Étoile Be

Étoile Be

Une étoile Be est une étoile de type spectral B et qui en plus montre des raies spectrales en émission. Les étoiles Be sont des étoiles qui ont une très grande vitesse de rotation (plusieurs centaines de kilomètres à la seconde à l'équateur), et qui ont un disque autour d'elles. C'est le disque qui est responsable des raies en émission.

Des étoiles comme γ Cassiopeiae, λ Eridani, ou α Eridani (Achernar), sont des exemples d'étoiles Be.

Une étoile Be peut faire partie d'une binaire X. Dans ce cas elle est considérée comme étant une binaire X à forte masse. Sa période orbitale avec son compagnon compact est dans ce cas supérieure à 15 jours et son excentricité orbitale très faible (c'est-à-dire que son orbite est quasiment circulaire). Dans le cas où l'objet compact accompagnant l'étoile Be est une étoile à neutrons détectée sous forme de pulsar X, on observe empiriquement une relation de proportionnalité entre la période orbitale du système et la période de rotation du pulsar.

Sommaire

Historique des étoiles Be : de leur découverte au premier modèle

Découverte des étoiles Be

Alors qu'il développe une classification des spectres d'étoiles (1863-1866), le père Angelo Secchi, directeur de l'Observatorio del Collegio Romano du Vatican, remarque que la raie Hβ de l'étoile γ Cassiopeiae est en émission. Il publie alors cette découverte dans le journal Astronomische Narichten en 1866 et qualifie cette émission de "particularité curieuse de l'étoile γ Cassiopeiae" (Secchi, 1866). Cette découverte marque le début de la recherche de nouvelles étoiles Be et des premiers modèles pour expliquer leurs particularités.

Premier modèle physique

Le premier modèle physique cohérent permettant d'expliquer ces raies en émission nous vient d'Otto Struve (Struve 1931) ; il s'appuie sur plusieurs résultats d'observation.

Dans un premier temps, Struve remarque que les étoiles B à émission se trouvent aux mêmes endroits sur la séquence principale du diagramme HR que les étoiles B. Il reproduit avec succès les raies photosphériques présentes dans le spectre des étoiles B en émission en appliquant la théorie déjà utilisée pour les étoiles B. Par conséquent, l'origine des raies en émission ne peut être due à des changements dans les conditions d'excitation des niveaux atomiques, et donc de la formation des raies photosphériques, mais provient de différences dans les structures superficielles des étoiles. Ainsi, par analogie avec les nébuleuses gazeuses, Struve suggère la présence d'une enveloppe gazeuse autour des étoiles B en émission.

Dans un second temps, il met en évidence le fait que les raies en émission apparaissent dans les étoiles en rotation très rapide pour lesquelles les raies se trouvent élargies par effet Doppler. De plus, les résultats de Sir James Jeans (Jeans 1928), démontrant qu'un corps gazeux en rotation rapide prend une forme aplatie et peut éjecter de la matière à son équateur, sont en adéquation avec l'hypothèse de la présence d'un disque dans les étoiles Be. L'inclinaison du disque de l'étoile par rapport à la ligne de visée permet d'expliquer les diverses formes des raies en émission observées. En effet, si l'on observe le disque avec une inclinaison de 90°, on observe deux composantes en émission autour de la raie en absorption. Quant à la variation d'intensité observée dans les composantes des raies en émission, Struve suggère que le mouvement des atomes dans le disque n'est pas circulaire mais elliptique et que la rotation de la ligne des apsides des orbites elliptiques peut rendre compte d'une variation périodique de l'intensité des composantes.

Première définition d'une étoile Be

Jusque dans les années 70, plusieurs classes d'objets ont été nommés Be (Bidelman & Weitenbeck 1976) sans qu'une véritable définition ait été mise en place. Ainsi, des étoiles à rotation rapide, des binaires en interactions, des supergéantes, des étoiles de Herbig Ae/Be, de même que des nébuleuses quasi-planétaires on pu être qualifiées occasionnellement de Be. Partant du constat que les spectre des étoiles Be dites "normales" ou "classiques" sont ceux des étoiles B de classe de luminosité allant de III à V et dont les raies de la série de Balmer (et parfois de FeII) présentent de l'émission, Slettebak (1979) conclut que seules des étoiles en rotation rapide ou quelques étoiles binaires en interaction peuvent correspondre à cette définition. En effet, les supergéantes, bien qu'ayant parfois la raie Hα en émission, sont très différentes des étoiles Be dites "classiques". De même, les étoiles Herbig Ae/Be sont des objets très jeunes, pré-séquence principale. Enfin, les nébuleuses quasi-planétaires ont été souvent classifiées Bep mais sont très différentes des étoiles Be : elles ont une enveloppe circumstellaire très étendue et émettent dans le domaine radio.

Définition actuelle d'une étoile Be

Collins (1987) reprend la terminologie de Jaschek et al.(1981) pour définir les étoiles Be : "Une étoile Be est une étoile de type B non supergéante qui a été observée au moins une fois avec un moins une raie de Balmer en émission". Son argument est basé sur l'idée que la définition d'un étoile Be ne doit pas être utilisée pour distinguer entre des groupes d'étoiles ayant des propriétés physiques similaires, mais seulement pour caractériser les propriétés d'un spectre. Cependant, cette définition n'exclut pas certaines étoiles B en émission comme les Herbig Ae/Be ou les algols (binaires à éclipses). Pour cela, la dénomination "Be classique" ne concerne que les étoiles Be sur la séquence principale ou légèrement évoluées. Certaines étoiles de type O tardif ou A précoce peuvent également présenter le phénomène Be et être ainsi considérées comme une extension des étoiles "Be classiques". Dans la suite de cet article, le terme "étoile Be" fera toujours référence à une étoile Be classique.

Etoiles Be

Caractéristiques générales

Les étoiles Be sont des étoiles de la séquence principale du diagramme HR ou légèrement évoluées. Elles sont plus particulièrement situées à cheval sur les zones où se situent les étoiles β Cephei et les étoiles SPB (Slowly Pulsating B stars).

Diagramme HR. Les étoiles Be classiques sont des étoiles de la séquence principale ou légèrement évoluées qui recouvrent les zones d'instabilité des étoiles β Cep et SPB.

Ces étoiles possèdent une température effective allant de 10 000 K à 30 000 K pour les sous-types B9 à B0 respectivement. Leurs masses vont de 3 à 20 M_{\odot} (masses solaires) et leur luminosité de 100 à 50 000 L_{\odot}. Une de leurs caractéristiques importante est qu'elles sont des rotateurs très rapides ; elles forment une classe d'objet qui tournent près de la vitesse critique à laquelle la force centrifuge contrebalance la gravité.

Raies en émission

La principale caractéristique des étoiles Be classiques est de présenter au sein de leur spectre certaines raies en émission superposées aux raies en absorption qu'on s'attend à trouver dans une étoile B. On appelle cette caractéristique le phénomène Be. Dans le domaine visuel, il s'agit principalement des raies de la série de Balmer : Hα (6563 Å), Hβ (4861 Å ), .. ainsi que certaines raies d'éléments plus lourds comme le HeI (4921 Å, 5678 Å, 6678 Å), FeII (4233 Å, 4549 Å, 4583 Å) qui ne pourront apparaître que si le disque est suffisamment dense, et plus rarement si II (6347 Å) et Mg II (4481 Å).

Dans le domaine infra-rouge, on peut aussi observer les raies de Paschen et Brackett en émission, le triplet IR de Ca II, la raie de O I à 8446 Å, et ce, principalement dans les étoiles Be des premiers types (B0-2e). La figure de ce lien (lien vers Fig. 1 de Porter et Rivinius 2003) montre la variété des profils de raies en émission que l'on peut rencontrer au sein des étoiles Be. En effet, certaines étoiles Be vont présenter des raies en émission à simple pic, à double pic, ou à double pic avec, au centre, une raie fine en absorption. Ces différences sont dues à l'inclinaison de l'étoile (et du disque) par rapport à l'observateur (voir aussi Figure 3, Slettebak 1979, fichier pdf). Une étoile Be observée depuis le pôle ne présentera qu'un seul pic en émission, on appelle ces étoiles Be des étoiles "pole-on" (Slettebak 1949). Une étoile Be observée par l'équateur présentera une raie fine d'absorption au centre de la raie en émission, on l'appelle alors "Be-shell" selon la dénomination de Slettebak (1949). Entre ces deux inclinaisons, le profil de raie sera à double pic. Les composantes des doubles pics sont nommées V pour le pic décalé vers le violet et R pour le pic décalé vers le rouge.

Vents radiatifs

Les étoiles B étant des étoiles massives, elles sont sujettes à des vents radiatifs, au moins pour celles des premiers sous-types. Les grands relevés menés à l'aide du satellite IUE (International Ultraviolet Explorer) ont montré que les vents stellaires sont plus forts dans les étoiles Be que dans les étoiles B de type spectral similaire (Snow 1987).

Ces derniers ont été découverts dans les années 70 par Bohlin (1970) dans l'étoile γ Cas. L'origine de ces vents radiatifs s'explique par le fait que la force radiative qui s'exerce sur diverses raies métalliques est responsable de l'accélération de la matière (Castor et al. 1975). Les étoiles chaudes actives (dont les étoiles Be) ont la particularité de posséder des vents radiatifs particulièrement anisotropes ils sont beaucoup plus rapides aux pôles qu'à l'équateur. Les taux de perte de masse typiques pour les étoiles Be se situent entre Ṁ = 10 − 6 et Ṁ = 10 − 11 M_{\odot} par an ; ces valeurs dépendent de la méthode utilisée pour la détermination de la perte de masse. Les taux de perte de masse déduits des raies UV sensibles au vent (Si IV, C IV, N V) sont en général plus faibles (Snow 1981 ; Grady et al. 1987) que ceux déduits des excès IR (Waters 1986, par ex.) et des mesures interférométriques dans le domaine de Hα (Stee 1996), ces derniers étant en général en bon accord.

Variabilités

Les étoiles Be sont sujettes à de nombreuses variations sur différentes échelles de temps. Elles subissent, en effet, des variations périodiques à court terme dues à des pulsations et à la rotation, des variations à plus long terme qui sont reliées à la présence d'un vent et du disque, et des variations épisodiques associées à des éjections de matière de l'étoile vers son disque. Les principales origines de variabilités des étoiles Be sont exposées dans ce paragraphe. Plus de détails peuvent être trouvés dans Hubert (2007), Baade (2000) ou encore Baade & Balona (1994).

Variations d'intensité des doubles pics

Pulsations non radiales (NRP) et modulation rotationnelle

Passage de la phase Be à la phase B normale

Variabilités photométriques

Forme de l'étoile et du disque de matière

Proportions d'étoiles Be par rapport aux étoiles B

Le phénomène Be : problématiques actuelles

Bibliographie

Baade, D. 2000, in Astronomical Society of the Pacific Conference Series, Vil. 214, IAU Colloquium 175 : The Be phenomenon in Early-Type Stars, ed. M.A.Smith, H.F. Henrichs, & J. Fabregat, 178
Baade, D. & Balona, L.A. 1994, in IAU Symposium, Vol. 162, Pulsation ; Rotation ; and Mass Loss in Early-Type Stars, ed. L.A.Balona, H.F. Henrichs, & J.M. Le Contel, 311
Bidelman, W. P. & Weitenbeck, A. J. 1976, in IAU Symposium, Vol. 70, Be and Shell Stars, ed. A. Slettebak, 29
Bohlin, R.C. 1970, Astrophysical Journal, 162, 571
Castor, J.I., Abbott, D.C., & Klein, R.I. 1975, Astrophysical Journal, 195, 157
Collins, II, G.W. 1987, in IAU Colloquium 92 : Physics of Be Stars, Ed. A. Slettebak & T. P. Snow, 3-19
Grady, C.A., Bjorkman, K.S. & Snow, T.P. 1987, Astrophysical Journal, 320, 376
Hubert, A.M. 2007, in Astronomical Society of the Pacific Conference Series, Vol. 361, Active OB-Stars : Laboratories for Stellar and Circumstellar Physics, ed. A.T. Okazaki, S.P. Owocki & S. Stefl, 27
Jaschek, M. Slettebak, A. & Jaschek, C. 1981, Be star terminology
Jeans, J. 1928, Astronomy & Cosmology, 257
Porter, J. M. & Rivinius, T. 2003, PASP, 115, 1153
Secchi, A. 1866, Astronomische Nachichten, 68, 63
Slettebak, A. 1949, Astrophysical Journal, 110, 498
Slettebak, A. 1979, Space Science Reviews, 23, 541
Snow, T.P. 1981, Astrophysical Journal, 110, 498
Snow, T.P. 1987, in IAU Colloquium 92 : Physics of Be Stars, ed. A. Slettebak & T.P. Snow, 250-260
Stee, P. 1996, Astronomy & Astrophysics, 311, 945
Struve, O. 1931, Astrophysical Journal, 73, 94
Waters, L.B.F.M. 1986, Astronomy & Astrophysics, 162, 121


Voir aussi


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