République théocratique de Genève

République théocratique de Genève

La République théocratique de Genève est le régime politique de dictature théocratique instauré par Jean Calvin de 1541 à sa mort en 1564.

Sommaire

Première tentative de réforme

Lorsque Calvin arrive à Genève, la ville est déjà largement acquise à la réforme. Le premier culte évangélique est célébré le vendredi saint de 1533. En janvier 1534, une controverse publique met aux prises Guillaume Farel et un dominicain, Guy Furbity. Le 1er octobre 1535, la population chasse le dernier évêque de la cité, Pierre de la Baume, prélat de la ville depuis 1522. Durant la même année, la réforme se met en place lentement, les autorités suspendant au départ provisoirement la messe, tandis que les ordres réguliers quittent progressivement la ville. Durant un temps, le fonctionnement spirituel de la ville était tout entière aux mains de Farel. Puis, les autorités organisent le basculement de la cité dans la réforme au début de l'année 1536. On interdit aux curés, aux chanoines, etc. de célébrer les rites catholiques, on leur impose de jurer obéissance aux doctrines évangéliques. Enfin, le dimanche 21 mai 1536, Le peuple réuni en Conseil Général proclame son adhésion unanime à la Réforme religieuse[1].

Calvin arrive à Genève à l'été 1536. Il n'a donc pas pris part à la conversion de la cité elle-même.

En 1536, il vit à Genève où il a été nommé professeur de théologie, et où la Réforme vient d'être adoptée. Il y joue un rôle à la fois religieux et politique. En octobre 1536, il participe à la dispute de Lausanne, destinée à faire basculer la ville dans le camp de la réforme.

Il écrit avec Farel les Confessions de foi pour tenter d'organiser l'Église de Genève. Publiée officiellement le 10 novembre 1536, le texte fait l'objet d'une discussion âpre avec les autorités, qui refusent de signer les 21 articles. Il y a ainsi discussion sur la fréquence des communions, et sur la sévérité à appliquer l'excommunication. Ces mesures sont en effet également politique, car une excommunication équivaut à un ostracisme dans une société éminemment religieuse. Calvin fait également montre de grande rigueur dans la décision de bannir les anabaptistes, en mars 1537. En avril, Calvin institue un syndic chargé de se rendre de maison en maison pour s'assurer que les habitants souscrivent à la confession de foi. Mais devant les résistances, cette initiative s'enlise.

Durant toute l'année 1537, Calvin mène avec d'autres intolérants une pression continue sur les hésitants et les tièdes[1]. En été, il est prévu d'interroger chaque dizainier sur sa foi. Il lui est demandé de surveiller la foi des habitants de son quartier. Ensuite, on demande à chaque quartier de venir accepter la confession de foi et jurer fidélité à Genève. Le 30 octobre, on demande publiquement aux hésitants de souscrire à la confession de foi. Le 12 novembre, les récalcitrants sont banni de la ville.

Progressivement, les adversaires de Calvin, ou plutôt de son fanatisme se regroupent et prennent de l'importance. Le 4 janvier 1538, le Conseil général statue que plus personne ne doit être interdit de participer à la communion. Le 3 février 1538, quatre nouveaux syndics sont élus, tous hostiles à Calvin. Les deux reproches les plus fréquents sont le mélange permanent du spirituel et du pouvoir temporel, et le fait que ce soit un étranger qui décide de bannir de la ville des genevois. Mais en aucun cas, cette hostilité à Calvin est une défiance vis-à-vis de la réforme. En mars, le conseil somme Calvin de ne plus s'occuper d'affaires civiles. Le ton montant, il est emprisonné un mois plus tard. Il faut noter que lors de cette escalade, Calvin n'est pas seul et est pleinement en phase avec Guillaume Farel.

Finalement, pour avoir bravé plusieurs interdits, Calvin et Farel sont bannis de Genève en avril 1538. Il se retire alors à Strasbourg, où, dès son arrivée, il propage les nouvelles doctrines.

Organisation des pouvoirs

Il « croyait aux textes et aux institutions. Celles de Genève furent formulées [en 1541] par les ordonnances ecclésiastiques, promulguées par le conseil de la ville sur le modèle strasbourgeois »[2]. Calvin participe ainsi à la mise en place d'une république calviniste dans la ville.

Ce gouvernement théocratique protestant n'est pas en pleine rupture avec le système de gouvernement et l'état d'esprit du christianisme médiéval (catholique) : il lutte contre ceux qui ne sont pas favorables à la Réforme, parfois même en les condamnant à l'exil ou à la peine de mort.

Calvin crée également le Consistoire, assemblée comprenant cinq pasteurs et douze délégués du Petit Conseil appelés anciens qui étaient des laïcs investis d'un ministère religieux. Cette assemblée a pour rôle de contrôler la ville quant à l'orthodoxie spirituelle ainsi que de punir les petits délits(réprimandes, amendes) et les grands délits (prison, exil et peine de mort). À partir de cette époque, il devient très influent dans la ville : aussi ses adversaires le surnomment-ils le pape de Genève. Il fait adopter par le conseil ses articles de foi, ainsi que ses ordonnances sur la discipline ecclésiastique ; il réforme les mœurs aussi bien que les croyances. Il ne s'oppose pas à la condamnation à mort de Michel Servet[3], et, même s'il souhaite que la sentence prononcée par le Conseil de la ville soit exécutée autrement que par le bûcher, il en est la cause directe en ayant dénoncé et combattu ouvertement sa doctrine opposée à la Trinité (27 octobre 1553).

La terreur

Durant les seules cinq premières années de son règne, treize personnes seront pendues, dix décapitées, et trente-cinq périront sur le bûcher[réf. nécessaire]. Il y eut tout de même de nombreux conflits entre le Conseil et le Consistoire notamment au sujet de l'excommunication. Calvin pensait en effet qu'on ne pouvait laisser impunis ceux qui se moquent de l'Église et de la loi de dieu et que l'Église avait le droit de décider. Les magistrats quant à eux estimaient que c'était de leur ressort car la communion était le droit et le devoir de chacun. L'excommuniation était à l'époque une très grande honte civile et religieuse et par conséquent un très grand pouvoir.

L'installation de la discipline très stricte de Calvin se fit avec de nombreux heurts et divisa rapidement le peuple en partis pro et anti-Calvin. Si, en effet, Calvin ne faisait pas de politique directement, il était régulièrement sollicité par les magistrats pour la politique intérieure et extérieure. Son pouvoir indirect était très fort.

La guerre civile

Les Libertins, groupe réunissant les citoyens opposés à la dictature de Calvin, étaient au départ ses principaux partisans. Ils le soutenaient pour "libérer" Genève du joug de l'Evêque mais jugèrent rapidement que la discipline qu'il tentait d'imposer aux citoyens était trop sévère. La tensions monta peu à peu entre Calvin et les Libertins au travers de conflits comme par exemple "l'affaire Gruet", jusqu'en 1553 où les "Perrinistes"[4] gagnèrent les élections. C'est dans ce climat de tensions que survint l'affaire Michel Servet où les "Perrinistes" soutinrent Servet sans pour autant trop se prononcer de peur d'être jugés comme hérétique eux aussi. La montée en puissance de la résistance au nouvel ordre moral institué par Calvin s'exerça de 1543 à 1555.

En effet, dès 1555, les Libertins furent battus et leurs chefs exilés ou exécutés, il n'y eut dès lors plus d'opposition au régime de Calvin. La voie était donc libre pour la réforme des mœurs. C'est alors que le nouveau régime protestant se stabilisa définitivement et Genève prit le surnom de "Cité de Calvin". Ce fut le triomphe du réformateur.

Développement des institutions pédagogiques

En 1559, Calvin fonda l'Académie de Genève, dont il confia le rectorat à Théodore de Bèze. Débuta alors une grande réforme scolaire qui impliquait le bénéfice d'une organisation pédagogique développée.

Notes et références

  1. a et b "Cottret"
  2. Pierre Miquel, Les guerres de Religion, Fayard, 1980, p. 182-183
  3. Cours de base : Leçon 3
  4. Ce terme définit les opposants de Calvin menés par la famille Perrin

Bibliographie

  • V° Jean Calvin, Dictionnaire de biographie, Bouillet.

Voir aussi

Articles connexes



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