Charles du fresne, sieur du cange

Charles du fresne, sieur du cange

Charles du Fresne, sieur du Cange

Charles du Fresne Du Cange
Charles Du Fresne, Seigneur Du Cange.JPG

Surnom(s) « Le Varron français »
Naissance 18 décembre 1610
Amiens
Décès 23 octobre 1688 (à 78 ans)
Paris
Nationalité France France
Profession(s) Historien, linguiste, philologue

Charles du Fresne, sieur du Cange ou Du Cange, né le 18 décembre 1610 à Amiens et mort le 23 octobre 1688 à Paris, est un historien, linguiste et philologue français.

D’une noble famille, dont la souche remontait à Hugues du Fresne, bailli d’Aire en 1214, Du Cange, après avoir terminé ses premières études chez les jésuites de sa ville natale, et avoir fait son droit à Orléans avec un égal succès, se fit inscrire au tableau des avocats en 1631, et plaida pendant quelque temps au barreau de Paris.

Mais cette carrière ne pouvait fixer un esprit comme le sien. Il revint à Amiens où il acquit la charge notariale de son père et tint compagnie à sa vieillesse, tout en amassant, à ses côtés, sans autre but que celui de satisfaire son penchant et sans aucune préoccupation d’avenir, les immenses connaissances en matière de théologie, philosophie, jurisprudence, humanités, histoires sacrée et profane, ancienne et moderne, générale et particulière qui devaient l’illustrer.

Rendu à la liberté par la mort de son père, il épousa, en 1638, Catherine du Bos, qui lui survécut avec deux fils et deux filles. Mais ni cette union, ni un office de trésorier de France en la généralité d'Amiens, acheté sept ans après au seigneur de Dancourt, son beau-frère, ne l’empêchèrent de trouver des loisirs et des heures précieuses pour l’étude qui l’a fait passer à la postérité comme linguiste philologue. Il laissa plusieurs dictionnaires et glossaires latins et grecs que l’on trouve aujourd’hui à la Bibliothèque nationale de France. Il se livra tout entier à des recherches sur l’antiquité et le Moyen Âge et mérita d’être surnommé le « Varron français ». Son œuvre permet de comprendre le passage opéré en France du latin classique au latin impérial, puis au latin médiéval et finalement au français.

Il a en outre édité plusieurs ouvrages précieux pour les études historiques. Le premier ouvrage qu’il publia est une Histoire de l’Empire de Constantinople sous les empereurs français, avec une version nouvelle de Geoffroi de Villehardouin, soldat-historien de la conquête, et un texte plus pur, illustré d’observations historiques et d’un glossaire (au Louvre, 1657, in-fol.). C’est moins une histoire élégante, animée, rapide, que l’œuvre consciencieuse d’un érudit, plus occupé du fond que des formes. Son second ouvrage, qui a pour titre : Traité historique du chef de saint Jean-Baptiste (Paris, 1665, in-4°), fut composé pour revendiquer la possession de cette relique, que plusieurs villes disputaient à sa ville natale.

En 1669, Du Cange, pour soustraire sa famille au fléau de la peste, qui ravageait cette ville et ses environs, vint fixer sa demeure à Paris. Cette année même, il mit sous presse, dans cette capitale, l’Histoire de saint Louis, écrite par le sire de Joinville, édition in-fol., enrichie de notes curieuses et de vingt-six dissertations sur l’origine des pannes et des couleurs héraldiques, les cris d’armes, la réception, le solde et la hiérarchie des chevaliers, l’oriflamme, la rançon de saint Louis, la prééminence des rois de France, etc.

Vint ensuite une édition de Jean Cinname, historien des empereurs Jean et Manuel Comnène, avec une traduction latine en regard du texte grec, accompagnée de notes historiques et philologiques, tant sur l’ouvrage en lui-même que sur Nicéphore de Brienne et Anne Comnène. Dans ce mince volume in-fol. (Paris, Imprimerie royale, 1670), Du Cange publia la Description de Sainte-Sophie, par Paul le Silentiaire, texte grec accompagné d’une version latine et suivi d’un riche commentaire.

Cependant, Colbert méditait un monument digne d’un grand siècle et d’une grande nation : c’était une collection de tous les historiens qui avaient écrit en divers temps sur des parties de l’histoire de France, projet qui ne fut exécuté que sous Louis XV. Ce ministre, qui appréciait Du Cange et se plaisait à l’entretenir souvent dans sa bibliothèque, jugea que personne n’était plus propre que lui à exécuter un aussi vaste travail, et celui-ci, répondant à ses désirs, composa un volumineux rapport où il passait en revue les annalistes et les chroniqueurs, l’époque où ils avaient fleuri, l’histoire qu’ils avaient traitée, le mérite de leur style et le poids de leur autorité, et dont le père Lelong a publié un extrait dans la Bibliothèque historique. Ce travail n’obtint pas l’approbation du gouvernement, qui prescrivit à Du Cange un plan si peu fait, selon lui, pour répondre à la dignité de la France, qu’il renvoya toutes les pièces qu’il avait entre les mains.

Libre de cette entreprise, qui eût consommé plusieurs de ses années, il se livra tout entier à la composition du glossaire latin que l’Europe attendait avec impatience, et qu’il publia en 3 vol. in-fol. (Paris, 1678) sous le titre : Glossarium ad scriptores mediae et infimae latinitatis, in quo, etc. Dans ce livre, Du Cange ne se borne pas à expliquer les mots dont la signification a été détournée avec le temps, ni à interpréter les termes étrangers naturalisés latins par le droit de conquête ; ces mots donnent lieu souvent à de véritables dissertations, étendues, approfondies et complètes sur la théologie ou la jurisprudence, sur les mœurs du moyen âge, sur les usages de la vie publique ou privée, sur le rite des églises et l’étiquette des cours, sur les dignités civiles, ecclésiastiques ou militaires. Vint ensuite le Glossarium ad scriptores mediæ et infimæ græcitatis; accidit appendix ad glossarium mediæ et infimæ latinitatis, una cum brevi etymologico lingæ gallicæ ex utroque glossario (Paris, 1688, 2 vol. in-fol.) qui furent accueillis, aux applaudissements unanimes de l’Europe savante, comme une conquête de l’érudition moderne sur les ténèbres du moyen âge.

L’intervalle qui sépare la publication de ces deux ouvrages ne fut pas stérile : l’auteur donna l’Histoire byzantine(Paris, 1680, in-fol.), éclaircie par un double commentaire dont l’un contient, outre les familles et les généalogies des empereurs de Constantinople, avec leurs médailles et quelques portraits, les familles dalmatiques et turques ; l’autre, une description de Constantinople, telle que fut cette ville sous les empereurs chrétiens. L’année 1686 vit une édition nouvelle en 2 vol. in-fol., des Annales de Zonare, texte grec, avec une version latine de Jérôme Wolphius, revue et annotée par Du Cange. Quelques notes sur Nicéphore Grégoras insérées dans les volumes qu’en a donnés Boivin sont dues encore à cet infatigable savant, le seul homme de France et peut-être de l’Europe, canote au l’a dit, qui eût lu d’un bout à l’autre la Byzantine en grec.

Du Cange termina ses publications avec le Chronicon paschale a mundo condito ad Heraclii imperatoris annum vicesimum (Paris, 1689, in-fol.), tissu anonyme de divers auteurs, manuscrit découvert au milieu du XVIIe siècle en Sicile et mis au jour avant lui sous des titres qui en donnent une fausse idée, puisqu’il n’embrasse ni les fastes de la Sicile (fasta sicula) ni l’histoire d’Alexandrie (Chronicon Alexandrinum). Mais Du Cange, en réimprimant le texte corrigé, avec une nouvelle traduction latine, accompagnée de notes historiques et chronologiques, l’annonça sous un titre plus exact, car il est à la fois une chronique sèche et une supputation des années, des mois et des lunes, afin de trouver les jours auxquels on doit célébrer Pâques et les fêles mobiles.

Du Cange fut, après cinquante-cinq années d’une santé parfaite, attaqué d’une rétention d’urine pendant l’impression de cet ouvrage. Rien n’égala les douleurs aiguës de ses derniers jours, que sa constance à les supporter, vertu qu’il avait puisée dans une piété solide, le guide de toute sa vie et la compagne de sa mort. Il expira âgé de soixante-dix-huit ans.

Étienne Baluze, chargé par l’éditeur mourant de surveiller l’impression du Chronicon paschale, a tracé le portrait de son ami Du Cange dans une épître latine écrite à la postérité sous l’adresse de l’abbé Renaudot et mise en tête de l’édition. « Ducange, y est-il dit, était d’une taille un peu au-dessous de la moyenne ; il avait la tête bien proportionnée, les yeux charmants et pleins de feu, une belle figure, les traits distingués et l’air noble. S’il ne jouissait pas d’une extrême opulence, il possédait néanmoins une fortune honnête, et n’en désira jamais une plus grande, répétant qu’un homme de lettres devait se contenter d’une aisance qui lui permit de satisfaire son goût pour les livres. D’une humeur égale, jamais incommode, ne fatiguant personne, se prêtant sans réserve à ceux qui imploraient son appui, communiquant avec facilité les fruits de ses études, il était plus enclin à mériter les récompenses qu’à les solliciter. En effet, parmi les membres de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, on n’a pas vu siéger ce savant laborieux, dont les travaux égalaient peut-être ceux de la compagnie entière. »

Le gouvernement vint aussi trop tard honorer, par une modique pension de huit cents livres, les deux dernières années d’une vie si pleine. Louis XIV en accorda une de 2 000 aux quatre enfants qu’il laissa. Les vastes labeurs dont nous avons parlé ne sont pas les seuls qui honorent la mémoire de Du Cange. Il laissa plusieurs manuscrits en état d’être imprimés, et un recueil immense d’extraits, de pièces et de matériaux pour la composition d’ouvrages aussi étendus et non moins importants que ses ouvrages publiés, qui sont déposés à la Bibliothèque du Roi, et dont l’impression fut plusieurs fois annoncée, parmi lesquels : Histoire des principautés et des royaumes de Jérusalem, de Chypre et d’Arménie sous les princes latins ; Histoire des comtes d’Amiens, des comtes de Ponthieu, des vicomtes d’Abbeville, des seigneurs de Saint-Valéry, etc ; Projet d’une histoire de Picardie ; Recueil de matériaux pour une histoire de France par dignités ; Traité des armoiries, de leur origine et usage [1]; Ébauche d’un dictionnaire universel sur différentes matières, continué depuis A jusqu’à V ; Esquisse d’une géographie universelle de la Gaule, monument d’érudition et fruit de la plus immense lecture.

Cet immense savoir valut à Du Cange la qualification de « Varron français » à l’esprit laborieux qui l’avait acquis, honneur au-dessus duquel Bayle semblerait l’exhausser, car il écrit que les « nations les plus illustres ne sauraient mettre aucun des leurs en parallèle avec notre Ducange » ; « homme extraordinaire, s’écrie Baillet, suscité pour délivrer huit ou neuf siècles de la tyrannie des barbares ! » Du Cange est également parmi les historiens les plus cités par Edward Gibbon dans son ouvrage Déclin et chute de l’empire romain. Dans une note, Gibbon en parle comme de notre « sûr et infatigable guide au moyen Âge et dans l’Histoire byzantine. »

Une statue en bronze a été érigée à Du Cange à Amiens en 1849. Une Étude sur sa vie et ses ouvrages a été publiée par Léon Feugère, Paris, 1852.

Sommaire

Œuvres imprimées

  • Histoire de l’Empire de Constantinople sous les empereurs français (1657), in folio faisant suite à Histoire de la conquête de Ville-Hardouin
  • Histoire de Saint Louis par Jean de Joinville, 1668, in-fol.
  • Glossarium mediœ et infimœ latinitatis, 1678 - 1887 (nombreuses rééditions, continuellement augmentées). Édition de Favre (1883-1887), consultable en mode image (Gallica), PDF images téléchargeables (Université de Stanford), consultable et cherchable en mode texte (École nationale des chartes, projet de numérisation en cours, toutes les lettres ne sont pas encore disponibles : en septembre 2009, seules les initiales O à Z le sont, il est prévu que les autres le soient pour la fin de la même année)
  • Historia byzantina, (Histoire byzantine), 1680, in fol.
  • Zonaras, 1686, 2 vol. in-fol.
  • Glossarium mediœ et infimœ grœcitatis, 1688, 2 vol. in-fol., ouvrages indispensables pour la lecture des écrits du moyen âge

Il a laissé de nombreux manuscrits, entre autres une Géographie de la France par provinces.

Bibliographie

Le Glossarium latinitatis a été abrégé par Johann Christoph Adelung et réimprimé, avec de nombreuses additions, par les Bénédictins, 1733-1736 (dont Maur Dantine), et par G. A. Louis Henschel, chez MM. Didot 1840-1861, 8 vol. in-4.

Source

  • William Duckett fils, Dictionnaire de la conversation et de la lecture, t. 8, Paris, Michel Lévy, 1854, p. 102-3.

Notes

  1. Thibaut Girard, Le Traité du droit et du comportement des armes de Du Cange. Édition critique et commentaire, thèse d'École des chartes (non publiée), 1986
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