Georges Darlan

Georges Darlan
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Georges Darlan (1920-1965) est un homme politique centrafricain de tendance libérale, connu pour avoir été le président du Conseil représentatif d'Oubangui-Chari de 1949 à 1952.

Sommaire

Biographie

De l’instituteur au président du Conseil représentatif (1920-1949)

Georges Darlan naît en 1920 à Kouango d’un père européen et d’une mère oubanguienne[1]. Après avoir passé ses études primaires dans la colonie, il intègre en 1935 le tout nouveau établissement formant les cadres autochtones en AEF, l’École Edouard Renard de Brazzaville[1]. Il en sort en 1939 avec le diplôme d’instituteur[1]. Son poste fixé à Libreville au Gabon, il enseigne jusqu'à son enrôlement en 1941 dans les Forces françaises libres[1]. Démobilisé en 1945 avec le grade de sergent-chef, il rentre l’année suivante en Oubangui et se lance dans une carrière de commerçant[1].

La politique alors naissante dans la colonie l’intéresse beaucoup. Après avoir soutenu en novembre 1946 la candidature à la députation de Barthélemy Boganda[1], il mène lors de l’élection du Conseil représentatif nouvellement créé, les listes d’Action économique et sociale présentées au collège des autochtones[2]. Ses listes remportent l’intégralité des quinze sièges à pourvoir[2]. Il est élu conseiller de Bangui[2]. Le 19 octobre 1947, il se fait élire par ses pairs, grand conseiller de l’AEF avec son frère aîné Antoine Darlan[3].

En août 1947, il se voit confier la présidence du premier parti politique local, l’Union oubanguienne (UO) fondée par Boganda[4]. L’UO est une réussite, son extension est croissante et continue[5]. Fort de ce succès, Darlan utilise cette organisation pour implanter dans le pays ses coopératives de coton, la COTONCOOP, et de consommation, la SOCOOMA, créées en 1948[5]. Grâce aux liens étroits de l’UO avec la COTONCOOP, il se crée une clientèle importante[6]. Son ascendant sur les élus locaux en fait un leader. En 1948, alors que la majorité des conseillers autochtones s'oriente vers le Rassemblement démocratique africain (RDA) sous l’influence de son frère Antoine Darlan très progressiste[7], Georges Darlan de tendance plutôt libérale[8] use de toute son influence pour empêcher ce glissement à gauche[7]. Seuls les élus de Bangui font scissions[9]. Les élus de brousse, fidèles[9], le portent en 1949 à la tête du Conseil représentatif[1].

Ambitions et discrédit, les déboires de la COTONCOOP (1950-1951)

Devenu la personnalité la plus importante d’Oubangui-Chari[6], Georges Darlan ambitionne d'être élu député. Ses relations avec Boganda se sont dégradées. La rupture remonte à septembre 1948, lorsque le Conseil représentatif refuse au député une subvention pour sa coopérative, la SOCOULOLÉ, alors que quelques mois auparavant la COTONCOOP en obtenait une[10]. Ayant le sentiment d’avoir été trahi, Boganda lui présente le mois suivant sa démission de l’UO[10]. L’UO se maintient jusqu’en 1950[11]. Cette année-là, le président du Conseil représentatif décide de recentrer son action sur la COTONCOOP, organisme plus souple[11] comptant 24 000 membres[12], et dont les cadres se trouvent être à peu de chose près les mêmes[11].

La COTONCOOP ne tarde pas à sombrer. En juillet 1950, le Conseil représentatif est surpris d'apprendre que la perception des cotisations est rendue quasi-obligatoire dans certaines régions « au nom du gouvernement »[12]. De vives critiques s'élèvent sur sa gestion financière. Sur les trente-deux millions de francs de subventions octroyés par le Conseil représentatif, vingt millions ont été dilapidés : neuf millions dans l'achat d’une demeure à Bangui, les autres engloutis dans diverses opérations de construction, d'achats de végétaux et de frais de gestion[13]. En 1951, devant le nombre de plaintes déposées, le gouvernement est obligé de prendre le contrôle de l'entreprise[13]. Les rapports envoyés au chef de territoire et au gouverneur général de l’AEF sont sans appel, toutes les opérations entreprises par la société ont été réalisées en pure perte[13].

En dépit de ces déboires, Georges Darlan est toujours considéré début juin 1951 par l’administration comme le principal adversaire de Boganda aux législatives du 17 juin[14]. Mais son action controversée aussi bien au niveau coopératif qu’au niveau du Conseil représentatif où en sa qualité de président il a fait augmenter l’impôt, est facilement exploitée par Boganda[15]. En quelques jours il perd tout crédit[16]. Le 17 juin, il doit se contenter de la troisième place avec 8 288 voix, 12,6 % des suffrages[17].

Les années de végétation et l’aventure congolaise (1952-1965)

En 1952, Georges Darlan décide de ne pas se représenter aux élections territoriales[1]. Son retrait de la vie politique dure jusqu’en 1956. Cette année-là, il fonde un parti, L’Émancipation oubanguienne, et se présente sans succès à l'élection municipale de Bangui face à Boganda[18]. En 1957, Georges Darlan opère un revirement vis-à-vis du RDA ; il participe à la reformation de la section oubanguienne[18]. Boganda l'accuse d'être un « messager de Moscou »[8], attaque désuet, le RDA empruntant depuis 1950 une voie libérale.

De caractère « bouillant, entreprenant, bon viveur »[19], Georges Darlan finit par quitter définitivement la scène politique oubanguienne en 1960 pour l'ex-Congo belge[18]. Sa randonnée le mène à devenir en 1961, conseiller économique de Moïse Tshombe dans son gouvernement sécessionniste du Katanga[18]. L’aventure semble prendre fin en 1963 lorsqu’il s’établit comme commerçant à Brazzaville[18]. Mais début 1965, accusé d’activité politique pour le compte de Tshombe, les autorités du Congo-Brazzaville l’expulsent sur Bangui[18].

En juin 1965, Georges Darlan décède alors qu’il tente de monter une activité commerciale à Bangui[18]. Abel Goumba évoque la possibilité d'un assassinat : Darlan aurait pris « un verre » en compagnie d’une jeune femme lorsque pris d'un soudain malaise, il serait rentré précipitamment chez lui et succomba[19]. Pour Goumba, les circonstances sont analogues à l'assassinat par empoisonnement de l'opposant camerounais Félix Moumié, à Genève en 1960[19].

Notes et références

  1. a, b, c, d, e, f, g et h Jacques Serre, Biographie de David Dacko: premier président de la République centrafricaine, 1930-2003, Paris, Éditions L'Harmattan, 2007, p.298
  2. a, b et c Juan Fandos-Rius, « Conseil Représentatif de l'Oubangui-Chari » In Parliament of the Central African Republic, 14 novembre 2007
  3. Juan Fandos-Rius, « Oubangui-Chari representatives to France and Brazzaville (1946-1961) » In Colonial Rulers of Oubangui-Chari, 2 juillet 2008
  4. Jean-Dominique Pénel, Barthélémy Boganda. Écrits et Discours. 1946-1951 : la lutte décisive, Paris, L’Harmattan, 1995, p. 47
  5. a et b Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.48
  6. a et b Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.261
  7. a et b Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.189
  8. a et b Abel Goumba, Les Mémoires et les Réflexions politiques du Resistant anti-colonial, démocrate et militant panafricaniste, v. 1, Paris, Ccinia, 2007, p.56
  9. a et b Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.199
  10. a et b Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.49
  11. a, b et c Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.288
  12. a et b John A. Ballard, The Development of Political Parties in French Equatorial Africa, Fletcher School, 1964, p.411
  13. a, b et c International Co-operative Alliance, Year book of agricultural co-operation, Londres, Horace Plunkett Foundation, 1954, p.220
  14. Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.339
  15. Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.342
  16. Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.341
  17. Jean-Dominique Pénel, op. cit., p.67
  18. a, b, c, d, e, f et g Jacques Serre, op. cit., p.299
  19. a, b et c Abel Goumba, op. cit., p.58

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