Phèdre (Racine)

Phèdre (Racine)
Phèdre
Édition Claude Barbin, 1678
Édition Claude Barbin, 1678

Auteur Jean Racine
Genre Tragédie
Pays d'origine Drapeau de France France
Lieu de parution Paris
Éditeur Jean Ribou
Date de parution 1676
Date de la 1re représentation 1er janvier 1677
Lieu de la 1re représentation Hôtel de Bourgogne
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Phèdre est une tragédie en cinq actes et en vers de Jean Racine créée et représentée pour la première fois le 1er janvier 1677 à l’Hôtel de Bourgogne. La pièce comporte 1 654 alexandrins.

Sommaire

Personnages

  • Thésée, fils d’Égée, roi d’Athènes
  • Phèdre, femme de Thésée, fille de Minos et de Pasiphaé
  • Hippolyte, fils de Thésée et d’Antiope, reine des Amazones
  • Aricie, princesse de sang royal, fille de Pallas écarté du trône par Égée
  • Œnone, nourrice et confidente de Phèdre
  • Théramène, gouverneur d'Hippolyte
  • Ismène, confidente d'Aricie
  • Panope, femme de la suite de Phèdre
  • Gardes

Argument

La scène est à Trézène, ville du Péloponnèse.

Acte I (5 scènes)

Hippolyte, fils de Thésée, annonce à son confident Théramène son intention de quitter Trézène pour fuir sa belle-mère Phèdre qu'il n'aime pas et surtout pour fuir son amour pour Aricie, sœur des Pallantides, un clan ennemi. Phèdre, épouse de Thésée, avoue à Œnone, sa nourrice et confidente, la passion qu’elle ressent pour son beau-fils Hippolyte. On annonce la mort de Thésée.

Acte II (6 scènes)

Hippolyte propose à Aricie de lui rendre le trône d'Attique, laissé vacant par la mort de Thésée, et lui avoue son amour. Leur entretien est interrompu par Phèdre, venue prier Hippolyte de prendre soin de son fils mais qui finit par lui révéler son amour. Comprenant son erreur, elle prend l'épée d'Hippolyte pour en finir avec la vie mais Œnone l’arrête. Théramène annonce qu’on a peut-être vu Thésée.

Acte III (6 scènes)

Thésée, qui n’est pas mort, arrive à Trézène et s’étonne de recevoir un accueil si froid : Hippolyte, qui envisage d’avouer à Thésée son amour pour Aricie, évite sa belle-mère ; Phèdre est submergée par la culpabilité.

Acte IV (6 scènes)

Œnone, qui craint que sa maîtresse ne se donne la mort, déclare à Thésée qu’Hippolyte a tenté de séduire Phèdre en la menaçant, donnant pour preuve l'épée qu'elle a conservée. Thésée bannit Hippolyte et prie Neptune, dieu de la mer, de le venger. Phèdre veut le faire changer d’avis mais elle apprend qu’Hippolyte aime Aricie. Furieuse d’avoir une rivale, elle renonce à le défendre.

Acte V (7 scènes)

Hippolyte part après avoir promis à Aricie de l’épouser hors de la ville. Thésée commence à avoir des doutes sur la culpabilité de son fils, mais la nouvelle de sa mort, causée par un monstre marin, survient. Après avoir chassé Œnone qui, de désespoir, s’est jetée dans les flots, Phèdre révèle la vérité à Thésée ; ayant pris auparavant du poison, elle s’effondre sur scène.

Analyse de l'œuvre

L’œuvre de Racine s’inscrit dans le registre tragique par le caractère de Phèdre à inspirer terreur mais aussi pitié (registre pathétique, on parle de catharsis, ou purgation des passions), accablée par le poids de l’hérédité qui la condamne dès l’acte I.

Contexte historique

Phèdre est la dernière tragédie profane de Racine avant un long silence de douze ans au cours duquel il se consacrera au service du roi et à la religion. Une nouvelle fois, il choisit un sujet déjà traité par les poètes tragiques grecs et romains.

Phèdre a été victime de la création simultanée, sur le même thème, d’une pièce de Nicolas Pradon aujourd’hui oubliée qui donna lieu à une querelle littéraire qui, elle-même, déboucha sur l’Affaire des sonnets. Gabriel Gilbert avait déjà publié un Hypolite ou le garçon insensible (1647).

Sources

Dans la préface de 1677, Racine évoque ses sources, et principalement le poète grec Euripide (484-406 av. J.-C.), qui dans sa tragédie Hippolyte porte-couronne (428 av. J.-C.) avait traité le mythe de Phèdre après l’avoir traité dans Hippolyte voilé aujourd’hui perdu. Dans la pièce conservée, le héros est poursuivi par la déesse de l'amour, Aphrodite, qui dès les premiers vers clame sa fureur d'être délaissée par le jeune homme au profit d'Artémis. Dans Phèdre, Vénus s'acharne contre la famille de la reine dont l'ancêtre, le Soleil, avait révélé les amours coupables de la déesse et de Mars. La fatalité prend ainsi la forme de cette haine implacable attachée à toute la descendance du Soleil.

Sénèque, philosophe et poète romain du premier siècle après J.-C., est également l'auteur d’une Phèdre. Le récit de Théramène, dans toute son horreur, doit beaucoup à cette source sur laquelle Racine insiste moins. Les ravages de la passion comme maladie de l'âme, ont été également explorés par les Anciens. Citons encore les Héroïdes d’Ovide, et l’Énéide de Virgile, en particulier Les Amours de Didon et Énée.

Réception

Tout dans Phèdre a été célébré : la construction tragique, la profondeur des personnages, la richesse de la versification et l’interprétation du rôle-titre par la Champmeslé. Contrairement à Euripide dans Hippolyte porte-couronne, Racine fait mourir Phèdre à la fin de la pièce, sur scène : elle a donc eu le temps d’apprendre la mort d’Hippolyte. Le personnage de Phèdre est l’un des plus remarquables des tragédies de Racine. Elle est à la fois coupable du malheur des autres et victime de ses pulsions.

Certains vers sont devenus des classiques. On a tellement célébré la musicalité de l’alexandrin « la fille de Minos et de Pasiphaé » que certains s’en sont moqués. Racine ne fait pourtant jamais de la poésie pour la seule beauté des sons. La généalogie de Phèdre est pleine de sens : elle a hérité de sa mère l’intensité de ses désirs et craint après sa mort le jugement de son père, qui est juge aux Enfers.

Par la suite, Phèdre est devenue peu à peu l’une des pièces les plus célèbres de Racine. Si elle n’est pas autant étudiée au lycée que Britannicus ou Andromaque, c’est l’une des tragédies du XVIIe siècle les plus souvent représentées sur la scène.

Citations

  • « Tout m’afflige et me nuit et conspire à me nuire. » - Phèdre (I, 3, v. 161)
  • « Quand tu sauras mon crime et le sort qui m’accable,
    Je n’en mourrai pas moins, j’en mourrai plus coupable. »
    - Phèdre (I, 3, v. 241-242)
  • « Je le vis, je rougis, je pâlis à sa vue,
    Un trouble s’éleva dans mon âme éperdue. »
    - Phèdre (I, 3, v. 273-274)
  • « C’est Vénus toute entière à sa proie attachée. » - Phèdre (I, 3, v. 306)
  • « Ariane, ma sœur, de quel amour blessée
    Vous mourûtes aux bords où vous fûtes laissée ! »
    - Phèdre, I, 3
  • « C'est peu de t'avoir fui, cruel, je t'ai chassé .
    J'ai voulu te paraître odieuse, inhumaine,
    Pour mieux te résister, j'ai recherché ta haine.
    De quoi m'ont profité mes inutiles soins ?
    Tu me haïssais plus, je ne t'aimais pas moins. »
    - Phèdre (II, 5, v. 685-688)
  • « Ses yeux, qui vainement voulaient vous éviter,
    Déjà pleins de langueur ne pouvaient vous quitter.
    Le nom d'amant peut-être offense son courage.
    Mais il en a les yeux, s'il n'en a le langage. »
    Ismène à propos d'Hippolyte (II, 1, v. 411-414)

Les deux citations suivantes sont célèbres pour leur métrique parfaite. La seconde n’est constituée que de monosyllabes.

  • « La fille de Minos et de Pasiphaé. » - Hippolyte (I, 1, v. 36)
  • « Le jour n’est pas plus pur que le fond de mon cœur. » - Hippolyte (IV, 2, v. 1112)

Quelques traductions de Phèdre

  • En italien : Giuseppe Ungaretti (1950)
  • En espagnol : Pablo Olavide (1786), Carlos Pujol (1982), Rosa Cachel (1983), Dolores Fernández Lladó (1985), Nydia Lamarque, Paloma Ortiz García (2003).
  • En anglais : Robert Lowell (1961), Wallace Fowlie (1962), J. Cairncross (1982), Ted Hughes (vers libre, 1998), Charles Sisson (2001), Timberlake Wertenbaker (2009)
  • En allemand : Friedrich von Schiller (1805), Ernst August Wilhelm Gräfenhan (1825), Wilhelm Willige (1956), Rudolf Alexander Schröder (1958), Wolf Steinsieck (1995)
  • En néerlandais : H. van Bracht (1715), Hans Bakx (1982)
  • En danois : J. H. Schønheyer (1790), C. E. Falbe Hansen (1945), Erik Rosekamp (2007)
  • En norvègien : Halldis Moren Vesaas (1960, première traduction), Jon Fosse (2005)
  • En suédois : Gudmund Jöran Adlerbeth (1797, première traduction), Karl August Hagberg (1906), Thomas Kinding (1964) [ces trois en alexandrins], Göran O. Eriksson (1996), Anders Bodegård (2006)
  • En Arabe: فيدر

Postérité

Annexes

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