Mont Djoudi

Mont Djoudi
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Le mont Djoudi (nom araméen, en arabe جبل جودي Jebel Ǧūdī, turc Cudi Dağı, kurde Çiyayê Cûdî, syriaque (peshitta) traditionnel aussi Qardū), selon la tradition des premiers chrétiens et dans l'islam (la sourate 11,44 du Coran), est l'endroit où l'Arche de Noé se posa après le Déluge.

Turquie et le mont Ararat
Le mont Ararat en Turquie ; le mont Djoudi est situé au sud-est d'Ararat.

La tradition coranique est basée sur une légende judéo-chrétienne, apparemment d'origine syrienne, peut-être elle-même venue d'une version du mythe dérivé d'une tradition non biblique. L'identification du mont Djoudi comme lieu d'atterrissage de l'Arche perdura dans les traditions syriaque et arménienne jusqu'à l'Antiquité tardive mais fut abandonnée pour une tradition qui situait le lieu biblique sur la plus haute montagne de la région, le mont Ararat.

D'après les traditions islamique et syriaque, le mont Djoudi ou Qardou est un sommet proche de la ville de Jazirat ibn Oumar (l'actuelle Cizre), vers les sources du Tigre, près de l'actuelle frontière entre la Syrie et la Turquie. C'est un historien arabe, Al Masû'dî (décédé en 956) qui rapportait que l'endroit où reposait l'Arche pouvait toujours être vu en son temps. Il situait le mont Djoudi à 80 parasanges du Tigre.

La description du géographe médiéval Yaqout al-Hamawi correspond exactement avec un sommet de 2 089 m qui est appelé de nos jours Jebel Djoudi ou Djoudi dagh par les musulmans et Qardou par les chrétiens et les juifs, au nord de Silopi.

Sommaire

Nom

Le rapport entre le nom « Qardou » et « Djoudi » n'est pas clair. « Qardou » est certainement à rapprocher de « Gordyène » et de ce fait à l'ethnonyme des Kurdes. L'origine de « Djoudi » est bien moins claire, souvent considéré comme une altération corrompue du même nom, via « al-Gourdi » (Reynolds 2004). L'hypothèse que les deux noms soient en fait le même fut posée pour la première fois par l'orientaliste anglais George Sale, dans sa traduction du Coran publiée en 1734, dans une note de bas de page :

« Cette montagne (c'est-à-dire al-Djoudi) est l'une de celles qui, au sud, séparent l'Arménie de la Mésopotamie, et cette partie de l'Assyrie est habitée par les Kurdes, de là ces montagnes prirent le nom de Cardou, ou Gardou, dont les Grecs firent Gordyae, et d'autres noms. ... Le mont Djoudi (qui semble être une corruption, bien qu'il soit toujours écrit ainsi par les Arabes, pour Djordi, ou Giordi) est aussi appelé Thamanin ... , probablement du nom d'une ville qui se trouve à sa base. »

Sale poursuit en disant qu'il y eut autrefois un célèbre monastère chrétien sur la montagne, mais que celui-ci fut détruit par la foudre en -776 après quoi : « la croyance en cette tradition diminua et fut remplacée par une autre, jusqu'à présent, et selon laquelle l'Arche reposa sur le mont Massis en Arménie, dénommé par les Turcs Agri Dagh[1]. »

Tradition chrétienne

Les Syriens de l'est du Tigre avaient une légende selon laquelle l'Arche se posa sur le mont Djoûdi dans le pays de Kard. Cette légende peut êre originellement différente du récit dans la Genèse du Déluge de Noé, enraciné dans les légendes plus générales de déluges au Proche-Orient, mais après la christianisation des Syriens, à partir du IIe siècle environ, il devint associé au le mont Ararat, où selon la Genèse l'Arche se posa, et depuis la Syrie, cette légende se propagea aussi aux Arméniens. Ces derniers n'associaient pas traditionnelllement la descente de l'Arche de Noé au mont Ararat, connu sous le nom de Masis par les autochtones, mais jusqu'au XIe siècle ils continuèrent à l'associer au mont Djoudi[2].

Selon Flavius Josèphe, les Arméniens montraient, encore au Ier siècle, les restes de l'Arche de Noé dans un lieu appelé αποβατηριον « Lieu de la Descente » (en arménien Նախիջեւան, Nakhitchevan ; Ptolémée : Ναξουανα), à peu près 60 miles au sud-est du mont Ararat (ca. 39° 04′ N 45° 05′ E / 39.07, 45.08)[3]. Flavius Joseph de plus déclara que Themanin, la première ville bâtie après le Déluge, le fut à la base du mont Djoudi[4].

Les « monts Ararat » de la Genèse étaient identifiés au Moyen Âge chrétien avec le sommet de ce nom, un massif volcanique sur la frontière entre l'Arménie et la Turquie, en turc Agri Dagh (Ağrı Dağı).

Tradition islamique

Le récit du Déluge et de l'Arche de Noé dans le Coran concorde avec celui de la Genèse, avec juste quelques variances, l'une d'elles étant le lieu final d'arrêt de l'Arche : selon la Genèse sur « les montagnes Ararat » ; dans le Coran, sourate 11,44, sur le mont Djoudi :

« Et la parole fut parlée : “Ô Terre ! avales tes eaux ! et toi, ô ciel, cesse [ta pluie] !” Et l'eau pénétra dans la terre, et la volonté [de Dieu] fut accomplie, et l'Arche vient se poser sur le mont Djoudi. Et la parole fut parlée : “Qu'il en soit fini avec ces malfaisants !” »

— Coran 11,44.

Pour le géographe arabe du IXe siècle, Ibn Khordadbih, le mont Djoudi se situe au Kurdistan, et l'historien abbasside Abu al-Hasan 'Alī al-Mas'ūdī (env. 896-956) rapporta que son lieu d'arrêt pouvait encore être vu de son temps. Masû'dî dit aussi que l'Arche commença son voyage à Koufa, au cœur de l'Irak, et voyagea vers La Mecque, où elle fit le tour de la Kaaba, avant de finir par voguer vers Djoudi. Le géographe et encyclopédiste Yaqout al-Hamawi (1179-1229), connu aussi sous le nom de Al-Roumi, situa la montagne « au-dessus de Jazirat ibn Oumar, à l'est du Tigre » et mentionna une mosquée bâtie par Noé qui pouvait toujours être vue de son temps ; le voyageur Ibn Battouta visita la montagne au XIVe siècle[5].

Recherches du mont Djoudi

Dans les années 1980, Ron Wyatt, aventurier et auto-proclamé archéologue, avec son collègue David Fasold, déclarèrent qu'ils avaient découvert l'Arche de Noé à Douroupinar, à peu près à 20 miles du mont Ararat, près de la montagne que les locaux appellent Coudi Dağı[6]. Par la suite, David Fasold se montra moins affirmatif[7],[8],[9],[10]. Dans les années 1990, Bill Crouse, un autre chercheur de l'Arche, déclara que le Coudi Dagh se situait approximativement à 200 miles au sud du mont Ararat en Turquie méridionale[11].

Notes et références

  1. (en) Lee Spencer and Jean Luc Lienard, « The Search for Noah's Ark », 2005.
  2. (en) Frederick Cornwallis Conybeare, review of Friedrich Murat, Ararat und Masis, Studien zur armenischen Altertumskunde und Litteratur, Heidelberg, 1900.
  3. Conybeare (1901).
  4. (en) An Universal History from the Earliest Account of Time, Millar, 1747 [lire en ligne], p. 242 
  5. (en) J. P. Lewis, « Noah and the Flood: In Jewish, Christian, and Muslim Tradition », dans The Biblical Archaeologist, décembre 1984, p. 237.
  6. (en) David Fasold, The Ark of Noah, New York, Wynwood, 1988 (ISBN 978-0-922066-10-0) (LCCN 88020437), p. 92–93 .
  7. (en) Clifton, Brad : Doubts sank faith in Ark (9 April 1997)..
  8. (en) Thomson, Kirstyn : Witness Tells How Ark Faith Sank (9 April 1997)..
  9. (en) David Allen Deal, Noah's Ark: The Evidence, Muscogee, OK, Artisan, 2005 (ISBN 978-0-933677-02-9) (OCLC 150351080) .
  10. (en) June Dawes, Noah's Ark: Adrift in Dark Waters, Belrose, NSW, Noahide, 2000 (ISBN 978-0-646-40228-4) (OCLC 46953992), p. 184 .
  11. (en) Bill Crouse, « Noah's Ark: Its Final Berth », dans Archaeology and Biblical Research, vol. 5, no 3, Summer 1992 [texte intégral] :

    « Cudi Dagh is located approximately 200 miles south of Mt. Ararat in southern Turkey almost within eyesight of the Syrian and Iraqi borders. The Tigris River flows at its base. The exact co-ordinates are 37°21′N 42°17′E / 37.35, 42.283 ... just east of the present Turkish city of Gizre and still within the bounds of the Biblical region of Ararat (Urartu). The Nestorians ... built several monasteries around the mountain including one on the summit called 'The Cloister of the Ark'. It was destroyed by lightning in 766 A.D. The Muslims later built a mosque on the site. In 1910, Gertrude Bell explored the area and found a stone structure still at the summit with the shape of a ship called by the locals 'Sefinet Nebi Nuh' 'The Ship of Noah'. ... As late as 1949 two Turkish journalists claimed to have seen the Ark on this mountain, a ship 500 feet in length! »

     .

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