Fuhrer

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Führer est un substantif dérivé du verbe allemand führen et signifie en premier lieu « dirigeant », «  chef », « guide ». Le mot est passé à la postérité au cours du XXe siècle pour avoir désigné la personne d'Adolf Hitler.

Il est ici traité essentiellement du contenu politique de ce terme en Allemagne au cours du Troisième Reich.

Sommaire

Avant la prise de pouvoir

À l'origine, le Führer était le chef de file du groupe parlementaire du parti, le véritable directeur politique du parti, et celui qui, en cas de victoire électorale, était le candidat naturel à la direction du nouveau gouvernement. Ce n'est pas obligatoirement le président ou le secrétaire général du parti, des fonctions essentiellement administratives.

Le terme et la thématique du « Guide » est présent de longue date dans la mouvance völkisch (nationaliste et populiste) et surtout nazie. Le Führerprinzip est omniprésent dans l'argumentaire nazi dès les années 1920. Selon Adolf Hitler, le Führerprinzip a d'abord été le moyen de marquer concrètement et d'inscrire dans les statuts du parti son anti-parlementarisme virulent[1]. Il aura pour conséquence de placer la propagande au-dessus de l'administration et par là d'imposer la prééminence de son directeur sur le parti[2].

Hitler est élu Führer du NSDAP dès sa création en 1921 au congrès de Salzbourg, après la fusion de plusieurs partis d'inspiration proche (nationalistes, racistes et populistes). Il en devient président quelques mois plus tard lors du renouvellement du comité directeur en se faisant attribuer les « pouvoirs dictatoriaux » pour la « direction administrative » du parti en sus de sa « direction politique », ce qui n'était pas spécialement dans la tradition allemande. Dans la pratique, la direction administrative sera confiée à des « suppléants auprès de la présidence du parti », Rudolf Hess, puis Martin Bormann.

En 1925, lors de la refondation légale du NSDAP après l'interdiction consécutive au putsch de la brasserie, Hitler est réélu président du parti (les mandats sont de trois ans, le président est élu par le Congrès sur proposition du comité directeur) et Oberstführer (guide suprême) du NSDAP et de la SA. Il est aussi le Führer de tout le mouvement national-socialiste, c'est-à-dire du parti dont il est déjà le président, des SA dont il est le commandant suprême, mais aussi de toutes les organisations rattachées au parti et autonomes administrativement (syndicats, mouvements de jeunes, des mères de familles et même des ligues féminines, etc.) Dans la pratique, il délègue à des lieutenants la direction de toutes ces organisations, se réservant la politique générale du mouvement.

Hitler devient l'objet d'un véritable culte de la personnalité dès les années 1925-1926. Il renforce son ascendant sur le parti grâce à ses premiers succès médiatiques, puis électoraux. Ses collaborateurs s'adressent à lui en disant Mein Führer, c'est-à-dire « Mon guide, mon chef ». Dans sa monumentale biographie, l'historien Ian Kershaw cite ainsi Luise Solmitz, une institutrice de Hambourg qui assista le 23 avril 1932 à un meeting électoral du NSDAP :

« Personne ne disait « Hitler », mais toujours simplement « le Führer ». « le Führer dit », « le Führer veut », et ce qu'il disait et voulait paraissait bel et bon. »[3]

Une affiche politique lors de l'Anschluss en 1938) proclame ainsi Ein Volk ein Reich ein Führer (« Un peuple, un "empire", un chef »).

Après 1933

Après la liquidation des partis politiques concurrents, puis le vote de la loi instituant l'unité du Parti et de l'État, Hitler, déjà chancelier fédéral (Reichskanzler) et Führer du parti devient de facto le führer de l'État et du peuple allemand.

En tant que chancelier, chef d'un cabinet de concentration nationale où les nazis seront toujours minoritaires, il se fait déléguer par le Reichstag des pouvoirs spéciaux renouvelables tous les quatre ans, et normalement à l'origine réservés au président de la République de Weimar par la constitution de 1919 qui restera toujours en vigueur, amendée dans le sens du national-socialisme, jusqu'en septembre 1945, date officielle de la dissolution du Reich par les autorités militaires alliées.

Par la Gleichschaltung, il transforme le Reich en un état unitaire[4] mais décentralisé (larges pouvoirs des ministres-présidents). Les Gauleiter ne sont que les directeurs locaux du parti, chargés de surveiller l'administration du Land, mais en pratique, ils sont toujours, soit le Statthalter, soit le ministre-président local.

À la mort du président Hindenburg, Hitler assure les fonctions de chef de l'État après autorisation du Conseil des ministres, avec le modeste titre de Führer du Reich en détournant un article de la constitution de Weimar qui confie l'intérim présidentiel au chancelier après avoir refusé de se faire élire président du Reich « par déférence » envers Hindenburg. Après le référendum d'août 1934, où il obtient 89 % des voix, Hitler devient ainsi, en fait et en droit, le chef de l'Allemagne autant que le chef du gouvernement.

C'est le Führerstaat : Hitler concentre sur sa personne les fonctions toujours distinctes en théorie de chef du gouvernement, de l'État, du parti unique et de l'armée. À ce titre, il obtient même que les militaires lui prêtent un serment personnel à la manière des empereurs romains dont il s'est d'ailleurs ouvertement inspiré. Il était dans sa jeunesse un grand lecteur de l'historien Theodor Mommsen[réf. nécessaire].

En pratique cependant, il délègue ses pouvoirs dictatoriaux « souverains » (car par délégation du peuple et de ses représentants : double suffrage direct et indirect) à des « commissaires » dans le cadre d'un département administratif, géographique ou d'une mission déterminée : c'est le Führerprinzip, système qui lui a été inspiré par son expérience militaire et la lecture du traité du constitutionnaliste Carl Schmitt sur la dictature (1922).

Les fonctions protocolaires et honorifiques du chef de l'État sont souvent dévolues à Hermann Göring, deuxième personnage de l'État en tant que président du Reichstag (et donc vice-président de la République) et à sa femme Emma, « Première Dame du Reich », Hitler n'étant pas marié, et celles du chancelier à Joseph Goebbels, vice-chancelier à partir de 1934 et à son épouse Madgalena.

Dictateur habile, Hitler s'arrange toujours pour qu'aucun de ses lieutenants ne soit en mesure de le supplanter sans s'associer avec d'autres chefs importants du parti, de la SS et de l'armée, et il entretient entre ceux-ci les haines, rivalités, surveillances et délations réciproques.

Enfin, il prend personnellement le portefeuille de la guerre en 1938 et obtient le pouvoir de se constituer une armée personnelle internationale en 1939, la Waffen-SS, à l'intérieur même de la Wehrmacht. Celle-ci représentait 10% des effectifs en 1944.

Dès 1939, il abandonne le titre de chancelier, mais non les fonctions, et en 1941, avec le renouvellement quadriennal de ses pouvoirs, il se fait attribuer par le Reichstag les fonctions de « juge suprême » avec le droit de vie ou de mort sur les citoyens du Reich et la possibilité de légiférer par ordonnances secrètes[5]. Il a ainsi désormais les mains totalement libres juridiquement pour éliminer secrètement et massivement ses adversaires politiques, raciaux ou autres.

Juste avant son suicide, le 30 avril 1945, Hitler transfère ses pouvoirs présidentiels à l'amiral Karl Dönitz. Le maréchal du Reich Hermann Göring et son rival, le ministre de l'Intérieur, le général Heinrich Himmler, Reichsführer de la SS, sont destitués, exclus du parti et condamnés à mort sur ses ordres pour « haute trahison ». Ses pouvoirs de chancelier sont transmis au vice-chancelier Goebbels et la présidence du parti à Martin Bormann, jusqu'alors chef de la Chancellerie du parti. Après le suicide de Goebbels et la fuite de Bormann qui lui ont transféré également leurs pouvoirs respectifs, Dönitz prend le titre de président du Reich par interim, nomme un nouveau chancelier par intérim, et dissout le NSDAP qui n'a plus de raison d'être du fait de l'échec de sa mission historique qui était la revanche de l'Allemagne sur les pays de l'Entente de 1914-1918.

Titres comparables dans d'autres pays

Des titres équivalents à ceux de chef ou de guide sont utilisés, de manière officielle ou non, par les dirigeants de divers régimes ou courants politiques, notamment dans un contexte de dictature.

  • Le titre de « Caudillo », en espagnol, a une consonance nettement plus militaire et même religieuse.
    • Le révolutionnaire mexicain Venustiano Carranza s'était autoproclamé Primer Jefe (premier chef)
    • Le révolutionnaire mexicain Emiliano Zapata était El Caudillo del Sur (Caudillo du Sud).
  • Le président mexicain Plutarco Elías Calles était qualifié de « Jefe Maximo » durant sa dictature de fait, le « Maximato ».
  • L'Argentin Juan Peron préférait le surnom plus fasciste de « Conductor »

Cinéma

Références

  1. Mein Kampf, Tome II, chapitre 11 Propagande et organisation
  2. Ian Kershaw, Hitler, Tome 1, page 256
  3. Ian Kershaw, Hitler, tome I (1889-1936) page 524, Flammarion 2001
  4. Les Länder perdent leur statut d'états fédérés et le gouvernement central y est représenté par un gouverneur (Statthalter)
  5. Ces ordonnances ne seront ni promulguées ni publiées. Voir Ordre du Führer
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