Explosion atomique

Explosion atomique
Test d'une bombe atomique américaine de 23 kilotonnes, le 18 avril 1953

Une explosion atomique ou explosion nucléaire est le résultat de l'explosion d'une bombe atomique. Le terme ne distingue généralement pas l'explosion d'une bombe Afission) d'une bombe Hfusion), en tant qu'il met l'accent sur :

  • l'énergie libérée (exprimée en kilotonnes ou mégatonnes de TNT – une tonne de TNT développant 109 calories, soit 4,18x109 joules) ;
  • les radiations (émises par les deux types de bombe atomique).

Ces deux facteurs expliquent la puissance et les conséquences redoutables de l'explosion atomique. Les deux bombes qui ont explosé au-dessus de Hiroshima et Nagasaki ont suffi, par leurs effets, à faire basculer le monde – la géopolitique aussi bien que la philosophie ou l'art – dans l'ère nucléaire.

Sommaire

Physique de l'explosion

Déroulement

Déroulement d'une explosion au sol

L'explosion atomique se déroule en plusieurs phases :

  • réaction en chaîne (de 0 à 10-6 seconde) ;
  • boule de feu / surpression (10-6 jusqu'à 1/10e de seconde) ;
  • extension de la surpression, refroidissement progressif de la boule de feu (0,1 à 10 secondes) ;
  • formation du champignon (plusieurs secondes, voire minutes) ;
  • élévation et dissipation du champignon, retombées, pluie noire (de quelques minutes jusqu'à plusieurs mois pour les retombées).

La durée de ces phases peut fortement varier en fonction de l'intensité, de l'altitude, de la nature de la bombe, des conditions météorologiques et de la nature du terrain dans le cas d'une explosion souterraine ou à faible altitude.

Libération de l'énergie

Bombe à fission

Article détaillé : Bombe A.

Lorsque la masse critique est atteinte, que ce soit dans le cas du plutonium ou de l'uranium, une réaction en chaîne se déclenche. Les neutrons libérés atteignent alors une vitesse d'environ 1 4x107 m/s et traversent la masse de matière fissile d'environ 10 à 20 centimètres de diamètre en seulement 10-8 seconde. Le temps moyen entre deux fissions est de 10-8 seconde. La matière radioactive destinée à une utilisation militaire doit ainsi libérer au moins deux neutrons à chaque collision afin d'atteindre une réaction suffisante. Une bombe avec environ 2x1024 fissions produit une énergie équivalente à 20 kilotonnes de TNT (soit un peu plus que la puissance de la bombe atomique larguée sur Hiroshima). En considérant que 2 neutrons sont libérés à chaque fission, on peut approximativement déterminer le nombre de générations nécessaires pour obtenir cette puissance de 20 kt (en partant d'un neutron initial) :


n = \log_2 (2\cdot10^{24})+1 \approx 81{,}7

Si la réaction n'est pas interrompue, la libération de l'énergie est terminée après 0,8 microseconde. Comme cette progression suit une loi exponentielle, la plus grande partie de l'énergie est produite durant les dernières générations. Pendant les 60 premières générations, l'énergie est équivalente à la charge explosive conventionnelle nécessaire pour lancer l'explosion atomique ; après 77 générations, elle atteint environ 1 000 tonnes de TNT (1 kt). 95 % de l'énergie de la bombe sont produits durant les cinq dernières générations.

En pratique, ce phénomène n'est pas parfaitement séquentiel : une fission antérieure poursuit son action alors même qu'une nouvelle fission est en cours. Des modèles plus précis permettent d'obtenir une meilleure idée de la durée du phénomène et du nombre de fissions. Ces modèles ont notamment été modelisés par Einstein dans son traité sur l'atomique et ses dangers.

Bombe à fusion

Article détaillé : Bombe H.

Boule de feu et surpression

Boule de feu saisie avec une exposition d’un millionième de seconde. On aperçoit encore la base de la tour de tir au sommet de laquelle était installée la bombe (104 Kt, 1952).
On distingue l'onde de choc qui précède le front de la boule de feu: elle perturbe une fine colonne de fumée (flèche) (18 Kt, 1945).

Dans les premières microsecondes, l’énergie est libérée par la réaction nucléaire essentiellement sous forme de rayons γ et de neutrons. Ces rayonnements étant absorbés par l'air en quelques mètres, un dégagement de chaleur (au sens énergie thermique) a lieu, la température dépassant localement le million de degrés Celsius. Cet air surchauffé forme alors une "boule de feu" (masse sphérique de gaz incandescents) de quelques dizaines de mètres. Se comportant comme un corps noir, elle émet un rayonnement thermique intense d’abord sous forme de rayons X. L’atmosphère étant peu transparente à ces derniers, ils sont réabsorbés en quelques mètres. Dans les millisecondes qui suivent, la boule de feu se dilate et se refroidit. Son rayonnement thermique « glisse » vers l’ultraviolet, la lumière visible et l’infrarouge. L'air étant transparent à ces longueurs d'onde, le rayonnement thermique peut alors se propager sur plusieurs dizaines de kilomètres. Intense, il brûle et enflamme des objets à distance. En quelques secondes, la boule de feu qui continue de se refroidir atteint son diamètre maximal (autour de 2,2 km en 10 s pour 1 Mt). Cette dilatation ayant lieu initialement à vitesse supersonique, il y a genèse d'une onde de choc suivie d'un effet de souffle.

Formation du champignon

Pour consulter un article plus général, voir : Nuage en champignon.

Par convection, la boule de feu s'élève rapidement du fait de sa chaleur. En se refroidissant, elle cesse d'émettre de la lumière visible (donc cesse d'être incandescente). La vapeur d'eau qu'elle contient se condense formant le sommet du champignon atomique. C'est un pyrocumulonimbus, c'est-à-dire un nuage de type cumulonimbus formé par une source de chaleur autre que le rayonnement solaire. En principe, il atteint la stratosphère soit environ 20 km d'altitude pour une explosion de 1 Mt puis il s'écrase horizontalement sur une distance de 35 km de diamètre pour 1 Mt. Si la boule de feu, au moment de sa formation, n'a pas touché le sol, le nuage est plutôt blanc, il contient surtout de l'oxyde d'azote issu de l'échauffement des composants de l'atmosphère absorbés par la boule de feu, de la vapeur d'eau et une faible quantité de débris (poussières, gaz) rendus fortement radioactifs par la présence de radionucléides issues de la réaction nucléaire initiale. Si la boule de feu touche la surface du sol, une grande quantité de débris solides pulvérisés (poussière) sont aspirés dans le nuage ; il prend alors une couleur marron. Il peut s'y ajouter la suie des incendies.

Retombées radioactives

Article détaillé : retombée radioactive.

Si la boule de feu touche la surface ou si la puissance de l'engin est faible (<10 kt) :

  • dans les minutes qui suivent, une partie de cette poussière et de cette suie associée à l'eau liquide de la condensation (refroidissement conséquent à l’ascension du nuage) redescend rapidement sous forme de pluie noire (retombées radioactives) à proximité de la cible ;
  • dans les heures et les jours qui suivent, entraînées par les courants aériens, ces retombées se poursuivent jusqu'à des centaines de kilomètres sous le vent de la cible.

Dans le cas d’une explosion de plus forte puissance en altitude, la force ascensionnelle entraîne les débris de la bombe dans la haute atmosphère. Les retombées n'ont lieu que dans les semaines et les mois qui suivent, et sont globales.

Répartition de l'énergie dissipée

Pour référence, l'énergie dissipée par l'explosion nucléaire de Hiroshima (environ 1/60 mégatonne de TNT, soit plus de 69 terajoules) s'est partagée en :

Cette répartition peut varier en fonction :

  • de la puissance de la bombe : les petites puissances maximalisent les effets par rayonnements ionisants (radiations), les fortes puissances les effets thermiques.
  • de la « géométrie » de l'arme. On pense là à la « bombe à neutrons » : augmentation de la part de l'énergie sous forme de rayonnements ionisants.
  • du milieu où a lieu l'explosion :
    • aérienne (à distance de la surface) : maximalise les effets thermiques, mécaniques, et la surface touchée. Utilisée pour détruire des cibles « douces » comme des villes ou des unités militaires non préparées. C'était le cas de la bombe d'Hiroshima qui a explosé à une altitude de 500 m.
    • au contact (ou sous le niveau) de la surface : beaucoup d'énergie mécanique avec génération d'une onde de choc sismique et d'un cratère, les retombées radioactives sont très importantes. Utilisée pour détruire des cibles « durcies » tel les bunkers, les abris souterrains ou les silos de missiles. Les effets thermiques et l'onde de choc aérien sont diminués.
    • dans le quasi-vide de l'espace ou de la haute atmosphère : surtout des rayonnements ionisants, avec un très grand rayon d’action. Peu d’effets thermiques. Presque aucun effet mécanique. Il existe par contre, dans ce cas, des effets assez « exotiques » : voir ci-dessous.
  • des conditions météorologiques :
    • les nébulosités (nuages, brouillard) ou la présence de neige au sol peuvent beaucoup diminuer ou augmenter « l'efficacité » du rayonnement thermique de la bombe.
    • des phénomènes d'inversions de la température de l'air peuvent également dévier les ondes de chocs et ainsi diminuer les dommages à distance du point zéro.
Aurore formée au-dessus de l'atmosphère par les débris d'une bombe de 1,4 Mt qui vient d'exploser à 400 km d'altitude. L'aurore artificielle dura environ 15 minutes. À 1200 km de là, des lignes à haute tension disjonctèrent. Une partie des satellites en orbite à cette époque furent victimes d'avaries dans les semaines qui suivirent (1962).

Cas particulier des explosions dans l'espace

L'absence d'atmosphère pour absorber les rayonnements initialement formés modifie la répartition des énergies diffusées et la portée de leurs effets.

Suite à la détonation d’une arme nucléaire au niveau de l’orbite basse (quelques centaines de km d'altitude) de la Terre, voici la séquence d’événements qui aurait lieu[1] :

  • Durant les premières dizaines de nanosecondes : les puissants rayons γ nés de l’explosion sont arrêtés par les molécules neutres de la haute atmosphère à 30 ou 40 km d’altitude. Ces collisions aboutissent à l’émission simultanée d’électrons de forte énergie (effet Compton). Ce grand nombre de charges en déplacement rapide dans la même direction génère une puissante impulsion électromagnétique qui peut endommager ou détruire les circuits sensibles des appareils électroniques sur une grande partie de la Terre (une étendue comparable à celle d'où l'explosion est visible).
  • Durant les secondes suivantes : en l’absence d’atmosphère pour absorber et générer des effets thermiques ou mécaniques, 70 % de l’énergie de l’explosion est émise sous forme de rayons X. Ces rayons X durs sont assez puissants pour pénétrer et « cuire » les systèmes électroniques des satellites dans l’espace voisin.
  • Au même instant, les débris de la bombe sous forme de gaz ionisé sont projetés à plusieurs centaines de kilomètres d’altitude. Ces particules chargées interagissent avec le champ magnétique de la Terre, ce qui le distord et crée un gigantesque champ électrique de basse fréquence. Quoique ce champ soit faible (1 millivolt par mètre), il va induire dans les longs câbles terrestres et sous-marins des courants de forte intensité, faisant disjoncter des installations électriques et téléphoniques même à grande distance du point d’explosion (au-delà de l'horizon).
  • Ces particules ionisées (électrons et protons) sont finalement capturées et accélérées par le champ magnétique terrestre, puis injectées dans la magnétosphère où elles pourraient rester piégées des années. Le résultat serait une augmentation de l’intensité, de la taille et du nombre des ceintures de radiations de la Terre, ce qui en quelques mois endommagerait l’électronique d’une grande partie de la flotte des satellites en orbite et rendrait le voyage des humains dans l'espace impossible.

Conséquences pour les êtres humains

L'explosion nucléaire est un phénomène physique qui survient lors du fonctionnement d'une bombe nucléaire. Cette dernière est en principe utilisé comme arme. La partie suivante développe donc les conséquences médicales de cette explosion sur les populations civiles ou les combattants.

Préambule

Voici un extrait de la déclaration de paix de la ville de Nagasaki[2] publié le 9 août 2002 :

« Il y a 57 ans, jour pour jour, le 9 août 1945, la ville de Nagasaki fut soudainement transformée en un champ de ruines. Larguée depuis une altitude de 9 600 mètres, une seule bombe atomique explosa à 500 mètres au-dessus du sol, émettant des rayonnements de chaleur de plusieurs milliers de degrés Celsius et provoquant un souffle d'une force terrible, frappant la population civile et notamment les femmes, les personnes âgées et les enfants sans défense. Quelques 74 000 personnes furent tuées et 75 000 furent blessées. Depuis, les cas de cancer et de leucémie provoqués par les radiations ont fait de nombreuses autres victimes. Même plus d'un demi-siècle après, les survivants de la bombe atomique souffrent encore d'une anxiété constante quant à leur état de santé et se sentent traqués par la mort. »

Effets médicaux

En lisant la partie suivante, il faut garder à l'esprit quelques points : les blessures décrites sont souvent dans ces circonstances cumulatives ; une seule victime peut souffrir à la fois de brûlures thermiques, de plusieurs traumatismes et d'une irradiation... Même modéré, leur cumul peut être fatal, d'autant que la désorganisation qui suit l'attaque rend l'accès aux soins problématique. Pour finir, il existe une composante psychologique traumatique qui marquera toute leur vie certains survivants. Elle reste difficilement quantifiable ici.

Les informations qui suivent sont pour la plupart issues du NATO handbook on the medical aspects of the NBC defensive operations[3].

Les brûlures sur le corps de cette femme suivent le motif de son kimono. Les parties foncées du tissu ont absorbé la chaleur alors que les parties claires ont épargné en partie la peau.

Flash lumineux et rayonnement thermique de l'explosion

Ils entraînent des blessures selon deux mécanismes :

  • l'un direct, pour des personnes à l'extérieur des bâtiments par brûlures de la peau exposée. Le port de vêtements, en particulier clairs, peut apporter une certaine protection. Voici, par exemple, les distances estimées pour lesquelles surviennent des brûlures du deuxième degré pour 50 % des personnes exposées protégées par un treillis militaire : 369 m pour un engin de 1 kt, 1 100 m pour 10 kt, 3 km pour 100 kt, 8 km pour 1 Mt. Dans le cas particulier des personnes regardant par accident directement la boule de feu : la rétine peut être endommagée ou brûlée, avec un risque de cécité temporaire ou définitive, et ceci même à très grande distance.
  • l'autre, indirect : le rayonnement thermique entraîne nombre d'incendies, y compris à distance du point zéro. Les personnes exposées sont blessées ou tuées dans ces incendies (brûlures, asphyxie…). Par exemple, un engin de 35 kt peut enflammer un rideau de fenêtre en coton à 3,8 km. Un engin de 1 Mt déclenchera des feux jusqu'à 16 km. À Hiroshima, les multiples incendies se réunirent en une véritable tempête de feu qui dura 16 heures, dévasta 11 kilomètres carrés et ne laissa aucune chance aux victimes qui y étaient piégées[4].
Dégâts dans le centre de Hiroshima suite à l'onde de choc, au souffle et aux incendies.

Onde de choc et effet de souffle

  • Effet direct, par barotraumatisme : lésions internes (tympans, sinus, poumons, tube digestif) dues à la variation brutale de pression au passage de l'onde. La résistance des tissus est significative aussi ce n'est pas la cause de la majorité des blessures. En effet il faut une surpression de 100 kiloPascal ou kPa pour entraîner une lésion des tympans chez 50 % des personnes exposées[5]. De même que pour entrainer la mort de ces même 50% il faut une surpression de 300 kPa [6]. Par contre un mur en moellons s'effondre dès 15 kPa [7].
  • Indirect, et plus meurtrier :
    • le passage de l'onde de choc provoque l'effondrement des bâtiments. Un grand nombre de victimes succombent ensevelies sous les décombres, d'autant que des incendies s'y développent rapidement. Par exemple, une surpression de 35 kPa assurant des destructions complètes à modérées sur la plupart des constructions se retrouvera à 700 m d'un engin de 1 kt, 3,2 km d'un engin de 100 kt et 6 km d'un engin de 1 Mt.
    • le souffle projette des débris (par exemple, le verre des vitres brisées transformé en projectile). Voici, par exemple, les distances estimées pour lesquelles surviennent des blessures perforantes graves par projection de débris pour 50 % des personnes exposées : 220 m pour un engin de 1 kt, 570 m pour 10 kt, 1,5 km pour 100 kt, 3,6 km pour 1 Mt.
    • le souffle déplace brutalement les victimes et les blesse par chute ou écrasement. Voici par exemple, les distances estimées pour lesquelles surviennent des blessures graves pour 50 % des personnes exposées par écrasement ou chute : 270 m pour un engin de 1 kt, 750 m pour 10 kt, 1,9 km pour 100 kt, 4,8 km pour 1 Mt.
Retombée d'un engin de 10 Mt (explosion en surface). Les valeurs indiquées correspondent aux doses cumulées en Roentgen par rayons γ les 4 premiers jours après la détonation (107 Roentgens correspondent à environ 1 Gy). Des zones de retombées où surviendrait 50 % de décès chez les personnes exposées pourraient se retrouver jusqu'à 340 km du point 0.

Radiations

  • Causes d'irradiation :
    • Irradiation instantanée au moment de l'explosion (irradiation externe par neutrons et rayons γ). Voici, par exemple, les distances estimées pour lesquelles surviendrait un décès pour 50 % des personnes exposées à cause de l'irradiation au moment de l'explosion (soit une dose de Gray ou Gy) : 800 m pour un engin de 1 kt, 1 100 m pour 10 kt, 1,6 km pour 100 kt, 3,2 km pour 1 Mt. Des murs très épais apporteraient une certaine protection.
    • Irradiation par la radioactivité induite (activation neutronique) : Au moment de l'explosion le bombardement par les neutrons rend les matériaux du sol et des bâtiments radioactifs près du point zéro par formation de radionucléides. Cette radioactivité diminue rapidement et est confinée à une zone où le rayonnement thermique a normalement déjà tout tué. À Hiroshima et Nagasaki on estime qu'elle représentait le premier jour, au maximum, une dose cumulée de 0,6 Gy. La dose cumulée du deuxième au cinquième jour représentait moins de 0,1 Gy[8].
    • Irradiation suite aux retombées radioactives (surtout en cas d'explosion au niveau de la surface) : c'est-à-dire irradiation par les radionucléides produits par l'explosion. Ces radionucléides sont soit déposés au niveau du sol et de l'environnement (irradiation externe surtout par rayons γ), soit absorbés par l'organisme – par exemple, poussières déposées dans les voies respiratoires – (irradiation interne surtout par rayons β). La zone touchée par ces retombées peut, en fonction des vents, s'étendre sur des centaines de kilomètres. Ces radiations sont meurtrières, en particulier dans les premiers jours. Empiriquement, on peut estimer qu'une heure après l'explosion les victimes sont exposées à des débits de doses élevées jusqu'à 10 Gy/h à l'endroit des retombées. Toutes les 7 heures, ce débit est à diviser par dix. Au bout de 15 jours, ce débit n'est plus que de 1 mGy/h. La meilleure des protections serait d'évacuer la zone des retombées. Sinon le confinement à l'intérieur d'un bâtiment aux murs épais serait également une solution possible. À Hiroshima et Nagasaki (explosions aériennes), il y eut assez peu de retombées (dose cumulée totale au maximum de 0,4 Gy).
Fillette de 11 ans qui avait perdu ses cheveux plus d'une semaine après l'explosion. Elle se trouvait dans une maison en bois à 2 km de l'hypocentre, ce qui l'a, a priori, protégée des brûlures thermiques mais pas de l'irradiation instantanée. (Hiroshima).
  • Effets médicaux :
    • Syndrome d'irradiation aiguë. Au départ (quelques heures à quelques jours), une phase de prodromes : asthénie, céphalées, nausées, vomissements. Plus les signes surviennent précocement, plus le pronostic est sombre. Après une phase de latence (de quelques jours à quelques semaines) au cours de laquelle l'état de santé de la victime s'est amélioré, survient la phase aiguë : asthénie, céphalées, nausées, vomissements, diarrhées, immunodépression, perte des cheveux, hémorragies et éventuellement décès en quelques semaines à quelques mois. Sinon guérison avec ou sans séquelles (voir ci-dessous) en quelques mois. À Hiroshima et Nagasaki quelques dizaines de milliers de personnes sont mortes du Syndrome d'irradiation aiguë dans les jours, les semaines et les mois qui ont suivi l'attaque.
    • Exposition in utero des fœtus, conséquence de l'irradiation de femme enceinte. Elle peut entraîner une mort in utero (avortement), un retard de croissance, un retard mental ou des malformations (non héréditaires) [9].
  • Effets médicaux à long terme :
    • Séquelles du Syndrome d'irradiation aiguë : cataractes, stérilité (souvent réversible chez l'homme), augmentation de la fréquence des maladies pulmonaires, cardiaques ou digestives avec possible diminution de la durée de vie.
    • Cancers : tumeurs malignes solides et leucémies, conséquence de l'irradiation.
    • Pour estimer l'importance de ces effets à long termes, il faut se référer au suivi de 86 000 survivants de Hiroshima et Nagasaki[10],[11],[12].
      • Décès liés aux cancers : sur les 50 000 survivants suivis situés à moins de 2 500 m du point zéro au moment de l'explosion un excès de 428 cancers mortels liés aux radiations seraient survenus entre 1950 et 1990.
      • Excès de décès liés aux radiations autres que les cancers : ce nombre représenterait 50 à 100 % du nombre des décès par cancer liés aux radiations.
      • Au-delà de 2 400 m il n'y aurait que peu d'effets liés aux radiations.

Effets sur la descendance de la population irradiée

C'est ici l'altération des cellules germinales qui est en cause.

Celle-ci peut provenir de l'irradiation externe, ou interne, c'est-à-dire provoquée par les éléments radioactifs incorporés au corps.

Il se trouve que les effets mutagènes de l'irradiation externe sur l'espèce humaine sont extrêmement difficiles à préciser :

elle a une fécondité trop faible pour les méthodes statistiques

[réf. nécessaire] et est exposée continuellement, naturellement et artificiellement, à une multitude de facteurs entraînant des mutations ou lésions chromosomiques, et enfin peut altérer d'elle-même les données statistiques des anomalies (par avortement).

Il existe des éléments de réponse permettant d'appréhender l'importance de ces effets mutagènes :

  • les résultats du suivi des descendants des victimes d'Hiroshima et Nagasaki (30 000 enfants de parents irradiés, ce qui représente une population statistiquement significative) n'a pas permis d'observer une augmentation des malformations ou des troubles génétiques, du moins à la première génération. Si le risque mutagène existe, il peut sans doute être considéré comme faible[13],[14].
  • chez les mammifères, l'expérimentation animale n'a pas mis en évidence l'apparition d'anomalies génétiques, même sur plusieurs dizaines de générations successivement irradiées. Ce qui renforce les conclusions précédentes. L'utilisation de rayons X pénétrants permet a priori d'étendre ces conclusions aux effets génétiques des irradiations internes[15].

Effets sur le reste de la population mondiale (retombées globales)

Entre 1945 et 1971, les essais nucléaires atmosphériques ont libéré une énergie équivalente à celle de l'explosion de plus de cinq cents mégatonnes de TNT. À partir de 1963, des traités internationaux vont réduire les occurrences de ces essais et les puissances nucléaires vont d'elles-mêmes éviter les tirs atmosphériques pour leurs préférer des tirs souterrains.

L'ensemble de la population mondiale a été exposée aux radionucléides dispersés à la surface du globe par ces essais atmosphériques. Les effets sur la population mondiale restent difficiles à estimer en raison des très faibles doses d'irradiation impliquées (inférieures de plusieurs ordres à la radioactivité naturelle).

Un rapport américain du CDC[16], estimant la faisabilité d'une étude sur ce sujet, évoque la possibilité de 11 000 morts par cancers radio-induits par les retombées aux États-Unis entre 1950 et le début du XXIe siècle.

Cette étude estime le nombre de victimes par une extrapolation qui n'est qu'une hypothèse[17] (existence d'une fonction linéaire dose-réponse y compris pour de très faible doses), la radioactivité naturelle selon la même extrapolation serait alors responsable de 16 fois plus de morts[18]. En comparaison, toutes causes confondues en 1990, c'est 500 000 morts par cancers qui sont survenues dans le même pays.

Quant aux effets sur le nombre d'occurrences de maladies génétiques, les données fiables manquent mais ils peuvent être considérés comme très faibles.

Conséquences pour l'environnement

Conséquences climatiques

Article détaillé : hiver nucléaire.

À partir de 30 kt, le nuage de l'explosion peut atteindre la stratosphère, où non seulement il forme le fameux champignon mais surtout diffuse les matériaux qu'il a emportés dans ses courants ascendants. Les plus légers peuvent avoir le temps de se laisser entraîner par les courants stratosphériques.

Là dessus, des hypothèses ont été émises concernant les atteintes au climat terrien.

Parmi elles, on relèvera que lors d'une guerre nucléaire, les énormes quantités de poussières et de fumées rejetées auraient des conséquences comparables ou supérieures à celles d'une éruption volcanique cataclysmique, telle celle du Krakatoa en 1883.

Conséquences sur la faune et la flore

L'examen au microscope de spécimen de plantes ayant poussé à la fin de l'été 1945 sur les terres dévastées de Hiroshima révélait des cellules agrandies et déformées.

Concernant plus spécifiquement et théoriquement les altérations génétiques, la dose doublante, qui entraîne un doublement des anomalies par rapport à la fréquence des anomalies spontanées, est estimée entre 0,5 et 2,5 gray sur des espèces bien connues telles que les drosophiles. Ces chiffres peuvent être mis en relation avec le chiffre de 4 gray au minimum reçus dans un rayon de 1 km autour du point d'impact de la bombe de Hiroshima.

Dans le cas des mammifères, il n'a pas été expérimentalement mis en évidence de troubles génétiques y compris pour des irradiations de 2 Gy par génération sur 83 générations successives[15].

Hiroshima et Nagasaki

Le Département de l'Énergie des États-Unis (DOE) estime que 70 000 personnes ont été tuées instantanément à Hiroshima et 40 000 à Nagasaki. Mais un plus grand nombre de personnes sont décédées dans les années qui ont suivi. Ainsi, cinq ans après l'explosion, le nombre total de décès est estimé à peut être 200 000 personnes à Hiroshima. Pour Nagasaki, le chiffre d'un total de 70 000 décès en janvier 1946 est avancé[19],[20].

Plusieurs facteurs empêchent de fournir des statistiques fiables du nombre de victimes à ce jour, entre autres, le fait que nombre de victimes sont sorties d'elles-mêmes des statistiques officielles, telles ces Coréens rentrés en Corée après la guerre (10 % de l'ensemble des victimes étaient coréennes, selon les estimations japonaises).

De fait, en 2003, ces deux villes sont engagées dans deux combats : le premier, mis en avant, pour la paix ; le second, pour le soutien aux victimes, les hibakusha, n'a pas été relayé au niveau national.

Protection

Arrêt des essais

Les nombreux inconvénients des essais nucléaires les font progressivement remplacer par les simulations informatiques. Ces simulations utilisant la méthode de Monte-Carlo tel la Monte-Carlo N-Particle transport permettent de poursuivre le développement d'armes nucléaires sans avoir recours à des explosions de test.

Disparition des bombes atomiques

L'alternative consistant à supprimer les bombes nucléaires de la surface du globe est l'objet d'un débat propre à l'ère nucléaire.

Détection et localisation d'une explosion nucléaire

En physique théorique, l'effet Cristofv[21] permet la détection et la localisation d'une explosion nucléaire.

Glossaire

Des expressions et mots nouveaux sont apparus, en conséquence directe des explosions nucléaires :

  • Hibakusha : victimes atomisées (littéralement « personnes ayant subi le bombardement »)
  • Pikadon : synonyme de bombardement atomique (littéralement en japonais : éclair-explosion ; pika-don)
  • Syndrome des atomisés : sens variable — synonyme de leucémie, ou de tout désordre mal identifié provoqué par l'irradiation
  • Hiver nucléaire : abaissement hypothétique de la température du climat terrestre, suite à une guerre nucléaire.

Annexes

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Articles connexes

Bibliographie

Liens externes

Notes et références

  1. (en) Nuclear explosions in orbit, Daniel G. Dupont, page 68 à 75 de Scientific American, June 2004
  2. (fr) Déclaration de paix de la ville de Nagasaki [doc]
  3. (en) NATO handbook on the medical aspects of the NBC defensive operations
  4. (fr) Les effets immédiats et les effets différés de la guerre nucléaire, Kevin Lewis, page 85 à 96, La paix surarmée, Belin, 1987
  5. (en) NATO handbook on the medical aspects of the NBC defensive operations FM 8-9 Chapter 4 Section 403d2
  6. (en) NATO handbook on the medical aspects of the NBC defensive operations FM 8-9 Chapter 4 Table 4-I
  7. (en) NATO handbook on the medical aspects of the NBC defensive operations FM 8-9 Chapitre 4 Section 403c
  8. (en) Radiation Effects Reasearch Foundation, FAQ, Are Hiroshima and Nagasaki still radioactive?
  9. (en) Radiation Effects Reasearch Foundation, FAQ, What health effects have been found among persons who were exposed before birth?
  10. (en) The study of atomic bomb survivors in Japan, de C.S. Finch dans le numéro 66 pages 899 à 901 de Am. J. Med. de 1979
  11. (en) Radiation Effects Reasearch Foundation, FAQ, How many cancer deaths have occurred among atomic-bomb survivors and how many of these can be attributed to radiation?
  12. (en) Radiation Effects Reasearch Foundation, FAQ, What health effects other than cancer have been seen among the atomic-bomb survivors?
  13. (en) Genetic effects of the atomic bombs : a reappraisal, de William J. Schull, Masanori Otake et James V. Neel dans le volume 213, numéro 4513, pages 1220 à 1227 de Science du 11 septembre 1981
  14. (en) Radiation Effects Reasearch Foundation, FAQ, What health effects have been seen among the children born to atomic-bomb survivors?
  15. a et b (en) Comparative litter and reproduction characteristics of mouse populations for 82 generations of X-irradiated male progenitors de JF Spalding, MR Brooks et GL Tietjen dans le numéro 166 pages 237 à 240 de Proceedings of the Society for Experimental Biology and Medicine de février 1981
  16. (en) Final report on the feasibility of a study of the health consequences to the american population from nuclear weapons tests conducted by the United States and other nations
  17. (en) p.110
  18. (en) p.115
  19. (en) The Atomic Bombing Of Hiroshima
  20. (en) The Atomic Bombing Of Nagasaki
  21. Cristjo Cristofv, The real meaning of the Compton effect, 1954 http://library.wustl.edu/units/spec/archives/guides/pdf/compton3.pdf


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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Explosion atomique de Wikipédia en français (auteurs)

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