Surveillance en droit français

Surveillance en droit français

La Surveillance en droit français s'exerce selon différentes modalités selon les champs d'observation. Elle vise, globalement, à prévenir le risque d'activités jugées « dangereuses », et cela dans des domaines fort variés (criminalité ou, plus globalement, délinquance, mais aussi santé, etc.). Elle implique différents dispositifs de traçabilité, de fichage (plus de 45 fichiers en 2009), voire de vidéosurveillance.

Sommaire

Droit pénal

En droit pénal, la surveillance s'exerce selon diverses modalités, selon qu'on est:

Surveillance du « crime organisé »

Le « crime organisé » est une notion large définie à l'art.706-73 et 706-74 du Code de procédure pénale, qui comprend une série d'infractions commises en « bande organisée » (art. 221-4 du Code pénal), dont le meurtre, les « crimes de tortures et d'actes de barbarie », d'enlèvement et de séquestration, les crimes de terrorisme (art. 421-1 à 421-6 du Code pénal), ainsi que l'« association de malfaiteurs » lorsqu'elle a trait à certains des crimes ici mentionnés, mais aussi d'autres crimes tels que le trafic de stupéfiants, le proxénétisme, la destruction, dégradation et détérioration d'un bien, ou encore les « délits d'aide à l'entrée, à la circulation et au séjour irréguliers d'un étranger en France commis en bande organisée ».

Dans ces cas-là, la sonorisation et la fixation d'images est possible lors de l'enquête (art. 706-96 du CPP). En 2008, la Cour de Cassation a considéré régulier un arrêt jugeant illégale la sonorisation d'un parloir dans le cadre d'une enquête de meurtre, cette infraction ne relevant pas de l'art. 706-96 du CPP s'il n'est pas commis en « bande organisée » [1].

Renseignements

Les services de renseignement disposent de différents dispositifs de surveillance, allant des agents infiltrés aux fichiers (notamment celui des Renseignements généraux) en passant par Frenchelon. Outre Frenchelon, le renseignement d'origine électromagnétique utilise aussi le système EMERAUDE (Ensemble mobile écoute et recherche automatique des émissions).

Les écoutes téléphoniques

En 2007, la France dispose à l'Uclat (Unité de coordination de lutte anti-terroriste), d'un système pouvant traiter 20 000 requêtes par an[2], dont les deux tiers sont faites à la demande de la DST et des RG. L'écoute au sens strict est:

  • judiciaire, c'est-à-dire ordonnée par un magistrat dans un cadre légal strict;
  • ou administrative, c'est-à-dire ordonnée sous le responsabilité du Premier ministre à la demande de certains ministères dans des affaires de terrorisme, sécurité économique ou autres. Dans ce cas, l'opportunité des écoutes est contrôlée par une commission indépendante, la CNCIS (Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité).

Dans le domaine bancaire, les écoutes sont enregistrées pour une durée variant de six mois à cinq ans[3].

Les écoutes téléphoniques (ainsi que la vidéosurveillance) ont été facilitées par la loi n° 2006-64 du 23 janvier 2006 relative à la lutte contre le terrorisme. L'article 6 impose aux opérateurs télécoms, aux fournisseurs d'accès (FAI), mais aussi à tout établissement public proposant un accès à Internet, comme les cybercafés, de conserver les données de connexion ("logs") jusqu'à un an.

Le fichage

Article détaillé : Fichage en France.

La France disposait en 2007 de 36 fichiers de police, de gendarmerie et de justice; elle en dispose de 45 en 2009. Ceux-ci servent des finalités multiples et diverses, allant bien au-delà du casier judiciaire. Certains, tels le STIC, enregistrent les données personnelles des victimes ou des simples suspects, même au-delà d'un non-lieu éventuel ou de leur disculpation complète (voir aussi le FNAEG, ou fichier ADN).

Vidéosurveillance

La vidéosurveillance, rebaptisée « vidéo-protection » par la LOPPSI de 2010, est encadrée par plusieurs règlements. Les lieux ouverts au public (restaurants, magasins…) souhaitant s'équiper d'un dispositif doivent au préalable faire une demande en préfecture. Le public doit être averti de son existence et du risque d'être filmé. Le personnel doit également être informé de l'installation ; le dispositif doit être présenté au comité d'entreprise s'il y en a un. Les lieux fermés au public relèvent de la Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL).

En France, la vidéosurveillance n'est pas une preuve légale. Le rôle de la vidéosurveillance du point de vue de la procédure pénale est donc de servir davantage d'indice aux enquêteurs que de preuve formelle.[réf. nécessaire]

L'arrêté du 3 août 2007[4] définit les normes techniques des images. La Ministre de l'Intérieur Michèle Alliot-Marie a mis en place en octobre 2007 un plan dit de « vidéoprotection », dont une partie consiste à raccorder les centres de supervision urbaine (CSU), géré par les communes, aux commissariats et aux postes de gendarmerie; 80 raccordements avaient été faits en mai 2008, permettant aux forces de l'ordre d'avoir un accès direct aux images enregistrées par les caméras installées par les mairies[5]. Le Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) peut financer à 100% ces raccordements (toute question doit être adressée à videoprotection@intérieur.gouv.fr) [5]. Ces centres de supervision sont souvent protégés par des dispositifs biométriques de contrôle d'accès.

En avril 2008, la CNIL a adressé une note au ministre de l'Intérieur, dans laquelle elle estime que le développement des enregistrements numériques sur disque dur rend une intervention systématique de sa part pertinente[6].

La tentative de légaliser la transmission des images filmées par des caméras présentes dans les parties communes des immeubles aux forces de l'ordre a été jugée contraire à la vie privée par le Conseil constitutionnel (décision concernant la loi sur les violences en bande de 2010).

Depuis l'initiative de Patrick Balkany dans les années 90 à Levallois, la vidéosurveillance s'est installé en France: les professionnels reconnaissent installer chaque année entre 25 et 30 000 nouveaux systèmes de vidéosurveillance[7]. En 1998 le nombre de caméras en France était estimé à un million dont 150 000 dans le domaine public[réf. nécessaire]. En 2007, le nombre de caméras "autorisées" (donc dans l'espace public) était estimé à 340 000 mais pourrait atteindre un million d'ici peu selon le site du Premier ministre[8] Ces caméras sont présentes dans les aéroports et les gares, autour des routes, dans les transports publics.

Dans les transports en commun, la SNCF (RER B et D) et la RATP ont équipées leurs gares et stations d'« équipement à agent seul » (EAS). Les premiers équipements de ce type ont été testés en 1976[9].

A Paris, le maire Bertrand Delanoë a apporté son soutien au projet élaboré par la Préfecture de Police pour renforcer la vidéo-surveillance, ce qui lui a valu une « récompense » des Big Brother Awards en 2009[10].

Habitat

Depuis la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, le Code de construction et de l'habitation impose aux « propriétaires, exploitants ou affectataires » d'immeubles ou de locaux professionnels, commerciaux, etc., « le gardiennage ou la surveillance » de ceux-ci ainsi que des « mesures permettant d'éviter les risques manifestes pour la sécurité et la tranquillité des locaux » [11]. Autrement dit, la sécurité privée devient une obligation publique.

De même, l'art. L126-1, créé par la loi du 21 janvier 1995 sur la sécurité, permet aux propriétaires ou exploitants d'immeubles d'accorder à la « police et à la gendarmerie nationales », ainsi qu'à la police municipale (depuis la loi du 15 novembre 2001 sur la sécurité quotidienne), une « autorisation permanente de pénétrer dans les parties communes de ces immeubles ». Dans les copropriétés, cette décision est prise à la majorité des voix.

Santé

La surveillance de l'état de santé de la population est confiée à l'Institut de Veille Sanitaire ainsi qu'à des réseaux de médecins, comme le réseau Sentinelles de l'Inserm. La surveillance clinique est de plus en plus utilisée pour informer la politique publique dans l’allocation de soins médicaux. Alors que la santé devient de plus en plus dépendante des systèmes d’information et la surveillance clinique de plus en plus répandue, des préoccupations concernant l’intimité des patients peuvent surgir.

Références

  1. Crim., 9 juillet 2008, pourvoi n°08-82 091. Cf. Rapport 2008 de la Cour de Cassation, p.347
  2. http://www.news.fr/actualite/societe/0,3800002050,39369829,00.htm « La police française déploie ses grandes oreilles », par Thomas Rousseau, publié le : 30 mai 2007
  3. Questions relatives aux décisions n° 99-05 et 99-06
  4. Arrêté du 3 août 2007 publié au Journal officiel le 21 août, avec son rectificatif du 25 août
  5. a et b Ministère de l'Intérieur, Circulaire du 26 mai 2008 relative aux raccordements des centres de supervision urbaine aux services de police et de gendarmerie et conditions d’attribution du Fonds interministériel de prévention de la délinquance en matière de vidéoprotection. NOR : INTK0800110C (publié dans le Bulletin officiel du Ministère, N°2008-05 (mai 2008), 5 octobre 2008 [lire en ligne]
  6. CNIL, La CNIL demande un contrôle indépendant, avril 2008
  7. Paris et Londres coopèrent dans la lutte contre le terrorisme, RFI'
  8. http://www.premier-ministre.gouv.fr/information/actualites_20/un_million_cameras_videosurveillance_57751.html
  9. Métro-pole : équipement à agent seul
  10. http://bigbrotherawards.eu.org/Bertrand-Delanoe-et-Christophe-Caresche.html
  11. Article L127-1 du Code de construction et de l'habitation

Voir aussi


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