Generation spontanee

Generation spontanee

Génération spontanée

La génération spontanée serait l'apparition d'un être vivant sans ascendant, sans parent. Au XIXe siècle cela prend aussi le nom de spontéparité, ou encore hétérogénie.

La croyance en la génération spontanée fit longtemps partie du sens commun, parce que l’apparition d’êtres vivants là où on n’en voyait pas est un phénomène d’observation courante. Au cours des millénaires, les Hommes s'étaient aperçus que leurs animaux d'élevage avaient besoin d'un accouplement pour produire des petits. Les vaches ne pouvaient avoir de veaux sans taureau, les brebis pas d'agneaux sans bélier, etc. Néanmoins, pour les petits animaux, on continuait à croire que des petites souris pouvaient naître spontanément d'un tas de chiffons et des asticots sortir d'un morceau de viande. Les micro-organismes, microbes et levures, semblaient le produit évident d'une génération spontanée.

Au début du XIXe siècle elle était soutenue par Geoffroy Saint-Hilaire et Jean-Baptiste de Lamarck. Ils considéraient tous deux que les formes de vie les plus simples, les infusoires, pouvaient encore apparaître actuellement par génération spontanée.

En 1859 quand éclate la controverse entre Louis Pasteur et Félix-Archimède Pouchet, auteur de «Hétérogénie ou Traité de la génération spontanée», elle est déjà une théorie hétérodoxe, rejetée par l'Académie des sciences [1].

Les expériences soigneuses de Pasteur au XIXe siècle ont clairement établi que dans tous les cas supposés de génération spontanée, il y avait en fait des germes, des œufs, à l’origine des êtres vivants apparus. Dans un milieu isolé et convenablement stérilisé, la vie n’apparaît pas spontanément, du moins pas aux échelles de temps et d’espace typiques d’un laboratoire. La remise en cause de la génération spontanée a joué un grand rôle dans les mesures d'hygiène et d'asepsie contre le développement des maladies. Félix-Archimède Pouchet inventeur de l'hétérogénie, avec qui Pasteur s'est opposé à l'Académie des sciences est resté jusqu'à sa mort convaincu de la génération spontanée.

L'hypothèse de la génération spontanée a aujourd'hui perdu tout crédit scientifique, excepté dans le cadre des recherches sur l'origine de la vie sur Terre.

Sommaire

Le problème de la régression à l’infini

Le problème de la régression à l’infini est celui du paradoxe de l'œuf et de la poule. L’origine d’une poule, ou de tout être vivant pluricellulaire, est un œuf. L’origine d’un œuf de poule est une poule. Qui était là le premier ? On peut supposer qu’il n’y a pas de premier, que les poules et les œufs se sont succédé sans qu’il y ait jamais eu de commencement.

Sous cette forme, cette hypothèse est incompatible avec ce que l’on sait de l’histoire de la vie sur la Terre. Il n’est pas contestable que les êtres vivants d’aujourd’hui aient évolué à partir de formes primitives unicellulaires. On pourrait encore croire à une régression à l’infini des unicellulaires, mais cette hypothèse se heurte à la finitude temporelle du système solaire.

Pour échapper aux difficultés de la régression à l’infini, il faut supposer que la vie peut apparaître spontanément sans transgresser les lois connues. Cela conduit à supposer que dans un océan sans vie, des molécules prébiotiques puis des unicellulaires primitifs ont pu apparaître.

Les expériences numériques de Kauffman

Que des formes complexes ne puissent pas avoir une origine aléatoire était un principe très généralement accepté. Stuart Kauffman est le premier à l’avoir mis en doute à la suite d’expériences numériques. Il étudiait la dynamique de réseaux d’automates cellulaires engendrés d’une façon aléatoire. Il a alors observé que des formes stables animées d’un mouvement périodique apparaissaient spontanément, quelles que soient les conditions initiales. Il voyait ainsi des formes complexes et durables engendrées d’une façon purement aléatoire. Il a vite compris que son observation renouvelle d’une façon très originale nos façons d’expliquer les phénomènes et qu’il pouvait l’appliquer à la question de l’origine de la vie. Il a mis quelques années avant de le faire accepter par d’autres scientifiques.

Les réseaux autocatalytiques

Lorsque de nombreuses molécules différentes sont mises en présence, on peut décrire la dynamique chimique par un réseau. Chaque espèce de molécules est reliée aux autres espèces avec lesquelles elle réagit. Un tel réseau peut avoir des boucles autocatalytiques, c’est-à-dire qu’une espèce moléculaire, appelons-la A, favorise, ou catalyse, des réactions chimiques qui vont conduire à la production de molécules du type A. Une telle boucle est potentiellement explosive, parce qu’il y a un effet boule de neige, mais si les espèces à partir desquelles A est produite sont en quantité limitée, l’autoproduction de A est elle-même limitée.

Les êtres vivants sont toujours des réseaux autocatalytiques. Toutes leurs molécules (ADN, protéines et autres) réagissent avec les molécules ingérées (les aliments) pour produire des molécules semblables à elles-mêmes. Les plantes sont même capables d’utiliser la lumière du soleil dans ce but.

En étudiant des modèles, Kauffman a établi que sous des conditions assez générales un réseau de réactions chimiques contient nécessairement des réseaux autocatalytiques. Il suffit que le réseau soit suffisamment touffu, que les espèces moléculaires soient suffisamment nombreuses et réactives les unes vis à vis des autres.

Les réseaux autocatalytiques expliquent la reproduction des molécules mais à eux seuls ils ne suffisent pas pour expliquer la reproduction des unicellulaires.

La formation spontanée des vésicules

Il suffit d’agiter une eau savonneuse pour obtenir de la mousse. L’écume de la mer se forme de la même façon, d’autant plus facilement que l’eau est plus sale. On l’explique à partir du caractère amphiphile de certaines molécules. Une molécule est hydrophile si elle « préfère » être dans l’eau que dans l’huile, c’est-à-dire si spontanément, du fait des lois de la physique statistique, elles se concentrent davantage dans l’eau que dans l’huile. Elle est hydrophobe, ou lipophile, dans le cas inverse. Certaines molécules, telles que celles du savon, sont allongées avec une extrémité hydrophile et l’autre hydrophobe, c’est pourquoi elles sont dites amphiphiles. Lorsqu’elles sont mises en solution dans l’eau, elles forment alors spontanément de nombreuses structures qui peuvent être très complexes et notamment des bicouches qui se replient en vésicules. Une bicouche est une paroi, plongée dans l'eau, dont les deux faces sont composées de têtes hydrophiles, les extrémités hydrophobes étant rassemblées à l’intérieur de la bicouche. Une vésicule est un petit sac plein d’eau, qui flotte dans l’eau, et dont la paroi est une bicouche.

Les cellules des êtres vivants sont des vésicules très élaborées. Leur paroi est essentiellement une bicouche lipidique, mais elle est beaucoup plus complexe que les parois des vésicules dans l’eau savonneuse. L’intérieur de la cellule surtout est très différent de son extérieur, ce qui n’est pas le cas des vésicules que l’on forme en agitant une eau sale.

Les premières cellules

De très nombreuses vésicules ont pu se former dans l’océan primitif, aussi facilement qu’aujourd’hui l’écume de la mer. Qu’une telle vésicule soit le lieu de réactions autocatalytiques est tout à fait plausible. Si ses parois sont telles qu’elles laissent pénétrer les petites molécules nécessaires à la reproduction des grosses, alors on obtient, par le simple jeu des lois physiques et chimiques, un organisme capable de s’alimenter et de grandir. Bien sûr les vésicules ne sont pas toujours dotées d’une telle capacité, mais si elles sont assez nombreuses et assez diversifiées un tel événement n’est peut-être pas complètement improbable.

Pour qu’une cellule soit vivante, il ne suffit pas qu’elle soit capable de grandir, il faut encore qu’elle puisse se reproduire. La destinée la plus probable d’une vésicule en croissance est d’exploser et donc de disperser tout son contenu, ce qui revient à mourir. Mais on peut supposer que certaines vésicules aient incorporé à leur paroi des molécules qui la rendent susceptible de former de nouvelles vésicules, par l'intermédiaire de protubérances qui se détachent par exemple. Cette partie du scénario ici proposé de l’origine de la vie n’est peut-être pas très plausible mais elle n’est pas non plus complètement exclue, surtout si l’on songe à la diversité des structures bidimensionnelles qui peuvent se former spontanément sur des bicouches.

Si une vésicule est capable de croître en s’alimentant et de se reproduire, en formant des protubérances, alors elle est un être vivant primitif. Elle a la propriété essentielle des êtres vivants, la capacité de se reproduire quand elle est placée dans un environnement approprié. On peut alors supposer qu’une telle vésicule est l’ancêtre de tous les êtres vivants qui existent aujourd’hui.

Des vésicules appelées bions sont apparues, lors d'expériences menées par Wilhelm Reich, à partir de matières minérales et organiques portées à ébullition. Ces vésicules se sont organisées et ont donné naissance à des cellules présentant toutes les caractéristiques de la vie. (voir "la biopathie du cancer", Wilhelm Reich) Du fait que Reich, suite à une expérience dangereuse où il manipula de la matière radioactive, a vu son esprit quelque peu altéré, l'ensemble de ses travaux a été ridiculisé et ses nombreuses découvertes remises en question, notamment celle d'une énergie particulière (orgone)dont les propriétés contredisaient la 2eme loi de la thermodynamique sur l'entropie. Celà a fait totalement oublier la rigueur de ses expériences sur les bions où la validité de la génération spontanée redevenait d'actualité et lançait un nouveau défi à ses détracteurs.

L’origine de l’ADN et du code génétique

Les premiers réseaux autocatalytiques n’étaient pas aussi élaborés que ceux d’aujourd’hui, fondés sur la machinerie très complexe de l’ADN, des ribosomes, du code génétique et des protéines. Mais les êtres vivants primitifs étaient capables d’évoluer. Leurs réseaux autocatalytiques pouvaient être modifiés par l’incorporation de nouvelles molécules, absorbées de façon exceptionnelle. De telles modifications sont héritables, parce qu’une fois qu’une molécule est incorporée à un réseau autocatalytique, elle devient capable de se reproduire. Les conditions de l’évolution par la sélection naturelle, telles qu’elles ont été énoncées par Darwin (L'origine des espèces), sont donc réunies : variations aléatoires héritables et compétition au sein d’une population pour l’accès aux ressources. Les cellules primitives les plus performantes sont celles qui se reproduisaient le mieux et elles tendaient à dominer la population. On peut alors supposer que les êtres vivants primitifs ont évolué. Leurs techniques autocatalytiques rudimentaires se sont perfectionnées jusqu’à atteindre un point de quasi-perfection, à savoir les techniques de réplication de l’ADN et de fabrication des protéines qui sont possédées depuis des milliards d’années par tous les êtres vivants.

Comment savoir si cette théorie est vraie ?

On ne peut pas remonter le temps pour aller voir comment était l’océan primitif et comment il a évolué. Mais on peut trouver des témoignages indirects. Le passé laisse des traces dans le présent. Si on a les bons outils, théoriques et observationnels, on peut déduire le passé à partir du présent. Par exemple, les techniques autocatalytiques d’aujourd’hui se sont en quelque sorte fossilisées depuis des milliards d’années, puisqu’elles n’ont pas ou peu évolué. Elles nous renseignent donc sur un passé très lointain. En combinant ces informations avec d’autres, on peut espérer remonter encore plus loin dans le temps. Des expériences en laboratoire de chimie prébiotique peuvent apporter des renseignements précieux.

Biologie et cosmologie

La théorie de la génération spontanée conduit à une vision unifiée de la matière et de la vie. L’apparition et l’évolution de la vie y sont conçues comme des conséquences nécessaires de la dynamique de l’univers. Dès que des conditions adéquates sont réunies (de l’eau liquide, ce qui suppose une température adéquate, et des molécules organiques en abondance, autrement dit, de l’eau sale), la matière manifeste sa capacité d'engendrer la vie. D’une façon métaphorique, on peut dire avec Kauffman que les êtres vivants peuvent se sentir chez eux dans l’univers, parce que la matière est comme la terre nourricière qui nous a donné la vie. Aux premier temps de son existence la Terre était une sphère de matière encore fluide et brûlante, bombardée en permanence par des météorites de toutes tailles. Les éléments qui la constituaient (comme les métaux et les substances minérales qui entrent dans la composition des roches) formaient un mélange assez homogène.

Voir aussi

Bibliographie

  • (en) Stuart Kauffman, At home in the universe
  • John Maynard Smith, Eörs Szathmary, Les origines de la vie

Articles connexes

Notes et références

  1. Louis pasteur, claude bernard, charles darwin...La science conquérante Michel de Pracontal in Le Nouvel Observateur n°2250 du 20 décembre 2007
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