Bête faramine

Bête faramine

Tarasque

Pour le peuple amérindien, voir Tarasque (ethnie).

La Statue de la Tarasque, au pied du château de Tarascon

La Tarasque, dite aussi « bête faramine » (de « faramineuse », terme que l'on donne aussi à la vouivre), est un animal fabuleux de la tradition populaire, semblable au dragon, que le promeneur égaré rencontre la nuit tombée. Elle est en Provence le pendant de la Vouivre dans le Jura.

Sommaire

Tarasque de Tarascon

Légende

La légende dit que la Tarasque était la fille de Béhémoth et de la Vipère[réf. nécessaire]. Immonde serpent de mer aux yeux rougis et à l'haleine putride, elle vivait tapie dans une cavité aquatique naturellement creusée sous le château de Tarascon. Elle guettait les voyageurs passant le Rhône pour s'en repaître, semant la terreur dans tout le pays.

Elle est décrite de la façon suivante par Jacques de Voragine dans la Légende dorée qu'il écrivit dans les années 1261 - 1266 :

« Il y avait, à cette époque, sur les rives du Rhône, dans un bois entre Arles et Avignon, un dragon, moitié animal, moitié poisson, plus épais qu'un boeuf, plus long qu'un cheval, avec des dents semblables à des épées et grosses comme des cornes, qui était armé de chaque côté de deux boucliers; il se cachait dans le fleuve d'où il ôtait la vie à tous les passants et submergeait les navires. »[1]

Plusieurs versions existent pour expliquer la fin du monstre. Un jour, une jeune fille originaire de Judée, Sainte Marthe, venue évangéliser la Basse-Provence, décida de braver la bête. Avec toute la compassion que lui procurait sa foi chrétienne, elle obtint la soumission de la créature qui se laissa mener en laisse : Sainte Marthe avait ligoté à jamais ce symbole du paganisme. Mais le village avait subi tant de pertes que ses habitants se ruèrent sur le monstre et le tuèrent.

Ou encore, seize jeunes gens auraient défié et tué la Tarasque et seulement huit en seraient sortis vainqueurs et auraient fondé les villes de Tarascon et Beaucaire.

On peut rapprocher cette légende d'autres histoires analogues de saints sauroctones, par exemple l'évêque saint Romain qui délivre Rouen de la Gargouille, dragon qui terrorisait la ville, ou saint Clément de Metz qui tue le Graoully.

Festivités

Tarasque de Tarascon, de face
Tarasque de Tarascon, de profil

Cette légende donna naissance à des festivités destinées à exorciser le mal qui, pour les riverains du Rhône, se traduisait par les débordements intempestifs du fleuve. On accusait, entre autres choses, la Tarasque de bousculer les digues péniblement établies, de rompre de ses coups de queue les barrages qui empéchaient les eaux d'inonder la Camargue. On fabriqua alors un monstre qu'on lâchait dans les rues.

L'effigie était naïve mais impressionnante : immense carcasse de carton de 6 mètres de long, au corps en forme de tortue, hérissé de piquants, une tête humaine avec des moustaches gauloises, des oreilles triangulaires, des dents de poisson carnivore et une longue queue qui balaie tout sur son passage. À Pentecôte, elle devait rappeler au peuple le retour possible des catastrophes naturelles.

Au XIXe siècle, les apparitions de ce monstre sont encore assez menaçantes : la queue très longue, constituée d'une poutre, traverse la foule qui, comme dans les abrivades, montre son habileté en bravant ou en essayant de toucher le monstre tout en lui échappant. À son passage, il était d'usage (et c'est encore l'usage aujourd'hui) de pousser le cri traditionnel :

Lagadeou, lagadigadeou, la Tarascou
Lagadeou, lagadigadeou, lou Casteou

(lagadeou est une onomatopée, le casteou fait allusion au château de Tarascon)

A l'époque, la périodicité de cette fête était aussi imprévisible que les inondations qu'elle était censée exorciser. La Tarasque courut en 1846, 1861, 1891 et 1946.

Jusqu'à la fin du XIXe siècle, ces fêtes s'accompagnaient de jeux et d'une procession menés par les différentes corporations de métiers : vignerons, portefaix, bergers, jardiniers (maraîchers, fermiers, métayers) mais aussi des bourgeois. La présence de ces corporations, qui représentaient les métiers de la Provence, symbolisait la renaissance fertile lors des fêtes de Pentecôte.

Désormais, la Tarasque ne sort qu'une fois par an (en principe le 29 juillet, jour de la Sainte Marthe mais il ne reste plus grand-chose du monstre processionnel ; il s'agit plutôt d'une exhibition folklorique et touristique.

La Tarasque et les Chevaliers de la Tarasque

Tous les ans, pendant les fêtes de la Tarasque on la voit défiler dans les rues de la ville, ce qui est devenu un argument touristique. Le reste de l'année, on peut la voir dans son antre dans la Rue des Halles.

Le 25 novembre 2005, l'UNESCO a inclus la Tarasque dans la liste du patrimoine oral et immatériel de l'humanité[2].

Pour l’anecdote, un dinosaure, le Tarascosaure, a été nommé en hommage à la Tarasque. On la retrouve aussi au sein du museon Arlaten à Arles, musée ethnographique de la Provence ainsi que d'autre rites et légendes de la région et ses environs.

Tarasques espagnoles

Tarasque de la procession de Fête-Dieu à Valence

La Tarasque est présente dans de nombreuses villes espagnoles, de Madrid à Grenade.

Liée à la ville de Tarragone en Catalogne, la Tarasque fait également partie du bestiaire des fêtes de Ciutat Vella de Barcelone, la capitale autonomique catalane, depuis au moins le XVIe siècle[3].

Tarasque de Noves

« Tarasque » de Noves (musée Calvet Avignon, profil - époque incertaine : IIe siècle av. J.-C. ?)

Découverte à Noves, près d'Avignon, cette statue représente un monstre au dos recouvert d'écailles, évoquant la Tarasque. Voir les articles Cavares et Celtes.

Tarasque des jeux de rôles

La représentation de la créature dans les diverses processions illustrant maintes fêtes de la cité ramène curieusement à la plastique trouvée dans le jeu de rôle Advanced Donjons & Dragons dès ses premières éditions, ce qui induirait l'origine du pillage.

Monstruosité nordique, la tarrasque de Donjons et Dragons (avec deux "r" dans l'orthographe rôliste) est un des nombreux croisements entre les dieux et les géants (les géants étant, dans la mythologie nordique, extrêmement puissants), il s'agit d'une des créatures les plus puissantes du bestiaire. Elle est pourtant largement ignorée.

Tarasque des jeux vidéo

Dans la version française du jeu vidéo Final Fantasy IX, il existe un personnage jouable du nom de Tarask. Il s'appelait Salamander en version japonaise et Amarant en version américaine. Les traducteurs français l'ont certainement renommé à cause de la réputation de combattant impitoyable qu'il traîne derrière lui. Dans la version française de Final Fantasy XII, un monstre du même nom peut être combattu dans le jeu.

Le monstre apparaît également régulièrement dans la série des Shin Megami Tensei, bien connue des fans pour reprendre les légendes et autres figures mythologiques afin de créer son propre bestiaire. Elle a d'ailleurs un rôle secondaire majeur dans le spin-off Devil Summoner 3: Raidō Kuzunoha vs. The Soulless Army, où elle sert de moyen de transport. Pour l'invoquer, il suffit d'utiliser la flûte du Rhône. C'est également un allié du héros dans les phases d'action. A noter que la bête s'y révèle attirée par la boisson...

Autre référence, dans le jeu Defense of the Ancients, une variante de Warcraft III: The Frozen Throne, un objet permet de décupler la vitalité de son porteur ; son nom Heart of Tarasaque.

Bibliographie

  • Frédéric Mistral, traduction Anthony Berthier, Les Fêtes de la Tarasque en 1861, Marseille-Paris : Moullot 1862
  • Louis Dumont, La Tarasque : essai de description d'un fait local d'un point de vue ethnographique, Paris : Gallimard 1951 (ISBN 2-070709833)
  • Jean d'Aillon, La Tarasque, récit, Aix : à l'enseigne du Grand-Châtelet 2003, (ISBN 2-911850-99-8)
  • Jean-Paul Clébert,Les Fêtes en Provence, Avignon : Aubanel 1982 (ISBN 2-7006-0097-5)
  • Odile Cavalier (édité par), La Tarasque de Noves : réflexions sur un motif iconographique et sa postérité : actes de la table-ronde organisée par le musée Calvet, Avignon, le 14 décembre 2001, Avignon : musée Calvet 2004 (ISBN 2-9503664-4-9)
  • ‎DÉSANAT J.-‎ ‎Coursos dé la Tarasquo et Jocs founda per lou Rey René.-‎ ‎Avec une série de Notes explixcatives rédigées en français. Pouémo en vers prouvençaous burlequo-tragi-coumiqué, en doujé paousos. Patois dé Tarascoun. Arles. Garcin. 3 mai 1846

Notes

  1. Légende dorée, Sainte Marthe, traduction Roze, tome 2, 1902
  2. unesco.org
  3. Tarasque de Barcelone

Voir aussi

Liens externes

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