Syndérèse

Syndérèse

La syndérèse est le terme qui désigne la partie la plus élevée de l'âme. D'autres expressions sont aussi utilisé pour la désigner, comme « étincelle de l'âme », « cime de l'âme », « pointe de l'âme » ou encore « étincelle de la conscience ».

Sommaire

Doctrine

Remords de Cain, par Henri Vidal, Jardin des Tuileries, Paris

La syndérèse est un terme qui désigne une faculté en l'homme de reconnaître de manière infaillible le bien. Le terme développé dans la théologie à partir de Jérôme de Stridon, est décrite comme le remords de la conscience présent dans l'homme, et ceci même après le péché originel. Utilisé la première fois dans le commentaire de Jérôme de Stridon sur Caïn, premier fils selon la Bible d'Adam et Eve, et auteur du premier crime de l'histoire de l'humanité, Jérôme de Stridon affirme que malgré son crime, Caïn se sait coupable. Cette faculté en lui de reconnaître le bien du mal est alors analysé comme une faculté de l'âme humaine de reconnaître le bien.

Les différents théologiens vont alors tenter de définir avec plus de précision cette capacité de reconnaître le bien, en y voyant une faculté de l'âme, faculté qui n'est pas touché par les conséquences du péché originel. Thomas d'Aquin définit alors cette faculté comme une faculté de la raison et donc de l'intelligence. Cette dernière étant une faculté qui n'est pas victime des conséquences du péché originel, elle est alors décrite comme les facultés les plus pures en l'homme, une faculté presque angélique, et devient pour certains le lieu de l'union de l'homme à Dieu, contribuant à donner naissance aux expressions « fine pointe de l'âme ».

Le concept de syndérèse subit alors des évolutions, certains y voyant une faculté de la raison, d'autre une faculté qui est autant de la raison qu'à la volonté, et est décrite par certains auteurs mystiques, non plus comme une faculté de l'homme mais comme le lieu de l'union à Dieu.

Histoire de la Syndérèse

Jérôme de Stridon

La syndérèse est un terme d'origine grec, qui va trouver deux nouvelles expressions dans les écrits de Jérôme de Stridon. L'expression de « scintilla animae »« étincelle de l'âme » se trouve dans le commentaire de la vision d'Ezéchiel de Jérôme de Stridon, dans lequel Jérôme de Stridon considère que l'« étincelle de l'âme » est l'analogon du quatrième ange de la vision, l'ange venant affirmer une quatrième faculté autre que l'intelligible, le concupiscible et l'irascible. Cette dernière faculté qui n'est pas corruptible après la chute due au péché originel est l'« étincelle de la conscience »[A 1].

Jérôme de Stridon utilise aussi la formule « scintilla conscientiae » ou « étincelle de la conscience » dans le même commentaire, où il étudie le péché de Caïn, celui-ci tue son frère mais continue de connaître sa culpabilité : « Ils placent, en outre, au-dessus de ces trois facultés, une quatrième que les Grecs appellent syndérèse, qui, comme l'étincelle de la conscience,ne s'est pas éteinte dans la poitrine de Caïn après qu'il a été rejeté du paradis et grâce à laquelle nous savons que nous péchons et que nous sommes vaincus par les plaisirs ou la colère, et lorsque nous sommes abusés par de fausses raisons »[A 1].

Albert le Grand

Dans la somme théologique d'Albert le Grand, celui-ci parle de l'étincelle de la conscience dans laquelle il voit la présence incorruptible de la conscience face au mal, celle-ci continuant d'agir et ne s'arrête pas même avec le péché : « Il semble que la conscience soit toujours agissante puisque l'on parle de l'étincelle de la conscience et qu'une étincelle ne cesse de briller. »[A 2]. Elle est alors désigné comme la conscience de l'âme[A 2].

Thomas d'Aquin

Article détaillé : Thomas d'Aquin.

La syndérèse va connaître un basculement dans la pensée de Thomas d'Aquin. Dans la somme théologique, il rattache la syndérèse, ou l'étincelle de la conscience aux facultés de jugement et donc à la partie supérieure de la raison[A 2].

En effet celle-ci permet de connaître de manière infaillible le vrai dans les principes moraux, malgré la chute du péché qui, selon la théologie chrétienne, contribue à altérer ses facultés[A 2]. Dans De Veritae Thomas d'Aquin affirme : « De même que l'étincelle est ce que le feu a de plus pur et ce qui se trouve de plus haut dans le jugement de la conscience ; et c'est suivant cette métaphore que la syndérèse est appelée étincelle de la conscience »[A 2],[1].

Dans la somme théologique, Thomas d'Aquin définie la syndérèse comme un habitus naturel des premiers principes pratiques[A 2],[2]. Il fait donc appartenir la syndérèse à la raison pratique plus qu'à la raison théorique[A 2]. Or cette partie de l'âme étant définie comme une faculté qui est de nature angélique, c'est-à-dire une faculté qui n'est pas touché par la conséquence du péché originel, il est définie non plus comme une faculté mais comme le lieu de l'union de l'âme et Dieu[A 3].

Maître Eckhart

Article détaillé : Maître Eckhart.

Maître Eckhart va donner un nouveau nom à la syndérèse, « scintilla animae »« étincelle de l'âme »[A 3]. Dans sa description de l'âme comme un château, il définit alors la syndérèse en affirmant « Ce petit château fort de l'âme, j'ai dit que c'était une étincelle mais maintenant je dis ceci : il est libre de tout noms, dépourvu de toutes formes, absolument dégagé et libre, comme Dieu est dégagé et libre en lui-même. il est aussi absolument un et simple que Dieu est un et simple »[A 3].

La syndérèse passe alors d'une faculté de raison, à un élément plus central et plus existentiel : le lieu en l'âme de la participation de l'essence de Dieu[A 3].

Bonaventure de Bagnorea

Article détaillé : Bonaventure de Bagnorea.

François de Sales

François de Sales quant à lui ne reprend aucune formulation traditionnelle et ne mentionne pas la syndérèse dans ses traités théologiques[A 4]. Il mentionne cependant les expressions la « pointe de l'esprit », le « fond de l'âme », le « fond du coeur » ou encore la « haute région de l'esprit »[A 4],[3]. Pour François de Sales ce lieu de l'âme ne dépend pas seulement de l'intelligence ou la raison à proprement parlé, mais aussi de la volonté, ce qui constitue un retour vis-à-vis des conceptions scolastiques qui contribuaient à faire de la syndérèse une faculté de l'intelligence et de la raison[A 4].

Il définit la pointe de l'esprit comme le lieu « de la simple vue de l'entendement et d'un simple sentiment de la volonté »[A 4].

John Henry Newman

Articles détaillés : Lettre au duc de Norfolk et John Henry Newman.

Notes et références

Notes
Principales sources utilisées
  • Michon, Hélène, Saint François de Sales une nouvelle mystique, Paris, Cerf, coll. « Patrimoines », mars 2008, poche, 353 p. (ISBN 978-2-204-08409-3) 
  1. a et b p.136
  2. a, b, c, d, e, f et g p.137
  3. a, b, c et d p.138
  4. a, b, c et d p.139
Autres sources
  1. De veritae, Thomas d'Aquin, 17, a 2, ad 3
  2. Somme théologique, Ière partie, Question 79
  3. les références de ses expressions se trouvent principalement dans l'ouvrage de François de Sales, Traité de l'Amour de Dieu

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