Invasion indonésienne du Timor oriental

Invasion indonésienne du Timor oriental

L' invasion indonésienne du Timor oriental en 1975 eut lieu après la révolution des Œillets au Portugal, qui avait amené ce pays à se retirer de sa colonie.

Sommaire

Contexte

Le Timor oriental revendique sa spécificité territoriale du fait qu'il faisait partie de l'empire portugais alors que le reste du Timor, et l'archipel indonésien plus généralement, ont été colonisés par les Néerlandais, un accord divisant l'île entre les deux puissances européennes ayant été signé en 1915. En collaboration avec des chefs locaux, les Portugais mirent en place un système de travail forcé qui concerna l'entièreté de la population mâle en âge de travailler dès le début du XXe siècle. Le régime colonial fut remplacé par les Japonais durant la Seconde Guerre mondiale, dont l'occupation stimula un mouvement de résistance dont la répression fit 60 000 morts, soit 13 % de la population d'alors. À la fin de la guerre, les Portugais rétablirent leur contrôle sur la région, tandis que le reste de l'île proclamait son indépendance.

Le départ des Portugais et la guerre civile

En avril 1974, les forces armées portugaises montent un coup d'État contre la dictature de Caetano (c'est la révolution des Œillets) au Portugal, et annoncent leur intention de mettre rapidement fin à l'empire colonial portugais (incluant également l'Angola et le Mozambique). Les élections pour mettre en place une assemblée constituante ont lieu en 1976, et la pleine indépendance est obtenue trois ans plus tard. En 1975, la principale force politique est le Fretilin (le front révolutionnaire pour l'indépendance du Timor oriental), bien implanté dans l'ensemble du pays, notamment grâce aux mesures progressistes visant à améliorer la vie des paysans. En janvier 1975, Fretilin fait alliance avec l'autre force politique majeure du pays, l'Union démocratique timoraise, et des élections locales se tiennent sous la supervision du Comité de décolonisation mis en place par le parlement portugais.

À la mi-juin 1975, les forces du Fretilin dirigées par l'ancien soldat portugais Hermengildo Alves prirent brièvement le pouvoir à Oecusse, une petite enclave portugaise au sein du Timor occidental. Cette coalition prédomina dans l'enclave durant quelques mois.


Motivations Indonésiennes

Indonésiens et militaires nationalistes purs et durs, en particulier les dirigeants de l'agence de renseignement Kopkamtib, et les Unités des opérations spéciales, Opsus, ont vu le coup d'Etat portugais comme une opportunité pour l’Indonésie d’annexer le Timor oriental[1]. Le major-général Ali Murtopo, chef de l’Opsus et proche conseiller du président indonésien Suharto, ainsi que son protégé le général de brigade Benny Murdani, ont mené les opérations de renseignement militaire et ont été les fers de lance du putsch pour la pro-annexion par l’Indonésie du Timor oriental[1]. Leur crainte était également de voir un Timor oriental indépendant inspirer des sentiments indépendantistes dans les provinces indonésiennes.

Cependant, à cause de facteurs politiques internes à l’Indonésie du milieu des années 1970, de tels sentiments expansionnistes n’étaient pas propices. Le scandale financier de 1974-1975 entourant la compagnie pétrolière Pertamina obligea l'Indonésie à faire preuve de prudence pour ne pas alarmer les investisseurs étrangers et les banquiers. Schwarz suggère que cette crainte a du jouer dans la réticence du Président-Dictateur Suharto à suivre le désir des généraux dans une invasion du Timor Oriental au début de l'année 1975[2].

De telles considérations ont cependant été occultées par la crainte des Indonésiens et des Occidentaux de l'Ouest de voir la victoire de l’aile gauche du Fretilin mener à la création d’un état communiste à la frontière de l’Indonésie. Celui-ci aurait pu être utilisé comme base par des puissances hostiles à l’Indonésie et constituer une menace pour les sous-marins de l'Ouest. Toutes ces préoccupations ont été utilisées avec succès pour obtenir le soutien des pays occidentaux soucieux de maintenir de bonnes relations avec l'Indonésie, en particulier les États-Unis qui, à cette époque, achevaient leur retrait d'Indochine[3]. Les organisations de renseignement militaire avaient initialement demandé une annexion stratégique, sans recours militaire, avec l’intention d’utiliser l’APODETI comme vecteur d’intégration[1].

L’Indonésie suivait la planification du « Nouvel Ordre » de Suharto pour l’invasion du Timor oriental. Il n’y avait aucune liberté d’expression dans le « Nouvel Ordre » et partant de là, nul besoin de consulter les Timorais de l’Est non plus[4].

Début septembre, pas moins de 200 soldats des forces spéciales lancent l’incursion, notifiée par l’US intelligence, suivie en octobre d’une attaque militaire conventionnelle. Le 16 octobre, cinq journalistes, connus comme les cinq de Balibo et travaillant pour un réseau d’informations Australien, ont été exécuté par les forces indonésiennes à la périphérie de la ville de Balibo[5],[5].


Invasion

Carte de l'invasion

Le 7 décembre 1975, les forces indonésiennes ont envahi le Timor oriental. L'opération Lotus (operasi Seroja) a été la plus grande opération militaire menée par cette nation[6],[7].


Le 10 décembre, une seconde opération militaire aboutit à la prise de la seconde ville du pays, Baucau, et le jour de Noël, plus de 10000 soldats stationnaient à Liquiçá(en) et Maubara(en). En avril 1976, 35000 soldats indonésiens occupaient le Timor oriental et 10000 autres la partie occidentale.

Le monument de l'intégration à Dili est une donation du gouvernement indonésien, comme symbole de la fin du colonialisme

Annexion et opération d'intégration

Occupation

Le rôle des États-Unis

Le rôle de l'Australie

Réaction des Nations unies

Le 12 décembre 1975, l’assemblée générale des Nations Unies approuva une résolution selon laquelle, « après avoir entendu les déclarations des représentants Portugais, en qualité de puissance coloniale, concernant les événements au Timor portugais [...] déplore l’intervention militaire des forces armées indonésiennes au Timor portugais et demande au gouvernement indonésien de retirer sans délai ses forces armées du territoire Timorais [...] et recommande au conseil de sécurité de prendre des mesures urgentes pour protéger l’intégrité territoriale du Timor portugais ainsi que le droit inaliénable de son peuple à l’autodétermination.

Le 22 décembre 1975, le conseil de sécurité des Nations Unies a approuvé la résolution 384 déplorant les actions Indonésiennes et regrettant que le Portugal n’ait pas respecté ses obligations en tant que puissance administrative. La résolution appelle toutes les nations et toutes les parties à respecter l’intégrité du Timor Oriental et son droit à l’autodétermination. Elle exhorte aussi le secrétaire général des Nations Unies à envoyer un de ses représentants pour évaluer la situation et décider si le Conseil reste saisi de la situation.

Daniel Patrick Moynihan, à l’époque ambassadeur américain à l'ONU, a écrit dans son autobiographie que «les États-Unis souhaitaient que les choses se passent comme elles se sont passées, et ont travaillé en ce sens. Le Département d'Etat souhaitait que les Nations Unies apportent la preuve de leur inefficacité dans toutes les mesures qu’elles ont entreprises [à l'égard de l'invasion du Timor oriental]. Cette tâche m’a été confiée, et je l'ai poursuivie avec un succès non négligeable"[8]. Plus tard, Moynihan a admis qu’en tant qu'ambassadeur américain à l'ONU, il a défendu une "honteuse" politique de la guerre froide à l'égard du Timor oriental.

Notes

  1. a, b et c Schwarz (1994), p. 201
  2. Schwarz (1994), p. 208
  3. Schwarz (1994), p. 207
  4. (en) Jean Gelman Taylor, Indonesia: Peoples and Histories, New Haven and London, Yale University Press, 2003, poche (ISBN 978-0-300-10518-6) (LCCN 2002152348), p. page 377 
  5. a et b Eyewitness account of 1975 murder of journalists
  6. Indonesia (1977), p. 39.
  7. Budiardjo and Liong, p. 22.
  8. A Dangerous Place, Little Brown, 1980, p. 247

Bibliographie

  • Indonesia. Department of Foreign Affairs. Decolonization in East Timor. Jakarta: Department of Information, Republic of Indonesia, 1977. (OCLC 4458152).
  • (en) A. Schwarz, A Nation in Waiting: Indonesia in the 1990s, Westview Press, 1994, 6e éd. (ISBN 978-1-86373-635-0) 


Liens externes


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