Planctoniques

Planctoniques

Plancton

Les diatomées sont une des bases des réseaux trophiques océaniques et d'eau douce. Certaines sont considérées comme bioindicatrices de la qualité de l'eau.
Beroidae, élément du zooplancton.
La couleur des lacs et des mares peut être due à des populations dominantes de plancton.

Homère désignait les animaux errant à la surface des flots par plankton, du grec ancien πλαγκτός / planktós ou « errant »). Selon Hensen (1887), le plancton est l'ensemble des petits organismes vivants dans les eaux douces, saumâtres et salées, le plus souvent en suspension et apparemment passivement : gamètes, larves, animaux inaptes à lutter contre le courant (petits crustacés planctoniques et méduses), végétaux et algues microscopiques.

Le plancton est à la base de nombreux réseaux trophiques. Il constitue la principale nourriture des baleines à fanon, des coquillages filtreurs (dont moules, coques, huîtres, etc. qu'il peut intoxiquer par diverses toxines).
Le zooplancton contribue par ses mouvements verticaux (cycles liés à la lumière et aux saisons) au mélange des couches d'eau. C'est un aspect de la bioturbation qui pourrait avoir été sous-estimé[1],[2]. De tels phénomènes existent également en eau douce (avec le mouvement des populations de daphnies par exemple)..

Sommaire

Définitions scientifiques contemporaines

La définition d'Hensen est perçue comme incomplète car elle n'inclut pas certains êtres. Des scientifiques ont proposé différents termes pour désigner une certaine partie des organismes vivants en milieu aquatique :

  • le necton, capable de se déplacer activement horizontalement et/ou verticalement éventuellement contre le courant : poissons, cétacés, etc.
    Le caractère passif du déplacement est réputé être le seul critère valable pour caractériser l'appartenance au plancton, mais de nombreuses espèces planctoniques sont capables de se déplacer (flagelles, modifications de la densité des cellules...)
  • le tripton, appelé pseudoplancton par Davis (1955)[3], qui rassemble les éléments supposés morts (nécromasse) ou d'origine minérale ou organique (excrêtats, particules issues du plancton mort...).
  • Le seston, qui regroupe l'ensemble des particules, de toute nature, mortes ou vives, organiques ou inorganiques en suspension dans l'eau (seston = tripton + plancton). Le seston est notamment formé des excrétats du plancton et des autres organismes, dont leurs excréments.

Types de plancton

Pterotracheidae (Zooplancton)
Larve planctonique de poisson d'eau froide (Zooplancton)
Animalcule planctonique contribuant aux miro-mélanges (bioturbation) de l'eau
  • Le plancton végétal, ou phytoplancton (du grec φυτόν / phutón ou « plante »), se construit à partir d'éléments minéraux. Hormis pour le nanoplancton et le picoplancton, il est essentiellement présent dans les couches superficielles de la mer (de 0 à 15 mètres de profondeur), où il accomplit sa photosynthèse. C'est-à-dire qu'il absorbe des sels minéraux et du dioxyde de carbone pour rejeter de l'oxygène sous l'effet de la lumière.
  • Le plancton animal, ou zooplancton (du grec ζῷον / zõio ou « animal »), se nourrit de matière vivante, certains espèces étant herbivores et d’autres carnivores. Il remonte la nuit vers la surface pour se nourrir de phytoplancton et redescend pendant la journée vers les eaux plus profondes. Il échappe ainsi aux prédateurs et économise de l’énergie car la température est moins élevée. Ce mouvement du zooplancton, qui contribue au brassage des eaux et des couches de températures variées ou diversement oxygénées est appelé migration verticale quotidienne ou nycthémérale — un nycthémère, du grec νυκτ- / nukt-, nuit, et ἡμέρα / hêméra, jour, désigne une durée de 24 heures. Certains prédateurs du plancton suivent ces mouvements. Sur certains littoraux, et berges urbanisées, il est possible que certaines espèces de zooplancton puissent être affectées par la pollution lumineuse.
  • Le nanoplancton (20-2 µm) et le picoplancton (2-0,2 µm), et femtoplancton, ou le virioplancton (virus marins essentiellement) découverts plus récemment, constituent une part encore mal connue de la biodiversité marine. Ces catégories de taille incluent de nombreuses espèces qui semblent pouvoir vivre à grande profondeur où l'intensité lumineuse est extrêmement faible. Certaines de ces espèces semblent avoir des rythmes de reproduction très lents ainsi qu'une durée de vie exceptionnellement longue (caractéristique qu'on retrouve aussi chez des organismes plus complexes des grandes profondeurs, dont certains poissons des grands fonds).

Le plancton désignant l'ensemble d'organismes différents, il est incorrect de dire « un plancton » : on devrait préciser de quel organisme (taxon) on parle.

Productivité

La productivité primaire, réalisée par le phytoplancton (algues planctoniques), dépend de la disponibilité en nutriments (azote, phosphore et selon les espèces de phytoplancton silicium), de la température et de la lumière dans l'eau. La productivité secondaire est liée à la biomasse du zooplancton (plancton animal) et à son efficacité de croissance.

La productivité, liée à la biomasse, est plus élevée dans l’eau froide, généralement plus dense et riche en nutriments. Elle est aussi souvent plus forte en milieu côtier soumis aux enrichissement en nutriments des fleuves.

Malgré une augmentation de productivité dans le nord, autour des pôles, et malgré quelques blooms spectaculaires locaux, l’activité planctonique semble en diminution à échelle planétaire de 1999 à 2006.
Le plancton est à la base de nombreux réseaux trophiques.

Plancton et chaîne alimentaire

Le plancton est le premier maillon des chaînes alimentaires marines. Le phytoplancton est mangé par le zooplancton et par une multitude d’organismes marins. Ils seront la proie de petits prédateurs eux-mêmes chassés par de grands prédateurs. Certains gros animaux comme la baleine et le requin pèlerin se nourrissent directement de zooplancton. Dans les eaux douces et plus encore dans les eaux saumâtres, le phytoplancton est une des bases principales des chaînes alimentaires.

Dans les eaux particulièrement turbides, chargées de particules sableuses ou de vases en suspension, des types particuliers de plancton apparaissent, qui colonisent les particules en suspension, permettant une biomasse élevée malgré le fait que la turbidité ne permette pas la pénétration du soleil. Ces eaux sont généralement soumises à une agitation et ou à des courants importants qui les oxygènent.
Un cas particulier est celui du bouchon vaseux des estuaires, qui se meut au rythme des marées et des afflux d'eaux douces. Il sert de nurserie ou de protection et de zone de nourrissage aux alevins de certaines espèces. Il peut aussi concentrer certaines pollutions. La "pluie" ou "neige" que constituent les cadavres ou excréments de zooplanctons qui descendent passivement vers les fonds marins a une grande importance pour l'alimentation des espèces de grands fonds et pour les cycles biogéochimiques.

Certaines espèces planctoniques peuvent produire des toxines puissantes (dont botuliques), lesquelles peuvent être concentrées dans la chaîne alimentaire par les coquillages, organismes filtreurs ou certains poissons. Ces mêmes organismes peuvent aussi et en sus concentrer des toxiques modifiés et/ou bioaccumulés par le plancton tel le mercure méthylé, dont la quantité tend à augmenter régulièrement chez les poissons prédateurs et cétacés, de manière très préoccupante pour la santé des consommateurs humains et des écosystèmes marins.

Dans certaines conditions (apports élevés de nutriments, généralement des matières organiques, nitrates ou phosphates), un "excès" de plancton conduit à une situation d'eutrophisation, voire de dystrophisation, c'est-à-dire de mort ponctuelle ou durable de la plupart des organismes aquatiques. L'ONU a identifié une centaine de zones mortes (Dead zone) dont en mer Baltique. Dans ces zones, l'eutrophisation peut être combinée à d'autres types de pollution ou de perturbation.

Plancton et nécromasse

Floraison planctonique (bloom) en aval d'un estuaire au large de l'Argentine, signe d'une productivité biologique intense, mais qui peut conduire à une zone d'anoxie la nuit, ou à une production de toxines (détecté par le satellite Aqua de la NASA à l'aide du spectroradiomètre MODIS (Moderate Resolution Imaging Spectroradiometer))

Le plancton est à l'origine d'une biomasse considérable, mais aussi d'une nécromasse qui constitue une part importante de certains sédiments (la craie est la nécromasse fossile de plancton marin). La sédimentation de la nécromasse planctonique est un des puits de carbone planétaire, mais aussi une des voies qui a permis la détoxication des océans primitifs trop riches en certains sels, de calcium notamment, pour permettre une vie complexe sur les modèles que nous connaissons.

Plancton et climat

Le plancton intervient dans le cycle du carbone, via la photosynthèse, mais aussi en émettant après sa mort des molécules soufrées qui contribuent à la nucléation des gouttes d'eau, c'est-à-dire à la formation des nuages et des pluies. Le diméthylsulfure est le plus abondant des composés biologiques soufré émis dans l'atmosphère et il l'est essentiellement à partir des océans. Il est dégradé dans l'atmosphère marine ; principalement en dioxyde de soufre, diméthylsulfoxyde (DMSO), acide sulfonique et acide sulfurique qui forme des aérosols dont les molécules se comportent comme des noyaux de condensation de nuages. Le plancton a ainsi une influence sur la formation des nuages, et secondairement sur les apports terrigènes à la mer par le ruissellement.(voir article sur le diméthylsulfure).

La biomasse planctonique par litre d'eau est en moyenne bien plus importante dans les eaux froides, même sous la calotte glaciaire, que dans les eaux chaudes tropicales, si elles sont éloignées de sources d'oligoéléments tels que les apports volcaniques des atolls coralliens.
Les phénomènes de remontée d'eau des profondeurs (« upwellings ») et d'endo-upwellings sont à l'origine de la répartition des masses de planctons qui conditionnent les espèces des réseaux trophiques supérieurs. Les modifications climatiques, en affectant les courants marins et la température de l'eau (et donc sa teneur passive en oxygène) pourraient modifier la répartition et la nature des masses de plancton et donc des ressources halieutiques. Des modifications importantes sont observées depuis près d'un siècle, mais la part des impacts de la surpêche et des pollutions (nitrates, pesticides, métaux lourds, turbidité, pollution thermique..) dans ces phénomènes est encore difficile à déterminer. Le plancton pomperait aujourd'hui environ un tiers du CO2 anthropique, soit autant que tous les végétaux terrestres et les plantes aquatiques, le dernier tiers étant celui qui est responsable de l’augmentation des gaz à effet de serre dans l'atmosphère[4].

Menaces sur le plancton

Selon un article de Michael Behrenfeld, de l'Université de l'Oregon, publié par le journal Nature (7 décembre 2006), l’imagerie satellitaire, qui permet par exemple d'évaluer la quantité de chlorophylle dans l'eau, montre que 60 % environ des mers de 1998 à 1999 ont eu un niveau d'activité planctonique très bas, en raison du phénomène El Niño, avant de récupérer avec La Niña puis de chuter régulièrement : de 1999 à 2005 (durant 6 ans). L'activité planctonique a fortement et régulièrement chuté, l’océan perdant – en moyenne, et chaque année - une capacité d’absorption de 190 millions de tonnes (Mt) de carbone par rapport à l'année précédente. Si cette tendance devait être confirmée dans les années à venir, le réchauffement climatique pourrait être accéléré. Ce sont en effet environ 695 Mt de CO2, soit plus que le total des émissions annuelles de la France, qui n’ont pas - en 6 ans - été absorbées dans les zones tropicales et équatoriales, suite au recul de l’activité planctonique.

Le réchauffement est la cause possible la plus souvent citée, en raison de la « stratification » des eaux qu’il engendre, laquelle implique une moindre remontée de sels nutritifs pour le plancton. La partie mobile du plancton contribuant elle-même à la formation des nuages, et au mélange des couches thermiques et de densité différente, ce cycle pourrait s’auto-entretenir, d’autant que les poissons, qui contribuent aussi au mélange des couches de surface sont également de moins en moins nombreux, alors que les zones marines mortes sont en augmentation.

Scott Doney[5], également dans la revue Nature, précise que, dans le même temps, la productivité a augmenté aux hautes latitudes en raison du réchauffement des eaux de surface, mais sans pouvoir compenser le déficit de la zone tropicale, le gain de productivité étant limité et concernant un volume d’eau très inférieur. Il faut ajouter cet effet à ceux de l’acidification des océans, à ceux de leur surexploitation dont les impacts sont mal compris, à ceux du blanchiment ou de la mort des coraux, et à ceux de l’eutrophisation et de la turbidité anormale des estuaires et de vastes zones marines. Le plancton marin pourrait être mis à mal avant 2050, voire avant 2030 dans l'océan Austral. En Mer du Nord, depuis 1961, la part du plancton d’eau chaude ne cesse de croître par rapport à celle du plancton d’eau froide.

Des régressions importantes de phytoplancton semblent être déjà survenues, notamment il y a environ 55 millions d'années, à une période justement caractérisée par une augmentation des taux de gaz à effet de serre (de cause inconnue).

Les tailles

Le plancton est souvent classé selon sa taille, liée au type de filtre utilisé pour le recueillir :

  • mégaplancton : 20-200 cm (ex : grosses méduses, colonies de salpes)
  • macroplancton : 2-20 cm
  • mesoplancton : 0,2 mm-2 cm (visible à l'œil nu)
  • microplancton : 20-200 μm (filtre en toile)
  • nanoplancton : 2-20 μm (filtre à café)
  • picoplancton : 0,2-2 μm (bactéries et eucaryotes)
  • femtoplancton : <0,2 μm (essentiellement des virus)

Le nanoplancton et les planctons de tailles inférieures ont seulement été découverts dans les années 1980. Le plus gros organisme planctonique est la méduse Chrysaora. Elle mesure 1 m de diamètre et 6 m de long.

Anecdote

  • En 1952, Alain Bombard a traversé l'Atlantique en s'alimentant exclusivement de poissons, de planctons, d'eau de mer et d'eau de pluie. Il voulait prouver qu'une personne peut survivre longtemps sur un canot pneumatique de moins de cinq mètres avec pour seules ressources les produits de la mer et du ciel.

Notes et références

  1. études conduite par Katija et Dabiri au California Institute of Technology de Pasadena, relatée par la revue Nature (Brève NatureNews publiée on Line 2009/07/29, Nature doi:10.1038/news.2009.745) et Article Nature ; William K. Dewar ; Oceanography : A fishy mix ; Nature 460, 581-582 (2009/07/30) ; doi:10.1038/460581a ; online 2009/07/29 (payant)
  2. Bibliographie
  3. C. C. Davis, 1955. The marine and fresh-water plankton, Michigan State Univ. Press, 562 p.
  4. Michael Behrenfeld, Université de l'Oregon, in le journal Nature du 7 décembre 2006
  5. Woods Hole Oceanographic Institution

Voir aussi

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Voir « plancton » sur le Wiktionnaire.

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Liens externes

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