Saint-jean-le-thomas

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Saint-Jean-le-Thomas

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Le littoral de St Jean-le-Thomas avec vue sur le Mont St Michel et le rocher de Tombelaine dans la brume du soir.
Le littoral de St Jean-le-Thomas avec vue sur le Mont St Michel et le rocher de Tombelaine dans la brume du soir.

Administration
Pays France
Région Basse-Normandie
Département Manche
Arrondissement Avranches
Canton Sartilly
Code Insee abr. 50496
Code postal 50530
Maire
Mandat en cours
Alain Bachelier
2008-2014
Intercommunalité Communauté de communes de Sartilly - Porte de la Baie
Démographie
Population 421 hab. (2006)
Densité 177 hab./km²
Géographie
Coordonnées 48° 43′ 51″ Nord
       1° 30′ 56″ Ouest
/ 48.7308333333, -1.51555555556
Altitudes mini. 5 m — maxi. 90 m
Superficie 2,38 km²

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Saint-Jean-le-Thomas est une commune française, située dans le département de la Manche et la région Basse-Normandie donnant sur la baie du mont Saint-Michel.

Sommaire

Géographie

La commune est entourée de Dragey-Ronthon et Champeaux et se trouve dans le canton de Sartilly. De ses plages, il y a une très belle vue sur le mont Saint-Michel et Tombelaine.

Histoire

Administration

La mairie
Liste des maires successifs
Période Identité Parti Qualité
 ? mars 2001 Roger Grupallo - -
mars 2001 actuel Alain Bachelier SE Boulanger
Toutes les données ne sont pas encore connues.

Démographie

Évolution démographique
(Source : INSEE[1])
1962 1968 1975 1982 1990 1999
377 376 327 390 398 395
Nombre retenu à partir de 1962 : population sans doubles comptes

Lieux et monuments

Tombelaine et le mont Saint-Michel vus depuis les hauteurs de Saint-Jean-le-Thomas

Église de Saint-Jean-le-Thomas

L'église Saint-Jean-Baptiste du Xe siècle

Par l'extérieur et l'intérieur, on peut retrouver la marque des onze siècles d'histoire de l'église, de ses remaniements et cicatrices... Une visite s'impose :

Archéologie des pêcheries dans la partie nord-orientale de la Baie du mont Saint-Michel

Comme tous les grands estuaires européens, la baie du mont Saint-Michel offre un patrimoine archéologique spécifique et spectaculaire. Elle le doit à plusieurs particularités liées à un environnement exceptionnel. En premier lieu, elle le doit à la richesse des ressources littorales telles que le poisson et le sel. Elle le doit également à des conditions géologiques rarement rencontrées : d'une part, une sédimentation continue pendant toute la durée de l'Holocène récent (depuis 6300 avant J.-C.), et d'autre part, à l'omniprésence de l'eau, qu'il s'agisse de l'eau douce de la nappe phréatique ou de l'eau salée apportée par le battement des marées. Par la qualité de la conservation des vestiges au sein de sédiments fins vaseux ou sableux, les sites dits « en milieu humide » constituent une des priorités actuelles de la recherche archéologique.

Les recherches archéologiques récentes réalisées dans la partie sud de la Baie se sont portées sur l'activité de briquetage aux époques gauloises et gallo-romaines (Bizien-Jaglin, 1995), ainsi que sur l'occupation de la Butte de Lillemer et de son marais vers 4000 avant J.-C. (Laporte et al., 2003). Nous évoquerons ici le travail en cours sur la partie nord-orientale qui porte principalement sur les vestiges d'anciennes pêcheries fixes.

Les pêcheries du nord-est de la baie

En 2003 a été lancé un programme de recherche visant à étudier les installations anciennes sur le domaine maritime. Ce projet a montré l'état général de conservation exceptionnel de ce type de sites. La zone nord-est de la baie (secteur de Saint-Jean-le-Thomas - Champeaux) constitue à cet égard un véritable laboratoire d'étude pour les anciennes pêcheries. Grâce à une faible exposition à la houle du nord-ouest et à des dépôts de sédiments très fins, les vestiges de ces sites ont pu être remarquablement conservés, même s'ils sont aujourd'hui largement menacés par l'érosion littorale.

Les travaux sur la zone intertidale ont été menés dans des conditions difficiles. Ils ont jusqu'à présent comporté des relevés topographiques, l'étude du contexte sédimentaire de cette zone, des campagnes d'échantillonnage des bois, des fouilles et des travaux d'analyse (étude des bois et des restes de poissons, datation par le carbone 14).

Les sites découverts se partagent en 3 grands ensembles :

  • au sud, des pêcheries en bois du début du Bronze ancien (vers 2 000 ans avant J.-C. en date calibrée) ;
  • au nord, des pêcheries médiévales mêlant digues de pierre et palissades en bois ;
  • au centre, un ensemble de structures circulaires en pierres (avec parfois des pieux de bois), non datées et probablement également liées à la pêche [2].

Les pêcheries en bois de la plage de Pignochet et de la plage Saint-Michel à Saint-Jean-le-Thomas

Une grande partie des travaux de fouille a principalement porté sur le site de la pêcherie de la "Plage de Pignochet" à Saint-Jean-le-Thomas (Manche), qui est aujourd'hui l'une des plus anciennes installations de ce type en Europe. Il revient à Alain L'Homer d'avoir découvert ce site dans les années 1970 et d'en avoir fait une première étude avec la collaboration d'A. Petra. Ingénieur géologue et familier de la baie, Alain L'Homer fut intrigué par l'aspect singulièrement ancien du bois qu'il trouva sur une plage soumise à l'érosion. Il en préleva un fragment pour effectuer une datation par le carbone 14. Celle-ci révéla que ces pieux dataient du début de l'âge du bronze.

Vers 2 000 ans avant J.-C., la mer a atteint temporairement un niveau moyen relativement proche de l'actuel dans un contexte transgressif. S'installant dans une zone traversée par des chenaux de marée, les hommes ont alors construit sur l'estran une vaste installation en bois, couvrant près de 2 hectares et destinée à piéger les poissons. Découverte dans un état de conservation exceptionnelle, elle est constituée d'alignements de pieux : au centre, deux structures fermées en bois, en périphérie des alignements rayonnants. Chaque alignement supportait un entrelacs de gaules, tandis que des branches très fines, des herbacées ou des tiges de fougères protégeaient fréquemment la base de ces haies, fortement exposées à la houle, et qui nécessitaient un entretien permanent.

L'un des aspects les plus spectaculaires du site réside également dans la présence de multiples renforts obliques étayant les palissades, qui devaient s'élever à un minimum de 1,50 m de hauteur.

Les principales essences ayant servi à la fabrication des pieux sont l'aulne, le saule, le frêne, le noisetier, plus rarement le chêne. L'analyse des éléments issus de la fouille des premiers sondages permet également une approche de l'approvisionnement en bois de clayonnage composé surtout de noisetiers, mais également de saules et de genêts.

Les nombreux chenaux qui traversent l'installation semblent avoir eu une fonction importante. Le principe de piégeage des poissons semble toutefois plus complexe que les pêcheries actuelles. La connaissance de l'environnement du site a considérablement progressé grâce, d'une part, à une collaboration étroite avec les géologues et géomorphologues travaillant sur le site. Une première typologie des faciès lithologiques sur la zone intertidale actuelle a ainsi été dressée. Les objectifs principaux de cette analyse sont de mesurer l'éloignement du site par rapport à la côte, d'identifier les multiples chenaux qui ont sillonné l'estran et de les dater par rapport à la période de fonctionnement de la pêcherie.

La fouille de multiples secteurs a été riche d'informations techniques, aussi bien sur les dispositifs de protection du pied de haie que sur les modes de clayonnage. L'élévation de clayonnage conservée grâce à une chape de tangue peut ainsi atteindre une cinquantaine de centimètres. Le passage de petits chenaux de marée traversant des haies de clayonnage peut être identifié en surface par la présence de nombreux galets de tangue ou de graviers. Les aménagements découverts évoquent plusieurs zones « pêchantes » et la possibilité de barrer le chenal par un filet ou bien une grande nasse. L'érosion active a permis l'observation de nombreuses empreintes de pas humains bien visibles, ainsi que des zones de circulation de bovidés. Les objets archéologiques rencontrés sont rares et souvent sans rapport avec ceux que l'on trouverait sur un site d'habitat : peson de filet en terre cuite, copeaux de bois, liens torsadés en branches de noisetier, outil en bois de cerf emmanché destiné à fendre du bois. Les restes de poissons sont fréquemment piégés en pied de haie : le tamisage des nombreux prélèvements a permis la collecte d'un grand nombre d'écailles, de quelques éléments de rachis et de crâne actuellement en cours d'étude.

La pêcherie en bois de la plage Saint-Michel est situé environ 500 m au nord de la précédente et utilise le même vaste système de chenaux de marées. Cette pêcherie en bois, découverte plus récemment, a globalement une forme en V dont l'angle est très ouvert vers le nord-ouest. Elle est indiscutablement implantée dans un ancien paléochenal colmaté. À la pointe du dispositif, la ligne de pieux s'interrompt pour faire place à un aménagement qui a été partiellement fouillé. Le long des pieux est apparue une trame de fines gaules de noisetier entrelacées sur une armature de piquets épointés. Ces piquets sont répartis tous les 20 cm en moyenne et forment un véritable panneau de clayonnage autonome, fixé sur la face aval de la haie.

L'existence de panneau de clayonnage mobile est pour la première fois attestée dans notre zone d'étude. Ce dispositif est connu dès le Néolithique final et a été employé jusqu'à quasiment aujourd'hui sur les pêcheries en bois de la façade occidentale du Cotentin. Cette installation semble contemporaine de l'ensemble de la plage de Pignochet.

Les pêcheries médiévales en pierre de Champeaux

Au sud de la falaise qui forme la limite du massif de Carolles, figure un vaste complexe de digues de pierres en forme de V, couvrant près de 12 hectares. Cet ensemble spectaculaire et visible du haut de la falaise émergeait des sédiments estuariens dans les années d'après-guerre. Complètement envasé, il n'est réapparu à Alain L'Homer et A. Petra qu'en 1992 par l'effet de l'érosion littorale. Catherine Bizien-Jaglin a survolé ces pêcheries en septembre 2000 et en fait état pour la première fois en 2001. Le premier indice de l'ancienneté de cet ensemble est fourni de manière très indirecte, dans la charte de fondation de l' abbaye de La Lucerne en 1162, qui mentionne que le seigneur Guillaume de Saint-Jean fit don, à Saint-Jean même, d'une pêcherie ainsi mentionnée : « la place d'une pêcherie à la mer et toute la dîme de toutes les pêcheries et des seiches venant de la pêche en bateau ». Rien n'indique toutefois qu'il s'agisse du même groupe de pêcheries.

Une première datation par le carbone 14 réalisée sur un échantillon provenant d'un pieu de chêne situé au sein d'une des digues les plus anciennes du site a donné environ 700 après J.-C. Il apparaît donc que, dans ce cas précis, des travaux de restauration et d'entretien plus récents n'ont pas fait disparaître les vestiges de l'installation primitive. Le relevé général des vestiges est en cours grâce à un appareil GPS différentiel.

Bilan

Faute d'un intérêt suffisant pour le patrimoine fluvial et maritime, l'archéologie des pêcheries a connu un retard considérable en France, particulièrement pour la zone littorale. Pourtant le poisson en estuaire offre l'une des plus grandes densités de nourriture dont puissent disposer les sociétés traditionnelles.

Ailleurs en Europe, particulièrement dans les Îles Britanniques, les données accumulées sur cette activité sont très nombreuses depuis une vingtaine d'années. Elles ont été possibles principalement dans les grands estuaires qui offrent des conditions très protégées, comparables à celles de la Baie du Mont-Saint-Michel, qui sont uniques sur le littoral français.

Personnalités liées à la commune

Dwight David Eisenhower établit son quartier général à Saint-Jean-le-Thomas du 19 août au 29 septembre 1944.

Petit historique

Alors qu'il commandait les forces alliées de Méditerranée, le général Eisenhower est nommé, le 12 février 1944, commandant suprême des forces expéditionnaires alliées. Il se rend en Angleterre pour mettre au point le débarquement et établit son quartier général à Londres puis dans une résidence secrète.

Après le débarquement du 6 juin 1944, son quartier général est transféré sur le continent, quelques jours au Molay-Littry près de Cerisy-la-Forêt puis à Jullouville, commune du Sud Manche, où il demeura deux mois.

Durant le transfert, Eisenhower confie au maréchal Montgomery le soin de le représenter et de diriger l'ensemble du front. Dans le même temps, il crée la troisième armée sous le commandement du général Patton ainsi que la première armée sous le commandement du général Bradley. Hodge prend le poste de Bradley.

Il s'agira de conduire l'avancée des troupes alliées en direction de la Bretagne et de l'ensemble du territoire français puis vers l'Allemagne, avec l'espoir de mettre fin à la guerre pour la fin de l'année 1944.

Souvenirs de Jean Robidel

31 juillet 1944 : les Américains arrivent à Jullouville

Les services de l'état-major d'Eisenhower s'installent dans le château de la Mare, propriété de la colonie de la ville de Saint-Ouen. Un centrale téléphonique est édifié. Sur le plateau situé au-dessus de la vallée des peintres, un camp d'aviation va permettre d'incessants départs et arrivées d'avions de renseignement. Eisenhower habite une immense roulotte camping.

La maison Montgomméry : sur le plateau de Champeaux, la route de Jullouville à Avranches permet au voyageur de prendre du regard la baie du mont Saint-Michel dans sa quasi totalité. Le point de vue est assez remarquable pour avoir été qualifié par Édouard Herriot de « plus beau kilomètre de France ». La descente vers Saint-Jean-le-Thomas laisse, sur la gauche, la falaise flanquée de belles demeures et propriétés boisées. Parmi elles se cache la maison Montgomméry. Celle-ci servira de résidence au général Eisenhower du 19 août au 29 septembre 1944.

Le choix porté par les Américains sur cette maison a sans doute été préparé avec soin. À l'abri des regards, facile à protéger, en raison de sa situation en bord de la baie, sur un coteau escarpé, confortable et spacieuse, elle dispose d'une terrasse qui offre un panorama exceptionnel sur le mont Saint-Michel, le rocher de Tombelaine et l'ensemble de la baie. À proximité de la maison s'élevait, au XIIe siècle, le donjon du château de Saint-Jean qui lui-même avait été édifié à l'emplacement de fortifications romaines. C'est dire que les Américains chargés de trouver une résidence sûre ne s'étaient pas trompés. La maison porte un nom prestigieux : « Montgomméry », souvenir du bastion que le seigneur de Montgomery avait construit à cet endroit, au XVIe siècle. En 1944, la villa Montgomméry est la propriété de M. Benois, associé de la maison Coty, la célèbre marque de parfums. À cette époque, personne n'occupe la maison car la famille Benois a quitté sa résidence pour Genève et Chamonix.

Premiers contacts

Jean Robidel, 24 ans, saint-jeannais, est chargé d'entretenir la maison, le parc et les jardins qui sont situés alors de l'autre côté de la route, sur le coteau. Jean Robidel a échappé au service du travail obligatoire en Allemagne.

« Un jour, le 7 ou 8 août, un officier américain est venu me demander les clefs de la maison. Il avait demandé par politesse l'autorisation du maire de Saint-Jean, M. Percepied. On a parcouru le parc, il prenait des notes... quelques jours plus tard, un camion est arrivé. Des Américains ont emménagé une baignoire, car celle de la villa était trop petite à leur goût. Les soldats ont déchargé du charbon pour le chauffage de la maison. Un groupe électrogène a été installé, car depuis le mois d'avril nous n'avions plus d'électricité. Suivaient des fourneaux à fioul pour la cuisine. Je fus chargé d'aller chercher un grand lit dans la villa voisine, propriété des Massin. Ma sœur et ma femme avaient fait le ménage et fleuri les pièces. La caravane roulotte est arrivée par la suite. Des stocks de nourriture et des rouleaux de tissus furent rentrés dans la propriété : ils occupaient la moitié de l'une des pièces de la maison. J'avais vu auparavant apporter des kilomètres de fil de téléphone dans et tout autour de la propriété. »
Le personnel d'Eisenhower
« Durant la campagne d'Afrique du Nord, en Italie et à Londres, un personnel accompagne Eisenhower. Il est encore présent à la villa Montgommery : son maître d'hôtel principal, Williams, un superbe noir bâti en armoire à glace, qui était « le chouchou » du général. Deux assistants cuisiniers, des Noirs. Un vacher ! En effet, Eisenhower avait deux vaches, Maribell et Lullabell pour le lait frais et la crème. Elles paissaient au-dessus de la villa. Deux valets de chambre, l'ordonnance Michaël Mckeogh. Un chauffeur, Léonard Dray, de Détroit, ouvrier chez Ford et un mécanicien qui avaient à disposition trois Packard. Un plombier, Sam Cassalino, qui était originaire de New York. Un tailleur, Michel Popp, yougoslave originaire de Belgrade. Celui-ci s'installera dans une grande avenue de New York après la guerre. Trois ouvriers tailleurs étaient sous ses ordres. »
« Les Blancs logeaient dans la villa mais les Noirs, dans les dépendances. La guerre n'avait pas effacé les pratiques du pays. Tous ces gens avaient beaucoup d'estime pour celui qu'ils appelaient "le chef". »
L'entourage d'Eisenhower
« Occupaient la villa avec Eisenhower, le lieutenant-colonel britannique James Gault, de la Garde écossaise qui représentait le maréchal Montgomery auprès d'Eisenhower et Kay Summersby, une belle jeune femme aux cheveux roux, que certains appelaient la « fidèle secrétaire » et qui faisait office de chauffeur du général. Et puis, il y avait les officiers de passage, Patton et Bradley, ces généraux avec qui Eisenhower coordonnait l'avancée de trois millions de soldats vers l'Allemagne, le général Koenig, les officiers de l'Armée de l'air que je reconnaissais à leur uniforme et qui allaient participer à la bataille d'Arnheim. Le maréchal Montgomery n'est jamais venu à la villa : il faut dire que les deux hommes avaient peu de sympathie mutuelle. »
« Dans son livre Croisade en Europe, Eisenhower cite tous ceux qui l'entouraient : « La qualité des services qui me furent rendus par mon état-major personnel est un de mes meilleurs souvenirs de guerre. Tous accordaient à mes affaires et même à mon confort, une priorité absolue. »
Les soldats américains à Saint-Jean
« Un dispositif de sentinelles avait été mis en place autour de la propriété, tous les vingt-cinq mètres. Elles étaient reliées entre elles par téléphone. Et, sur la falaise de Champeaux, un camp de deux mille hommes avait été monté en quelques jours. Des patrouilles de nuit de six hommes se relayaient pour protéger la villa. Les soldats américains venaient parfois boire un coup chez le père Redon, à l'hôtel de la Plage ainsi que chez la mère Rosper. Mais leur présence à Saint-Jean était beaucoup plus discrète que celle des soldats allemands. »
Eisenhower et la table
« C'était un bon vivant. Il adorait la crème fouettée que lui préparait son vacher avec le lait des deux vaches qui elles aussi étaient arrivées à la villa Montgommery. Il dégustait la crème avec framboises et mûres sauvages. Le petit déjeuner était très copieux. J'allais chercher régulièrement du filet de bœuf, de gros morceaux, à la boucherie du village tenue par Pierre Grant, occupée aujourd'hui par M. Lecarpentier. A 9 heures, chaque matin, Eisenhower venait à la cuisine. Il avait trois cuisiniers mais cela ne l'empêchait pas de faire lui-même sa tambouille. C'était la cuisine » à l'américaine, généreuse en maïs, souvent très épicée. Par contre, les fruits de mer lui étaient inconnus. Je leur fournissais parfois des légumes du jardin qui s'étendait de la route jusqu'au chemin de la plage.
« Un jour, Eisenhower est allé manger avec des généraux et Miss Kay à la Grande Auberge, tenue alors par M. et Mme Tilche, juifs anglais qui portaient l'étoile jaune au revers de la veste et qui n'avaient jamais été importunés par les nazis. La Grande Auberge est toujours là, sur la route qui mène à l'église, vaste demeure aujourd'hui transformée en appartements. »
L'emploi du temps du général
« Il allait et venait entre le quartier général de Jullouville et la villa Montgomméry, recevait les officiers, se reposait. Le mois de septembre n'avait pas été très beau mais il allait souvent sur la terrasse regarder et contempler les méandres changeants que le sable et les rivières dessinent dans la baie. »
Atterrissage forcé dans la baie
« Le 27 ou 28 aout, Eisenhower est parti pour Paris, afin de rencontrer De Gaulle après la libération de Paris par la division Leclerc. Son avion s'était envolé de la piste de Carnet à proximité de Saint-James. La piste de Carolles était en effet trop courte pour l'avion du général. Ce jour-là, le brouillard était épais, le pilote a du posé son avion dans la baie du Mont-Saint-Michel. Le général en sortit avec une entorse au genou. C'est moi qui le soignais tous les jours avec de la tangue de la baie. Fangothérapie ou tangothérapie déjà appliquée. »
« Dans Croisade en Europe, Eisenhower relate cet incident : « Nous essayâmes de traîner l'avion assez loin du bord de la mer pour éviter qu'il fut atteint par la marée montante. Ce faisant, je me démis un genou. Mon pilote Underwood m'aida à traverser la plage pendant que je scrutais d'un oeil anxieux le sable uni pour y détecter toute trace de mine enfouie... ce fut une marche pitoyable sous une pluie diluvienne. »
Les relations avec les occupants de la ville
« J'ai eu le privilège d'être le seul français à approcher le général et son entourage. J'avais mes entrées partout. Eisenhower parlait mal notre langue, j'ai donc eu peu de conversation avec lui. »
« Les sentinelles me demandaient souvent de l'eau, c'était l'été, et en échange, ils me donnaient des cartouches de cigarettes. »
« Lorsque la bataille d'Arhneim fut terminée, je demandai au colonel Gault si la guerre allait prendre fin rapidement. Il me répondit qu'il faudrait encore attendre plusieurs mois. » « 
« Le tailleur était un chic type, il s'exprimait bien en français. Il travaillait beaucoup, pour le général, ses officiers, Miss Kay... »
« Mais c'est avec Williams, le maître d'hôtel que j'ai le plus échangé. Ayant suivi Eisenhower en Afrique, en Italie, à Londres, présent aux repas, il était au courant de tout ce qui se passait. Je n'avais pas de poste radio, et avec Williams, j'étais au courant de l'avancée du front, des projets et des résultats. »
« C'est grâce à lui que je pus suivre les préparatifs de la bataille d'Arnheim. »
« Tous les gens de la villa venaient souvent nous voir chez nous à la villa Bingard. Ma mère leur faisait des crêpes. On passait de bonnes soirées avec eux. Heureux d'apprendre le français, ils étaient curieux de tout, regardaient nos livres d'histoire et cherchaient à nous faire plaisir. Ils m'offrirent du matériel pour me raser, Michel Popp voulut tailler des jupes pour ma femme et ma sœur mais celles-ci ne voulaient pas se déshabiller devant des hommes. Ma femme et ma sœur allaient chercher le bois et le cidre à la villa ; elles aussi avaient leurs entrées. Les Américains leur offraient le thé et les faisaient monter dans leurs jeeps. Ils aimaient bien discuter avec elles. »
La bataille d'Arnheim
« Il semble bien que le séjour d'Eisenhower à Saint-Jean-le-Thomas ait consisté à coordonner les préparatifs de cette bataille. Il y avait chez tous le désir d'en finir au plus vite avec la guerre. Le plus impatient était sans doute Montgommery. Il persuada Eisenhower de lui affecter l'armée aéroportée alliée pour monter une attaque au pont d'Arnheim aux Pays-Bas. C'était le principal objectif de l'opération Market Garden. Il permettrait de franchir le Rhin par le pont d'Arnheim et de pénétrer dans la Ruhr. C'en aurait été fini de la puissance de guerre nazie. Lancée le 17 septembre, l'opération Market Garden fut un demi-échec dû au mauvais temps, la 1re division aéroportée britannique fut décimée, la tête de pont ne fut pas établie. Il faudra attendre le mois de mai 1945 pour retrouver la paix. »

Eisenhower et De Gaulle

« C'est toujours par William que j'appris qu'Eisenhower n'avait aucune sympathie pour de Gaulle. En Afrique du Nord, Eisenhower avait rencontré l'Amiral Darlan qui faisait partie du régime de Vichy et que les Américains avaient fait venir en Afrique du Nord. William me racontait qu'il n'avait jamais vu son chef aussi en colère que le jour où, au cours d'un repas, il avait appris que Darlan avait été assassiné, en décembre 1942. »

Départ

« Après la bataille d'Arnheim, Eisenhower devait partir pour Versailles installer son quartier général. Avant de partir, le maître d'hôtel voulait faire une grosse commande de filet de bœuf. La Normandie offrait des vivres, mais qu'en était-il de la région parisienne ? »
« Le 29 septembre 1944, Eisenhower quittait la villa Montgomméry, suivi de son entourage et de son personnel. Quand les soldats partirent, il ne restait plus que quelques fils de téléphone oubliés dans la propriété et le souvenir d'avoir vu les hommes du nouveau continent, leur matériel moderne, leur maïs, leur wiskhy. et quelques adresses que ma sœur a conservées. J'ai reçu après la guerre une ou deux lettres du personnel mais à ma connaissance aucun de ceux qui avaient séjourné à la villa, n'est revenu sur les lieux. En 1953, j'apprenais que l'hôte de la villa Montgommery en août et septembre 1944 était élu Président des États-Unis. La télévision française vint me filmer, le journaliste Georges Panchené m'interviewa et j'eus droit à des émoluments d'artiste. »
« La villa Montgommery est toujours là, bien nichée dans la falaise regardant le va et vient de la mer et l'archange saint Michel. Le temps efface les traces du passage des hommes, même célèbres. Pourtant la mémoire découvre encore ce moment de l'été 1944 qui vit l'extraordinaire libération de l'Europe du nazisme. Saint-Jean-le-Thomas en fut un modeste point stratégique durant quelques semaines. »
« Une plaque commémorative a été posée au carrefour de la route de Jullouville et de l'avenue de Gaulle. En 1953, le conseil municipal de Saint-Jean décerna au nouveau président des États-Unis le titre de citoyen d'honneur de Saint-Jean-le-Thomas. »
« Dwight David Eisenhower est mort en 1969, après avoir mis fin à la guerre de Corée et établi les premiers contacts directs avec l'URSS. Il avait été président des États-Unis de 1953 à 1961. »[3]

Voir aussi

Articles liés

Notes et références

  1. Saint-Jean-le-Thomas sur le site de l'Insee
  2. Ce projet de recherche est cofinancé par le Ministère de la Culture et de la Communication (DRAC-Service régional de l'archéologie) et le Conseil Général de la Manche. Le Groupe de Recherches Archéologiques du Cotentin assure la gestion de ces moyens.
  3. Souvenirs de Jean Robidel recueillis par Louis Malle, avril 1999. Texte sous GFDL.

Bibliographie

BIZIEN-JAGLIN C., 1995 – Les sites de briquetage de la zone du Marais de Dol dans leur contexte sédimentaire. In « Baie du Mont-Saint-Michel et Marais de Dol », Centre Régional d'Archéologie d'Alet, p. 67-80.

LAPORTE L., BERNARD V., BIZIEN-JAGLIN C., BLANCHET S., DIETSCH-SELLAMI M.-F., GUITTON V., GUYODO J.-N., HAMON G., MADIOUX P., NAAR S., NICOLLIN F., NOSLIER A., OBERLIN C., QUESNEL L., 2003 – Aménagements du Néolithique moyen dans le Marais de Dol, au pied de la butte de Lillemer (Ille-et-Vilaine) : les apports d'un programme de prospection thématique. Revue Archéologique de l'Ouest, 20, p. 127-153.

L'HOMER A., 1995 – Les vestiges de la pêcherie en bois de Saint-Jean-le-Thomas datant de l'âge du Bronze. In « Baie du Mont-Saint-Michel et Marais de Dol », Centre Régional d'Archéologie d'Alet, p. 111-118.

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