Thermoïonique

Thermoïonique
Vue rapprochée d'une lampe au mercure à basse pression montrant une émission lumineuse autour de la partie centrale du filament. Cette émission lumineuse est provoquée par une émission thermoïonique. La couche blanche du filament est habituellement composée d'oxydes de baryum, de strontium et de calcium. Les émissions thermoïoniques provoquent sa disparition petit à petit, ce qui mène à la destruction du filament.

Une émission thermoïonique est un flux d'électrons provenant d'un métal ou d'un oxyde métallique, qui est provoqué par les vibrations des atomes dues à l'énergie thermique lorsque ceux-ci parviennent à surmonter les forces électrostatiques. L'effet croit de manière importante avec l'augmentation de la température, mais est toujours présent pour les températures au-dessus du zéro absolu. La science en rapport avec ce phénomène est la thermoélectricité. Les particules chargées sont appelées « thermions ».

Sommaire

Histoire

Cet effet est rapporté en 1873 par Frederick Guthrie en Grande-Bretagne, alors qu'il effectue un travail sur les objets chargés. Le Professeur Guthrie découvre qu'une sphère de fer chauffée au rouge et chargée négativement, perd sa charge. Il découvre aussi que cela ne se produit pas si la sphère possède une charge positive.

On peut également citer les travaux de J.W.Hittorf qui étudie la conductibilité de l’air au voisinage des métaux chauffés au rouge, lorsqu'il constate le même phénomène dans l’action de l’électricité sur les gaz raréfiés.

Owen Richardson travailla sur l'émission thermoïonique et reçu le prix Nobel en 1928 « Pour son travail sur le phénomène thermoïonique et plus spécialement pour la découverte de la loi portant maintenant son nom ».

Loi de Richardson

Dans chaque métal, il y a un ou deux électrons libres qui peuvent se déplacer d'un atome à un autre. Cela est parfois appelé « mer d'électrons ». Leur énergie suit une distribution statistique, au lieu d'être uniforme, et sous certaines conditions un électron pourra avoir une énergie suffisante pour partir du métal sans y revenir. L'énergie minimum nécessaire pour qu'un électron puisse quitter la surface est appelée le travail de sortie, et varie d'un métal à l'autre. Pour les tubes électroniques, une fine couche d'oxyde est souvent appliquée à la surface du métal pour obtenir un travail de sortie plus bas, ce qui facilite le départ des électrons de la surface.

L'équation de Richardson énonce que la densité de courant émis J (A/m2) est relative à la température T par l'équation :

J = A_G T^2 e^{-W \over k T}

T est la température du métal en Kelvins, W est le travail de sortie du métal en électron-volt, k est la constante de Boltzmann, et AG la constante de Richardson. L'exponentielle dans l'équation montre que le courant émis augmente énormément avec la température et tend à devenir proportionnel au carré de celle-ci pour les températures élevées. Les équations de l'émission thermoïonique sont importantes dans la conception des semi-conducteurs.

De 1911 à 1930, comme la compréhension physique du comportement des électrons dans les métaux augmentait, plusieurs expressions théoriques furent proposées pour AG par Richardson, Dushman, Fowler, Sommerfeld et Nordheim. Au début du XXIe siècle, la forme précise de cette expression est encore débattue par les spécialistes théoriques, mais il y a une entente que AG devrait s'écrire comme :

 A_{\mathrm{G}} = \; \lambda_{\mathrm{R}} A_0

λR est un facteur correctif lié au matériau (d'une valeur proche de 0,5) et A0 est une constante universelle donnée par

A_0 = {4 \pi m k^2 e \over h^3} = 1.20173 \times 10^6\,\mathrm{A\,m^{-2}\,K^{-2}}

m et e représentent la masse et la charge de l'électron, et h est la constante de Planck.

Vers 1930, il y avait accord que, à cause de la nature ondulatoire de l'électron, une partie rav des électrons sortants sont réfléchis lorsqu'ils atteignent la surface de l'émetteur, ce qui réduit la densité du courant d'émission : λR aurait la valeur (1-rav). C'est pourquoi l'équation de l'émission thermoïonique est écrit ainsi :

J = (1-r_{\mathrm{av}}) A_0 T^2 \mathrm{e}^{-W \over k T}.

Cependant, un traitement théorique plus récent par Modinos fait l'hypothèse que la bande de valence du matériau émetteur doit aussi être prise en compte. Cela introduit un deuxième facteur de correction λB pour λR, ce qui donne AG = λB(1 − rav)A0.

Les valeurs expérimentales du coefficient AG sont généralement du même ordre de magnitude que A0, mais diffèrent sensiblement entre les matériaux émetteurs, ainsi que selon la face cristallographique du même matériau. De façon qualitative, ces différences expérimentales s'expliquent par des valeurs différentes de λR.

Une confusion importante existe dans la littérature à ce sujet : (1) plusieurs articles ne distinguent pas AG de A0, n'utilisant que A (ou parfois le terme « constante de Richardson ») ; (2) les équations qui ont recours ou non au facteur de correction (λR) reçoivent le même nom ; et (3) différents noms sont donnés à ces équations, dont « équation de Richardson », « équation de Dushman », « équation de Richardson-Dushman » et « équation de Richardson-Laue-Dushman ».

L'effet Edison

L'effet Edison dans une diode à vide. Celle-ci est connectée de deux façons : en direct, les électrons circulent. En inverse, il n'y a aucun flux. Les flèches représentent la circulation d'électrons dans le vide.

L'effet fut re-découvert accidentellement en 1880, par Thomas Edison, alors qu'il essayait d'expliquer la rupture du filament et le noircissement du verre des lampes incandescentes. Edison construisit une ampoule avec la surface interne recouverte d'une feuille d'étain. Quand il connectait la feuille au filament au travers d'un galvanomètre, en appliquant une tension négative à la feuille par rapport au filament, rien ne se passait. Mais, quand il augmentait la tension de la feuille de manière à atteindre une tension positive par rapport au filament, une petite circulation de courant était indiquée par le galvanomètre : des électrons étaient émis par le filament chaud et attirés par la feuille, fermant ainsi le circuit. Cette unidirectionalité du courant fut appelée l'effet Edison (ce terme est parfois utilisé comme référence à l'effet thermoïonique lui-même). Bien qu'Edison ne voyait pas d'application pour cet effet, il le breveta en 1883, mais ne l'étudia plus.

La diode à vide

Le physicien anglais John Ambrose Fleming, alors qu'il travaillait pour la société « Wireless Telegraphy », découvrit que l'effet Edison pouvait être utilisé pour la détection des ondes radios. Fleming développa un tube électronique à deux éléments connu sous le nom de diode à vide, qu'il breveta le 16 novembre 1904. La diode thermoïonique peut aussi être configurée comme un convertisseur différence de chaleur/énergie électrique et ce sans pièces mobiles.

Émission Schottky

Dans les appareils à émission d'électrons, et particulièrement dans les canon à électrons, l'émetteur thermo-ionique est électrisé négativement par rapport à l'ambiance. Il se crée pour cette raison un champ électrique d'intensité F à sa surface. En l'absence de ce champ, la barrière de potentiel de surface que traverse un électron éjecté du niveau de Fermi présente une épaisseur W égale au travail de sortie. Le champ électrique diminue la barrière de potentiel d'une valeur ΔW, ce qui augmente l'intensité émise : c'est l’« effet Schottky », ou amplification par effet de champ de l’émission thermo-ionique. On peut la modéliser en adaptant légèrement l'équation de Richardson : à W on substitue l'épaisseur modifiée de la barrière de potentiel (W − ΔW). On obtient donc l’équation[1],[2] :

J (F,T,W) = A_{\mathrm{G}} T^2 e^{ - (W - \Delta W) \over k T}
\Delta W =  \sqrt{e^3 F \over 4\pi \epsilon_0},

ε0 est la constante diélectrique (ou permittivité du vide).

L'apparition d'un courant électrique engendré dans des conditions thermiques et électriques telles que cette équation s'applique, est appelée émission Schottky. L’équation de Schottky est précise pour des champs électrique d'intensité inférieure à 108 V/m. Pour un champ électrique d'intensité supérieure à 108 V/m, l’effet tunnel de Fowler-Nordheim (FN) vient altérer sensiblement l'intensité de ce courant électrique : à un tel régime, en effet, l'action combinée de l'effet Schottky et de l'effet de champ se modélise par l'équation de Murphy-Good relative à l'effet thermoélectrique[3]. Dans les champs encore plus intenses, l'effet tunnel Fowler-Nordheim finit par devenir dominant, et l'émetteur se comporte comme une cathode froide dans l'Émission par effet de champ.

L’émission thermo-ionique peut également se trouver amplifiée par interaction avec d'autres formes d’excitation comme la lumière[4]. Par exemple, la vapeur de césium excitée des convertisseurs thermo-ioniques forme des amas de Rydberg de césium qui font décroître le potentiel d'émission du collecteur de 1,5 eV à 1, voire 0,7 eV. Étant donnée la persistance des édifices de Rydberg ce potentiel reste diminué suffisamment longtemps pour que l'efficacité du convertisseur froid s'en trouve affectée[5].

Notes et références

  1. D'après M.E. Kiziroglou, X. Li, A.A. Zhukov, P.A.J. de Groot, C.H. de Groot, « Thermionic field emission at electrodeposited Ni-Si Schottky barriers », dans Solid-State Electronics, vol. 52, no 7, juillet 2008, p. 1032-1038 (ISSN 0038-1101) [Sciencedirect.com texte intégral] , doi=10.1016/j.sse.2008.03.002
  2. Jon Orloff, Handbook of Charged Particle Optics, CRC Press, 1997 (réimpr. 2e édition : 2008) (ISBN 978-1420045543) [lire en ligne (page consultée le 16 avril 2010)], « Schottky emission », p. 5–6 
  3. D'après E. L. Murphy, R.H. Good, « Thermionic Emission, Field Emission, and the Transition Region », dans Phys. Rev., vol. 102, no 6, 1956, p. 1464-1473 .
  4. D'après A.G. Mal'shukov1 et K.A. Chao, « Opto-Thermionic Refrigeration in Semiconductor Heterostructures », dans Phys. Rev. Letter, no 86, 2001, p. 5570-5573 .
  5. Cf. R. Svensson, L. Holmlid, « Very low work function surfaces from condensed excited states: Rydberg matter of cesium », dans Surface Science, vol. 269/270, 1992, p. 695-699 , doi=10.1016/0039-6028(92)91335-9.

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