Siège de Constantinople (717-718)

Siège de Constantinople (717-718)
Page d'aide sur l'homonymie Pour les articles homonymes, voir Siège de Constantinople.
Siège de Constantinople
Greekfire-madridskylitzes1.jpg
Description du feu grégeois, manuscrit de Jean Skylitzès
Informations générales
Date 15 août 717-15 août 718
Lieu Constantinople
Issue Victoire byzantine et bulgare décisive
Belligérants
Umayyad Flag.svg Califat omeyyade Empire byzantin
Bulgarie
Commandants
Umayyad Flag.svg Maslama ibn ʿAbd Al-Malik
Umayyad Flag.svg Sulaymān †
Léon III l'Isaurien
Tervel
Forces en présence
80 000 hommes
1 800 navires
30 000 Byzantins
50 000 Bulgares
Pertes
Inconnues Inconnues
Guerres byzantino-omeyyades
Batailles
1er ConstantinopleSebastopolisCarthageTyane2e ConstantinopleNicéeAkroinon

Le second siège omeyyade de Constantinople est un conflit qui se déroule du 15 août 717 au 15 août 718 et oppose le Califat omeyyade à l'Empire byzantin et la Bulgarie. Malgré leur nombre et l'arrivée de renforts, les Omeyyades ne peuvent ni forcer la chaîne qui barre le port ni détruire la muraille de Théodose. La flotte byzantine inflige de gros dégâts à la flotte omeyyade, notamment grâce au feu grégeois. Cette bataille est très étudiée car elle arrête l'expansion musulmane vers l'Europe de l'Est pendant près de 700 ans.

Sommaire

Contexte

Le premier siège de Constantinople par les Omeyyades (674-678) se solde par un échec, les murailles de la ville la rendant imprenable. Une seconde attaque décisive sur la ville est décidée quelques années plus tard.

Déroulement

Étapes initiales

Une armée forte de 80 000 hommes, dirigée par Maslama ibn ʿAbd Al-Malik, frère du calife Sulaymān, traverse le Bosphore à partir de l'Anatolie pour assiéger Constantinople par la terre, tandis qu'une énorme flotte de guerre, commandée par un autre Sulaymān, initialement estimée à 1 800 navires, navigue dans la mer de Marmara, au sud de la ville.

Léon III l'Isaurien, qui est monté sur le trône byzantin cinq mois auparavant, est en mesure d'utiliser les fameuses murailles de Constantinople à son avantage et l'armée omeyyade ne réussit pas à les détruire, tandis que les galères omeyyades, constamment attaquées et harcelées par la marine byzantine qui utilise le feu grégeois avec une grande efficacité, sont incapables de remonter le Bosphore.

Hiver et printemps

John Julius Norwich décrit l'hiver 717-718 comme « l'hiver le plus cruel de mémoire d'homme ». Constantinople est approvisionnée par l'intermédiaire de la mer Noire et n'affronte que peu de difficultés, contrairement aux assiégeants sur terre, qui subissent d'immenses peines et des pertes dues à la maladie et la famine pendant l'hiver, car ils ne sont pas en mesure d'avoir les provisions nécessaires et sont contraints de manger leurs montures et, selon Michel de Syrie, même de petits cailloux et les corps de leurs morts. Le sol étant gelé, les Omeyyades sont forcés de jeter des centaines de morts dans la mer de Marmara, dont le commandant de la marine, l'amiral Sulaymān.

Une flotte venant d'Égypte de 400 navires et une autre venant de ʾIfrīqiyya de 360 navires arrivent au printemps avec de nouveaux renforts, mais les assauts successifs sur la ville sont des échecs[1]. Beaucoup de marins qui composent la flotte omeyyade sont des chrétiens faits prisonniers ou qui désertent en masse.

Le calife Sulaymān meurt en octobre 717[2] à Dābiq[3] et est remplacé par ʿUmar II, qui poursuit le siège. La mort et la succession du calife en 717 jouent sans doute un rôle dans le retard des renforts jusqu'au printemps. Michel de Syrie affirme que « Maslama leur a menti, quand il leur a dit que, bientôt, des renforts de leur roi arriveront ». Mais il est très probable que Maslama ait dit (vu ce qu'il sait) la vérité car il ignore que son frère, le calife Sulaymān, vient de mourir en menant une attaque contre les frontières byzantines.

Aide bulgare

Les Bulgares, qui ont établi des relations amicales avec les Byzantins un an plus tôt sous le khan Tervel, apparemment en raison de l'imminence de la menace omeyyade, viennent au secours de la ville assiégée à l'automne 717. Pour Norwich, « les Bulgares n'avaient pas d'amitié pour les Byzantins, mais ils pensaient que si Constantinople devait être prise, elle devrait tomber dans les mains bulgares et non arabes ».

Les Omeyyades sont surpris par cette attaque inattendue des Bulgares sur leur camp, et un massacre a lieu. Les attaques bulgares incessantes à l'arrière des lignes omeyyades les forcent à construire des tranchées. Ainsi, les Omeyyades se retrouvent coincés sur une fine bande entre les deux fortifications. Encouragés, les Byzantins ouvrent les portes et tentent de briser le siège, mais sont arrêtés par les tranchées omeyyades et doivent se réfugier derrière les murs de la ville en raison de la contre-attaque. Cette scène se répète plusieurs fois au cours du siège avec le même succès pour les deux camps.

Après un hiver exceptionnellement rigoureux, las de la longue usure de la guerre de siège, terrassés par la maladie et la famine, et démoralisés par le manque de succès, les Omeyyades tentent de se replier vers leurs navires en juillet, mais sont anéantis par une attaque bulgare contre leurs forces terrestres.

Les chroniqueurs contemporains rapportent que 12 000 à 15 000 Omeyyades au moins sont morts au cours de la première attaque bulgare.

Retraite omeyyade

Les Omeyyades sont contraints d'abandonner définitivement leurs ambitions sur Constantinople en août. Le siège est levé et une partie de l'armée tente de se replier à travers l'Anatolie, tandis que l'autre partie prend la voie maritime. Une tempête détruit la flotte restante sur son chemin de retour, seules cinq galères arrivent à bon port.

Conséquences et postérité

Cette bataille est un coup sévère porté au calife ʿUmar II et l'expansion du Califat omeyyade est ralentie au cours de son règne.

Léon III consolide les frontières de l'Empire byzantin et bat à nouveau le Califat omeyyade à la bataille d'Akroinon.

L'aide de la Bulgarie est l'un des principaux facteurs de la défaite des Omeyyades et de nombreux poètes et musiciens glorifient le khan Tervel comme le « sauveur de l'Europe ».

Du point de vue macro-historique, si Constantinople tombait, l'expansion musulmane en Europe de l'Est aurait eu plus de possibilités. Beaucoup d'historiens contemporains arabes et occidentaux voient dans le deuxième siège omeyyade de Constantinople, ainsi que dans les batailles de Toulouse et de Poitiers, un jalon crucial dans l'Histoire qui transforme le cours de l'incursion musulmane en Europe, en assurant au christianisme sa position dominante en Europe à un moment où cette dernière est dans un état de désarroi suite à la chute de Rome. Khalid Yahya Blankinship fait valoir qu'avec la bataille de Toulouse et la bataille de Poitiers, l'échec du siège de Constantinople montre la faiblesse de la dynastie des Omeyyades et est un facteur déterminant dans leur chute. Selon Paul K. Davis, « en repoussant l'invasion musulmane, l'Europe est restée chrétienne, et aucune menace musulmane sérieuse pour l'Europe n'a existé avant le quinzième siècle. Cette victoire, coïncidant avec la victoire des Francs à Tours (732), a limité l'expansion ouest de l'islam au sud du monde méditerranéen »[4].

Citation de la Chronique de Michel de Syrie

« Puis toute l'armée des Arabes a été placée sur la côte ouest contre les Portes d'or. Maslama a ordonné que soit fait un fossé autour du camp - l'un entre le camp et la ville et un autre derrière eux, du côté des Bulgares. De gauche à droite le camp a été contigu à la mer, dans laquelle étaient les navires, chargés d'une armée - de dix mille Arabes et des soldats égyptiens -, il les a mis là pour lutter contre les navires romains, il a envoyé une armée forte de 20 000 soldats pour garder le camp contre les Bulgares, et il a mis autant de Syriens.

Les Arabes ont été attaqués par les terres tant par les gens de la ville, que par les Bulgares, et dans la mer - par les navires romains, et de l'autre côté de la mer par l'avant-garde romaine.

Ils ne pouvaient pas sortir du camp, à une distance supérieure à deux miles, alors qu'ils ont été forcés de rechercher du blé.

Les Bulgares ont attaqué les Arabes et en tuèrent ; ces derniers firent plus peur aux Bulgares qu'aux Romains assiégés.

L'hiver est arrivé, mais les Arabes ont eu peur de la retraite : tout d'abord - en raison de leur roi, d'autre part - à cause de la mer et le troisième - en raison des Bulgares. Le vent de la mort les a saisis.

Maslama leur a menti, quand il leur a dit que, bientôt, des renforts de leur roi arriveront.

Les Romains étaient assiégés, mais la situation des Arabes n'était pas mieux.

La faim les a tellement oppressés qu'ils mangeaient les corps des morts, et les matières fécales entre eux.

Ils ont été forcés de s'exterminer eux-mêmes, pour pouvoir manger.

Un modius de blé valait dix deniers.

Ils étaient à la recherche de petites roches, qu'ils mangeaient pour satisfaire leur faim.

Ils ont mangé les ordures de leurs navires. »

— Michel de Syrie, La Chronique

Notes et références

  1. (en) Michael McCormick, Origins of the European Economy : Communications and Commerce AD 300–900, Cambridge, Cambridge University Press, 17 janvier 2002 (ISBN 0521661021), p. 412 .
  2. Tabarî (trad. Hermann Zotenberg), La Chronique : Histoire des prophètes et des rois [« تاريخ الرسل والملوك (Tārīḫ ar-rusul wal-mulūk) »], vol. II, Arles, Actes Sud, coll. « Sindbad », 19 mai 2001 (ISBN 2742733183), p. 197-207 .
  3. Village au nord d'Alep, théâtre d'une bataille entre l'Égypte et l'Empire ottoman en 1516.
  4. (en) Paul K. Davis, 100 Decisive Battles : From Ancient Times to the Present, États-Unis, Oxford University Press, 14 juin 2001 (ISBN 0195143663), p. 99 .

Bibliographie


Wikimedia Foundation. 2010.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Siège de Constantinople (717-718) de Wikipédia en français (auteurs)

Игры ⚽ Нужна курсовая?

Regardez d'autres dictionnaires:

  • Siege of Constantinople (718) — Infobox Military Conflict conflict=Second Arab siege of Constantinople caption= partof=the Byzantine Arab Wars date=717 718 AD place=Constantinople, Byzantine Empire (modern day Istanbul, Turkey) result= Decisive Byzantine Bulgarian victory;… …   Wikipedia

  • Siege de Constantinople (718) — Siège de Constantinople (718) Pour les articles homonymes, voir Siège de Constantinople. Lors du second siège de Constantinople les Arabes ne purent prendre la capitale byzantine. Cinq mois après l avènement de Léon III, l armée arabe de Maslama …   Wikipédia en Français

  • Siège de Constantinople (718) — Pour les articles homonymes, voir Siège de Constantinople. Lors du second siège de Constantinople les Arabes ne purent prendre la capitale byzantine. Cinq mois après l avènement de Léon III, l armée arabe de Maslama, le fils d Abd al Malik,… …   Wikipédia en Français

  • Siège de constantinople (718) — Pour les articles homonymes, voir Siège de Constantinople. Lors du second siège de Constantinople les Arabes ne purent prendre la capitale byzantine. Cinq mois après l avènement de Léon III, l armée arabe de Maslama, le fils d Abd al Malik,… …   Wikipédia en Français

  • Siege de Constantinople — Siège de Constantinople     Cette page d’homonymie contient une liste de différentes batailles, sièges ou guerres partageant le même nom. Si un lien interne vous a conduit sur cette page alors qu il existe un article détaillé, merci de… …   Wikipédia en Français

  • Siège de Constantinople (1390) — Siège de Constantinople     Cette page d’homonymie contient une liste de différentes batailles, sièges ou guerres partageant le même nom. Si un lien interne vous a conduit sur cette page alors qu il existe un article détaillé, merci de… …   Wikipédia en Français

  • Siège de Constantinople (1395) — Siège de Constantinople     Cette page d’homonymie contient une liste de différentes batailles, sièges ou guerres partageant le même nom. Si un lien interne vous a conduit sur cette page alors qu il existe un article détaillé, merci de… …   Wikipédia en Français

  • Siège de constantinople —     Cette page d’homonymie contient une liste de différentes batailles, sièges ou guerres partageant le même nom. Si un lien interne vous a conduit sur cette page alors qu il existe un article détaillé, merci de le mettre à jour pour qu …   Wikipédia en Français

  • Siège de Constantinople —     Cette page d’homonymie contient une liste de différentes batailles ou sièges partageant le même nom …   Wikipédia en Français

  • Constantinople — This article is about the city before the Fall of Constantinople (1453). For a more detailed approach after 1453, see History of Istanbul. For other uses, see Constantinople (disambiguation). Map of Byzantine Constantinople …   Wikipedia

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”