Tapisserie

Tapisserie

La tapisserie est une forme d'art textile, traditionnellement tissé sur un métier vertical, mais qui peut être aussi pratiquée sur un métier horizontal à plat.

Une tapisserie est composée de deux ensembles de fils entrelacés, ceux parallèles à la longueur (la chaîne) et ceux parallèles à la largeur (la trame) ; les fils de chaîne sont mis en place sous tension sur un métier, et le fil de trame est transmis par un mouvement mécanique de va-et-vient sur tout ou partie de l'ouvrage. Souvent la tapisserie est une réalisation textile décorative d'ameublement, se classant dans les arts décoratifs.

La tapisserie peut aussi être considérée comme un art à part entière.

Sommaire

Techniques

La tapisserie peut être une œuvre tissée sur un métier à tisser hautes-lices ou basses-lices, ou brodée avec ou sans métier. On distingue donc la tapisserie « de lices » de la tapisserie « aux points ». En tapisserie tissée, celui qui effectue le travail s'appelle « licier » ou « lissier[1] ».

Que ce soit des tapisseries de lices[2] (lisses) ou « aux points d'aiguille », on crée un carton, qui est l'ébauche en dimensions réelles de la tapisserie. Le carton n'est pas à confondre avec une peinture mais il peut être peint. Certains cartonniers, travaillant le plus souvent pour d'importantes manufactures à caractère commercial, sont spécialisés dans cette ébauche. Dans ce cas, le cartonnier n'est généralement pas reconnu comme « artiste peintre ».

Néanmoins, l'exécutant de la tapisserie peut être aussi l'artiste qui a créé le carton. Ainsi des peintres ou des artistes en d'autres domaines ont souvent créé leurs propres cartons pour tapisseries et les ont donnés à réaliser soit à des manufactures de tapisseries, des artisans liciers, soit à des façonniers en tapisseries aux points d'aiguille, soit encore les ont eux-mêmes réalisés par l'une ou l'autre des deux techniques.

Les deux techniques d'exécution de la tapisserie de lices sont utilisées par plusieurs centres de productions : manufacture des Gobelins à Paris, tapisseries d'Arras (anciennement appelées « Arrazo »), tapisseries d'Aubusson, tapisseries de Beauvais et, en Belgique, la manufacture royale de tapisserie De Wit, à Malines, et Chaudoir, à Bruxelles. Audenarde[3] ainsi que Grammont (Geraardsbergen) et Enghien, sont mondialement connus pour les « verdures ».

Musei Capitolini, Rome.

La plus célèbre des tapisseries « aux points d'aiguille » est la tapisserie de Bayeux, grandiose tapisserie historique de 70 mètres de long. Techniquement la tapisserie de Bayeux est en fait une broderie ; en effet ce qui distingue une tapisserie — qu'elle soit de lisses ou aux points d'aiguille — d'une broderie, c'est que les fils de couleurs dans ce dernier cas ne couvrent pas la totalité de la surface alors que dans les deux techniques dites de tapisserie la totalité de la surface est couverte par les fils de couleur.

La tapisserie aux points d'aiguille (aujourd'hui le plus souvent sur canevas mais à l'origine il s'agissait plutôt d'une toile grossière) est connue depuis des temps immémoriaux. D'ailleurs l'aiguille ne fut-elle pas le premier outil ayant servi à confectionner un entremêlement de fils ? Le principal point commun avec la tapisserie tissée (sur métiers manuels ou mécaniques) est l'utilisation des fils de couleurs pour représenter le sujet ou la scène sur toute la surface de la tapisserie.

Bien que généralement destinée à des œuvres de moindres dimensions que le tapisserie de lisse, le tapisserie au point a permis la réalisation d'œuvres grandioses telles des tentures de lits princiers, voire des tentures murales. Toutefois la technique du point d'aiguille étant assez souvent une pratique de salon, c'est avec des ouvrages de taille plus modeste qu'elle s'est réellement épanouie. Ainsi les dessus de sièges réalisés au petit ou gros point sont, dans tous les châteaux et musées, très largement répandus.

La destination la plus répandue du tapisserie aux points fut et est encore de nos jours le tapisserie pour dessus de sièges.

Historique

La tapisserie au Moyen Âge

Saint Antoine ermite, tapisserie de Guigone de Salins, Beaune.

Le tapisserie au Moyen Âge est relativement méconnue si on la compare à la place qu'elle prend dans nos sources. En effet, un grand nombre de tapisseries sont parvenues jusqu'à nous directement. Elles sont parfois grandioses (tapisserie de l'Apocalypse d'Angers, La Dame à la licorne conservée au musée de Cluny, la tenture de David et Bethsabée[4] conservée à Ecouen), souvent plus modestes. De plus, les inventaires des puissants, laïcs et ecclésiastiques, font état de nombreuses tapisseries, qui représentaient de coûteux investissements. Celles-ci, parfois tissées de fil d'or et d'argent, étaient bien plus que de simples objets d'ameublement. Elles pouvaient constituer une réserve de capital, un cadeau diplomatique ou encore de mariage. Elles étaient également des objets d'ostentation, déployées dans les demeures des grands ou à l'occasion de cérémonies publiques.

Les tapisseries jouaient également un rôle dans l'imagerie religieuse : en 1025 à Arras se réunit un concile qui prit la décision de développer les images, la décoration, afin de cultiver un peuple illettré sur la religion et la politique. De ce fait les évêques vont commander plusieurs tableaux et tapisseries représentant la vie du Christ et des saints aux artistes, ce qui embellira les églises et cultivera davantage le peuple. On peut citer l'exemple de la tenture de Saint Étienne[5], commandée par l'évêque d'Auxerre pour le chœur de sa cathédrale vers 1500.

Il n'est pas toujours aisé de retrouver l'atelier d'origine d'une tapisserie médiévale. On sait cependant que si Paris tenait une place importante dans la production, la première région était l'Europe du Nord, et en particulier la Flandre et les Pays-Bas. Arras était si réputée qu'elle donne son nom au mot italien signifiant tapisserie (arazzi). Bruges et Bruxelles étaient également des centres de production qui fournirent toute l'Europe. La fabrication était apparemment coordonnée par de grands entrepreneurs qui mettaient en relation commanditaires, ateliers et fournisseurs de matière première (par exemple, Nicolas Bataille à Paris qui fournit au duc d'Anjou la tenture de l'Apocalypse).

Enfin, l'art de la tapisserie est aussi le témoin de l'art des peintres qui réalisaient les cartons préparatoires. C'est donc un aspect essentiel de l'histoire de l'art au Moyen Âge[6]...

La tapisserie sous l'Ancien Régime

L'industrie se spécialise dans les tapisseries de laine fine, notamment celles d'Arras qui sont vendues pour décorer les palais et les châteaux partout en Europe. Peu de ces tapisseries ont survécu à la Révolution française : des centaines y sont brûlées pour récupérer les fils d'or tissés. Au XVIe siècle, la Flandre devient le principal centre de production européen de la tapisserie avec les villes d'Audenarde, de Bruxelles, de Grammont et Enghien. De nombreux exemplaires de cette époque existent encore, démontrant le détail complexe des motifs et des couleurs. Au XVIIe siècle, la tapisserie européenne imite la peinture, la couleur prenant désormais plus d’importance que les effets de tissages.

La tapisserie contemporaine

Des artistes contemporains créent des cartons pour qu'ils soient réalisés en tapisserie.

On parle alors d'artistes cartonniers qui, le dessin effectué sur une commande ou un travail personnel, font exécuter leurs œuvres par des liciers de manufactures de tapisseries comme celles d'Aubusson ou des ateliers indépendants.

On peut citer Jean Lurçat, Jean Picart le Doux, Loewer, Le Corbusier, Calder, Jacques Lagrange, Enrico Accatino, Marc Petit, Nicolas de Staël, Serge Poliakoff, Charles Lapicque, Alfred Manessier, Jean Le Moal, Henri-Georges Adam,Édouard Pignon, Gustave Singier, Lanskoy, Linder, Alberto Magnelli, Michel Seuphor, Zadkine, Debré, Georges Chazaud et, surtout, Dom Robert qui a grandement participé au renouveau de la tapisserie dans la seconde moitié du XXe siècle.

À l'Académie royale des beaux-arts de Bruxelles et à l'Académie des beaux-arts et des arts décoratifs de Tournai, il existe toujours un atelier de tapisserie où les étudiants-artistes peuvent profiter de métiers hautes-lices et basses-lices pour leur propre création.

Quelques tapisseries remarquables

L'une des dix tapisseries de la tenture de David et Bethsabée du XVIe siècle.
  • La tenture de David et Bethsabée exposée au musée national de la Renaissance d'Ecouen est sans doute l'ensemble le plus connu de l'époque Renaissance. Cette œuvre de grandes dimensions fut tissée à Bruxelles entre 1510 et 1515. Constituée de dix pièces, elle est longue de 75 mètres et haute de 4,5 mètres (totalisant donc 340 m²). Le nom de ses auteurs demeure inconnu. Il s'agit d'un récit biblique. Le musée national de la Renaissance expose bien d'autres tapisseries du XVIe siècle, provenant de toute l'Europe.
Christ en Gloire pour la cathédrale de Coventry, carton de Graham Sutherland.

Manufactures et musées

Notes et références

  1. Les deux orthographes sont admises.
  2. Exemple célèbre de tapisserie de lices : L'Apocalypse à Angers.
  3. Sur le site web de la ville est fournie une présentation des techniques de restauration. Cette activité joua un grand rôle dans l'histoire de la ville.
  4. Sur le site du musée de la Renaissance.
  5. Sur le site du musée du Moyen Âge.
  6. Edina Bernard, Pierre Cabanne, Jannic Durand, Gérard Legrand, Histoire de l'art du Moyen Âge à nos jours, Paris, 2006, pp. 132-133.

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Tapisserie de Wikipédia en français (auteurs)

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