organise autour d'elle. C'est à son échelle, et plus précisément au nom du père de famille, que sont effectuées les distributions de nourriture et de vêtements et l'attribution du logement. La société sudiste impose en la matière son modèle patriarcal, illustré par la division sexuelle du travail : l'homme assure l'entretien de la case, la chasse et la pêche, la femme est dévolue aux tâches ménagères et à l'éducation des enfants. Quand les planteurs les autorisent, les économies financières sont inscrites au nom du mari. Les cases familiales ne dépassaient semble-t-il pas 25 m² pour une moyenne de près de 6 personnes[31]. Elles étaient regroupées dans des quarters situés à distance de la demeure du maître, les plus grandes plantations pouvant en compter plusieurs disséminées sur l'exploitation. L'hygiène y était quasiment inconnue.

Dans certaines régions privilégiées comme les zones de riziculture de Caroline du Sud ou de Georgie, les esclaves étaient autorisés à exercer une activité complémentaire en sus de leurs heures de travail obligatoire. Les compléments apportés par l'élevage et la culture de subsistance pouvaient être consommés ou revendus sur des marchés. Une économie parallèle semble s'être mise en place dans ces régions. Il était aussi de coutume d'octroyer un supplément financier pour la période de Noël et quelques propriétaires autorisaient leurs esclaves à conserver leurs gains au jeu (un esclave, Denmark Vesey, est connu pour avoir gagné à la loterie et acheté sa liberté). S'ils étaient dépourvus de tout droit, et donc du droit de propriété, les esclaves pouvaient, dans certaines régions, se voir octroyés la jouissance de biens, en particulier du bétail ou des outils[32]. La transmission héréditaire de ces biens était semble-t-il tolérée par certains planteurs.

Évolution démographique

L'évolution démographique de la population des esclaves aux États-Unis constitue une originalité par rapport à celle de ses voisins américains. Bien que n'ayant importé qu'environ 6% de la population d'esclaves du continent, les États-Unis comptèrent rapidement une population d'esclaves plus importante que celles des Caraïbes ou du Brésil. En 1810, soit deux ans après l'interdiction officielle de la traite, les États-Unis comptaient 1,1 million d'esclaves, soit le double de leur importation totale. En 1860, cette population avait presque quadruplé pour atteindre un total de 4 millions. En comparaison, il ne restait en Jamaïque en 1834 que 311 000 des 750 000 Africains importés par l'ancienne colonie britannique.

Si, dans les autres colonies importatrices d'esclaves, le taux de mortalité était très élevé, aux États-Unis, le taux de natalité des esclaves lui fut dès l'origine supérieur. Il est cependant malaisé de donner une explication à ce phénomène. Cette différence tient sans doute pour une part à la taille respective des exploitations. En Amérique du Nord, la majorité des esclaves vivaient dans des plantations de moins de dix esclaves. Les relations entre les propriétaires et esclaves s'en trouvaient fondamentalement modifiées : la majorité des maîtres vivaient dans leurs plantations et ne déléguaient pas sa gestion à un régisseur. Dans les plantations brésiliennes ou jamaïcaines la situation différaient sensiblement : les plantations étaient de taille bien plus importantes (seul un quart des esclaves travaillait dans une exploitation de moins de cinquante esclaves) et les propriétaires résidaient majoritairement dans les villes coloniales ou même en métropole.

Les interactions quotidiennes qui survenaient entre les propriétaires et leurs esclaves contribuèrent sans doute à développer un paternalisme, qui, s'il présentait des aspects négatifs, améliora les conditions de vie des esclaves. En ne concentrant pas les esclaves dans de vastes dortoirs communs, les petites exploitations favorisaient aussi l'hygiène de vie et prévenaient le développement d'épidémies massives qui décimèrent la population noire brésilienne et caribéenne. Cette configuration, ainsi que la proportion plus élevée d'esclaves de sexe féminin, affectées principalement aux tâches domestiques en Amérique du Nord, permit aussi le développement d'une vie familiale autonome.

Le traitement des esclaves

L'ancien marché aux esclaves de Newport (Rhode Island), construit en 1762. Il a été transformé en musée (Museum of Newport History)

L'historien Kenneth M. Stampp estime, en examinant le rôle de la coercition dans l'esclavage, que « sans le pouvoir de punir, que l'État conférait au maître, l'esclavage n'aurait pu exister. En comparaison, toutes les autres techniques de contrôle étaient d'importance secondaire ». Stampp note plus loin que si les récompenses conduisaient parfois les esclaves à se comporter de manière conforme aux exigences de leurs maîtres, la plupart des propriétaires d'esclaves s'accordaient sur la méthode de ce fermier de l'Arkansas :

«  Je parle de ce que je connais quand je dis que c'est comme de « jeter des perles aux pourceaux » que de persuader un nègre de travailler. Il doit être forcé à travailler, et l'on doit lui faire comprendre que s'il échoue à remplir sa tâche il va s'en trouver puni[33]. »


L'historien récipiendaire du Prix Pulitzer David Brion Davis et l'historien marxiste Eugene Genovese s'accordent tous deux pour qualifier le traitement subi par les esclaves d'« inhumain ». Qu'ils travaillent ou qu'ils marchent dans la rue, les esclaves étaient soumis à un régime de violence légalement autorisée. Davis souligne que par certains aspects, l'organisation économique et sociale des États-Unis d'alors avaient l'apparence d'un « capitalisme social » (welfare capitalist).

«  Cependant il ne faut jamais oublier que ce même "capitalisme social" des plantations du sud était essentiellement basé sur l'usage de la terreur. Même le plus gentil et humain des maîtres savait que seule la menace de la violence pouvait obliger les équipes d'esclaves à travailler de l'aube jusqu'au crépuscule avec, selon un témoin contemporain, « la discipline d'une armée régulière entraînée ». De fréquentes séances de flagellations publiques étaient là pour rappeler à chaque esclave la punition pour un travail inefficace, une conduite indisciplinée ou le refus de se plier à l'autorité d'un supérieur[34]. »


Dans les grandes plantations, les régisseurs étaient autorisés à fouetter et brutaliser les esclaves désobéissants. Parmi les châtiments utilisés figurent les privations, les travaux supplémentaires, le marquage au fer rouge pour les fugitifs, la castration ou les mutilations. Les codes de l'esclavage autorisaient et requéraient même l'usage de la violence. Esclaves comme noirs libres étaient soumis au code noir et voyaient leurs mouvements surveillés par des patrouilles composées de trois ou six conscrits blancs, autorisés à infliger des châtiments sommaires, pouvant aller jusqu'à la mutilation ou la mort, contre les échappés. En plus des violences physiques ou de la mort, les esclaves étaient placés sous la menace constante de perdre un membre de leur famille si le propriétaire décidaient d'une vente[35]. Cependant, si l'esclave n'avait aucun droit et pouvait être sévèrement puni, le planteur n'avait pas intérêt à maltraiter ses esclaves : les traces de fouet diminuaient la valeur marchande de l'esclave car elles montraient qu'il était insoumis ou paresseux[36]. Le propriétaire se considérant comme un aristocrate, il se devait de respecter un code de conduite morale et devait en principe s'abstenir de toute cruauté gratuite[36].

Les témoignages de Mary Chesnut et de Fanny Kemble, toutes deux issues de l'aristocratie des planteurs, ainsi que ceux des anciens esclaves réunis par la Works Progress Administration (WPA), attestent tous des abus sexuels réguliers infligés aux esclaves de sexe féminin par les propriétaires, les membres de leur famille, les amis ou superviseurs blancs. De Genovese à Nell Irwin Painter, la communauté universitaire s'accorde elle aussi quasi-unanimement sur ce point. Le statut des esclaves, considérés comme la propriété des planteurs, contribuait pour une grande part à donner une légitimation légale à ses pratiques. Les enfants issus de ses viols héritaient le plus souvent du statut d'esclave de leur mère mais étaient parfois libérés par leur maître.

Le traitement des esclaves variaient avec la couleur de leur peau. Les esclaves à la peau la plus foncée étaient confinés au travail des champs alors que les esclaves à la peau plus claire pouvaient servir plus facilement de domestiques et recevaient comparativement une meilleure nourriture, un logement et des vêtements plus décents. Les enfants issus de relations entre planteurs et esclaves pouvaient servir de domestiques : plusieurs des gens de maisons du président Thomas Jefferson étaient ainsi des enfants de son beau-père et d'une esclave. Au XVIIIe siècle siècle, certains esclaves domestiques noirs vivaient mieux que bien des paysans pauvres blancs[37].

Révoltes et soulèvements

L’étude de la résistance des esclaves prit son essor avec la publication en 1843 d’American negro slave revolts de l’historien marxiste Herbert Aptheker. Aptheker répertorie 250 révoltes et complots du XVIIe siècle à la fin du XIXe siècle. On peut y distinguer les révoltes planifiées des révoltes spontanées.

Les révoltes planifiées impliquent une division du travail entre les insurgés. Elles ont le projet de conquérir un territoire ou de préparer une évasion massive. Au contraire des configurations sud-américaines ou caribéennes où un marronnage de grande ampleur est fréquent, le stade de l’insurrection a rarement été franchie en Amérique du Nord. Dans la majorité des cas, la rumeur de la révolte a été ébruitée et la conspiration démasquée. Ce fut le cas des plus célèbres d’entre elles comme celles de Gabriel Prosser qui planifia la conquête de la Virginie en 1800 ou de Denmark Vesey en Caroline du Sud en 1822. La rébellion de Stono qui avait préparé en 1739 une marche vers la Floride, alors sous souveraineté espagnole, fut reprise avant de pouvoir atteindre son objectif.

Les révoltes réactives naissent d’un incident entraînant le meurtre du régisseur ou du maître et la destruction de sa propriété. Elles comptent sur les esclaves de la plantation puis ceux des propriétés avoisinantes pour lui fournir, par une réaction en chaîne, des troupes supplémentaires. La rébellion de Nat Turner en Virginie en 1831, bien qu’elle n’apparaisse pas totalement spontanée, peut entrer dans ce cadre. Le soulèvement de German Coast en Louisiane débuta en 1811 lorsqu'un esclave blessa son maître et tua son fils à l'aide d'une hache. En réunissant de 180 à 500 esclaves en 1811, il est tenu pour être la plus grande révolte d’esclaves qu’ait connu le territoire américain[38].

La localisation des révoltes a également évolué au cours du temps. Pendant la période coloniale, elles sont principalement concentrées dans le Nord, à New York (révolte des esclaves de New York de 1712) ou au New Jersey, et dans les États de Virginie et de Caroline du Sud (rébellion de Stono en 1739). Après la révolution américaine, l’esclavage disparaît du Nord du pays et les révoltes sont localisées dans le Sud, en Caroline du Nord et en Louisiane[39].

Réprimées le plus souvent dans le sang, ces révoltes ont périodiquement donné lieu à un durcissement de la surveillance et des règlements applicables aux Noirs, qu’ils soient libres ou esclaves.

L'abolition dans les États du Nord

Convention anti-esclavagiste de 1840
Texte de Benjamin Franklin en faveur de l'abolition de l'esclavage

Les premiers abolitionnistes américains se trouvent d'abord dans les sociétés Quakers de Pennsylvanie : dès 1688, ils rédigent et publient la Protestation de Germantown qui proteste contre l'esclavage[40]. En 1759, les Quakers pennsylvaniens s'interdisent toutes pratiques esclavagistes[41]. En 1761, la colonie lève une taxe sur tout esclave importé à l'intérieur de ses limites[40]. En 1767, le livre d'Anthony Benezet connaît un certain succès jusqu'en Angleterre.

Dans les années 1770, la Société d’émancipation des Noirs libres et illégalement réduits à la servilité est fondée à Philadelphie[42]. Pendant la Révolution américaine, plusieurs intellectuels ont défendu les droits des Noirs comme Thomas Paine, l'auteur du Sens commun (1776)[42]. Durant ses dernières années, Benjamin Franklin (1706-1790) fut un fervent défenseur de l'abolition de l'esclavage (il libéra ses esclaves dès 1772). Thomas Jefferson, George Washington, James Madison et Patrick Henry militèrent au Congrès américain pour la suppression de l'esclavage[43]. Le premier président américain affranchit ses esclaves par testament[44].

L'esclavage est aboli en 1777 dans le Vermont[41],[45], en 1780 en Pennsylvanie[46], en 1783 dans le Massachusetts[47] et le New Hampshire[44]. Une loi de 1782 votée en Virginie entraîne la libération de 10 000 Noirs en dix ans[48]. En 1794 est créée la Convention des sociétés abolitionnistes à Philadelphie[49]. En 1783, le Maryland interdit l'importation d'esclaves[50]. En 1786, la Caroline du Nord augmente fortement les droits sur l’importation des esclaves ; l’esclavage disparaît au nord des États-Unis au début 19e siècle[51]. La Caroline du Sud interdit la traite en 1803[48].

L'Ordonnance du Nord-Ouest (1787) interdit l'esclavage dans le territoire du Nord-Ouest[52],[53],[44] et établit de fait la limite entre les états esclavagistes et les autres sur l'Ohio. La traite négrière est abolie officiellement en 1808, même si les contrebandiers la poursuivent clandestinement pendant plusieurs années[54].

Pourtant, lorsque la Constitution américaine entre en vigueur le 4 mars 1789, elle ne remet pas en cause l'esclavage pratiqué dans les États du Sud, afin de garantir l'union de la jeune nation. Si les esclaves sont exclus de la citoyenneté, les États du Sud réclament qu'ils soient comptabilisés dans le recensement qui doit permettre la répartition des sièges à la Chambre des représentants. Cette revendication qui avantagerait considérablement les États-Unis du Sud aboutit à un compromis connu sous le nom de « clause des trois cinquièmes » ; cette disposition ajoute au total de la population libre des différents États « les trois cinquièmes de toutes autres personnes » vivant sur le territoire, c'est-à-dire les esclaves qui, comme dans l'ensemble de la Constitution, ne sont pas désignés directement[55]. L’attorney général du Maryland Luther Martin, représentant de son État à la convention de Philadelphie, refusa la constitution parce qu’elle ne condamnait pas l’esclavage explicitement. La Société de Pennsylvanie pour l'abolition de l'esclavage fit circuler une pétition, signée notamment par Benjamin Franklin en 1790[56].

Dans les années 1820, la Female Anti-slavery Society dénonce l'esclavage. L'esclavage dans les États Unis d'Amérique est aboli en 1865 suite à la guerre de sécession qui opposa les États du Nord aux États du Sud.

La Guerre de Sécession

L'abolition de l'esclavage sur l’ensemble du territoire américain présente la caractéristique d’être la conséquence d’une guerre civile, la guerre de Sécession. Elle ne figure toutefois pas au rang des motifs de guerre des deux protagonistes. Les Confédérés entrèrent en sécession au nom de leur droit à l’auto-détermination, pour protester de l’élection du républicain Abraham Lincoln à la présidence de la République ; l’objectif initial des Nordistes était le maintien de l’unité territoriale du pays.

Ce n’est qu’avec la Proclamation d'émancipation du 1er janvier 1863 que l’abolition devient l’un des objectifs affichés du camp nordiste. Après la guerre, le 13e amendement de la Constitution américaine abolit définitivement l’esclavage sur le territoire américain ; durant la Reconstruction qui suivit la guerre, deux amendements consécutifs, le 14e et 15e, ne parviendront toutefois pas à empêcher l’instauration d’un système ségrégationniste dans le Sud du pays.

Statistiques

Sur les environ huit millions de Blancs que comptaient la totalité des États esclavagistes, seulement 385 000 possédaient des esclaves, soit 4,8 % de la population. La moitié n'avait que cinq esclaves ou moins, mais 110 000 Blancs en avaient plus de 50 et 3 000 d'entre eux, plus de 100 [57].

Positions des protagonistes

Si la question de l’esclavage est indiscutablement l’une des causes du conflit, celle de l’abolition n’apparaît que manière indirecte au rang des préoccupations de ses protagonistes. La position d'Abraham Lincoln, le président républicain nouvellement élu, était claire au sujet de l’esclavage : intellectuellement opposé à cette institution, il s’était prononcé contre son expansion tout en promettant de ne pas la remettre en question dans les États où elle existait déjà.

Pour les Confédérés, l’élection de Lincoln apparaissait, malgré ses positions modérées au sujet de l’esclavage, comme la remise en cause de leurs intérêts et plus encore, de leur mode de vie. Le débat politique dans la décennie précédant l’élection de 1860 s’était cristallisé avec une telle violence autour de la question de l’esclavage que la solution sécessionniste, la plus radicale, apparut comme la seule alternative face à ce qui était perçu comme une remise en cause des valeurs et de l'organisation sociale du Sud[58].

De la défense du statu quo à la lutte pour l'abolition

Jusqu’en août 1862, Lincoln se défend de faire de l’abolition un des objectifs du conflit. Sa prudence découle en partie de considérations stratégiques : le Delaware, le Maryland, le Kentucky, le Missouri, bien que tout quatre esclavagistes avaient choisi de rester dans l’Union ; une émancipation immédiate présentait le risque de les faire basculer dans le camp sécessionniste[59].

Si la position de Lincoln est amenée à évoluer, c’est selon l’historien Peter Kolchin à cause de la conjonction de trois facteurs[60] : une évolution du rapport de force au sein du parti républicain et de l’opinion nordiste ; des impératifs de politique étrangère ; et l’attitude des esclaves du Sud.

Un glissement de l'opinion

Au sein du parti au pouvoir, l'opinion des républicains radicaux, dont l'ambition est de profiter de la guerre pour réformer en profondeur les structures sociales du Sud, gagnent sensiblement du terrain. Outre par les radicaux, la question de l’abolition est portée dans l’arène publique par l’activité redoublée des militants abolitionnistes dont les plus célèbres représentants sont alors Wendell Philipps[61] et Frederick Douglass. La revendication apparaît de plus en plus partagée par l’opinion publique du Nord : en réaction au coût humain inattendu du conflit, la population réagit en exigeant que son issue marque un changement radical dans l’organisation sociale du Sud.

Face à l’opinion internationale

Le soutien des diplomaties étrangères était un enjeu fondamental pour les Nordistes. La France et le Royaume-Uni, qui avaient accordé aux Confédérés le statut d’Etat belligérant, étaient tentés, pour faire face à la pénurie de coton, de reconnaître la pleine souveraineté à la Confédération. Un positionnement clair en faveur de l’abolition constituait un argument décisif pour rallier des partenaires hésitants, et notamment une opinion publique britannique largement acquise aux idées abolitionnistes[62].

Le comportement des esclaves du Sud

Le comportement des esclaves du Sud durant la guerre a fait l’objet de nombreux controverses. A l’exception de quelques auteurs, majoritairement noirs comme W.E.B du Bois, l’idée de la loyauté des esclaves à leurs propriétaires sudistes était largement répandue jusqu’au début du XXe siècle. Elle est aujourd’hui largement abandonnée. Bien que n’ayant pas organisé de grandes rébellions, identique aux rébellions serviles caribéennes, les esclaves profitèrent de la désorganisation des structures de contrôle occasionnée par la guerre pour ralentir leur travail ou même refuser d’obéir à leurs propriétaires. À l’approche des troupes nordistes, beaucoup s’enfuyaient pour rejoindre le camp adverse[63].

Ce comportement obligea le commandement militaire puis la direction politique à se prononcer sur le statut à conférer aux esclaves fugitifs, désignés sous le terme de contrabands, et aux esclaves situés sur les territoires occupés par les troupes nordistes. S’agissant des premiers, une loi votée par le Congrès interdit en mars 1862 de renvoyer les fuyards à leurs anciens propriétaires[64]. Le second problème donna lieu à plusieurs passes d’armes entre pouvoirs militaire et politique. Le général Frémont au mois d’août 1861 puis le général Hunter en mai 1862 prirent, dans leur secteur respectif, des mesures d’émancipation des esclaves appartenant à des planteurs sécessionnistes ; ils furent à deux reprises désavoués par le président Lincoln[65].

Parallèlement, la volonté de combattre manifestée par les Noirs libres du nord et les fugitifs du Sud aboutit à la constitution des premières unités de combattants noirs au Massachusetts ou dans les États occupés de l’Arkansas et de la Louisiane[66].

La Proclamation d'émancipation

Cette configuration contraint Lincoln à abandonner sa prudence initiale pour une position tranchée en faveur de l’abolition. Entravée au sein de l’Union par les blocages institutionnels et le compromis avec les quatre états esclavagistes, son action s’oriente vers les territoires sécessionnistes[67].

À l’automne 1862, il menace les Confédérés d’abolir l’esclavage s’ils ne rentrent pas dans le rang de l'Union. À l’expiration de l’ultimatum, le 1er janvier 1863, la Proclamation d'émancipation libère « toute personne asservie » située sur les territoires sécessionnistes [68]. Elle autorise par ailleurs officiellement les Noirs libres ou affranchis à s’engager dans l’armée de l’Union. La moitié des 180 000 Noirs qui combattirent au final aux côtés des Unionistes était des esclaves libérés[69].

Abolition et Reconstruction

Avant même la fin de la guerre, un consensus s’était dessiné au sein des républicains pour une abolition générale de l’esclavage sur l’ensemble du territoire des Etats-Unis. Le 8 avril 1864, le Sénat avait voté un amendement en ce sens mais la procédure d’adoption buta longuement sur l’hostilité des démocrates[70]. À la suite des élections générales de 1864, les républicains, qui ont pris pour l’occasion l’étiquette d’ « unionistes », remportent une majorité suffisante à la Chambre des représentants pour réunir les deux tiers des suffrages nécessaires à l’adoption d’un amendement à la Constitution. Le 31 janvier 1865 le 13e amendement est ainsi voté de justesse en remportant le nombre exact de voix requises[71]. La ratification, nécessitant l’adhésion des trois quarts des états, fut obtenue dans le cours de l’année et le 18 décembre 1865 le 13e amendement était promulgué.

Si la question de l’esclavage était formellement résolue par ce nouvel amendement, de nombreuses questions restaient encore en suspens, notamment au sujet des moyens de garantir l’autonomie des anciens esclaves. Les résistances manifestes de la société sudiste, qui se traduisirent par l’adoption de codes noirs visant à maintenir un ordre social hiérarchisé sur une base raciale, achevèrent de convaincre de la nécessité d’une politique de Reconstruction volontariste. Les droits civils et politiques, qui semblaient devoir garantir l’émancipation véritable des Noirs du Sud, furent étendus à tous les hommes nés ou naturalisés aux Etats-unis, et donc aux Noirs, par une série de lois sur les droits civils et par le 14e amendement. Le processus, émaillé de plusieurs invalidations par la Cour Suprême et d’interprétations divergentes du sens du 14e amendement, nécessita l’adoption d’un nouveau texte à valeur constitutionnelle. Promulgué en 1870, ce 15e amendement interdisait explicitement la limitation du droit de vote « pour des raisons liées à la race, à la couleur ou à un état antérieur de servitude »[72].

Dès les années 1870, la Reconstruction étaient cependant perçue par l’ensemble des catégories de la population- Noirs comme anciens maîtres- comme un échec. Pour les anciens esclaves, la déception était à la hauteur de l’espoir qu’elle avait suscité. Les difficultés d’intégration qui provoquèrent les premières migrations du Sud vers le Nord à la fin des années 1870 annonçaient les grandes migrations du début du XXe siècle. La persistance du racisme ainsi que la rapide séparation des Noirs et des Blancs dans de nombreux domaines de la vie sociale laissaient apparaître les prémisses du système ségrégué que viendraient institutionnaliser la série des lois Jim Crow dans le Sud du pays.

En juillet 2003, le président George W. Bush avait parlé de l'esclavage comme « l'un des plus grands crimes de l'Histoire », au cours d'une visite sur l'île de Gorée au Sénégal[73]. Cinq ans plus tard, la Chambre des représentants présente des excuses pour l'esclavage et la ségrégation raciale envers les Noirs[73]. Puis c'est au tour du Sénat des États-Unis le 18 juin 2009, sous la forme d'une résolution symbolique[73].

Historiographie

Longtemps délaissée par l'historiographie américaine[74] dont l'attention fut longtemps retenue par la question des origines institutionnelles et politiques de la nation américaine, le thème de l'esclavage n'apparaît véritablement qu'au cours des années 1920 dans le champ de la recherche académique avec les travaux d'Ulrich Phillips.

Le point de vue développé à la suite de Phillips, qui présente les rapports entre maîtres et esclaves sous un jour plutôt favorable, n'est remis en cause qu'au début des années 1950 par Kenneth Stamp qui, après en avoir questionné l'objectivité en 1952, produit l'un des classiques du domaine avec The peculiar institution : slavery in the ante-bellum south[75]. Balayant l'image de la plantation comme lieu d'exercice d'un paternalisme bienveillant, il défend une position marxiste qui voit dans le système des plantations un régime d'exploitation au profit d'une aristocratie de planteurs.

Ses travaux seront prolongés par Eugene Genovese puis sa femme Elizabeh Fox-Genovese. Genovese conçoit l'économie du Sud comme un système non capitaliste et quasi-féodal où les planteurs sont considérés comme une caste, plus qu'une classe, pré-bourgeoise plus éprise d'une consommation ostentatoire que d'une mesure systématique de la rentabilité de ses investissements[76]. Si le circuit commercial et financier de l'économie de plantation implique les métropoles de l'Est (New York, Baltimore ou Philadelphie et revêt même un cadre international (Le Havre, Liverpool), il constitue pour Genovese un système autonome du système capitaliste. Sa position marxiste originelle évaluera progressivement et Genovese ouvrit un vaste programme de recherche centré sur la psychologie sociale de l'esclave américain. S'appuyant sur les recueils d'entretien de la Works Progress Administration et non plus sur les écrits des planteurs qui avaient constitué jusqu'alors l'essentiel des sources sur la société esclavagiste, Genovese joua un rôle fondamental dans l'appréhension socio-culturelle de la société de plantation[77]. À sa suite, Lawrence Levine ou John Blassingame insistèrent sur les modes d'expression spécifiques développés par les esclaves (gospels, folklore afro-américain...)[78].

Dans les années 1970, parallèlement au programme socio-culturel ouvert par Genovese, le développement de la cliométrie est revenu, en inaugurant de nouvelles méthodes quantitatives, sur la question des implications économiques de l'esclavage. La mesure de sa rentabilité est en particulier devenue l'une des questions centrales soulevées par cette approche. Ouvert par John Meyer et Joseph Conrad, ce débat va focaliser toute l'attention après la parution de l'ouvrage Time on cross de Robert Fogel et Stanley Engermann qui apparaît rétrospectivement comme « une sorte de tremblement de terre dans l'historiographie de l'esclavage »[79]. La diversification des sources mobilisées et l'utilisation pionnière de l'outil informatique constituent les premières innovations d'un ouvrage qui remet surtout en cause nombres des positions communément admises jusque-là sur l'esclavage nord américain. En affirmant que les conditions de vie des esclaves étaient comparables et même meilleures que celles des ouvriers du Nord, les deux auteurs soulevèrent un tollé qui dépassa le monde académique. Une grande partie des travaux universitaires qui parurent sur le sujet dans les années 1970 se donneront ainsi pour tâche d'attaquer les conclusions des deux économistes. Les auteurs qui passèrent l'ouvrage au crible critiquèrent en particulier certaines extrapolations statistiques, les modes de traitement et relevèrent des erreurs de calcul manifestes. La présentation, sous un jour plutôt favorable, de la condition servile fut aussi vivement critiquée. Fogel revint sur certaines de ses conclusions dans un nouvel ouvrage ; il y affirmait notamment la supériorité économique du travail libre sur le travail servile, le premier permettant « la mobilité économique et sociale » et « la possibilité pour les individus de s'élever dans l'échelle économique »[80], toutes choses qui étaient impossibles dans le cadre du second.

Notes et références

  1. Hugh Thomas, The slave trade : the story of the atlantic slave trade, 1440-1870, Simon and Schuster, New York, 1997.
  2. a  et b Étienne de Planchard de Cussac, Le Sud américain. Histoire, mythe et réalité, Paris, Ellipses, 2001, (ISBN 2729802630), p.28
  3. Christian Delacampagne, Histoire de l'esclavage. De l'Antiquité à nos jours, Le livre de poche, Paris, 2002 (ISBN 2253905933) , p.159
  4. Le maître payait au travailleur le voyage et disposait de sa force de travail durant une période déterminée.
  5. Oscar et Mary Handlin, « Origins of the Southern Labor System », The William and Mary Quarterly, Vol. 7, N°2, Avril 1950.
  6. Carl Degler, « Slavery and the Genesis of American Race Prejudice », Comparative Studies in Society and History, Vol. 2, N°1, October 1959.
  7. La définition de cette période de travail, souvent arbitraire, assimilait toutefois le statut de ces serviteurs à celui d'esclave.
  8. Anne Garrait-Bourrier, L'esclavage aux États-Unis, Paris, éditions Ellipses, 2001, p.24.
  9. Trinkley, M. « Growth of South Carolina's Slave Population », South Carolina Information Highway.
  10. a  et b Plan.mod.pipo
  11. Dès 1834, l'Alabama, le Mississipi et la Louisiane cultivaient la moitié du coton américain et, en 1859 près de 78% avec la Georgie. En 1859, la culture du coton dans les deux Carolines avaient chuté à 10% du total national. Berlin p. 166.
  12. Kolchin, American slavery. 1619-1877, New York : Hill and Wang, p. 96. C'est nous qui traduisons.
  13. C'est par ce nom qu'est communément désigné la traversée de l'océan Atlantique par les esclaves.
  14. Berlin, p. 161-162
  15. Michael Tadman, Speculators and slaves : masters, traders, and slaves in the old South, 1989.
  16. Berlin p. 168-169. Kolchin p. 96.
  17. Kolchin note que Robert Fogel et Engerman soutiennent que 84% des esclaves se sont déplacés avec leurs familles en suivant leurs maîtres mais la majorité des autres universitaires accordent un poids bien plus important à la vente des esclaves. Ransome (p.582) note que Fogel et Engerman ont basé leurs conclusions sur l'étude de comtés du Maryland dans les années 1830, extrapolant les données obtenues à tout le sud sur la période entière.
  18. Berlin pg 166-169
  19. Kolchin p. 98.
  20. Berlin p. 168-171.
  21. Berlin pg. 172-173.
  22. Berlin pg. 174.
  23. Berlin p. 175-177
  24. Berlin p. 179-180
  25. 12% des exploitations américaines comptaient en effet plus de 20 esclaves, Claude Folhen, op. cit., p. 167.
  26. Ainsi durant la période des semailles, un esclave était chargé d'ouvrir le sillon, un autre de semer les graines, un troisième fermait le sillon tandis qu'un quatrième battait la terre.
  27. La loi impliquait souvent la présence d'un Blanc dans tout corps de Noirs. Voir Fogel et Engermann, Time on the cross, vol. 1, p. 213.
  28. Voir sur ce point Pap N'Diaye, « Questions de couleur. Histoire, idéologie et pratiques du colorisme », in Fassin Didier et Éric Fassin (dir.), De la question sociale à la question raciale, La Découverte, Paris, 2006.
  29. L'intégralité de ces récits ont été publiés en vingt-deux volumes sous la direction de Georges Rawick. The american slave : a composite autobiography, Greenwood, Wesport (Connecticut), 1977 et 1979. Une compilation d'extraits en français dans James Mellon, Paroles d'esclaves : les jours du fouet, Seuil, Paris, 1991.
  30. Franklin Edward Frazier. The Negro Family in Chicago, University of Chicago Press, Chicago, 1932 ; The Negro family in the United States, University of Chicago Press, Chicago, 1939 ; en français, Bourgeoisie noire, Plon, Paris, 1955.
  31. Pour plus de détails sur les sources disponibles pour ces mesures, voir Claude Folhen, Histoire de l'esclavage aux États-Unis, p. 163 et s.
  32. Voir l'étude menée par Dylan Penningroth dans un comté de Georgie, « Slavery, freedom and social claims to proprety among African Americans in Liberty County, Georgia, 1850-1880 », Journal of American History, vol.84, 1997, p. 404-435.
  33. Stampp, The Peculiar Institution, p. 171
  34. Sur la punition par le fouet, voir Claude Folhen, op. cit., p.173 et s. ; Davis p. 196.
  35. Genovese, The Political Economy of Slavery : Studies in the Economy and Society of the Slave South, 1967.
  36. a  et b Étienne de Planchard de Cussac, Le Sud américain. Histoire, mythe et réalité, Paris, Ellipses, 2001, (ISBN 2729802630), p.29
  37. Étienne de Planchard de Cussac, Le Sud américain. Histoire, mythe et réalité, Paris, Ellipses, 2001, (ISBN 2729802630), p.27
  38. Encyclopedia of slave resistance and rebellion, Greenwood Publishing Group, 2007, Vol. 1, p. 213.
  39. Randall M. Miller et John David Smith, Dictionary of Afro-American Slavery and, Westport (Conn.), Praeger, 1997, p. 619 et s.
  40. a  et b Christian Delacampagne, Histoire de l'esclavage. De l'Antiquité à nos jours, Le livre de poche, Paris, 2002 (ISBN 2253905933) , p.203
  41. a  et b Christian Delacampagne, Histoire de l'esclavage. De l'Antiquité à nos jours, Le livre de poche, Paris, 2002 (ISBN 2253905933) , p.200
  42. a  et b Bernard Cottret, La Révolution américaine : La quête du bonheur 1763-1787, Paris, Perrin, 2003, (ISBN 2262018219), p.178
  43. Bernard Vincent, La Révolution américaine 1775-1783, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 1985, tome 2, (ISBN 2864802112), p.172
  44. a , b  et c Christian Delacampagne, Histoire de l'esclavage. De l'Antiquité à nos jours, Le livre de poche, Paris, 2002 (ISBN 2253905933) , p.204
  45. Jacques Binoche, Histoire des États-Unis, p.103 ; Bernard Cottret, La Révolution américaine : La quête du bonheur 1763-1787, Paris, Perrin, 2003, (ISBN 2262018219), p.425
  46. Bernard Cottret, La Révolution américaine : La quête du bonheur 1763-1787, Paris, Perrin, 2003, (ISBN 2262018219), p.425 ; Bernard Vincent, La Révolution américaine 1775-1783, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 1985, tome 2, (ISBN 2864802112), p.11
  47. Bernard Vincent, La Révolution américaine 1775-1783, Nancy, Presses Universitaires de Nancy, 1985, tome 2, (ISBN 2864802112), p.12
  48. a  et b Étienne de Planchard de Cussac, Le Sud américain. Histoire, mythe et réalité, Paris, Ellipses, 2001, (ISBN 2729802630), p.31
  49. Bernard Cottret, La Révolution américaine : La quête du bonheur 1763-1787, Paris, Perrin, 2003, (ISBN 2262018219), p.425
  50. Bernard Cottret, La Révolution américaine : La quête du bonheur 1763-1787, Paris, Perrin, 2003, (ISBN 2262018219), p.478
  51. Bernard Cottret, La Révolution américaine : La quête du bonheur 1763-1787, Paris, Perrin, 2003, (ISBN 2262018219), p.478
  52. Claude Fohlen, Les pères de la révolution américaine, Paris, Albin Michel, 1989, (ISBN 2226036644), p.162
  53. Étienne de Planchard de Cussac, Le Sud américain. Histoire, mythe et réalité, Paris, Ellipses, 2001, (ISBN 2729802630), p.34
  54. Christian Delacampagne, Histoire de l'esclavage. De l'Antiquité à nos jours, Le livre de poche, Paris, 2002 (ISBN 2253905933) , p.208
  55. Article 1er, section 2 de la Constitution de 1787. Cité dans Claude Fohlen ,Histoire de l'esclavage aux États-Unis, Perrin, 1998, p. 109.
  56. G. B. Nash, Race and Revolution, Madison, Wisconsin, Madison House, « The Merill Jensen Lectures in Constitutionnal Studies », 1990, p.144 sq
  57. (fr) Histoire sociolinguistique des États-Unis (5) L'Amérique anglocentrique
  58. Claude Folhen, Histoire de l’esclavage aux États-Unis, op. cit., p. 275.
  59. Claude Folhen, Histoire de l’esclavage aux États-Unis, op. cit., p. 278-279.
  60. Peter Kolchin, Une institution particulière : l’esclavage aux Etats-Unis. 1619-1877, Paris : Belin, 1998, p. 212-220.
  61. Ce dernier redoubla d’activité durant l’année 1862, prononçant notamment en mars un discours à Washington en présence du Président et des membres du Congrès. Voir sur ce point J.M. McPherson, La Guerre de Sécession, p. 539-540.
  62. Claude Folhen, p. 286.
  63. Voir Ira Berlin (dir.), Freedom : a documentary history of emancipation. 1861-1867. Serie I, volume I : The destruction of slavery, Cambridge university press, 1985
  64. Claude Folhen, Histoire de l’esclavage aux États-Unis, op. cit., p. 283.
  65. Claude Folhen, Histoire de l’esclavage aux États-Unis, op. cit., p. 284.
  66. Folhen, p. 281.
  67. Quelques mesures, notamment la libération des esclaves du district de Columbia, siège de la capitale fédérale Washington avaient eu lieu à l’été 1862 ; le pouvoir fédéral avait toutefois tenté, sans succès, de proposer un amendement à la Constitution pour libérer les esclaves des états esclavagistes de l’Union. Voir sur ce point, Claude Folhen, Histoire de l’esclavage aux États-Unis, p. 284-286.
  68. Peter Kolchin, Une institution particulière, op. cit., p. 218.
  69. Peter Kolchin, Une institution particulière, p. 219.
  70. Claude Folhen, op. cit., p. 293
  71. Claude Folhen, op. cit., p. 294
  72. Claude Folhen, op. cit., p. 302
  73. a , b  et c « Le Sénat américain présente ses excuses pour l'esclavage » dans Le Monde du 18-06-2009, [lire en ligne]
  74. Pour une synthèse de l'historiographie de l'esclavage nord américain, voir Claude Folhen. Op. cit., p. 24-38. Peter Parish. Slavery. History and historians, New York, 1989.
  75. Paru aux États-Unis en 1956.
  76. The political economy of slavery, New York, 1963 ; traduction française, Économie politique de l'esclavage : essais sur l'économie et la société du Sud esclavagiste, Maspero, Paris, 1968.
  77. Voir Roll, Jordan, Roll : the world slaves made, 1974.
  78. Lawrence Levine, Black culture and black consciousness : afro-american folk thought from slavery to freedom, 1977.
  79. Peter Parish. Op. cit., p.9.
  80. Robert Fogel, Without consent or contract : the rise and fall of american slavery, p.395-396.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

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Bibliographie

  • Ira Berlin, Many thousands gone. The first two centuries of slavery in north America, Harvard University Press, Cambridge, 1998.
  • Claude Folhen, Histoire de l'esclavage aux États-Unis, Perrin, Paris, 2007.
  • Walter Johnson, Soul by soul : life inside the antebellum slave market, Harvard University Press, Cambridge, 1999.
  • Peter Kolchin, Une institution très particulière. L'esclavage aux États-Unis, Belin, Paris, 1998.
  • Randal M. Miller et John D. Smith (dir.), Dictionary of Afro-American Slavery, Greenwood, Westport (Connecticut), 1997.
  • Michael Tadman, Speculators and slaves : masters, traders, and slaves in the old South, University of Wisconsin Press, Madison, 1989.
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