Peuplement de l'Asie du Sud-Est

Peuplement de l'Asie du Sud-Est

Cet article présente les hypothèses et les découvertes reliées au peuplement de l'Asie du Sud-Est.

Sommaire

Les premiers habitants

Migrations humaines et ADN mitochondrial (datations en milliers d'années avant le présent) :
  • Africain: L, L1, L2, L3, L3
  • Méditerranée: I, N
  • Europe du Sud et Ouest: J, K, X
  • Europe générale: H, V, X
  • Europe du Nord: T, U, X
  • Asie: A, B, C, D, E, F, G
  • Australie : M
  • Amérique: A, B, C, D, et X

On pense que les premiers habitants de l'Asie du Sud-Est sont les ancêtres de populations qu'on désigne sous le nom général de Négritos et qui regroupent notamment :

Ce nom, qui signifie petit Noir en espagnol, a été donné par les premiers visiteurs espagnols des Philippines, qui pensaient que ces populations venaient d'Afrique en raison de leur apparence physique et de leur petite taille.

Par ailleurs, on a retrouvé, dans la Grande Grotte de Niah au Sarawak un crâne humain qu'on a daté de 40 000 ans. Toutefois, le lien avec les ancêtres des Négritos n'a pas été établi.

On a tenté de reconstituer les grandes migrations humaines de la préhistoire à partir de l'ADN mitochondrial.

Les peuples de langues papoues

Il y a environ 21 000 ans, la Nouvelle-Guinée était reliée à l'Australie, formant la masse continentale appelée "Sahul". L'Australie avait été peuplée il y a au moins 40 000 ans par des migrations depuis l'actuel continent asiatique. Ces migrations ont forcément eu lieu par voie maritime (voir l'article Ligne Wallace).

Des migrations avaient également pu avoir eu lieu directement de l'Asie vers la Nouvelle-Guinée et les îles Salomon.

Les peuples de langues austroasiatiques

Article détaillé : Orang Asli.

Les peuples de langues austronésiennes

Dès 1706, le philologue hollandais Hadrian Reland avait souligné les ressemblances entre le malais, le malgache et la langue parlée à Futuna dans le Pacifique (à partir du glossaire recueilli en 1616 par le navigateur Jacob Le Maire à Futuna).

L'existence d'une famille linguistique qui s'étend de Madagascar à l'ouest aux îles du Pacifique à l'est est définitivement établie par Lorenzo Hervás y Panduro en 1784 (Catalogo delle Lingue).

En 1834, cette famille, étendue à l'île de Pâques, est baptisée "malayo-polynésienne" par le linguiste Wilhelm von Humboldt (frère du navigateur Alexander von Humboldt).

On appelle désormais cette famille, langues austronésiennes. Ces langues sont parlées à Taïwan, en Asie du Sud-Est, dans l'océan Pacifique et à Madagascar. Leur foyer d'origine semble être Taïwan.

Il y a 8 000 ans ont lieu des "révolutions néolithiques" dans le centre et le sud de la Chine actuelle, dans les bassins des fleuves Yang-tsé et Huang He. Les hommes commencent à cultiver le millet et le riz. Les ancêtres des Austronésiens habitaient vraisemblablement les plaines du littoral de la Chine du Sud. Les ancêtres des Tai-kadai, des Austroasiatiques et des Sino-tibétains habitaient plutôt les collines et piémonts. Des linguistes essaient de reconstituer une proto-langue commune austronésienne-tai kadai sur la base d'un vocabulaire commun entre les deux familles, notamment dans les domaines de l'agriculture et de l'élevage. On a en particulier identifié des mots communs pour le champ inondé, le riz, le taro, la canne à sucre, le bétail, le buffle, la hache, la pirogue[1].

Il y a 5 000 ans, des habitants du littoral commencent à traverser le détroit pour s'installer à Taïwan. Il y a environ 4 000 ans, des migrations ont lieu de Taïwan vers les Philippines. De nouvelles migrations commencent bientôt des Philippines vers Sulawesi et Timor et de là, les autres îles de l'archipel indonésien. Il y a 3 500 ans, un autre mouvement mène des Philippines en Nouvelle-Guinée et au delà, les îles du Pacifique. Les Austronésiens sont sans doute les premiers grands navigateurs de l'histoire de l'humanité.

Les raisons qui ont poussé les ancêtres des Austronésiens à quitter le continent pour Taïwan et plus tard, partir de cette dernière pour les Philippines et au delà, les îles du Pacifique d'une part et l'archipel indonésien d'autre part, est encore objet de spéculation. L'archéologie est insuffisante pour reconstituer leurs migrations. Il faut alors faire appel à la linguistique. Ainsi, à partir de la répartition actuelle des langues austronésiennes et en étudiant ce qu'on appelle leur genèse phylétique, on est prévenu à reconstituer un itinéraire des migrations de ces groupes.

Quoi qu'il en soit, un trait incontestable des populations austronésiennes est leur capacité à s'adapter à des contextes écologiques contrastés, comme en témoignent la diversité des environnements dans lesquels ils se sont établis. H. Forestier et D. Guillaud émettent un postulat, à savoir que "la différenciation est une caractéristique intrinsèque du groupe des Austronésiens" [2].

Les priorités économiques des Austronésiens semblent avoir été l'occupation de zones côtières. Après avoir migré vers les Philippines il y a 4 000 ans, une séparation s'opère. Des groupes commencent à migrer vers Sulawesi et Timor. Puis, ils se dispersent dans l'archipel indonésien.

Les conditions locales semblent plus favorable à la culture du millet. Les Austronésiens "oublient" donc la culture du riz qu'ils pratiquaient sur le littoral chinois. Au début de l'ère chrétienne, on connaît en Inde l'île de Java sous le nom de Yavadvipa en raison de son millet (yava). Un "retour" au riz sera possible à travers une redomestication de cette plante.

L'étude de l'organisation socio-politique de différentes populations austronésiennes actuelles révèle une structuration autour de lignages descendant d'un personnage fondateur qui forment des clans liés à un territoire et produisent une superstructure héréditaire à partir d'un chef, le datu(k). On constate un lien étroit entre organisation sociale et expression spatiale.

On ne peut s'empêcher de trouver un paradoxe entre les origines de la Chine méridionale, avec ses sociétés sédentaires paysannes et leurs systèmes sociaux complexes et hiérarchisés, et le phénomène.

Il semble qu'une constante qui régule le fonctionnement des sociétés austronésiennes soit l'opposition entre l'aîné du clan, qui détient la légitimité du pouvoir et garantit la perpétuation de l'ordre social, et le cadet, qui se retrouve dans une position de contestataire de l'autorité. Les mythes de fondation font souvent référence à un conflit aîné-cadet. Les noms des héros fondateurs comportent souvent le mot bungsu ou mweawu, qui signifie cadet.

Une explication de cette propension des Austronésiens à migrer toujours plus loin pourrait donc s'expliquer par la décision d'un groupe de suivre un cadet entré en conflit avec son aîné chef de clan.

Toutefois, la biologie ne semble pas indiquer que des migrations humaines aient systématiquement accompagné ces diffusions culturelles. Une étude[3] sur la variation du chromosome Y menée par un groupe de biologistes des États-Unis, d'Italie, du Royaume Uni et de Taïwan conclut à un héritage paternel dans la majorité des habitants d'Indonésie et d'Océanie provenant de populations établies dans la région depuis le Pléistocène (c'est-à-dire il y a plus de 10 000 ans avant le présent, donc antérieurement aux migrations austronésiennes). Cette étude montre par ailleurs un apport génétique chez les Indonésiens en provenance du nord (Philippines et Taïwan) associé à des populations d'agriculteurs, donc datant du Néolithique. Selon cette étude, tout se passe comme si les habitants de l'Océanie avaient adopté au néolithique la langue et les techniques de populations originaires des Philippines sans que cela se traduise par l'établissement de celles-ci dans la région. En revanche, des populations venues du nord se seraient établies en Indonésie, sans doute moins densément peuplée au néolithique.

Références

  1. Laurent Sagart, The Peopling of East Asia : Putting Together Archaeology, Linguistics and Genetics, 2005
  2. Hubert Forestier et Dominique Guillaud, "Des Austronésiens en Asie-Pacifique : continuité et rupture sur le chemin des migrations anciennes", Aséame, 16, décembre 2005, pp. 11-40
  3. Cristian Capelli et autres, « A predominantly indigenous paternal heritage for the Austronesian-speaking peoples of insular Southeast Asia and Oceania » [PDF], American Journal of Human Genetics, 68, 2001

Voir aussi

Article connexe


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