Force De Police Auxiliaire (Guerre D'Algérie)

Force De Police Auxiliaire (Guerre D'Algérie)

Force de police auxiliaire (Guerre d'Algérie)

La Force de police auxiliaire est une unité de police formée de supplétifs algériens musulmans pour lutter en France métropolitaine contre le FLN pendant la guerre d'Algérie.

Sommaire

Création

La création de la FPA semble avoir été inspiré par l'utilisation massive des supplétifs algériens lors de la mise en place du plan Challe[1]. Le 30 novembre 1959, alors que Maurice Papon est préfet de police de Paris, le premier ministre Michel Debré décide de constituer une Force de police auxiliaire (FPA) composée de musulmans algériens volontaires qui sera commandée par le capitaine Raymond Montaner[2] [3] et en métropole. La FPA qui devient opérationnelle à partir de mars 1960 dépend directement du premier ministre qui la met à disposition du prefet pour les problèmes opérationnels [4]. Elle est formée à la caserne du fort de Romainville où se trouve également la branche action du SDECE, et où se trouve son commandement, elle est dispersée dans les quartiers à forte implantation musulmane de Paris, dans six hôtels connus pour leur appartenance au FLN qui sont frappés d'une mesure de fermeture administrative.[4].

Méthodes

Outre le personnel en tenue de policier, de nombreux soldats sont chargés d'infiltrer le FLN et la plupart de leurs succès sont dus à cette infiltration. Présente dans les zones de forte implantation du FLN, elle montre à l'ensemble de la population algérienne de Paris que la toute puissance du FLN a des limites. Alors que la police judiciaire ne lance ses coups de filets qu'après un long travail d'enquête ayant permis de mettre à jour un réseau, la FPA exploite immédiatement les renseignements obtenus[1], procède à l'interpellation des suspects et à leur interrogatoire en vue de remonter jusqu'à la tête du réseau. Les interrogatoires font usage de la torture comme l'a dénoncé dés 1961 Paulette Péju dans son livre " Les harkis à Paris"[5]. Les raisons de son efficacité sont multiples, mais la principale est structurelle : la police supplétive est la concentration, en une seule formation, de la presque totalité des procédés opérationnels de son service de tutelle. Elle regroupe à elle seule les trois volets de la stratégie ternaire. Outil de renseignement et d'action psychologique, elle infiltre efficacement les réseaux du FLN et organise des réunions de propagande dans les cafés arabes. Outil répressif, elle met sur pied des opérations de police dans la capitale (patrouilles et rafles). Outil de neutralisation, elle assure en outre le transfert des interpellés au centre d'internement de Vincennes, et veille, par l'intégration dans ses rangs, à la protection des individus menacés (souvent des anciens cadres du FLN ralliés ou des personnes ayant communiqué des renseignements). Egalement conçue comme une unité de lutte anti-terroriste et d'infiltration, la police auxiliaire voit ses pouvoirs légaux limités à ceux de la police municipale, ce qui, au lieu de lui ôter des prérogatives, lui confère au contraire une plus grande capacité opérationnelle, notamment en matière de contrôle dans les lieux public. Néanmoins, cette unité est conçue pour opérer en toute légalité dans le cadre du SCAA (Service de coordination des affaires algériennes) . En effet, l'exploitation des renseignements réunis par la police auxiliaire nécessite obligatoirement une validation judiciaire ce qui explique la participation conjointe de la BAV Brigade des agressions et violences) ou de la 8e BT (Brigade territoriale) lors des perquisitions.[4].

Les FAP obtiennent des succès rapides: Dès le 21 mars 1960, trois membres du FLN sont arrêtés. Pendant la nuit du 23 au 24 mars, des descentes dans les hôtels et meublés de l'arrondissement, conduites en collaboration avec la BAV, permettent grâce aux indications fournies par un cadre frontiste, l'interpellation de six membres de l'OPA (Organisation politico-militaire du FLN)et la saisie de documents importants[4]. Ces rafles obligent les cadres de l'organisation à quitter l'arrondissement. Bénéficiant de l'effet de surprise et d'informations préalables, le capitaine Montaner met immédiatement en place un réseau d'informateurs et donne une grande liberté d'action à chacun de ses chefs de sections pour obtenir un maximum de renseignements auprès des gérants d'hôtels[4]. L'objectif des FPA est de disloquer l'organisation du FLN en arrêtant les responsables et en empêchant le prélèvement des cotisations. Ils parviennent à rallier les Algériens menacés de mort par le FLN et à recruter des indicateurs parmi les commerçants[6]. La méthode utilisée par les hommes de Montagner est invariable: occupation d'hôtels habités par les travailleurs algériens, infiltration et recueil de renseignements, violences policières, tortures[6]. Dans les archives policières, Linda Amiri a retrouvé une plainte déposée par un breton au teint mat, torturé pour qu'il avoue. Autrement dit, conclut Linda Amiri, toute personne au teint mat est soupçonnée de cotiser au FLN et susceptible de donner des informations[6].

Les indicateurs sont majoritairement des commerçants et des gérants d'hôtels : sur une liste de 7 indicateurs, dont la profession a pu être clairement identifiée par les officiers de la Force de police auxiliaire, 4 sont gérants de cafés-hôtels, 1 est épicier et 2 travaillent dans le secteur secondaire. En un mois, la désorganisation, qui s'accélère à partir du 23 avril 1960, affecte les structures locales du FLN dans le XIIIe arrondissement. Les arrestations initiales, et les indications obtenues à leur suite, ont un effet accélérateur du démembrement, car la plupart des interpellations entraînent à leur tour des "dénonciations en chaîne". Dans la journée du 25 avril, trois sections de kasmas différentes ont été démantelées par l'exploitation de renseignements obtenus à la suite d'une arrestation unique. Le ralliement d'un chef de section a permis de localiser immédiatement, l'implantation de son unité et de connaître son chef de kasma, ainsi que ceux d'autres chefs de sections. Trois cadres subalternes du FLN se rallient et collaborent avec la police auxiliaire. Le chef de secteur du 14e arrondissement, sera intégré dans la FPA[4].

Réaction du FLN

L'efficacité des FPA conduit rapidement le FLN à déclencher avec eux une guerre sans merci. Le poste de la Goutte d'Or est attaqué par deux groupes armés le jour même de son installation, le 20 novembre 1960, puis le 4 décembre. D'une façon générale, les postes et les cafés tenus par la FPA dans le XVIIIe arrondissement sont la cible de commandos qui y subissent de lourdes pertes, mais en provoquent également chez l'adversaire[7]Brunet, Police contre FLN, p.69-71</ref>.

La préfecture de police mettra en vanat que pour contrer la FPA,le FLN a également recours, « à une campagne diffamatoire » dont le but serait d'émouvoir l'opinion publique et d'obtenir la dissolution de l'unité . Des informateurs du 6e secteur SAT (Service d'assistance technique) signalent l'ébauche d'une telle campagne. Ainsi, « Des responsables frontistes et des militants bien choisis du foyer de Vitry - 45, rue Rondenay - ont reçu les consignes de déclarer dans les cafés et lieux publics qu'ils ont subi des exactions, ont été spoliés d'un portefeuille, d'une montre […] et ont été l'objet de violences de la part de la "police algérienne »[4].

Regroupement à Romainville

L'efficacité de la FAP, conclut Jean-Paul Brunet, a eu pour contrepartie l'emploi de moyens illégaux et moralement condamnables comme les arrestations et détentions arbitraires et la pratique systématique de la torture[7]. Ces méthodes sont dénoncées dans la presse de gauche, et ce sont peut-être ces protestations, mais aussi l'ouverture des premiers pourparlers d'Évian entre le gouvernement français et le GPRA à la fin du mois de juin 1961, qui aboutisent au regroupement des compagnies de FPA au fort de Noisy à Romainville. Toujours est-il que les négociateurs français d'Évian présentent le regroupement des FPA comme un geste de bonne volonté de la France, en échange duquel le FLN annoncera l'arrêt des attentats contre les policiers français[7]. Partisan de l'Algérie française et conseiller municipal de Paris, Bernard Lafay dénonce ce geste, alors que François Rouve, secrétaire du syndicat général de la police présente au conseil général de son syndicat le regroupement comme la réponse positive du gouvernement à l'une de leur revendication. Il précise même «  nous avons obtenu que les cars conduisant les supplétifs soient conduits par des chauffeurs auxiliaires supplétifs, et non par des chauffeurs de la police municipale. »[7]

Après une visite au fort de Noisy, Jean Viatte, Président de la Commission de vérification des mesures de sécurité publique, qui représente également Maurice Patin, président de la Commission de sauvegarde des Libertés et droits individuels, termine son rapport en ces termes: « Le regroupement des forces supplétives et leur casernement à Noisy-le-Sec semblent avoir mis fin à certains excés antérieurs... »[7].

Dissolution

La FPA comptera jusqu'à 600 hommes. Le bilan 1960 des harkis de la région parisienne se monte à 300 arrestations, dont 70 tueurs, 3 chefs de zone, 2 Fusils mitrailleurs, 17 pistolets mitrailleurs, nombreux pistolets, fusils de guerre, bombes, grenades, explosifs saisis. elle est sont dissoute en janvier 1962. Tous les hommes seront reclassés, en général dans la police nationale. Certains trop compromis se verront remettre une nouvelle identité compléte[4].


Bibliographie

  • Jean-Paul Brunet, Police contre FLN, Flammarion, 1999 ISBN 2-08-067691-1
  • Raymond Muelle, 7 ans de guerre en France quand le FLN frappait en métropole Ed. Grancher, 2001, ISBN 2-7339-0719-0
  • Rémy Valat, Les calots bleus et la bataille de Paris. Une force de police auxiliaire pendant la guerre d'Algérie, éd. Michalon, coll. « Document », 2007, 286 p. ISBN 978-2-84186-382-2


Notes et références

  1. a  et b Emmanuel BlanchardPolice judiciaire et pratique d'exceptions pendant la guerre d'Algérie , Vingtième Siècle. Revue d'histoire, n°90, 2006/2
  2. Jean-Paul Brunet, Police contre FLN, le drame d'octobre 1961, Flammarion, 1999, p.60
  3. Linda Amiri, La Bataille de France. La guerre d'Algérie en Métropole, Paris, Robert Laffont, 2004, p.92-93
  4. a , b , c , d , e , f , g  et h Rémy Valat, Un tournant de la Bataille de Paris: l'engagement de la Force de police auxiliaire (20 mars 1960), article paru dans la Revue d'Histoire : Outre-Mers, 1er semestre 2004, N°342-343
  5. Paulette Péju, Les harkis à Paris, la Découverte, 2000, (1re ed 1961)
  6. a , b  et c Linda Amiri, La répression policière en France vue par les archives, dans La guerre d'Algérie, dir. Harbi et Stora, Robert Laffont, 2004, p.595-598
  7. a , b , c , d  et e Brunet, Police contre FLN, p.69-71

Voir aussi

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