Abbaye de Moncé

Abbaye de Moncé

L'abbaye de Moncé était un monastère féminin relevant de l'Ordre cistercien. Fondée en 1209 à Limeray près d'Amboise, d'abord prieuré avant de devenir abbaye, elle fut détruite lors de la Révolution française.

La Touraine n'a connu que deux abbayes de femmes, à Beaumont-lès-Tours et à Moncé, cette dernière étant beaucoup moins importante que la précédente. Il n'a été conservé qu'un petit nombre des chartes la concernant, mentionnées dans un inventaire ancien[1], [2]

Armes de l'ordre de Cîteaux

Sommaire

Toponymie

Montiacum[3], Moncé-lez-Amboise en 1185, Fons de Monceo à la création du prieuré en 1209, Monceium en 1228 (chartes de Fontaines les Blanches), Ecclesia B. Mariæ de Monceio en 1242 (charte de Moncé)[4], Moncy en 1288 (charte de la comtesse d'Alençon)[5], Mons Cœlestis[6] et finalement Moncé sur la carte de Cassini et Moncey sur le cadastre. Le nom découle probablement du latin mons devenu monceaus (1165) en vieux français, désignant une petite colline, soit la même origine que "monceau"[7]. Une autre source évoque un très hypothétique domaine de Moncius[8].

Histoire

La création de l'abbaye de Moncé est relatée dans la Grande chronique de Tours (Chronicon turonense magnum), rédigée au milieu du XIIIe siècle:

« L'année 1209 […] quatre religieuses, Ermengarde du Plessis et Perronelle de Méré, de l'abbaye de Beaumont-lès-Tours, accompagnées d'Agnès de Linières et de Pelerine, du prieuré de Saint-Avit, s'installèrent dans une maison en bois qu'elles avaient faite construire au sommet du coteau de Moncé. Elles y vécurent en suivant la règle cistercienne durant trois années. En 1212, un riche bourgeois de Tours, nommé Payen Hermenard (Pagani Hermenardi), leur fit bâtir en pierre un monastère et une église. Les religieuses furent peu à peu vingt, puis trente, puis cinquante. Elles s'installèrent dans les nouveaux bâtiments le 27 décembre 1216. L'église fut consacrée solennellement le 7 juin 1223 par Maurice, évêque du Mans. » [9].

Une des première religieuses du prieuré aurait été apparentée à la famille d'Amboise en étant une descendante d'Adénor, sœur d'Hugues Ier d'Amboise.

Le prieuré de Moncé fut érigé en abbaye par le Pape Innocent X en 1652, à la demande du roi Louis XIV qui en attribua ultérieurement les bénéfices à Madame de Châteaumorand, en qualité d'abbesse, le 15 août 1706 à Versailles[10]. Au XVIIe siècle l'abbaye abritait 40 religieuses.

Blason

Blason de l'abbaye de Moncé

Les armes de l'abbaye de Moncé se blasonnaient ainsi :

D'azur à la Vierge d'or portant de son bras dextre l'Enfant aussi d'or; accompagnée à dextre d'un pied humain contourné d'argent, et à senestre d'un boudon et d'une main versée, tous deux aussi d'argent et rangés en fasce.[11],[12].

Patrimoine

Sulpice III d'Amboise fut, sinon le fondateur, du moins un des premiers bienfaiteurs du prieuré en lui donnant une partie de son patrimoine. Dans une charte de 1214, il lui fait don de : « sa métairie de la Varenne située entre l'île Barbe et Limeray, avec toutes ses dépendances et droits de pêche en Loyre.  ». A sa mort en 1218, sa veuve, Isabelle de Chartes, dame d'Amboise poursuivit ces dons, tradition perpétuée par sa fille Mathilde. En 1242, Renaud de Précigny attribua aux religieuses une rente sur ses terrages et son moulin d'Augé et, en 1288, c'est Jeanne de Blois-Châtillon, comtesse d'Alençon, qui leur donna deux cents charretées de bois à prendre dans sa forêt de Blois. En 1363, Ingelger d'Amboise donna aux religieuses : « une maison dans l'enceinte du château »[13].

Le Clos Lucé, appelé fréquemment cloux ou clos, a appartenu aux religieuses du prieuré de Moncé, qui le louaient par bail à rente, d'abord à Amé du Perche, seigneur du Breuil, puis à Macé Baboyon et sa femme. Le 26 mai 1471, le clos sera définitivement cédé à Étienne le Loup, garde des forêts d'Amboise[14],[15].

Possessions à Limeray
Possessions diverses
Revenus

En 1762, le revenu de l'abbaye était estimé à 9 000 livres. La seigneurie de Chaumont-sur-Loire était assignée pour 500 livres de rente, et les bouchers d'Amboise pour 35 livres. S'y ajoutaient la dîme d'Auzouer-en-Touraine en indivis avec le curé de Saint-Nicolas de Blois, la dîme de Pocé-sur-Cisse et celle de Saint-Ouen-les-Vignes, sans oublier le droit de pêche sur la Cisse près du pont de la Ramée.

Trésor

En 1721, un paysan découvrit un petit trésor d'or et d'argent, caché dans un creux de rocher sous l'abbaye de Moncé. C'est sa soudaine aisance qui le fit remarquer[17].

Destruction

Château de Moncé édifié sur l'emplacement de l'abbaye

Comme toutes le communautés religieuses, l'abbaye fut victime de la déchristianisation pendant la Révolution française. Les religieuses en furent chassées, et les bâtiments, décrétés biens nationaux en novembre 1789 et vendus comme tels. La plupart furent détruits entre 1792 et 1798. Ne subsistèrent que l'infirmerie[N 6], une fuye[N 7], l'église et le logis abbatial. Ces deux derniers furent rasés en 1844 pour faire place à l'actuel château[N 8], de style néo-renaissance, construit de 1845 à 1846, par Charles Alphonse de Sain de Bois-le-Comte[18],[N 9]

Une statue de Sainte Marthe, datée de la fin du XVe siècle, en provenance de l'abbaye de Moncé est conservée dans l'église Saint-Saturnin de Limeray. Une statue d'un moine cistercien, datée du XVIe siècle, a peut-être la même origine. Deux médaillons de vitraux ont également été sauvés.

D'après les descriptions des bâtiments figurants dans les procès-verbaux des biens nationaux, on peut présumer que l'abbaye avait été en grande partie reconstruite au XVIIe siècle[18].

Prieures et abbesses

Prieures[N 10]

Vitrail de l'église de Limeray à l'effigie d'Ermengarde du Plessis[N 11]
  • 1223 -…? Ermengarde du Plessis
  • …? - 1284 Marguerite Vernant
  • 1284 - 1306 Denise d'Aguzon
  • 1306 - 1309 Jeanne de Freteval
  • 1319 - 1319 Florie de Pontlevoy
  • 1377 - 1415 Perronelle
  • 1453 - 1467 Jeanne Charpine
  • 1469 - 1490 Catherine de Commiers
  • 1491 - 1513 Catherine d'Aspremont
  • 1513 - 1518 Olive le Gaye
  • 1518 - 1538 Jeanne de Guenant
  • 1550 - 1561 Françoise de Lavardin
  • 1563 - 1570 Perronelle de Grosbois
  • 1570 - 1574 Marthe Larcher
  • 1575 - 1592 Pernelle de Craon
  • 1593 - 1613 Anne Larcher

Abesses

  • 1652 - 1675 Marie-Marthe d'Épinoy
  • 1676 - 1683 Marie-Elisabeth de Bouillé
  • 1684 - 1694 Madeleine Dorat
  • 1706 - 1709 Charlotte Joubert de la Bastide de Châteaumorand[19]
  • 1709 - 1712 Marie-Louise de Montgommery
  • 1712 - 1729 Marie-Madeleine de Bonsens des Épinets
  • 1731 - 1741 Cunégonde de Maillé-Carman
  • 1741 - 1747 Renée-Elisabeth de la Rue
  • 1747 - 1754 Elisabeth de Villette
  • 1755 - 1775 Marie-Françoise Le Marié d'Aubigny
  • 1775 - 1786 Louise-Marie de Trézia de Cangé
  • 1786 - 1790 Marie de Roucy[N 12]

Références

  1. Manuscrit N°1494 conservé à la bibliothèque de Tours
  2. Rapports et délibérations du Conseil général d'Indre et Loire, 184?,pp. 434-435
  3. Adrien de Valois, Notitia Galliarum, Paris, 1675, p. 572
  4. J-X Carré de Busserole, Dictionnaire Géographique Historique et Biographique d'Indre et Loire et de l'ancienne province de Touraine, Tome 4, 1882, p. 273
  5. Layette 38, Archives de la cour des comptes de Blois
  6. Jean-Louis Chalmel, Histoire de la Touraine jusqu'en 1790, Tome 3 chez H. Fournier jeune Paris et à Tours chez Mame et Moisy, 1828, p. 509
  7. Robert - Dictionnaire historique de la langue Française, Paris, 1998
  8. Pierre-Henri Billy, Origine des noms des villes et des villages de France, Editions Famot, Genève, 1981
  9. André Salmon, Recueil de chroniques de Touraines, Ladevèse, Tours, 1854, pp. 152-153 (texte en latin)
  10. Journal de Philippe de Courcillon, marquis de Dangeau, Tome 11, Firmin Didot frères, Paris, 1857, p. 180
  11. Ce blasonnement est reconstitué à partir du texte et du croquis figurants dans le manuscrit de l'abbé Blaive, reproduits dans le bulletin N°1 de la revue Ambacia paru en 1985, et de la transcription fournie par L.A. Bosseboeuf dans son livre : La Touraine historique, 1897, p. 585 (note en bas de page).
  12. Le bourdon étant un attribut des prieur(e)s, on peut présumer que le blason a été conçu avant l'élévation en abbaye en 1652
  13. Marguerite Coleman, Histoire du Clos-Lucé, Arrault et Cie, Tours, 1937, pp. 7-14
  14. Marguerite Coleman, Histoire du Clos-Lucé, Arrault et Cie, Tours, 1937, pp. 12-13
  15. J-X Carré de Busserole, Dictionnaire Géographique Historique et Biographique d'Indre et Loire et de l'ancienne province de Touraine, Tome 2, 1882, p. 325
  16. J-X Carré de Busserole, Dictionnaire Géographique Historique et Biographique d'Indre et Loire et de l'ancienne province de Touraine, Tome 1, 1882, p. 467
  17. Yves Combeau, Le comte d'Argenson (1696-1764) Ministre de Louis XV, Ecole des Chartes, 1999, p. 211
  18. a et b Denis Jeanson, Sites et Monuments du Val de Loire 1, à compte d'auteur, 1976, p. 52
  19. Nicolas Viton de Saint-Allais, Nobiliaire universel de France, Volume 17, Bachelin-Deflorenne, Paris, 1872-1878, p 419

Notes

  1. Bail du 21 juin 1787
  2. La métairie et les terres situées aux Fougerêts appartenaient avant la Révolution à l’abbaye de Moncé. Devenue propriété de la famille Lorin de Bray au cours du XVIIIe s., vendue comme bien national en 1791 à la même famille, elle est entrée dans le patrimoine de Jacques Pierre Orillard de Villemanzy lorsqu’il a hérité des biens de son demi-frère Etienne Jacques François Lorin de Bray, décédé en 1808 (voir le contrat de liquidation de la succession Villemanzy du 12 octobre 1830, sous la cote 111J113).
  3. Orthographiée "Bois d'Enha". Affermée pour 330 livres et 2 livres de cire le 12 mai 1284
  4. Trente arpents
  5. Bail du 8 décembre 1784
  6. Encore visible à la droite du château
  7. Ou fuie, petit pigeonnier
  8. Propriété privée, ne se visite pas.
  9. Charles Alphonse de Sain de Bois-le-Comte a été maire de Limeray. Selon Généanet, il était le fils de Claude Christophe, seigneur des Arpentis, lieutenant des maréchaux de France.
  10. Reconstitution approximative, les sources étant incomplètes et contradictoires :
    • M. de la Ponce, Recueil de documents destinés à faciliter la rédaction d'une géographie écclésiastique et politique, 1856 in Mémoires de Société archéologique de Touraine, Tome 9, à Tours chez Guilland-Verger, 1857.
    • J-X Carré de Busserole, Dictionnaire géographique, historique et biographique d'Indre et Loire et de l'ancienne province de Touraine, T4, 1882.
    • J-X Carré de Busserole, Armorial général de la Touraine, T18 & T19, Ladevèze, Tours, 1866-1867.
  11. Pour plus de détails, voir à l'article Eglise Saint saturnin de Limeray
  12. L'anneau d’argent de Marie de Roucy, dernière abbesse de Moncé, décédée le 8 novembre 1790, est conservé dans la sacristie de l’église Saint Saturnin de Limeray, monté sur un Christ en bronze du XVIIe siècle.

Annexes

Bibliographie

  • Jean-Louis Chalmel, Histoire de la Touraine jusqu'en 1790, chez H. Fournier jeune Paris et à Tours chez Mame et Moisy, 1828.
  • J-X Carré de Busserole, Dictionnaire Géographique Historique et Biographique d'Indre et loire et de l'ancienne province de Touraine en 6 tomes, 1879.
  • Marguerite Coleman, Histoire du Clos-Lucé, Arrault et Cie, Tours, 1937.
  • Denis Jeanson, Sites et Monuments du Val de Loire 1, à compte d'auteur, 1976.

Articles connexes

Liens externes



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