Bande interstellaire diffuse

Bande interstellaire diffuse
Bandes interstellaires diffuses (en blanc) superposées à un spectre de couleur allant du proche ultraviolet (droite), au proche infrarouge (gauche), où se concentre la plupart des bandes.

En astronomie, les bandes interstellaires diffuses (BID, ou Diffuse interstellar bands, en anglais) sont des régions en absorption dans le spectre d'objets astronomiques se situant dans notre galaxie, la Voie lactée. Elles sont causées par l'absorption de la lumière par le milieu interstellaire. Environ 100 bandes sont observables, allant de l'ultraviolet à l'infrarouge. L'origine de ces bandes fut très disputées pendant de nombreuses années. Aujourd'hui, les astronomes semblent d'accord pour dire qu'elles sont produites principalement par les hydrocarbures aromatiques polycycliques et autres molécules carbonées.

Sommaire

Découverte et historique

Le spectre électromagnétique des étoiles consiste en un continuum, dont la forme globale suit grosso modo le spectre d'un corps noir, sur lequel se superposent des raies, le plus souvent en absorption. Chacune de ces absorptions est attribuée à une transition électronique spécifique. De plus, la lumière provenant de tous les objets astronomiques est affectée par l'extinction interstellaire, c'est-à-dire l'absorption des photon par le milieu interstellaire. Mais cette absorption interstellaire affecte le spectre en entier, et de manière continue et chromatique : le rouge est moins affecté que le bleu. C'est en effet le résultat de la diffusion Rayleigh, également responsable de la couleur bleue du ciel.

En 1922, l'astronome Mary Lea Heger[1] observe pour la première fois un nombre de raies en absorption qui semblent être d'origine interstellaire.

La nature interstellaire de ces raies, qui ne sont donc pas formées dans l'atmosphère des étoiles, procède du fait que leur intensité est globalement proportionnelle à l'extinction globale totale, et qu'elles ne sont pas affectées par les vitesses radiales parfois très différentes des objets observés. Autrement dit, les raies des bandes interstellaires diffuses restent toujours globalement à la même place dans le spectre, et ce, indépendamment de la vitesse radiale de l'étoile, c'est-à-dire indépendantes de l'effet Doppler observé pour les raies atmosphériques. Le nom de bande interstellaire diffuse reflète le fait que ces raies sont bien plus larges que les raies en absorption généralement observées dans les spectres stellaires.

Les première BIDs observées furent celles de longueurs d'onde 578,0 et 579,7 nanomètre. D'autres BIDs fortes sont observées à 628,4, 661,4 et 443,0 nm. La bande interstellaire diffuse à 443,0 nm est particulièrement large, avec une largeur denviron 1,2 nm, alors que la largeur intrinsèque des raies stellaires vaut typiquement 0,1 nm ou moins.

Des études spectroscopiques subséquentes à plus haute résolution spectrale et plus grande sensibilité révélèrent de plus en plus de BIDs. En 1975, le catalogue des BIDs en recensaient environ 25, alors que 10 ans plus tard, il y en avait le double. Aujourd'hui, environ 300 sont connues. Les études les plus récentes (voir la bibliographie), avec des spectrographes à très haute résolution, comme UVES sur le VLT, ont révélé que de nombreuses BIDs montrent des structures encore plus fines.

La nature du matériau

Le grand problème avec les BIDs, apparu dès les premières observations, était que leur longueur d'onde centrale ne correspondait à aucune raie spectrale connue d'aucun ion ou autre molécule. Le matériau responsable pour cette absorption ne pouvait donc pas être identifié. Un grand nombre de théorie furent avancées pendant que le nombre de BIDs connues croissait, et la détermination de la nature du matériau absorbant devint un problème centrale de l'astrophysique.

Un résultat observationnel important fut de noter que la force (c'est-à-dire, principalement, la profondeur) des raies des BIDs n'étaient pas corrélées les unes avec les autres. Cela signifie qu'il ne peut y avoir un seul matériau responsable de toutes ces absorptions. L'autre résultat important fut de remarquer que la force des BIDs était corrélée grosso modo avec l'extinction. L'extinction est causée par la poussière interstellaire. Les BIDs devaient donc être probablement aussi dues à la poussière ou en tous cas liée à elle.

L'existence de sous-structure dans les profiles de raies des BIDs pointe clairement vers le fait qu'elles seraient causées par des molécules. Dans une molécule contenant, disons, 3 atomes de carbone, il existe plusieurs configurations isotopique différentes. La plupart des molécules contiendra 3 atomes de carbone 12 (noté 12C), quelques autres auront deux atomes de 12C avec un atome de 13C, d'autres encore moins nombreuses auront 1 seul atome de 12C et 2 atomes de 13. Et finalement une très petite fraction de ces molécules aura 3 atomes de 13C. Chacune de ces formes de molécules produira des raies spectrales à des longueurs d'onde légèrement différentes. L'études des isotopes, quand ils sont identifiés, permet ainsi d'étudier les abondances chimiques du milieu interstellaire.

Aujourd'hui, les molécules les meilleures candidates pour expliquer les BIDs sont celles qui contiennent de nombreux atomes de carbone, qui est un élément relativement abondant dans le milieu interstellaire (produit notamment par les naines blanches dans les nébuleuses planétaires, ainsi que certains types d'étoile Wolf-Rayet). Aujourd'hui, les astronomes semblent d'accord pour dire qu'elles sont produites principalement par les hydrocarbures aromatiques polycycliques et autres molécules carbonées, comme les fullerènes. Cependant, l'identification complète de toutes les BIDs est encore un travail en cours.

Références

  1. Mary Lea Heger, « Further study of the sodium lines in class B stars ; The spectra of certain class B stars in the regions 5630A-6680A and 3280A-3380A ; Note on the spectrum of [gamma] Cassiopeiae between 5860A and 6600A », dans Lick Observatory Bulletin, vol. 10, no 337, 1922, p. 146 [texte intégral (page consultée le 2007-02-12)] 

Bibliographie

  • Fossey S.J., Crawford I.A. (2000), Observing with the Ultra-High-Resolution Facility at the Anglo-Australian Telescope: Structure of Diffuse Interstellar Bands, Bulletin of the American Astronomical Society, v.32, p.727
  • Sollerman, J.; Cox, N.; Mattila, S.; Ehrenfreund, P.; Kaper, L.; Leibundgut, B.; Lundqvist, P., (2005), Diffuse Interstellar Bands in NGC 1448, Astronomy and Astrophysics, v.429, p.559-567
  • Krelowski, J., Diffuse interstellar bands - an observational review, Universitaet Jena, Jena Conference on Physics and Properties of Interstellar Matter Related to the Formation and Evolution of Stars, German Democratic Republic, May 2-7, 1988, Astronomische Nachrichten (ISSN 0004-6337), vol. 310, no. 4, 1989, p. 255-263
  • Galazutdinov G., Stachowska W., Musaev F., Moutou C., Lo Curto G., Krelowski J (2002), Fine structure of profiles of weak diffuse interstellar bands, Astronomy and Astrophysics, v.396, p.987-991
  • Ehrenfreund P. (1999), The Diffuse Interstellar Bands as evidence for polyatomic molecules in the diffuse interstellar medium, Bulletin of the American Astronomical Society, v.31, p.880
  • Herbig, G. H. (1995), The Diffuse Interstellar Bands, Annual Review of Astronomy and Astrophysics, v.33, pp. 19-74.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes


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