Joseph Lartigue

Joseph Lartigue

Joseph Lartigue, né le 27 février 1886 à Bayonne (Basses-Pyrénées), mort le 10 novembre 1938, était un syndicaliste des PTT. Dans l'immédiat après-guerre, de 1919 à 1924, animateur de la tendance révolutionnaire, il fut un des dirigeants de la fédération CGT des PTT, avant d'être le premier secrétaire général de la FPU, Fédération postale unitaire, au sein de la CGTU.

Sommaire

Biographie

Ce militant syndicaliste est souvent oublié par les histoires du syndicalisme[1] . Entré aux PTT comme commis, il travaille dans les services "ambulants" au moins depuis 1910. Probablement y était-il avant. Les postiers ambulants étaient ceux qui travaillaient, souvent en service de nuits bien qu'il y eut aussi des "services ambulants de "jour", dans les wagons-postes. Ils constituaient au sein de la corporation postale une catégorie marquée d'un fort particularisme, dû à l'indépendance qu'ils avaient dans leur travail, en "route", à l'esprit d'équipe qui soudait les "brigades", et au travail manuel qu'ils accomplissaient. En cas de grève, comme ce le fut en mars 1909, le non départ des ambulants, très impliqués dans l'Association générale des agents des PTT, était l'aune qui permettait de mesurer l'ampleur du mouvement social.

1919, secrétaire général-adjoint de la fédération postale CGT

Joseph Lartigue a sans aucun doute une certaine expérience dans le syndicalisme postier, quand en novembre 1919 il est élu, deux mois après sa fondation, secrétaire général adjoint de la Fédération nationale des travailleurs des PTT. Durant les deux années qui mènent à la scission syndicale de 1921, il a une activité importante, tant au niveau des PTT qu'au plan de des CSR, Comités syndicalistes révolutionnaires. Cette activité se poursuit jusqu'en 1924. Elle se situe à deux niveaux syndicaux.
Au plan professionnel, il agit pour que la Fédération postale soit reconnue par les autorités administratives, pour la désignation des représentants du personnel dans les structures paritaires : conseils de discipline, commissions d'avancement de grade. En cela il mène l'action avec ceux qui sont appelés les "réformistes", tel Léon Digat.
Mais parallèlement, il se bat pour un rapprochement avec les syndicalistes russes, tout en refusant l'adhésion à l'ISR. Il participe à des conférences syndicales internationales qui permettent de reconstituer "l'Internationale des travailleurs des PTT", fondée en 1911. Situation paradoxale pour le responsable fédéral qu'il est. Au Congrès de la CGT qui se tient à Orléans du 27 septembre au 2 octobre 1920, sa place est incontestable : il représente deux sections départementales du syndicat national des agents des PTT[2], la section de la Dordogne, 145 syndiqués et le section du département de la Seine, qui est forte de 8 000 syndiqués. C'est la plus importante section départementale de toutes les organisations syndicales de postiers[3] Lartigue intervient en séance le cinquième jour. Il précise d'emblée qu'il ne parle pas au nom de la fédération postale, puis il défend une position qui le place hors des deux grands courants qui divisent le syndicalisme : se référant à Jean Jaurès[4], il défend l'idée que les réformes des institutions politiques et économiques peuvent avoir une valeur révolutionnaire...puis soutenant la Révolution russe, il affirme refuser un quelconque adhésion à "l'Internationale de Moscou". S'abstenant sur le rapport moral, il ne prend pas part au vote du document d'orientation. Les deux années suivantes il évolue vers les révolutionnaires et lorsque la scission devient inéluctable, il choisit la nouvelle centrale, nommée CGTU

1922-1924, dirigeant de la Fédération postale unitaire

Minoritaires au sein du syndicalisme postier, Lartigue et les syndicalistes révolutionnaires se trouvent en accord avec les quelques noyaux communistes, implantés essentiellement dans le Syndicat des ouvriers des PTT, pour quitter la CGT et fonder la CGTU.
Il en est élu secrétaire général de la Fédération postale unitaire (FPU). Il le reste jusqu'en avril 1924, moment où les communistes prennent la direction fédérale
Au plan interprofessionnel, il se rallie au sein de la CGTU, à la minorité, qui veut rompre avec ce qu'ils estiment un syndicalisme de compromission. il se retrouve momentanément en accord avec les communistes, aussi les anarchistes. Mais il refuse toute nouvelle sujetion politique. Lartigue est élu à la Commission exécutive de cette confédération au 1er Congrès de celle-ci, en juillet 1922. Au sein de la CGTU, il entre rapidement en opposition avec les syndicalistes qui veulent un alignement sur les thèses russes. Qu'il soit arrêté en janvier 1923, après avoir dirigé une certaine agitation sociale durant l'été 1922 aux PTT, et qu'il ne soit libéré qu'au bout de quatre mois, ne le fait pas dévier d'une ligne revendiquant une certaine autonomie. Lors du 2e Congrès de la CGTU, en septembre 1923, il présente une résolution, au nom des groupes syndicalistes révolutionnaires. Elle est très minoritaire et il n'est pas réélu à la Commission exécutive de la centrale syndicale en voie de "bolchévisation".

Avril 1924, la "bolchévisation" de la fédération postale CGTU

Le premier Congrès de la Fédération postale unitaire est l'occasion d'une "normalisation"[5] qui élimine de la direction de la FPU les éléments rétifs à l'embrigadement du syndicalisme par les zélateurs de la version soviétique du communisme. Les assises fédérales ont lieu du 24 au 27 avril 1924[6]Deux tendances s'affrontent: l'une, celle du secrétariat fédéral sortant revendique l'indépendance du syndicalisme, fut-il révolutionnaire, par rapport au parti politique, en l'occurrence, le Parti communiste. Lartigue défend cette position et refuse la soumission aux commissions syndicales mises en place par le Parti communiste. L'autre tendance répercute les orientations de l'Internationale communiste et amalgame tout avis contraire à une trahison envers le prolétariat. Aux termes de débats houleux, deux votes contradictoires interviennent, qui suggèrent des manipulations.
Le rapport moral présenté par la direction sortante est voté par 97 voix "pour", contre 85 voix "contre", 6 abstentions.
Mais la motion d'orientation défendue par Lartigue est repoussée par 103 voix "contre, 80 "pour" et 4 abstentions[7]. Nouvel homme fort du syndicalisme "unitaire, Henri Gourdeaux, pragmatique et désireux d'éviter une débacle d'adhérents[8] propose une représentation de la minorité dans les organismes fédéraux : 21 titulaires et 6 suppléants pour la majorité, 12 titulaires et 3 suppléants pour la minorité. Le nom de Joseph Lartigue, accusé de tous les maux (incompétence, "autoritarisme", gabegie financière[9]), semble disparaître après 1924 de toute activité syndicale ultérieure.

Notes et références

  1. Georges Frischmann, auteur d'une Histoire de la fédération CGT des PTT, référence en la matière, "oublie" de nommer le premier secrétaire général de la Fédération unitaire, alors que ses camarades Henri Raynaud et Henri Gourdeaux sont fréquemment cités. Lartigue est référencé 2 fois en index (pages 239 et 240) alors que pour la même période 1919-1924, Gourdeaux apparaît 5 fois et Raynaud est mentionné en 7 occurrences (Cf index pages 563 à 590)
  2. CGT, 15e Congrès confédéral, compte rendu intégral, imprimerie "L'union typographique", Villeneuve-Saint-Georges, 1920. pages 465-466
  3. La section de la Seine du syndicat national des "employés des PTT" (les facteurs, chargeurs, et autres "manipulants") ne compte que 5 700 syndiqués, celle des "ouvriers" des lignes en totalise 2 500.
  4. Intervention de Lartigue, op. cit., pages 245-252
  5. Cet épisode n'est documenté par aucune synthèse historique. Passé sous silence par Georges Frischmann en 1967, l'approche de cette période nécessite le recours à la presse. Le site Gallica de la Bibliothèque nationale de France permet la consultation des journaux, dont l'Humanité
  6. Le congrès a lieu dans les locaux de la CGTU, 33 rue de la Grange-aux-Belles.(l'Humanité, 24 avril 1924, page 3.
  7. Chiffres extraits du compte-rendu des dernières séances du congrès, l'Humanité, 28 avril 1924
  8. Le nombre d'adhérents, selon le rapport du trésorier sortant, Roche, serait à la fin de l'année 1923 de 13 000. Ibid. L'Humanité, 28 avril, "les dernières séances de la Fédération postale unitaire".
  9. Outre son "anarcho-syndicalisme" et son "réformisme", dans deux articles "au vitriol" parus dans l'Humanité les 14 avril 1924, page 4, et 19 avril 1924, page 5. Il lui est aussi reproché de n'avoir fait "aucun travail pratique", d'ignorer les publications de l'Administration, et son incompétence à défendre les personnels...

Sources

  • Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, tome 33 (notice "Lartigue, Joseph")
  • Jean Maitron, Colette Chambelland, Syndicalisme révolutionnaire et communisme, les archives de Pierre Monatte, Editions François Maspero, Paris, 1969

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Joseph Lartigue de Wikipédia en français (auteurs)

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