Référé contractuel

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Contrat administratif en France

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En droit français, un contrat administratif est un contrat conclu par au moins une personne publique et dont la connaissance appartient au juge administratif. Il peut être qualifié de tel par la loi, ou par la jurisprudence s'il porte sur l'exécution d'un service public ou comporte des clauses exorbitantes du droit commun.

On peut distinguer plusieurs types de contrat administratif, notamment:

Sommaire

Distinction entre les contrats administratifs et ceux de droit commun

Détermination par la loi

Une catégorie de contrat peut être qualifiée d'administratif par la loi. C'est le cas des marchés publics, des contrats de partenariat ainsi que des contrats d'occupation du domaine public.

Pour le professeur René Chapus, la détermination par la loi se confondrait avec la détermination selon l'objet en ce que la loi ne ferait que prendre acte d'une réalité provenant de l'objet du contrat.

Détermination par la jurisprudence

La jurisprudence utilise deux critères cumulatifs: le critère organique et le critère matériel.

Le critère organique

Le contrat est en principe administratif s'il contient au moins une personne publique partie au contrat.

Pour les contrats entre deux personnes publiques le juge a affirmé qu'il y avait une "présomption d'administrativité" (T.C Union des Assurances de Paris, 21 mars 1983). Cette présomption est simple et cède si le contrat ne met en jeu que des rapports de droit privé. Il en est ainsi pour tous les contrats entre un usager qui serait une personne publique et un service public industriel et commercial.

A contrario, le contrat conclu entre deux personnes privées est en principe de droit privé même si l'une des personnes privées est chargée d'un service public. Mais le juge administratif a appliqué les notions de mandat et de représentation pour admettre que ce type de contrat pouvait être administratif dès lors qu'une des parties agit "pour le compte d'une personne publique" (C.E (Sté Brossette 30 janvier 1931). En fait l'acception de ces contrats signés entre personnes privées comme contrats administratifs constitue une exception au principe qui veut que ces contrats soient privés.ainsi ces contrats peuvent etre administratifs si l'un des co contractants a agit au nom et pour le compte d'une personne morale de droit public ou s'il a été mandaté par celle-ci(T.C 8 juillet 1963 Sté Entreprise Peyrot).

Le critère matériel

Le critère matériel se base sur deux critères alternatifs.

Les clauses ou le régime

Un contrat peut être administratif si ses clauses sont exorbitantes du droit commun (C.E 31 juillet 1912, Societé des granits porphyroïdes des Vosges) ou bien si son régime est exorbitant du droit commun(CE section, 19 janvier 1973, Société d'exploitation électrique de la rivière du Sant).

  • Les clauses exorbitantes du droit commun sont les clauses conférant aux parties des droits et obligations étrangers par nature à ceux librement consenti dans les contrats de droit privé (C.E, 20 octobre 1950, Stein)
  • Le régime exorbitant du droit commun est apprécié en fonction d'une "ambiance de droit public"(P.Weil, Le critère du contrat administratif en crise,Mélanges Waline,p.847). Ainsi le contrat est soumis à des règles provenant d’un texte législatif et/ou réglementaire, applicables indépendamment de la volonté des parties, et dérogeant au droit commun.
L'objet

Un contrat peut être administratif s'il est relatif à l'organisation et à l'exécution d'un service public (C.E. 20 avril 1956 époux Bertin).

C'est le cas pour:

  • Les contrats de délégation de service public
  • Les contrats d'engagement de personnel par une personne publique exerçant un service public administratif même si l'agent ne participe pas à l'exercice du service public (T.C. 1996 Berkani)
  • les contrats conclus avec les usagers des services publics administratifs

Les contrats conclus pour la réalisation de travaux ou ouvrages d'art routiers sont toujours administratifs même s'ils sont conclus entre deux personnes privées.

Le régime du Contrat administratif

L'exécution du contrat administratif

Le contrat administratif est marqué par le déséquilibre: déséquilibre lié à la nature des parties (personne publique et personne privée) et aux intérêts en jeu (intérêt privé et intérêt général). Ce déséquilibre a comme conséquence que les principes régissant les obligations et les droits des parties sont différents.

Les pouvoirs de l'administration

  • L'obligation est en principe personnelle pour la personne privée qui ne peut donc céder son obligation.
  • Le pouvoir de direction de l'exécution du contrat, se traduisant notamment par l'émission d'ordres de services ( arrêt Serrand ,CE 22 avril 1996)
  • Le pouvoir de contrôle de l'exécution du contrat
  • Le pouvoir de sanction en cas de faute
  • Le pouvoir de modification pour motif d'intérêt général, moyennant le respect de l'équilibre financier du contrat
  • Le pouvoir de résiliation pour motif d'intérêt général, moyennant indemnisation de son cocontractant

Les obligations du co-contractant

  • Le cocontractant est obligé de déclarer ses sous-traitants que l'administration doit alors agréer. L'administration paie alors directement les sous-traitants agrées.
  • Le cocontractant ne peut faire de cession de contrat sans autorisation de l'administration. Mais l'administration ne peut refuser la cession si le nouveau contractant proposé est tout aussi capable que l'ancien....

Les droits du co-contractant

Le droit à une rémunération

Il se traduit par le droit au règlement du prix ou de la redevance. Le Conseil d'État a ainsi jugé dans une décision du 29 septembre 2000, Société DEZELLUS METAL INDUSTRIE, au Rec. CE, que « si le caractère définitif des prix stipulés à un marché s'oppose en principe à toute modification ultérieure de ces prix par l'une des parties, ce principe ne fait pas obstacle à ce que l'une des parties obtienne, en cas de résiliation du contrat pour un motif autre que la faute du cocontractant de l'administration, le paiement des travaux qu'elle a réellement exécutés ».

Le droit aux indemnités

L'indemnisation est due au co-contractant quand il y a une rupture de l'équilibre financier.

Cela peut provenir d'un fait intérieur à l'administration; c'est le cas du fait du prince.

Elle peut également être due à des évènements extérieurs

  • théorie de l'imprévision : c'est un obstacle physique imprévisible au moment de la conclusion du contrat par les parties.
  • ou de la force majeure.

Pour l'imprévision, l'indemnisation par l'administration se fait dans le but d'assurer la continuité du service public, mais aussi il y a ce que l'on appelle les sujétions imprévues qui sont des faits matériels entrainant une simple difficulté dans l'exécution du contrat. En cas de sujétion imprévue, l'administration doit indemniser partiellement son cocontractant pour lui permettre la continuité de l'exécution du contrat.

Le contentieux des contrats administratifs

Le contentieux s'exprime par divers recours possibles devant le juge administratif: le reféré précontractuel, le contentieux contractuel et le recours pour excès de pouvoir.

Le référé précontractuel

Il est prévu par l'article L. 551-1 du code de justice administrative pour les marchés des pouvoirs adjudicateurs et par les dispositions de l'article L. 551-2 du même code s'agissant des marchés passés par les entités adjudicatrices.

Le référé précontractuel sanctionne le manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence par le pouvoir adjudicateur dans le cadre de la passation d'un contrat public.

Depuis l'arrêt SMIRGEOMES du 3 octobre 2008, le Conseil d'Etat exige désormais qu'une entreprise n'a intérêt à agir dans le cadre du référé précontractuel uniquement si elle se prévaut de "manquements qui, eu égard à leur portée et au stade de la procédure auquel ils se rapportent, sont susceptibles de l'avoir lésée ou risquent de la léser, fût-ce de façon indirecte en avantageant une entreprise concurrente". Le Conseil d'Etat a interprété de manière restrictive l'article L551-1 du Code de justice administrative sur la base duquel il était possible pour une entreprise d'agir par le biais du référé précontractuel alors même qu'aucun manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence ne l'avait lésée. En réduisant le champ des personnes ayant intérêt à agir, le juge administratif poursuit le travail entrepris par la jurisprudence "Société Tropic Travaux Signalisation" du 16 juillet 2007, le recours contre un contrat public s'écarte du contentieux objectif.

Le juge des référés statue avant la conclusion du contrat, en cas de manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Pendant son délai pour statuer qui est de 20 jours, il peut suspendre la signature du contrat.

Le contentieux contractuel

Le juge du plein contentieux ne pouvait être saisi que par les parties. Depuis l'arrêt Société Tropic Travaux Signalisation du 16 juillet 2007, le contrat peut désormais être attaqué directement par les concurrents évincés.

Le juge administratif dispose dans ce cadre d'une large palette de pouvoirs : annulation totale ou partielle, réformation, indemnisation, etc.

Le juge du contrat

Le juge du contrat ne peut être saisi que par les parties au contrat. Il dispose de larges pouvoir, dont celui de constater les nullités, d'indemniser les parties, etc.

Le référé contractuel

Issu de la transposition de la directive européenne (directive « Recours » du 11 décembre 2007) par l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009, le référé contractuel s'appliquera aux contrats de la commande publique pour lesquels une consultation aura été engagée à partir du 1er décembre 2009.

Ce référé est ouvert aux personnes ayant eu un intérêt à conclure le contrat et qui ont été susceptibles d'être lésées par un manquement aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Une personne ayant exercé un référé précontractuel ne sera pas recevable à exercer le référé contractuel si le pouvoir adjudicateur a respecté l'obligation de ne pas signer le contrat durant l'instance et s'est conformé à la décision rendue sur ce recours précontractuel.

Le juge du référé contractuel peut prononcer la suspension de l'exécution du contrat (avant la décision au fond), prononcer la nullité du contrat, décider de son abrègement ou prononcer des pénalités financières ne pouvant excéder 20% du montant hors taxes du contrat. Le juge est tenu de prononcer la nullité en cas de manquements graves aux obligations de publicité et de mise en concurrence, sauf raisons impérieuses d'intérêt général.

Le recours en appréciation de la validité d'un contrat (jurisprudence Société Tropic Travaux Signalisation)

À la question qui lui était soumise, à savoir la recevabilité d’un tiers pour agir contre un contrat administratif, le Conseil d’État a longtemps répondu négativement.

En 2007, il est revenu sur cette jurisprudence ancienne et a décidé la création d’un nouveau recours pour certains tiers contre le contrat. Afin d’assurer l’efficacité de ce nouveau recours et la sécurité juridique des cocontractants, le Conseil d’État a prévu la modulation dans le temps des effets de la jurisprudence. En effet,la jurisprudence Tropic travaux n'a pas d'effet rétroactif. Seuls les recours intentés par les concurrents évincés à partir du 16 juillet 2007 seront valables.

L’assemblée du Conseil d’État ne franchit pas entièrement le pas, tel que le proposait le commissaire du gouvernement, à savoir ouvrir ce recours à tous les tiers justifiant d’un droit lésé. La mention de « concurrent évincé » conduit à exclure les usagers du service public, les contribuables, les membres des assemblées délibérantes locales, qui pourtant, du fait de leur position, peuvent avoir intérêt à agir contre le contrat administratif. Pour attaquer le contrat, il reste à ces autres tiers la voie classique, celle de l’acte détachable.

Cette restriction de l’ouverture du recours aux « concurrents évincés » s’explique dans la mesure où le Conseil d’État considère que le litige qui lui est soumis est un litige entre candidats à un marché. Autrement dit que c’est un moyen d’appliquer le principe d’égalité devant la commande publique. Cependant, la jurisprudence pourra évoluer à l’avenir, en adoptant une définition plus extensive du tiers ayant intérêt à agir. Elle l’a démontré par le passé.

Le « concurrent évincé » peut former devant le juge du contrat un « recours de pleine juridiction, contestant la validité de ce contrat ou de certaines de ses clauses qui en sont divisibles, assorti, le cas échéant, de demandes indemnitaires ».

Pour tempérer les ardeurs contentieuses de tout « concurrent évincé », le Conseil d’État en consacrant la nouvelle voie de recours a, dans un souci d’équilibre, ajouté des conditions qui témoignent de son souci de ne pas porter une atteinte excessive à la stabilité des relations contractuelles.

En effet, la recevabilité du recours ne lui est plus possible contre les actes préalables détachables du contrat. En contrepartie de l’ouverture du nouveau recours offert au « concurrent évincé », celui-ci perd le droit au recours existant auparavant et qui persiste pour les autres tiers. Cela permet de protéger le recours et de ne pas donner à ces requérants deux voies de recours contre un seul et même contrat. Le Conseil d'État a magnifiquement conjugué respect du droit au recours et impératif de sécurité juridique.

La mention de « concurrent évincé » conduit à écarter les contrats administratifs non soumis à concurrence. Ainsi la jurisprudence Société Tropic travaux signalisation s’appliquerait alors principalement aux marchés publics et délégations de service public, voire à l’ensemble du champ de la commande publique.

Le recours pour excès de pouvoir

Le recours pour excès de pouvoir n'est en principe ouvert que pour les actes administratifs unilatéraux.

Il a néanmoins été admis par la jurisprudence pour les actes détachables des contrats (C.E. 4 aout 1905 Martin), dont la décision de signature du contrat ou encore les délibérations ayant autorisé cette signature.

Le recours pour excès de pouvoir contre les contrats a été ensuite étendu dans plusieurs cas :

  • En premier lieu par le déféré préfectoral institué par la loi du 2 mars 1982, qui permet au préfet de déférer les contrats au juge administratif. Dans l’arrêt CE, 4 novembre 1994, Département de la Sarthe, le Conseil d’État a estimé que des actes non soumis à obligation de transmission pouvaient également être déférés à la censure du juge.
  • Dans l’arrêt CE, 10 juillet 1996, Cayzeele, par la théorie dite de l’acte mixte, un tiers a été admis à demander directement l’annulation des clauses réglementaires se détachant du reste du contrat.
  • Enfin, l’arrêt CE, 30 octobre 1998, Ville de Lisieux, ouvre la possibilité à un tiers ayant un intérêt suffisant de contester directement le contrat de recrutement d’agents non titulaires de la fonction publique car le contrat est alors très proche du recrutement d'un fonctionnaire qui est un acte unilatéral.

Notes et références


Voir aussi

Bibliographie

  • Bernard Asso, Frédéric Monera, avec la collaboration de Julia Hillairet et Alexandra Bousquet, Contentieux administratif, Studyrama, 2006 (ISBN 2-84472-870-7) 
  • René Chapus, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 2006 (ISBN 978-2-7076-1441-4) 
  • M. Long, P. Weil, G. Braibant, P. Delvové, B. Genevois, Les Grands Arrêts de la jurisprudence administrative, Dalloz, 2007 (ISBN 978-2-2470-7424-2) 
  • Jean-Claude Bonichot, Paul Cassia, Bernard Poujade, Les Grands Arrêts du contentieux administratif, Dalloz, 2006 (ISBN 978-2-2470-7095-4) 

Articles connexes

Liens externes

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