Shibari

Shibari

Bondage japonais

Couverture du livre Shibari, l'Art du bondage Japonais

Le bondage japonais (緊縛 kinbaku « bondage » ou kinbaku-bi « magnifique bondage » est un type de bondage sexuel japonais entrant dans le cadre de jeux sadomasochistes. Il implique d'entraver celui (ou celle) qui tient le rôle de personne soumise en utilisant des figures géométriques pré-définies à l'aide d'une cordelette, habituellement de 6 à 8 millimètres de diamètre, faite de chanvre ou de jute. Le mot de shibari (しばり signifiant « attaché, lié », utilisé au Japon pour décrire l'art de ficeler les colis) est devenu l'appellation la plus courante, dans les années 1990, en Occident, pour désigner l'art du bondage kinbaku.

Sommaire

Historique

Shibari made in France

Il est établi que le bondage japonais moderne puise largement ses origines dans la société japonaise médiévale ; l'utilisation du ligotage militaire sous toutes ses formes remonte au moins au XVe siècle ; le Kinbaku y était pratiqué notamment en tant que châtiment corporel aussi bien que comme technique de capture et d'arrestation. Dans ce contexte elle se nommait hojo-jutsu. Les spécialistes de ces techniques étaient nommés nawashi. Les nobles et les samouraïs ne pouvaient être entravés que selon des codes et par des personnes spécifiques, afin de ne pas attenter à leur honneur.

XVe siècle1603 : La période sanglante de Shinkoku

L'époque Sengoku est la plus noire qu'ait connu le Japon. Elle reste gravée dans les mémoires pour les tortures cruelles infligées à l'aide du feu, de couteaux, de tatouages, etc. À cette époque, la société japonaise subit une période de guerres civiles complexes qui prit fin avec l'établissement du Shogunat des Tokugawa en 1603. Ces époques de conflits entrecoupées de courtes périodes de paix (comme entre 1568 et 1603) furent propices au développement des techniques de capture.

16031878 : Période Edo

À la suite du retour à la paix (1600) et de la mise en place du shogunat Tokugawa en 1603, les techniques de capture perdirent en importance et évoluèrent vers des techniques d'arrestation et de contrôle. L'usage du ligotage en tant que torture se développait par ailleurs. Le Japon de cette période était fondé sur un ordre social rigide. De sévères codes de lois furent établis. Dans ce contexte, la technique appelée hojo-jutsu, torinawa-jutsu ou hobaku-jutsu se développa. Le hobaku-jutsu était l'art martial spécifique employé pour attraper et immobiliser des criminels ou des prisonniers. Les techniques de maniement de la corde pour immobiliser un prisonnier se perfectionnèrent et se ritualisèrent. Chaque village avait sa propre méthode.

Un criminel/prisonnier pouvait être attaché/suspendu en public, surtout s'il s'agissait d'un châtiment judiciaire, et tout observateur pouvait dire par la façon dont le criminel ou le prisonnier était attaché/suspendu et par le modèle de corde employée, quelle était la classe sociale du criminel/prisonnier et le crime qu'il avait commis. Le sexe, l'âge et la profession de la victime étaient de même déterminant pour les techniques de ligotage utilisées. Deux supplices de l'époque reposaient sur l'usage du ligotage. Dans le premier, des liens très serrés créaient des points de compression infligeant de graves et irréversibles séquelles, le second était la suspension qui pouvait parfois durer plusieurs jours. L'issue de ces deux châtiments était généralement la mort.

En 1742, sous le shogunat Tokugawa, le gouvernement promulgue une loi interdisant certains crimes ou punitions. On trouve parmi ceux-ci les peines de travaux forcés, l'esclavage, l'exil, la peine de mort, etc., et encore quatre types de tortures : la peine du fouet, l'écrasement d'une partie du corps sous une lourde pierre, le ligotage serré du corps à l'aide de cordes, la suspension par ce même moyen.

L'utilisation du kinbaku comme pratique érotique pendant cette période est très incertaine, et aucun écrit pouvant clairement nous renseigner sur son usage n'a été retrouvé.

Le bondage japonais moderne

À la fin de la période d'Edo, quelques images érotiques japonaises apparaissent, où l'usage de la corde est enfin représenté. Si cet usage érotique a pu exister avant, on ne le connaît en tout cas dans aucun sens historique : seuls des récits ou des légendes y font allusion. Ito Seiu, considéré comme le père du kinbaku, est le premier à faire des recherches sur l'hojōjutsu dès 1908 et à l'introduire en tant qu'art. Le kinbaku ne devient réellement populaire dans les revues spécialisées qu'à partir des années 1950, peut-être sous l'influence de John Willie, photographe fétichiste et artiste du bondage. La tradition du bondage en tant qu'art ne se développe au Japon qu'à partir des années 1960.

Si les usages judiciaires du kinbaku ont disparu, plusieurs de ces techniques sont cependant à la base de l'utilisation moderne du ligotage sous ses formes érotiques. Le bondage sexuel est de loin plus mesuré et beaucoup de précautions sont prises pour éviter des blessures.

Différences entre les techniques occidentales et japonaises

L'art de poser des liens est très ancien au Japon. La date exacte de son origine est mal connue mais on estime qu'elle remonte à un millénaire.

Apparenté, à l'origine, aux arts martiaux, le ligotage ou Kinbaku est initialement une méthode de torture dont les techniques différent selon le rang du prisonnier (hojojutsu). Il s'est transformé pour devenir une pratique érotique. Le fait de lier (shibari) exige une pratique sereine, progressive et complexe dont la lenteur permet au ligotage d'induire son plein effet. Progressif veut dire qu'il est possible de commencer en n'importe quel endroit du corps (poitrine, cuisses ou ventre) pour gagner peu à peu d'autres points et finir, éventuellement par une immobilisation complète dans une position donnée comme, par exemple, la position en croix du ligoté connue sous le nom de "hog tied".

Le bondage japonais diffère du bondage occidental par le fait qu'au lieu de simplement immobiliser le sujet ou de pratiquer sur lui certaines contraintes, les techniques de shibari ajoutent à cette notion de base un point de vue esthétique (voire érotique) et une stimulation des centres d'énergie en des points précis du corps (Shiatsu). La personne soumise prend du plaisir par la tension de la corde qui lui écrase les seins ou les parties génitales. L'intensité des sensations procurées au sujet ligoté est fonction de sa position. Le bondage japonais est connu pour faire appel à des positions asymétriques qui exagèrent l'impact psychologique du bondage.
Les techniques du bondage traditionnel japonais utilisent quant à eux des cordages rugueux d'environ dix à quinze mètres de longueur et constitués de plusieurs brins en fibres naturelles faites de paille de riz, de chanvre, de jute ou encore en toile[1]. Cependant, les meilleurs résultats sont obtenus avec des cordes courtes de 3 à 4 mètres qui permettent de modifier certaines portions du ligotage sans être obligé de le défaire dans son entier ou d'ajuster la tension d'une corde sans toucher à celle des autres. Les cordes auront un diamètre assez gros de 8 à 12 millimètres afin de ne pas pénétrer trop profondément la peau, tout en la marquant suffisamment pour donner une impression de souffrance. Les nœuds seront, en outre, plus esthétiques et plus faciles à défaire.
De nos jours, les japonais, à l'instar des occidentaux, utilisent des cordes de nylon plus douces que les cordes traditionnelles mais dont l'inconvénient réside dans le fait que les nœuds ont une fâcheuse tendance à glisser.

L'art martial traditionnel (hojōjutsu) des samouraïs ne fait pas de nœud alors que le bondage japonais actuel, s'inspirant du modèle occidental, fait entre deux et cinq sortes de nœuds simples. Le bondage occidental utilise, quant à lui, des nœuds plus complexes. Avec ses racines profondément ancrées au Japon, enseigné dans le monde entier par des Maîtres (sensei) du bondage, le kinbaku a gagné en popularité.

En Occident, le bondage est souvent utilisé dans le cadre du BDSM. Il utilise de longues cordes, d'environ huit mètres de longueur dont le matériau a changé au fil des années : initialement en coton, ce dernier a été supplanté par le nylon dans les années 1980-90 puis de liens constitués de multiples filaments de polypropylène.

Technique

Exemple de motif Karada

Le kinbaku traditionnel est basé sur des motifs obtenus à l'aide de cordes et dont la plupart trouvent leur origine dans l’hojōjutsu. Parmi les différentes façons de lier, l’ushiro takatekote, le bondage de base, consiste à lier les bras contre la poitrine tout en liant les mains derrière le dos. L'ensemble décrit une figure en forme de « U ». C’est la figure la plus importante et la plus fréquemment employée. Une autre façon de faire est l’ebi ou figure de la « crevette », originellement une torture, est actuellement destinée à rendre l'aspect de la personne ainsi liée plus vulnérable et plus soumise au cours des scènes BDSM.

Le kinbaku traditionnel se pratique avec des liens de sept mètres de longueur. En raison des différences physiques des participant(e)s dans le BDSM occidental, on utilise plutôt des cordes de huit mètres. Les cordages sont habituellement réalisés en jute ou en chanvre (mais ni en sisal ni en chanvre de manille) spécialement traités pour obtenir une corde à la fois robuste, souple et douce au toucher. D'autres matériaux sont parfois utilisés.

Pour des raisons historiques, le kinbaku utilise rarement les nœuds (parfois pas du tout). S'il y en a, ce sont des nœuds coulants ou des nœuds de blocage qui requièrent tous deux des matériaux à haut pouvoir de friction, donc rugueux. D'après le livre de Nawa Yumio publié en 1964, les nœuds sont considérés comme particulièrement disgracieux. Les ligotages arborant des nœuds n'étaient pas considérés comme du bondage.

Règles de sécurité

Pour ceux qui souhaiteraient se lancer dans le ligotage, il faut savoir qu'un apprentissage est nécessaire car il s'agit d'un jeu dangereux.

  • Il faut toujours avoir à portée de mains des ciseaux adéquants capables de trancher les liens en cas d'urgence,
  • Il faut toujours protéger la peau du sujet lorsqu'on tire de grandes longueurs de cordes pour éviter de lui brûler la peau,
  • Il faut surveiller les extrémités du sujet (mains, pieds). Si elles blanchissent ou bleuissent, c'est le signe que les liens sont trop serrés et qu'il faut les défaire. Des picotements ou des engourdissements dans les membres sont le signe que le sang circule mal et doivent également conduire à défaire le ligotage et à frictionner le ou les membres.
  • Ne jamais serrer un lien devant le cou du sujet. Le risque serait de l'étrangler. La nuque ne pose, par contre, aucun problème,
  • Si le candidat(e) au ligotage doit être baillonné(e), il faut convenir d'un signal non équivoque pour alerter le ligoteur.


Glossaire

Démonstration d'une suspension partielle.
Mot japonais Signification
Asanawa Corde faite de chanvre et utilisée traditionnellement pour le ligotage
Agoura Comme l'ebi (voir ci-dessou), il réalise également l'image d'une crevette mais en moins violent
Ebi Réalise l'image d'une crevette
Hishi entrelacements réalisant l'aspect d'un diamant taillé. Lorsqu'il est réalisé sur toute la surface du corps, on le désigne parfois sous le nom de hishi-kikkou. L'hishi a été répandu par les mangas et autres dessins animés.* ebi : réalise l'image d'une crevette.
Hojojutsu art martial consistant à immobiliser un sujet avec des liens. Il était utilisé pour immobiliser rapidement un prisonnier avant même qu'il puisse se défendre
Karada littéralement: « le corps ». Par extension, il désigne le harnais de corde qui enveloppe le corps
Kataahi tsuri Suspension par une jambe
Kikkou Entrelacement de la corde qui réalise le dessin des écailles d'une carapace de tortue sur la face antérieure du thorax
Kinbaku
(緊縛)
Mot général pour désigner l'Art de ligoter un sujet (bondage) à la japonaise quelle que soit la technique utilisée.
Kotori Mot général désignant un petit oiseau quelle que soit son espèce. Par extension, désigne la suspension
Musubime Mot général pour désigner un nœud.
Nawa Nom général donné à une corde
Nawashi
(縄師):
littéralement: « fabricant de cordes ». Désigne l'artiste passé Maître dans l'art du ligotage (bondageur)
Nawa shibari
(縄縛り)
(substantif) le fait d'attacher ou de lier à l'aide d'une corde (un terme "construit" est incorrect et n'existe pas en japonais)[2]
Sakuranbo Mot signifiant "cerise". Par extension, il désigne les fesses
Shiatsu Mot général pour désigner l'Art de masser les "centres d'énergie"
Shibararetai Mot indiquant le désir du sujet d'être ligoté par le Maître
Shibari
(縛り)
Terme général désignant le fait de ligoter un sujet
Shibaritai Mot indiquant le désir du Maître de ligoter le sujet
Shibaru
(縛る)
Attacher ou lier à l'aide d'une corde
Shinju Mot signifiant "perles". Par extension, désigne les seins. Un Shinju est donc un bondage qui n'intéresse que la poitrine.
Tazuki Entrecroisements réalisant l'aspect d'un harnais.
Tanuki Blaireau
Tsuri Suspension verticale ou horizontale
ushiro takate kote Entrave basique pour la plupart des figures shibari. consistant à lier les bras et la poitrine en maintenant les mains liées derrière le dos. Le tout prend une forme de U. Ushiro takatekote est composé des mots 後ろ ushiro (« derrière le dos ») et 高手小手 tekatekote (« lier les mains et les bras »).

Artistes du bondage sexuel japonais

  • Kate Asabuki
  • Aika Miura
  • Aya Otosaki
  • Ayaka Fujisaki
  • Fuka Sakurai
  • Junko Asamiya
  • Hiroko Nishino
  • Kaori Fujimori
  • Karin Manabe

Bibliographie

  • Lee "Bridgett" Harrington, Shibari You Can Use: Japanese Rope Bondage and Erotic Macramé. Mystic Productions, 2007. ISBN 0-615-14490-X.
  • Master "K", Shibari: The Art of Japanese Bondage. Secret Publications, 2004. ISBN 90-807706-2-0.
  • Masami Akita (秋田昌美 AKITA Masami), musicien à l'origine, il a écrit de nombreux articles documentés sur l'histoire et la pratique du bondage japonais.
  • Midori, Les Sortilèges du bondage japonais, conseils, pratiques de base pour débutants et sécurité, Gremese, 2001

Source

Notes

Voir aussi



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