Élevage des fourmis

Élevage des fourmis
Fondation d’une colonie de Messor barbarus dans une fourmilière artificielle permettant l’élevage et l’observation des fourmis.

L’élevage des fourmis consiste à entretenir et développer une fourmilière en captivité. Il s’agit donc de maintenir de façon pérenne l’ensemble des castes d’une colonie dans un milieu artificiel. L’élevage de fourmis est majoritairement réalisé d’une part dans des laboratoires de recherche sur les insectes sociaux, et d’autre part par des amateurs et alors considérés comme nouveaux animaux de compagnie.

Les fourmis jouant un rôle très important dans les écosystèmes, il est important de tenir compte de l’impact d’un élevage sur l’environnement, au niveau du prélèvement comme en cas d’évasion d’espèce étrangères qui peuvent être invasives.

Sommaire

Prélèvement

Il est important d’effectuer les prélèvements avec respect, c’est-à-dire qu’il ne faut pas piller une fourmilière, même petite, pour trouver une reine. Premièrement, les chances sont quasiment nulles d’en trouver, ensuite, ce serait tuer toutes les autres fourmis qui ne peuvent vivre sans reine. Enfin, cela induit que la reine n’est peut-être pas toute jeune.

Capture de la reine

Il reste donc deux méthodes pour se procurer une reine : l’acheter ou la trouver lors d’un essaimage (envol des sexués). L’achat sur Internet présente l’avantage d’être sûr que la reine est fécondée et apte à former une fourmilière, puisqu’elle est envoyée avec une ou plusieurs dizaines d’ouvrières. Mais il y existe un risque que le couvain et la reine soient malmenés, voire blessés, mais surtout les ouvrières et la reine seront très stressées. De plus, les espèces présentes dans la nature sont généralement faciles à élever.

La meilleure méthode pour trouver une reine est donc d’attendre la période des essaimages qui a toujours lieu entre avril et octobre (pour l’Europe). Mais elle dépend de la région et des conditions météorologiques ; ainsi, les essaimages ont lieu de préférence quand il fait humide et chaud, c’est-à-dire en été, avant ou après un orage ou une averse. Même si les conditions sont largement suffisantes pour qu’un essaimage ait lieu, il ne faut pas forcément s’attendre à ce qu’il y en ait un : les fourmis sortent de leur hibernation en mars (pour la France) et il leur faut un peu de temps pour nourrir la colonie, réparer la fourmilière, élever des sexués. Les premiers essaimages ont donc lieu en mai ou juin.

Lors d’un essaimage important, on peut attraper les reines en vol. Alourdies par le poids du mâle qui s’accroche à elles, elles volent bas et lentement : on les capture simplement à la main. À défaut, on cherchera au sol des reines qui ont atterri. La plupart du temps, elle n’ont plus d’ailes car elles sont tombées ou la reine les aura enlevées. Cela présente l’avantage d’être sûr que la reine est fécondée, mais il est plus facile de prendre la reine par les ailes. Cependant, il est très faisable de prendre une reine sans ailes et de ne pas la blesser. Il suffit de la prendre délicatement par le thorax et faire attention qu’elle ne tombe pas.

Une fois la reine capturée, il faudra la mettre dans un endroit où elle sera en sécurité. Il est très conseillé de la mettre dans un tube à essai, avec au fond un peu d’eau pour l’humidité sous une bourre de coton tassé. On refermera ce tube avec une seconde bourre de coton plus aéré (mais pas trop pour ne pas que les fourmis s’échappent).

Reine déposée dans un tube à essai.

La première chose à faire après avoir installé la reine dans son tube est d’identifier son espèce. À défaut d’y parvenir, on peut l’observer après quelques heures : si elle s’agite près du coton d’ouverture, il faut la relâcher, car elle appartient probablement à une espèce à fondation dépendante, c’est-à-dire qu’elle ne pourra pas faire d’ouvrières toute seule. Généralement, ces reines sont moins lourdes que les reines à fondation indépendante et leur abdomen est moins gros.

Si, au contraire, elle reste calme près du coton humide, il y a de fortes chances que tout se passe bien. On l’installera alors dans un endroit éclairé mais loin des rayons directs du soleil qui tueraient le couvain. Jusqu’à l’arrivée des premiers œufs, il ne faut ni bouger le tube, ni le soulever ; il n’est pas nécessaire de nourrir la reine qui, stressée, pourrait tenter de s’enfuir.

Naissance des premières ouvrières

Une petite colonie de fourmis "Messor barbarus" en éprouvette.

Quelques jours plus tard, les premiers œufs apparaissent, souvent invisibles s’ils sont déposés sur le coton. La reine est alors un peu plus calme et reste constamment près d’eux : on peut commencer à l’alimenter.

Attention : il ne faut jamais donner de la nourriture à des fourmis dont on n’est pas sûr qu’il s’agisse de nourriture biologique (sans pesticides).

Pour le miel, jus ou autre liquide, on donne de petites gouttes dans lesquelles les fourmis ne pourront pas se noyer.

L’œsophage des fourmis ne permet que le passage d’aliments liquides, ce qui ne les empêche pas de broyer de la viande ou du pain. Ainsi, pour la reine, il faut lui donner des aliments faciles à manger car elle n’a pas d’ouvrières pour lui régurgiter la nourriture par trophallaxie. Le mieux est de lui donner du miel (attention aux pesticides) ou du sucre dilué dans de l’eau, cela la désaltérera et lui donnera de l’énergie. Pour ce faire on dépose une grosse goutte sur un support en plastique ou un morceau d'aluminium, afin de ne pas salir le tube, ce qui entraînerait des moisissures. On peut essayer également de lui donner de petits morceaux de fruits sucrés comme du raisin ou de la framboise. On retire doucement le coton pour ne pas faire trop de secousses, puis on insère la nourriture à l’aide de pinces brucelles.

À la naissance des premières ouvrières — un à plusieurs mois plus tard suivant l’espèce (six semaines pour les Lasius niger) — il faut commencer à les nourrir suivant les besoins de l'espèce. Par exemple les Messor barbarus qui sont granivores, il faut leur donner de petites graines. Mais la plupart des espèces communes, comme les fourmis noires Lasius niger, se nourrissent d'insectes et de liquides sucré comme du miellat de puceron.

Ouvrière crematogaster scutelallaris gardant des pucerons

Donc en plus d'un liquide sucré on peut leur donner des morceaux d’insectes congelés préalablement (soixante-douze heures afin d’enlever toute présence d’acariens, principal danger pour les fourmis) comme des vers de farine, des sauterelles, des mouches drosophiles (appelées aussi mouche du vinaigre), des grillonsetc.

Quand les premières ouvrières sont nées, il est souvent moins pratique de leur apporter de la nourriture dans le tube, on le place alors dans une aire de chasse, c'est-à-dire un récipient ouvert, transparent de préférence, pour une meilleure observation. Afin que les ouvrières ne s'échappent pas on dépose de l'anti-évasion sur le bord intérieur (voir la section "Vie dans la fourmilière").

Lorsque le nombre d'ouvrières est suffisant (au moins 20 ouvrières), et si on a préparé une fourmilière non friable (en béton cellulaire généralement, mais parfois en plâtre), on peut envisager l’installation de la colonie dans la fourmilière. Si c’est une fourmilière creusable (en sable stérile), il est parfois préférable d’attendre un peu plus, par exemple d'avoir une quarantaine d'ouvrières. Si on peut faire rentrer toutes les ouvrières sans les blesser dans le tube, on le place ouvert dans l’aire de chasse de la fourmilière, puis il suffit d’humidifier la fourmilière et de laisser faire. Si le nombre d'ouvrières est trop élevé, il faut relier les deux aires de chasse par un tube en plastique souple et transparent (vendu par exemple avec les accessoires d'aquarium)

Vie dans la fourmilière

Fourmilière verticale friable.
Fourmilière en béton cellulaire et avec du talc comme système anti-évasion.

Les fourmis et surtout le couvain ne pouvant vivre sans humidité, il est impératif d’humidifier la fourmilière. Il faut se renseigner sur l’humidité demandée par l’espèce, les indications à suivre selon le type de nid et l’espèce des fourmis (généralement une fois par semaine suffit), et si vous en avez la possibilité (mais ce n’est pas obligatoire) en prévoyant une partie où la fourmilière est humidifiée et une autre plus sèche.

Il ne faut pas oublier de mettre de l’anti-évasion en haut des parois de votre aire de chasse afin d’éviter toute évasion (les fourmis s’évadent de temps en temps et elles savent très bien grimper…). Pour l’anti-évasion, vous pouvez faire un mélange d’alcool à 90° avec du talc (de Venise, car pur et sans produit toxique). Il suffit juste de passer une fine couche de « talcool » sur les parois, car l’alcool s’évaporera et le talc restera en fine couche. Lorsque les fourmis passeront dessus, elles glisseront toutes seules.

Pour la nourriture, il faut s’informer sur les préférences de l’espèce, mais les fourmis sont en général omnivores. Pour les jeunes colonies, il faut privilégier un liquide sucré, comme du sirop, du miel ou du sucre mélangé à de l’eau ou du lait. On peut l’imbiber sur du coton ou déposer de petites gouttes sur un support afin d’éviter les noyades (une colonie étant jeune, il faut éviter toute perte). Pour les apports en protéines (surtout nécessaire au couvain), on peut donner des insectes congelés soixante-douze heures afin d’éviter tout risque d’acariens avant de les leur donner à manger. Dans les colonies plus âgées, ce n’est pas utile et il peut même être intéressant, autant pour l’observateur que pour les fourmis, de donner des insectes vivants à chasser. De cette façon, les fourmis garderont leur mode de vie naturel. Attention, il faut varier les aliments car un apport trop important en protéines peut entraîner la mort des fourmis.

Il est aussi très important de faire une diapause (repos hivernal des fourmis) pendant l’hiver (vers décembre-janvier) car les fourmis ont besoin d’avoir une phase d’inactivité. Ainsi, une reine qui s’est envolée en automne peut refuser de pondre avant le printemps suivant.

Pour effectuer un repos hivernal des fourmis, il suffit simplement de les laisser à une température comprise entre 10 °C et °C selon les espèces (au réfrigérateur en quelque sorte), mais il ne faut pas abaisser la température au-dessous de zéro, sinon elles gèleraient.

Types de fourmilière

Il en existe différents types de vivariums destinés à l’élevage et à l’étude d’une colonie de fourmis.

Le choix de la fourmilière est important. Si on choisit d’élever une espèce qui ne vit pas dans la terre ou qui construit difficilement, le mieux est de mettre les fourmis dans un nid en dur. Il est plus facile d’emploi pour l’humidification et la propreté, mais les fourmis ne pourront pas construire leurs salles. En revanche, dans le cas où on souhaite les laisser creuser à leur guise, il faut utiliser un nid avec un matériau friable, comme de la « mousse oasis » ou du sable stérile. Dans tous les cas, il est obligatoire d’avoir une aire de chasse non friable reliée à la partie habitable (incluse dans la fourmilière achetée), pour mettre la nourriture et pour que les fourmis déposent leurs déchets.

La construction d’une fourmilière est assez simple et très peu coûteuse si on a à sa portée quelques matériaux : du béton cellulaire pour creuser ses galeries avec un tournevis par exemple, une plaque de verre pour recouvrir le bloc de béton (on pourra siliconer les bords afin d’éviter que toute fourmi se faufile). Il ne faut surtout pas faire trop grand : les fourmis ne pourraient pas l’entretenir et elles préfèrent la promiscuité. De plus, une jeune colonie a du mal à gérer un nid trop grand et se sert de certaines salles comme dépotoir au lieu de jeter tout déchet dans l’aire de chasse (ce qui facilite tout de même le nettoyage). Pour une jeune fourmilière d’une espèce de taille moyenne, 15 cm sur 20 cm pour la partie habitable et 10 cm sur 20 cm pour l’aire de chasse sont parfaits. Surtout que l’on peut, par la suite, ajouter une partie habitable, reliée à la fourmilière initiale par un tube ou un pont.

Gel nutritif

Des fourmis creusant une galerie dans un gel nutritif.

Les formicariums constitués de gelée nourrissante ne sont pas dédiés à l'élevage d'une colonie de fourmis complète car ils ne sont pas prévus pour la reine ni pour le développement du couvain. Ils s'adressent uniquement à l'observation temporaire d'ouvrières ramassées dans la nature.

Maladies

En élevage, les fourmis peuvent souffrir d’acariens parasites pouvant nuire au développement de la colonie voire, à long terme, mener à la mort de la colonie tout entière. Plus simplement, dans la fourmilière mais dans le tube à essai surtout, il apparaît très souvent des moisissures. Celles-ci sont normalement inoffensives pour les fourmis, mais elles gênent l'observation. Acidifier le milieu semble être la solution la plus efficace face à ces problèmes[1]. Pour ce faire on introduit dans le système d'humidification quelques gouttes de solution acide, comme du jus de citron ou du vinaigre.

Notes et références

Annexes

Articles connexes

Liens externes


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