Régression et dégradation des sols

Régression et dégradation des sols
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Dans le domaine de la pédologie et de l'écologie, la régression et la dégradation sont des processus d'évolution associés à une perte d'équilibre d'un sol antérieurement stable. Ce type d'érosion commence généralement avec la destruction du couvert végétal, phénomène depuis longtemps connu puisque Platon lui-même, 400 ans avant J.-C. écrivait dans le Critias :

« Notre terre est demeurée, par rapport à celle d’avant, comme le squelette d’un corps décharné par la maladie. Les parties molles et grasses de la terre ont coulé tout autour, et il ne reste plus que la carcasse nue de la région »

Quelques siècles plus tard, les chroniqueurs décrivaient la disparition de près de 600 localités antérieurement prospères le long de la côte africaine entre l’Égypte et le Maroc, suite à la déforestations imposée par l’Empire romain qui venait là se servir en bois pour ses bateaux et chars de guerre[1]. Les sédiments issus des labours et de la déforestation ont comblé la Mer Égée sur cinq kilomètres en aval du port d'Éphèse, autrefois célèbre pour abriter un temple dédié à Artémis[1].

La perte de matière organique et le labour sont deux facteurs de dégradation des sols, qui deviennent alors plus sensibles à l'érosion.
La déshydratation est un autre facteur de dégradation et d'érosion des sols (ici Désert des Mojaves
Sur sols limoneux fragiles, le passages répétés d'engins lourds est un facteur d'asphyxie et de dégradation voire de régression du sol
Racines et radicelles sont de puissants facteurs de cohésion du sol, mais parfois insuffisants face au ravinement
La destruction du couvert forestier protecteur (canopée) est un des facteurs les plus courants de régression ou dégradation des sols, notamment en zone tropicale

Sommaire

Types de dégradation

On distingue souvent la régression et la dégradation des sols, qui peuvent se combiner.

La régression d'un sol est essentiellement due à l'érosion. Elle correspond à un phénomène de rajeunissement d'un sol (retour vers l'état opposé au stade climacique).

La dégradation d'un sol résulte souvent d'une combinaison de facteurs[2], incluant éventuellement la régression, qui conduisent le sol vers une évolution différente de l'évolution naturelle liée au climat et à la végétation locale. Elle est généralement directement liée à l'action de l'homme via par exemple :

  • le remplacement de la végétation primitive diversifiée (dite climacique) par une végétation secondaire (monoculture dans le pire des cas), qui modifie l'humus et la formation du sol.
  • une diminution des taux de matière organique induite par une surexploitation du sol (non retour, ou retour insuffisant de la matière exportée), son lessivage..
  • la destruction de l'humus et des complexes argilo-humiques insolubles par le labour qui enfouit et détruit les couches supérieures vivantes du sol, ou par un travail excessif (trop intensif ou trop fréquent) du sol.
  • l'acidification, la salinisation et éventuellement la désertification qui peuvent être induits ou exacerbés par les changements climatiques, mais aussi par l'irrigation et le drainage ;
  • l'érosion (hydrique et/ou éolienne) ; elle est facilitée par le labour et/ou désherbage qui laissent les sols nus trop longtemps (ils sont alors déstructurés et dégradés par l'action des sécheresse et/ou l'impact des pluies qui les lessivent au lieu de les pénétrer.
  • pollution par des métaux lourds ou des substances biocides (pesticides ou autres polluants) qui tueraient les organismes essentiels pour entretenir la cohésion et capillarité du sol (champignons, vers de terre...).
  • la compaction (tassement du sol) et leur asphyxie. Elle est souvent accompagnée de l'apparition d'une semelle de labour dans le cas des sols labourés ; Le tassement qui induit une forte baisse de la porosité naturelle du sol est une des formes les plus graves et les plus courantes de la dégradation des sols. La compaction des sols (notamment riches en argiles et/ou limons) et de leurs agrégats a un impact négatif, direct et durable sur leur activité biologique et sur leurs caractéristiques hydrologique. Les sols tassés sont moins productifs, plus sensibles à l'érosion et contribuent moins aux fonctions épuratrices et « tampon » des sols. Partout dans le monde, les sols utilisés par l'Homme tendent à se tasser, perdant de leur porosité, souvent sur 10 à 50 cm. Cette compaction est le plus souvent due aux engins agricoles et forestiers, mais le surpâturage et la surfréquentation d'un milieu par l'homme peuvent y contribuer localement. Enfin, l'utilisation excessive ou inadaptée d'engrais chimiques et d'amendements (alors que les fumiers, composts, et autres engrais organiques amélioraient la qualité des sols) contribuent-ils à déstructurer et tasser les sols (par éclatement des agrégats, et diminution de l'activité biologique), toujours au détriment de la pénétration des réseaux racinaires qui normalement - avec les organismes fouisseurs - décolmatent et construisent les sols.
    Mesure : Le tassement peut être évalué par des mesures physiques (dont densité et résistivité électrique du sol), mais il faudrait idéalement pouvoir comparer chaque paramètre à un sol identique non tassé ou non dégradé, ce qui n'est pas toujours possible.

Symptômes

Les sols tassés - selon leur nature - se reconnaissent à divers symptômes :

  • changements floristiques (plantes malingres, moins résistantes à la sécheresse, moins vertes, de tailles anormalement variables, apparition d'espèces adaptées aux sols compacts avec par exemple joncs poussant dans les ornières en forêt tempérée), levée retardée..
  • mauvaise pénétration de l'eau (flaques ou eau superficielle persistant en surface, plusieurs heures après une forte pluie, plusieurs seconde pour minutes après une faible pluie).
  • croûte de battance
  • semelle de labour
  • Présence de zones compactées sous la couche de sol arable (semelle de labour)
  • Les résidus végétaux ou de récolte se décomposent mal, même plusieurs mois après leur incorporation au sol
  • phénomènes érosifs anormaux, eaux boueuse dans les fossés et creux

Constats

Dans le monde

L'ONU et la FAO alertent depuis plusieurs décennies sur la dégradation de nombreux sols tropicaux, avec notamment de graves phénomènes de désertification et de salinisation.
D'après une étude du professeur d'écologie américain David Pimentel, dix millions d'hectares de terres cultivables sont emportés par l'érosion chaque année[3].

Dans l'Union européenne

La Commission européenne[4] estime que la dégradation des sols est devenue un problème grave en Europe, qui se pose avec une intensité variable selon les pays et régions[5], mais qui empire pour chacun des 27 États membres de l’UE, en particulier en zone méditerranéenne. 33 millions d’hectares serait concernée en Europe d’après l’ISRIC[6].

Causes

La Commission cite principalement des pratiques agricoles et sylvicoles « inadéquates » (labours, engins trop lourds), mais aussi les impacts de l'expansion urbaine, de la périurbanisation, de la croissance industrielle, du tourisme et des grands « travaux » qui empêchent les sols de rendre les services écologique et agricoles qu’ils rendaient.

Incidences

La Commission estime que ces dégradations ont une incidence directe sur les ressources en eau, air, biodiversité, ainsi que sur le changement climatique. Elle identifie aussi des impacts possibles sur la santé de l’homme et des animaux, et sur la sécurité sanitaire des denrées agricoles.

La Commission, sur la base des données disponibles[7], estimait en 2006 que :

  • 12 % des sols européens (115 millions ha) sont soumis à l'érosion hydrique,
  • 42 millions d'hectares subissent une érosion éolienne
  • Environ 3,5 millions de sites sont « potentiellement contaminés » par divers polluants dans l'UE-25.
  • 45 % des sols européens sont aujourd’hui pauvres ou appauvris en matières organiques, surtout dans les pays du sud, mais aussi dans des régions de France, du Royaume-Uni et d'Allemagne ;

En France, les sols ne sont toujours pas protégés par la loi en tant que tels, alors qu'il s'agit d'un des premiers pays agricoles et qu'un quart des sols en sont affectés par l'érosion, ce qui est « une des menaces les plus importantes » pour la qualité des sols car entraînant une « perte irréversible » à échelle de temps humaine (un sol français moyen nécessite environ un an pour qu'y apparaisse environ 100 kilos de terre par hectare en moyenne)[8][réf. incomplète]. Les grandes plaines limoneuses du nord sont les plus suivies par les agronomes et chambres d'agriculture, pour leur érosion, mais « on n'a pas de suivi de la quantité de sol perdue chaque année au niveau du territoire français »[8]. De plus environ « 60 000 hectares disparaissent sous le béton chaque année en France » et les taux de métaux lourds (cadmium, mercure, zinc, …) dans les régions industrielles (par exemple le bassin minier du Nord-Pas-de-Calais) ou très urbanisées (par exemple la région parisienne) sont également préoccupants[8]. Un Groupement d'intérêt scientifique sol (GIS Sol) est né en 2001 pour notamment développer avec les ministères concernés (Agriculture, Écologie) un SIG et des banques de données plus complètes (par exemple, en matière de biodiversité, on sait que plusieurs milliards d'organismes vivants vivent dans les sols français, mais seuls 5 % d'entre eux sont nommés ou connus)[8].

La base de donnée géoréférencée européenne, « Corine Land Cover »[9], montre de profonds et rapides changements dans l’usage des sols de l’UE. Alors que l’agriculture s’intensifie, de 1990 à 2000, plus de 2,8 % des terres ont changé d'affectation au profit de la périurbanisation avec une augmentation sensible du phénomène.

Ce changement concerne de 0,3 % à 10 % du sol, selon les pays de l’UE. La tendance, aggravée par les perspectives de changement climatique est à une aggravation de la dégradation des sols (aggravation étant en quelque sorte auto-entretenue, le sol étant lui-même un puits de carbone). La Commission estime « que la dégradation des sols en Europe va se poursuivre, peut-être à un rythme plus rapide »[10].

À titre d'exemple, en France, avec l’INRA et dans le cadre du Gis Sol chargé du système d'information sur les sols de France, l’IFEN a en novembre 2007 alerté une nouvelle fois[11] sur la diminution (« de 6 Mt/an sur une dizaine d'années ») de la capacité des sols agricoles à stocker le carbone. En 2007, un sol moyen français est - selon l'IFEN - composé de 58 % de carbone organique. La matière organique contribue à une meilleure fertilité, une meilleure résilience écologique et résistance à l’érosionet aux sécheresses[12]. Elle contribue aussi, rappelle l'IFEN, à une moindre circulation de certains contaminants, et à une fonction importante de puits de carbone.

Cas des sols forestiers

Outre qu'ils sont de plus en plus exposés aux incendies dans les régions plus sèches, ils ne sont pas épargnés par les phénomènes d'érosion (facilitée par les grandes coupes rases sur les pentes) et de tassement. Par exemple une étude[13], faite en France sur 48 chantiers de coupes forestières a conclu que (en moyenne) :

  • la surface circulée par les engins était supérieure à 30 % de la forêt (de 7 à 60 %) ;
  • il n'y avait pas de lien entre volume de bois prélevé par hectare et surface circulée ;
  • les cloisonnements n’avaient pas - dans ces cas - diminué la surface circulée (car éloignés de 40 à 50 m, voire 100 mètres, incitant les conducteurs d'engins à en sortir. Ces conducteurs manquaient par ailleurs de formation et information sur les dangers du tassement des sols ;
  • Au total, des tassements moyens ou forts ont été observés sur 76 % des chantiers:
    • 9 chantiers sur 21 ont produit des tassements moyens des sols;
    • 7 chantiers sur 21 ont produit des tassements graves (un tassement est dit grave quand la profondeur atteinte par le pénétromètre est diminuée de 40 à 80 %). Des solutions telles que le débardage par câble ou cheval sont localement expérimentées ou retrouvées, mais elles ne concernent encore qu'une infime partie des surfaces coupées.

Cycles

Le sol est une couche superficielle et vivante, interface entre la croûte terrestre, les eaux superficielles et l'atmosphère. Il résulte de la transformation par le vivant de la roche-mère et des apports organiques.

Au début de la formation d'un sol, la roche-mère est peu à peu colonisée par les microorganismes (bactéries, champignons microscopiques) puis par la végétation (algues, lichens et mousses, puis herbacées, suivies d’une strate d’arbustes et finalement forestière. Parallèlement se forme un premier horizon humifère (dit horizon A), puis des horizons minéraux sous-jacents (horizons B). Chaque étape successive est caractérisée par une certaine association sol/végétation et milieu : l'Écosystème "sol" est considéré comme un des grands compartiments de la biosphère, une des étapes du cycle biogéochimique des éléments (carbone en particulier).

Après un certain temps d'évolution du système sol-végétation, un état d'équilibre dynamique est atteint, dit « climacique ». On parle de progression" avant ce stade.

Les cycles d'évolution des sols ont des durées très variables, entre un millénaire pour les sols à développement rapide (sol à horizon A uniquement) à plus d'un million d'années pour les sols à développement lent. L'observation de la colonisation végétale des ilots rocheux volcaniques émergeant en mer montre que le processus est entamé très rapidement, mais qu'il est freiné ou interdit par les climats trop chauds ou trop froids.

[réf. nécessaire]

Facteurs écologiques influant sur la formation des sols

On reconnaît deux grand types de processus conjointement à l'œuvre ; l'altération et l'humification, qui expliquent notamment l'évolution des sols à développement court.
  • Un premier facteur est le climat général d'une région et la végétation qui lui est associée (biome). Ce facteur permet de définir les grandes zones de végétation et de sol.
  • Un second facteur est plus local, et est relatif à la roche d'origine et aux conditions locales, mais aussi au travail du sol, et notamment au drainage. Il est à l'origine d'associations végétales spécialisées (ex les tourbières).

[réf. nécessaire]

Théorie de la bio-rhexistasie

Henri Erhart a mis en évidence le rôle déterminant du climat et du couvert végétal dans l'altération des roches, et donc dans la formation des sols, avec sa théorie de la bio-rhexistasie.

  • En période de stabilité climatique (biostasie), la végétation couvre les sols. L'érosion mécanique est faible, l'altération est principalement chimique. Les eaux de drainage sont peu chargés en particules, elles entraînent vers les océans des cations (issus de l'altération des silicates) et des composés biologiques solubles qui vont donner, par sédimentation ou précipitation, des dépôts fins (argiles, calcaires...)
  • En période de déséquilibre (rhexistasie) la végétation disparaît, les sols sont érodés, les dépôts lacustres ou marins sont alors constitués de matériaux détritiques grossiers. Des sédiments ferrugineux et bauxitiques apparaissent tandis que les dépôts calcaires et organiques diminuent

Ainsi Erhart a-t-il fait le lien entre pédogenèse et sédimentogenèse marine. Ce modèle s'applique aux différents biomes : forêt boréale, temperée, et équatoriale, steppes, et savanes. Mais il n'explique pas les raisons des déséquilibres qui peuvent affecter la couverture végétale à l'échelle continentale (incendies majeurs, changements climatiques...). La stratification de certains dépôts lacustres ou marins semble corroborer sa théorie : matériel fin puis charbon (résidus de la couverture végétale), enfin matériel plus grossier[14].

Théorie de l'inadaptation des méthodes agricoles

Le microbiologiste et agronome, Claude Bourguignon soutient[15], lui, que la nature a créé des sols pérennes depuis des millions d'années, et que les principales causes de l'érosion des sols et de la désertification, sont leur destruction par les méthodes agricoles de l'homme. Selon lui :

  • L'érosion des sols et la perte des rendements agricoles a été par exemple une cause essentielle de la chute de l'Empire romain.
  • L'agriculture moderne considère le sol comme une masse inerte, alors qu'il contient (ou devrait contenir) la majorité de la vie dans notre écosystème.
  • Un sol vivant est naturellement stabilisé par les mécanismes biologiques qu'il abrite, et de ce fait est peu érodé par l'eau qui le traverse. Les champignons et en particulier leur mycelium ainsi que les déjections des vers de terre, forment en liant le minéral et le vivant, des macro-structures aérées, qui absorbent l'eau au lieu de la laisser ruisseler et sont particulièrement résistantes à l'érosion causée par le ruissellement.
  • Un sol ne devrait jamais être labouré : En effet, la nature ne laboure jamais et crée les sols par dépôt de couches successives. Le labour a comme conséquences de tuer la faune de surface en l'enterrant, et d'empêcher en les étouffant, les mécanismes naturels de formation d'humus, qui nécessitent la présence d'air.
  • Les résultats "fantastiques" de l'agriculture moderne, sont en fait du à l'intoxication des plantes par des excès dus aux engrais chimiques, des certains sels minéraux dans les sols, ce qui fait que la plante qui ne peux pas les éliminer, est obligée de se gorger d'eau pour diluer ces sels en excès.
  • L'attaque par les insecte ravageurs, est en fait la conséquence de ce que ces plantes sont en réalité malade, et qu'elles émettent des signaux chimiques pour que la nature les élimine de façon à éviter leur reproduction.
  • Ces deux derniers points entrainent la nécessité pour l'agriculture moderne, d'utiliser toujours plus de traitements chimiques pour lutter contre la destruction des récoltes, ce qui a pour conséquence de finir de tuer le sol et donc de favoriser son érosion.
  • Pour lutter contre cette érosion, il convient avant tout de mettre fin à l'hérésie du labour, puis de relancer les mécanismes biologique du sol, en le ré-équilibrant et en lui redonnant de quoi créer son humus sous forme d'un apport de bois raméal fragmenté. À terme, il faut redonner aux arbres leur place et leur importance dans le paysage agricole, par exemple, en restaurant des haies de feuillus dans nos paysages. Selon lui, une utilisation réfléchie des successions de culture, et le fait de ne pas toucher à la terre, permet d'éviter facilement les problèmes liés aux espèces inopportunes (mauvaise herbes). Il reconnait cependant que cette forme d'agriculture est plus technique car elle nécessite plus de compréhension des mécanismes du vivant.

Perturbations de l'équilibre d'un sol

Lorsque l'état théorique d'équilibre (climax) est atteint, le sol est théoriquement stable dans le temps, ou tend à accumuler de la matière organique. La végétation et la microfaune du sol produisant l'humus et assurant la circulation ascendante des matières. L'humus et la couverture végétale protègent le sol de l'érosion contre l'eau, la déshydratation et le vent. Les plantes, les bactéries et certains micro-organismes du sol réduisent aussi l'érosion en liant les particules du sol entre elles et aux racines grâce aux complexes argilo-humiquese et à divers mucus ou mucilages sécrétés par les organismes vivants.


Ainsi, toute modification légère est rapidement corrigée et l'équilibre rétabli.
Dans la réalité, les sols sont remodelés ou perturbés par de nombreux « facteurs de perturbation » se produisant occasionnellement.

En cas de destruction importante du sol ou de la végétation (avalanche, incendies, déforestation, labour, inondation de longue durée, salinisation, glaciation, désertification…), etc., la perturbation subie par l'écosystème peut ne pas permettre la résilience du système (à échelle humaine de temps). Le sol peut « mourir », ou l'érosion peut alors être plus rapide que le processus de formation des horizons supérieurs du sol ; il y a « rajeunissement » (« involution » ou « régression » du sol ; i.e. retour en arrière, vers l'état initial).

La régression peut être partielle ou totale (seule la roche-mère mise à nu subsiste alors). Un défrichement de sol en pente, suivi de fortes pluies peut conduire à la destruction complète du sol. À Madagascar des épaisseurs de 3 à 4 m de sol peuvent être ainsi emportés après déforestation, en une saison des pluies là où le sol forestier avait mis des millions d’années à se constituer.

[réf. nécessaire]


Perturbations anthropiques

La dégradation du sol est directement liée aux activités humaines, notamment agricoles. Le remplacement de la végétation primitive climaxique par une végétation secondaire, modifiant les processus de pédogenèse, est l'une des principales perturbations anthropiques (exemple : le remplacement de forêts de feuillus par des landes ou des plantations de pins est source d’acidification, de podzolisation et de dégradation des sols et de l’eau)

A cela s'ajoute la hausse considérable de l'érosion, qui est maintenant le principal facteur de la dégradation des sols. Les aménagements routiers et urbains en augmentant les surfaces imperméables exacerbent les inondations favorisent le ruissellement et donc l'entraînement du sol. La disparition des ripisylves, des méandres et d'espèces telles que le castor qui freinaient le cours de l'eau a également exacerbé les cycles inondations-sécheresses qui sont également facteurs d'érosion et de dégradation des sols. Mais ce sont les transformations récentes de l'agriculture qui ont accéléré l'érosion des sols sur une grande partie de la planète.

L'agriculture augmente les risques d'érosion en perturbant la végétation locale. Parmi les pratiques accélérant l'érosion du sol :

  • surpâturage (y compris en forêt)
  • monoculture
  • culture en rang espacés (maïs industriel, vigne) sans couvert végétal
  • labour
  • sol nu en automne et/ou période hivernale
  • défrichage et déforestation de grandes parcelles pour augmenter la surface agricole
  • sillon dans le sens de la pente
  • usage excessif d'intrants
  • tassement du sol par l'usage d'engins agricoles lourds
  • coupes rases abusives
  • ratissage des litières
  • usage répété et à large échelle du feu

En Europe, le bocage a durant plusieurs siècles produit un compromis très efficace et productif, mais il a été détruit par la mécanisation agricole, l’élevage hors-sol et les remembrements. Le remembrement des années 1960 en France a abouti à l'augmentation de la taille des parcelles et corrélativement à la suppression des haies, des talus et des fossés. Les surfaces en cultures de printemps, encouragées par les subventions, augmentent (tournesol, maïs, betterave) et laissent la terre à nu en hiver. Les terrains pentus sont progressivement colonisés par le vigne.

La destruction des plantes adventices par les herbicides laisse le sol à nu entre les plants cultivés. Les primes européennes favorisent le labour au détriment des prairies, qui partout dans le monde sont surexploitées ou tendent à régresser au profit des terres labourées et de l'élevage hors sol.

La mécanisation qui s'est développée après la guerre 14-18 est à l'origine d'une dégradation des sols liée au tassement ou compactage opéré par les engins agricoles et forestiers, de plus en plus lourds. Le tassement s'oppose à la circulation de l'eau, de l'air et des organismes du sol, les racines des végétaux en souffrent et l'on assiste à des pertes de rendement et de qualité des plantes cultivées, qui dépérissent. Le ruissellement provoqué favorise également l'érosion. La semelle de labour ajoute ses effets à ceux du compactage des sols.

La surexploitation des forêts est aussi un facteur de dégradation ou disparition des humus forestiers.

La fertilisation par engrais minéraux aux dépens de fumure organique augmente le rendement immédiat mais déstructure peu à peu le sol. Des agronomes tels que Claude Bourguignon alertent depuis les années 1970 sur le fait qu'on observe dans le monde une diminution globale progressive de la teneur du sol en matière organique, ainsi qu'une forte diminution de l'activité biologique du sol (en particulier relative à l'augmentation de l'utilisation de produits phytosanitaires).

La dégradation des sols contribuent à la pollution des cours d'eau et à l'eutrophisation des mers.

[réf. nécessaire]

Impacts

  • perte quantitative de sols (phénomène dit de régression);
  • perte de sols de qualité (phénomène de dégradation);
  • Moindre productivité : l'accroissement[Combien ?] récent[Quand ?] de la population mondiale explique une forte pression sur les sols mondiaux.
    Plus de 5,5 milliards d'humains utilisent environ 10% de la surface terrestre pour les productions animales et végétales. La plupart des sols présentent des signes de dégradation biologique, physique, chimiques et d'érosion, limitant leur productivité. Une dégradation est dite légère quand le rendement potentiel est diminué d'environ 10%, et modérée entre 15 et 50%, forte au-delà. Les pays en voie de développement sont les plus touchés, en Asie et en Afrique, mais dans l'hémisphères nord, la productivité est souvent couteusement et artificiellement soutenue par des engrais chimiques et pesticides qui contribuent eux-mêmes à dégrader les sols.
    La situation en matière d'érosion est telle que certains experts évoquent la possibilité que l'agriculture ne puisse rapidement plus en raison de l'érosion nourrir la population mondiale ;
  • moindre fonction de puits de carbone, sachant que le stock de carbone dépend fortement du types de sol, et de son usage (pratiques agricoles notamment). Le stock se fait essentiellement en surface et surtout (sauf dans les sols labourés) dans les 20 premiers centimètres.
    Le sol perd son carbone en culture intensive et le conserve ou en accumule sous forêts et prairies ( à sols et conditions climatiques comparables). La conversion de prairies, tourbières ou forêts en culture diminue fortement le stockage pédologique du carbone dans les sol, et inversement ;
  • Catastrophes naturelles(ou appelé communément ATC [Agriculture Territoire et Citoyennetée] dans certaines régions agricoles…) : coulées de boues, inondations responsables de la mort de nombreux êtres vivants chaque année. L'érosion des sols déshydraté de l'Asie centrale est à l'origine d'une pollution chronique (poussières et aérosols) de l'air en chine de l'Ouest, souvent visible de satellite ;
  • dégradation qualitative et quantitative de la ressource en eaux : l'augmentation des cycles inondations/sécheresse, et de la turbidité des eaux et l'apport d'azote et de phosphore peut être à l'origine de phénomène d'eutrophisation et de développement de microbes pathogènes, ou d'apparition de zones mortes en mer et dans certains lacs. L'entraînement des particules de sols dans les eaux superficielles s'accompagne également de celui des intrants agricoles (pesticides (dont antiparasitaires qui tuent les bousiers qui enfouissaient les excréments animaux) et engrais) et de polluants d'origine industrielle, urbaine et routière (métaux lourds notamment). L'impact écologique des produits phytosanitaires est reconnu mais difficile à évaluer du fait de la multiplicité et des interactions des produits et de leur large spectre d'action. La compaction des sols peut faciliter une fuite des nitrates[16],[17], du sol (et le lessivage des engrais épandus);
  • Contribution aux modifications climatiques, soit localement par modification de l'albédo, des microclimats (thermohygrométrie perturbée par les phénomènes de battance), voire émissions de méthane (sols asphyxiés mais antérieurement riches en matière organique) et de protoxyde d'azote (N2O) ; deux puissants gaz à effet de serre;
  • perte de la diversité biologique : la dégradation des sols entraîne la disparition de la végétation climax et la disparition de nombreux habitats pour la faune. On peut parler ici de disparition d'écosystèmes, et de tout ce que cela implique d'un point de vue environnemental : diminution de la biodiversité végétale, extinction d'espèces animales, diminution de la résilience écologique.
  • Un exemple : Dans le Pas-de-Calais (Nord de la France), dans les années 1980-1990, certains agriculteurs perdaient couramment 10 t/an/ha de sols, avec des "records" atteignant 100 tonnes:an[18] dans les zones les plus fragiles du bassin de la Canche. Non loin de là, dans le bassin versant de la Sensée (Nord-Pas-de-Calais), l'érosion des sols a provoqué le comblement progressif de l'étang de Lécluse qui, entre 1963 et 1980 a vu sa superficie diminuer de moitié passant de 8,7 ha à 4,5 ha.
    Dans le monde, les fossés, canaux et de nombreux barrages dont les eaux eutrophes abritent des bactéries dangereuses (cyanobactéries notamment), doivent être de plus en plus souvent curées, mais leurs sédiments (autrefois des engrais) sont maintenant contaminés par les métaux (dont cadmium des engrais) et des pesticides, au point parfois de tuer durant un ou deux ans les graines qu'on y plante.

[réf. nécessaire]

Mesures de lutte

L'érosion et la dégradation des sols peut être combattues par :

Outils et moyens juridiques

De nombreux pays ont une législation traitant peu ou prou de la protection des sols

Exemple du niveau Européen

Après les Directives sur l’eau et l’air, et après de longues négociation avec les états-membres, le sol européen commence peu à peu à être pris en compte à cette échelle de subsidiarité depuis les années 2000, avec ;

  • une stratégie thématique sur la protection des sols, pronant la protection et la restauration des sols dégradés “ de manière à les ramener à un niveau de fonctionnalité correspondant au moins à leur utilisation actuelle et à leur utilisation prévue, en tenant compte également des implications financières de la restauration des sols ”[19].
  • La Commission a présenté en 2002, une communication[20] qui a recueilli les conclusions favorables des autres institutions européennes.
  • l’adoption (496 voix pour, 161 contre et 22 abstentions) le 14 novembre 2007, par le Parlement européen du projet d'une “ Directive sols ” préparé par la commission, fixant un cadre européen de protection et restauration des sols, avec des objectifs et un calendrier, mais laissant une grande flexibilité aux États-membres dans le choix des moyens d’atteindre ces objectifs. Elle modifie la directive 2004/35/CE du 21 avril 2004 relative à la responsabilité civile environnementale en ce qui concerne la prévention et la réparation des dommages environnementaux.
Carrières de cendre volcanique, El Palmar, île de Tenerife, Canaries. La terre brune, ou « picòn » retirée de cet ancien cône volcanique est épandue sur les champs pour améliorer leur pouvoir de rétention d’eau.

Mesures techniques

Bien que généralement simples, elles nécessitent un minimum de technicité, de compétence en écologie des sols et de temps.


Dans les faits, elles ne sont que rarement appliquées, car méconnues des agriculteurs, ou nécessitant d'importants changements de pratique (ex : abandon du labour) et plusieurs années pour porter leurs fruits. Le génie écologique a démontré sa capacité à permettre de spectaculaires reconstruction de sols. Certaines techniques agronomiques, beaucoup utilisé en agriculture bio, améliorent en quelques années la structure du sol, et les rendements. Des techniques telles que l'apport de Bois raméal fragmenté semblent porteuses d'espoir.
L'apport régulier de matière organique, le non labour et la limitation de l'érosion et du ruissellement (par une couverture végétale permanente et un sol ayant retrouvé une bonne capacité d'infiltration et rétention de l'eau) en sont les principales clés. Ces techniques ne peuvent néanmoins pas intégralement restaurer des sols (incluant leur faune et flore propres) qui ont nécessité plus de 1000 ans et des espèces endémiques disparues pour atteindre leur état de stabilité.

[réf. nécessaire]

Une couche de terre de 20 à 30 centimètres imprégnée d’hydrogels permet de réduire la quantité d'eau nécessaire à la culture en piégeant l’humidité et la relâchant très lentement, ce qui peut transformer un paysage désertique en terre fertile[21].

Voir aussi

Liens externes

Bibliographie

  • « Le tassement des sols agricoles : problèmes actuels et perspectives » (Compte-rendus AAF Vol 74 no 1, Lavoisiers, 06 - 1988)
  • Plaquette AFES Les sols pour l'avenir de la planète Terre (PDF - 4M - 19/02/2008)
  • [1] Le sol, la terre, les champs. Par Claude & Lydia Bourguignon ingénieurs agronomes œnologues et spécialistes de la microbiologie des sols.

Notes

  1. a et b Harrisson, Robert (1992) citant David Attenborougth in Forêts. Essai sur l’imaginaire occidental, Flammarion, p. 18.
  2. Brochure « Le compactage des sols et les pneumatiques » (Agri Réseau / Agriculture, Pêcheries et Alimentation Québec)
  3. Frédéric Lewino, La grande menace de l'érosion
  4. Stratégie thématique en faveur de la protection des sols(Communication de la Commission au Conseil, au Parlement européen (PE), au Comité économique et social européen et au comité des régions)
  5. voir carte
  6. Voir aussi l'article consacré à la Directive sols
  7. AEE (Agence européenne pour l'environnement), 1995, “L'environnement de l'Europe - L'évaluation de Dobríš” - voir chap. 7 sur les sols
  8. a, b, c et d Dominique Arrouays, directeur de l'unité Infosol à l'Institut national de la recherche agronomique (Inra), lors d'une réunion organisée par l'Association des journalistes de l'environnement (AJE), dont les résultats ont été relayés par communiqué AFP
  9. en Publication EIONET
  10. page 3/13 de la Stratégie thématique en faveur de la protection des sols déjà citée
  11. (fr) Voir Bulletin IFEN n°121 de novembre 2007
  12. Cf. meilleure rétention en eau et capillarité
  13. étude faite par l’AFOCEL en 2005 et 2006 ; Cacot E. [2008] ; « Organisation des chantiers d’exploitation forestière ». Rendez-Vous techniques 19 : 26-29 (4 p., 2 fig., 5 tab., 2 réf.).
  14. Henri Erhart, La genèse des sols en tant que phénomène géologique : Esquisse d'une théorie géologique et géochimique, biostasie et rhexistasie, , 1956, Editions Masson. La théorie bio-rhexistasique est présentée succinctement dans les Eléments de Géologie, Charles Pomerol et all., 13e édition, p506-508
  15. (fr) résumé (son intervention dans le film Alerte à Babylone de Jean Druon
    (fr)conférence plus détaillée
    (fr)nouvelle édition Le Sol, la terre et les champs Claude et Lydia Bourguignon Sang de la Terre 2008
  16. Présentation d'un programme de recherche français visant notamment à modéliser le « lessivage du nitrate » (p2/2) / Dégradation physique des Sols agricoles et forestiers liée au Tassement (DST) : impact, prévision, prévention, suivi,cartographie. Inra Orléans (voir p 7/11)
  17. Présentation de premiers résultats du programme DST [ppt]
  18. Source : Chambre d'Agriculture du Pas-de-Calais, François Derancourt
  19. page5/13 de la stratégie
  20. Programme d'action communautaire pour l'environnement (JO L 242 du 10.9 2002, p. 1). COM(2002)179.
  21. La technologie des couches culottes pour sauver la planète sur Slate. Mis en ligne le 2 août 2010, consulté le 2 août 2010

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