Deformation elastique

Deformation elastique

Déformation élastique

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La déformation élastique est une déformation réversible : le milieu retourne à son état initial lorsque l'on supprime les sollicitations.

La déformation élastique est un domaine important de la mécanique des milieux continus (MMC) et de la thermodynamique (compression des gaz).

L'élasticité linéaire concerne les petites déformations proportionnelles à la sollicitation. Dans cette gamme, l'allongement est proportionnel à la force dans le cas d'un étirement, et l'angle est proportionnel au couple dans le cas d'une torsion.

Aux plus grandes déformations, l'élasticité devient non linéaire pour certains matériaux. Pour d'autres, la fracture ou le fluage interviennent. Voir plus bas.

La notion d'élasticité n'est pas spécifique à la mécanique des milieux continus et en physique, d'une manière générale, on parle d'interaction élastique lorsqu'il y a la conservation d'une grandeur. Par exemple, dans un choc élastique, les objets s'échangent leur énergie cinétique, mais il n'y a pas de perte par frottement ou par déformation résiduelle (de fait, la déformation est élastique). Dans le cas de l'interaction d'un atome avec un rayonnement électromagnétique, on parle de diffusion élastique lorsque le rayonnement conserve la même longueur d'onde (diffusion Rayleigh).

Sommaire

Cas des gaz

Un gaz est constitué de molécules qui volent et s'entrechoquent. Elles se cognent également aux parois du récipient contenant le gaz, ce qui crée la pression. L'énergie cinétique moyenne d'une molécule est proportionnelle à la température absolue (en Kelvin) :

E_c = \frac{3}{2} \cdot k \cdot T

k étant la constante de Boltzmann.

La pression du gaz sur les parois dépend donc du nombre de chocs par seconde et de la force de chaque choc, cette force dépendant de l'énergie cinétique. Si l'on diminue le volume de l'enveloppe en maintenant la température constante (compression isotherme), on augmente la fréquence des chocs donc la pression. À l'inverse, si l'on agrandit l'enveloppe, on diminue la fréquence des chocs, et donc on diminue la pression. Ceci se retrouve dans les lois de comportement des gaz, par exemple dans la loi des gaz parfaits, la pression est inversement proportionnelle au volume :

 P  \propto  \frac{1}{V}

(la constante de proportionnalité vaut nRTn est la quantité de gaz et R est la constante des gaz parfaits). Si l'on prend un cylindre de section S constante et de longueur l variable par l'action d'un piston, on a

F = P \cdot S = \frac{A}{l}

soit pour de petites variations (développement limité de la fonction  \frac{1}{l} autour de l0) :

\Delta F \simeq - \frac{A}{l_0^2} \cdot (l-l_0)

qui est une loi linéaire (ou plutôt affine) en l.

On a bien un comportement élastique pour les gaz isothermes soumis à de faibles variations de volume.

Voir les articles Théorie cinétique des gaz et Pression cinétique.

Déformation élastique des solides

Exemple des ressorts

Le cas le plus simple de déformation élastique est celui des ressorts.

Ressorts elasticite.png
Trois exemples de ressorts : ressort à spires non-jointives sollicité selon son axe (fig. de gauche), ressort à lame sollicité en flexion (au centre), ressort à lame sollicité en torsion (à droite)

Sur les dessins, nous n'avons pas représenté la réaction du support auquel est accroché le ressort. Mais il faut bien voir que la déformation résulte de l'application de deux actions mécaniques opposées (forces et/ou couples) ; s'il n'y a qu'une seule force, en application du principe fondamental de la dynamique, la force accélère le ressort sans provoquer de déformation, on se ramène à la mécanique du point.

Lorsque les lois de déformation sont linéaires, le coefficient de proportionnalité est appelé raideur du ressort et est noté k :

  • F = k1 · Δl pour une traction-compression ;
  • F = k2 · θ pour une flexion ;
  • C = k3 · θ pour une torsion.

On remarque que les coefficients k1, k2 et k3 ne sont pas homogènes (ils n'ont pas la même dimension). L'angle θ doit être exprimé en radians.

Dans le cas d'un ressort à spires non-jointives, l'énergie de déformation élastique W est le travail de la force :

W = \int_0^{\Delta l} F \cdot dl

C'est donc la surface du triangle délimité par la droite dans le graphique (Δl,F), soit

W = 1/2 k1 Δl 2 = 1/2 · F · Δl

Ressort energie elastique.png
Illustration graphique de l'énergie de déformation élastique dans le cas d'un ressort à spires non-jointives


Note : sur la première figure, nous avons utilisé un graphique montrant la déformation en fonction de la force, par exemple (Fl). Sur la deuxième figure, nous avons inversé les axes et représenté la force en fonction de la déformation (Δl,F). Si la première représentation nous semble plus intuitive (on se représente la force comme la cause de la déformation), les deux sont équivalentes. C'est de fait la seconde, (Δl,F), qui est la plus utilisée, les essais de traction se faisant à déformation imposée croissante (voir l'explication dans l'article essais mécaniques).


Limite d'élasticité

La déformation élastique intervient pour les faibles sollicitations. Si l'on augmente les sollicitations, on change le mode de déformation :

  • rupture (endommagement) pour les matériaux dits « fragiles » :
  • déformation plastique (irréversible et non linéaire) puis rupture pour les matériaux dits « ductiles » ;
  • éventuellement fluage pour les matériaux ductiles si la vitesse de déformation est lente et la température élevée.

La contrainte délimitant le domaine élastique des autres domaines est appelée limite d'élasticité (yield strength en anglais).

Contrainte et déformation

On utilise deux modèles de déformation élastique : la traction-compression et le cisaillement. La flexion peut se modéliser selon les cas comme une traction-compression ou comme un cisaillement, la torsion se modélise comme un cisaillement (voir plus bas).

Traction-compression uniaxiale

Prenons le cas de la traction ou de la compression d'une pièce cylindrique ou parallélépipédique selon son axe. La traction-compression correspond à des forces s'exerçant perpendiculairement aux sections de ces pièces ; elle est dite uniaxiale car les côtés de la pièce ne sont pas contraints, toutes les forces sont sur un même axe.

Allongement dans l'axe

En prenant des pièces de différentes dimensions, on remarque que pour une force donnée :

  • l'allongement Δl est proportionnel à la longueur initiale l0 du cylindre ;
ceci se conçoit bien : si l'on met deux ressorts identiques bout-à-bout, le premier ressort transmet intégralement la force au second ressort, les deux s'allongent donc de la même quantité ; donc si avec un ressort on a un allongement Δl1, avec deux ressorts l'allongement total est 2Δl1 ;
  • l'allongement Δl est inversement proportionnel à la section du cylindre ;
on conçoit également aisément que si l'on met deux ressorts identiques en parallèle, chaque ressort exercera la moitié de la force de traction, l'allongement final sera donc Δ1/2 ; si l'on double la section de la pièce, c'est comme si l'on mettait deux pièces côte-à-côte.

Si l'on veut caractériser le matériau en faisant abstraction de la forme de la pièce et de ses dimensions, on définit donc :

  • l'allongement relatif ou déformation (strain en anglais), noté ε
\varepsilon = \frac{\Delta l}{l_0} = \frac{l - l_0}{l_0}
ε est sans dimension, on l'exprime parfois en % (100×Δl/l0)
  • la contrainte (stress en anglais), notée σ
\sigma = \frac{F}{S}
σ est homogène à une pression ; du fait des valeurs énormes mises en jeu, on l'exprime généralement en mégapascal (MPa).

Cylindre et parallelepipede deformation elastique.png

La loi élastique s'écrit alors :

σ = E ε

c'est la loi de Hooke ; E est le module de Young (Young's modulus en anglais), qui est une caractéristique du matériau. E est également homogène à une pression, du fait des valeurs très élevées qu'il prend, il est généralement exprimé en gigapascal (GPa).

On voit aisément que la densité d'énergie de déformation w, c'est-à-dire l'énergie élastique divisée par le volume de la pièce, vaut :

w = 1/2 · σ · ε = 1/2 · E ε²
Élargissement

Lorsque l'on exerce une traction ou une compression, on constate que la largeur de la pièce varie également, à l'inverse de l'allongement. La variation relative de dimension est proportionnelle à l'allongement relatif ε, le coefficient de proportionnalité s'appelle le coefficient de Poisson ou rapport de Poisson (Poisson's ratio en anglais) en hommage au mathématicien français Siméon Denis Poisson. Il est noté ν et est sans unité :

  • pour un cylindre :
\frac{\Delta r}{r_0} = - \nu \cdot \frac{\Delta l}{l_0} = - \nu \cdot \varepsilon
  • pour un parallélépipède rectangle :
\frac{\Delta a}{a_0} = - \nu \cdot \frac{\Delta l}{l_0} = - \nu \cdot \varepsilon
\frac{\Delta b}{b_0} = - \nu \cdot \frac{\Delta l}{l_0} = - \nu \cdot \varepsilon

Traction compression variations dimensionnelles.png

Considérons le volume de la pièce. Pour une pièce cylindrique, on a :

V = l × π r 2

Pour des petites variations, on a donc :

ΔV/V0 = Δl/l0 + 2·Δr/r0

(développement limité au premier ordre), soit :

ΔV/V0 = (1 - 2ν) · ε

De même pour une pièce parallélépipédique, on a :

V = l × a × b
ΔV/V0 = Δl/l0 + Δa/a0 + Δb/b0

donc de même :

ΔV/V0 = (1 - 2ν) · ε

On voit donc que :

si ν > 0,5 le volume diminue en traction et augmente en compression (cas exceptionnel) ;
si ν < 0,5 le volume augmente en traction et diminue en compression (comportement le plus général).

Pour un acier, ν vaut environ 0,3, on est donc dans le second cas.

Si maintenant on maintient la largeur constante — par exemple on effectue une compression mais la pièce est dans une gaine ultra-rigide et ne peut pas s'étendre —, alors, la déformation n'est plus uniaxiale, la gaine exerce une pression (une contrainte) sur les côtés de la pièce. Il faut alors utiliser un autre coefficient élastique, noté C11, différent de E :

σ = C11 · ε

Cisaillement

Si l'on considère un parallélépipède rectangle, le cisaillement est une variation de l'angle, qui n'est plus droit. Cela correspond à des forces s'exerçant parallèlement à la face.

On définit de même la contrainte comme étant la force divisée par la surface sur laquelle elle s'exerce ; cette contrainte est appelée cission (toujours exprimée en MPa) et est notée τ.

La déformation est l'écart à l'angle droit γ, appelé cisaillement, exprimé en radian.

Parallelepipede cisaillement.png

On a toujours une loi linéaire :

τ = G · γ

G est le module de cisaillement ou module de Coulomb, généralement exprimé en GPa. Dans le cas d'un milieu isotrope, le module de cisaillement est lié au module d'Young et au coefficient de Poisson par la relation suivante :

G = \frac{E}{2 \; (1 + \nu)}

Note : dans l'article Tenseur des déformations, l'angle γ défini vaut la moitié de l'angle γ défini ici.


Compression isostatique

Une compression isostatique est l'exercice d'une pression isotrope, c'est-à-dire qui a la même valeur dans toutes les directions. Si l'on désigne par V le volume de l'objet, la variation de volume relative est proportionnelle à la variation de la pression P :

Isostatic pressure deformation.png

\Delta P = -K \cdot \frac{\Delta V}{V_0}

K est le module d'élasticité à la compression isostatique[1] (bulk modulus en anglais). On remarque que K est l'inverse du coefficient de compressibilité isotherme χT défini en thermodynamique par :

\frac{1}{K} = \chi_T = -\frac{1}{V} \cdot \left ( \frac{\partial V}{\partial P} \right )_T

K est aussi homogène à une pression et est généralement exprimé en gigapascal (GPa). On a :

matériau K
acier 160 GPa
eau 2,2 GPa
air 0,000 1 GPa[2]

Dans le cas d'un milieu isotrope, le module d'élasticité isostatique K, le module de Young E et le module de cisaillement G sont liés par la relation suivante :

\frac{1}{E} = \frac{1}{9\;K} + \frac{1}{3\;G}

Cas des grandes déformations

La définition que l'on a prise de ε dépend du trajet suivi. Considérons une déformation finale de ε1 + ε2. Si l'on fait la déformation en une étape, la longueur finale est

l = l0(1 + ε1 + ε2)

Si par contre on déforme d'abord de ε1, on a une première longueur

l = l0(1 + ε1)

qui devient la longueur initiale pour l'étape suivante, donc lorsque l'on rajoute une déformation ε2, on obtient

l = l0(1 + ε1)(1 + ε2)

En développant cette dernière formule, on voit que les deux sont équivalentes si

ε1 · ε2 ≪ ε1 et ε1 · ε2 ≪ ε2

soit, de manière synthétique, si

ε² ≪ ε, soit ε ≪ 1 ;

c'est l'hypothèse des petites déformations.

Pour les grandes déformations, on peut utiliser une autre définition de ε :

\varepsilon = \ln \left ( \frac{l}{l_0} \right )

on voit que si l et l0 sont proches, le développement limité de cette formule redonne la définition de ε des petites déformations

Pourquoi les lois sont-elles linéaires ?

De manière générale, toute loi peut localement (c'est-à-dire pour de petites variations) se remplacer par un développement limité du premier ordre, ou « approximation linéaire », à condition que la tangente de la loi ne soit pas horizontale autour du point considéré. Les lois élastiques sont donc des approximations linéaires du comportement réel, plus complexe.

Plus précisément, l'explication de la linéarité se trouve dans la forme du potentiel interatomique W(r), où r est la distance entre deux atomes.

À une température de 0 K, la distance entre deux atomes est r0. Si l'on s'éloigne un peu de cette valeur, l'énergie W augmente ; on peut localement approcher la loi de W par une parabole (il s'agit en fait d'un développement limité au second ordre), on peut donc écrire :

W(r) = W0 + k · (r - r0)2.

Potentiel deformation elastique.png

La force étant la dérivée de l'énergie potentielle, on voit que les atomes sont soumis à une force de rappel (qui tend à faire revenir à r0) qui vaut :

F = 2k · (r - r0)

qui est bien une loi linéaire.

Déformations complexes

Nous avons vu jusqu'ici des exemples de déformation simples : traction uniaxiale, cisaillement, compression isostatique, sur un parallélépipède rectangle. Les applications réelles correspondent à des pièces et des sollicitations plus complexes, nécessitant de décrire la déformation et les contraintes par des matrices, des tenseurs, voir les articles :

Notes

  1. La notion de module de compressibilité est d'ambiguë puisqu'il s'agit de l'inverse de la dite compressibilité.
  2. l'équation des gaz parfaits nous donne χT = 1/P, soit K = P = 105 Pa = 10-4 GPa à une atmosphère.

Voir aussi

Articles connexes

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