MtDNA

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Génome mitochondrial

Les mitochondries sont des organites présents dans la grande majorité des cellules eucaryotes et sont issues de l'endosymbiose d'une alpha-protéobactérie il y a environ deux milliards d'années. Les mitochondries ont conservé leur propre génome. Celui-ci, bien que très réduit par rapport à celui d'une bactérie, est essentiel au bon fonctionnement de ces organites. Le génome mitochondrial est particulièrement utilisé en génétique des populations humaine, ou en agronomie. Il se distingue du reste du génome des cellules eucaryotes par son asexualité, qui est à l'origine du phénomène de stérilité mâle cytoplasmique.

Confiné à l'intérieur des mitochondries, organites qui produisent l'énergie cellulaire, le génome mitochondrial (ADNmt) est distinct de l'ADN contenu dans le noyau. La transmission de cet ADN est généralement dite non-mendélienne, dans la plupart des cas il est transmis par la mère. Mais il existe de nombreuses exceptions chez les plantes, les champignons et même chez les animaux.

Sommaire

Évolution

Origine du génome mitochondrial

Il est maintenant admis que les mitochondries proviennent de l'endosymbiose d'une α-protéobactérie il y a environ 2 milliards d'années.[1]

Altération du génome mitochondrial

Même si de nombreuses fonctions vitales (métabolisme de l’ADN, de l’ARN, synthèse protéique, respiration, etc.) se déroulent toujours au sein des mitochondries, les génomes des bactéries ancestrales ont été fortement altérés eu cours de l'évolution. Ainsi, le génome mitochondrial ne contient aujourd'hui qu’une très faible partie du génome originel. Les séquences éliminées du génome mitochondriale ont été soit transférées vers le noyau, soit perdues définitivement.

Recombinaison et réparation de l'ADNmt

Il est souvent dit que les organites se reproduisant par reproduction asexuée, il n'y a pas de recombinaison de leur génomes. Or, la recombinaison permettant d'éliminer les mutations délétères des génomes, le transfert des gènes mitochondriaux vers le génome nucléaire serait avantageusement sélectionné car permettant la recombinaison de ces gènes (une fois intégrés au génome nucléaire) et donc l'élimination des mutations défavorables. Cependant ceci n'est pas une régle absolue, la recombinaison des génomes mitochondriaux existe, mais sa fréquence varie énormément d'une espèce à l'autre.

Maintien de certains gènes mitochondriaux

Cependant, on observe qu'une partie des gènes mitochondriaux n'ont jamais été transféré vers le noyau dans l'évolution des Eucaryotes. Ceci suggère que le transfert de ces gènes vers le noyau est contre-sélectionné ou alors très difficile à mettre en place. Il existe deux barrières principales au passage de ces gènes vers le noyau.

Tout d'abord, il existe des différences entre le code génétique de l'hôte et celui du symbionte. Ainsi, une séquence nucléotidique transférée de la mitochondrie vers le noyau ne donnera pas forcément la même protéine, et le transfert de gène peut être associé à une perte de fonction de la protéine.

De plus, un certain nombre de protéines qui n'ont jamais été transférées au cours de l'évolution montre une grande hydrophobicité. Ceci pourrait entraver le passage de ces protéines à travers les membranes des organites, rendant le transfert de gène difficile[2].

Structure et composition

Les génomes mitochondriaux ont subi de très nombreuses modifications. Ceci est flagrant au niveau de leurs tailles puisque le génome d’une bactérie du genre Rickettsia fait environ 1 mégabase et comporte près de 1000 gènes, alors que le génome mitochondrial humain ne fait que 16kb, et celui d’Arabidopsis thaliana 367kb. Les génomes mitochondriaux sont particulièrement hétérogènes, certains comme ceux des chaetognathes (vers sagittés, métazoaires constituant une grande part du plancton) ne conservant qu'une dizaine de gènes sans aucun ARNt sur à peine 11kb, d'autres comme celui du maïs dépassant les 700kb et portant plus de 100 gènes. D'importantes modifications ont également eu lieu au niveau de sa composition fine ou de son fonctionnement. Ainsi la majorité des génomes mitochondriaux connus sont transcrits par une ARN polymérase de type virale et non bactérienne. Seule exception connue à ce jours le génome mitochondrial de Reclinomonas americana qui contient les séquences de sous-unités d'une ARN polymérase de type bactérien.

Le génome mitochondrial est extrêmement dynamique, il est majoritairement hétéroplasmique chez les plantes et les animaux, c'est-à-dire qu'il coexiste différentes formes au sein de la même mitochondrie[3]. Il peut être trouvé sous forme circulaire ou linéaire, double ou simple brin. Ces différentes formes sont, entre autres, les produits de la réplication du génome mitochondrial par un mécanisme de cercle roulant, mais aussi d'un mécanisme de réplication recombinaison-dépendant, similaire à la réplication du phage T4. Les génomes mitochondriaux sont habituellement représentés sous forme circulaire, le "cercle maître" qui correspond à la molécule décrivant le mieux le génome.

Chez Arabidopsis thaliana, cette molécule fait 367kb, elle est riche en petites séquences répétées, 22 paires de répétitions identiques de plus de 100pb, dont deux majeures de 6,5 et 4,2kb (écotype C24). Seules ces deux régions sont impliquées dans des événements fréquents de recombinaison, créant 3 formes circulaires de 134, 233 et 367kb. Le ratio entre les différentes formes de génome peut varier, mais généralement une forme est majoritaire, les petites molécules d'ADN qui peuvent être produites lors de ces événements sont appelés sublimons. Les événements de recombinaison peuvent également être initiés en dehors des grandes séquences répétées, ces changements peuvent être impliqués dans des phénomènes de stérilité mâle cytoplasmique, ou chez les mammifères dans des maladies génétiques.

Composition en gènes

On distingue trois grands types dans la composition génique des génomes mitochondriaux. Chez les levures et les plantes, la taille et l'organisation du génome mitochondrial sont très variables. Chez les mammifères, le génome mitochondrial est trés compact. Enfin, il est compact, de taille variable et possède une zone riche en adénine et thymine chez les arthropodes.

Le génome mitochondrial humain

Article détaillé : Génome mitochondrial humain.
Organisation de l'ADN mitochondrial des mammifères

Chez l'homme, le génome mitochondrial humain est circulaire. Il comporte 37 gènes, lesquels codent 13 protéines, 22 ARN de transfert et 2 ARN ribosomaux. Les gènes sont disposés les uns à la suite des autres, et ne sont séparés que par de courtes régions non codantes. Les gènes codant des protèines sont séparés les uns des autres par des gènes codant des ARN de transfert. Une région de régulation de 600pb comporte les origines de transcription et une origine de réplication.

Les gènes du génome mitochondrial humain
Gènes codant:
une protéine un ARNt un ARNr
ND1 TRNF TRND RNR1
ND2 TRNV TRNK RNR2
COX1 TRNL1 TRNS1
COX2 TRNI TRNP
ATP8 TRNQ TRNE
ATP6 TRNM TRNT
COX3 TRNW TRNL2
ND3 TRNA TRNS2
ND4L TRNN TRNR
ND4 TRNA TRNG
ND5 TRNN
ND6 TRNC
CYTB TRNY

Le génome mitochondrial de la Drosophile

Chez la drosophile, le génome mitochondrial composite mesure 19,5kb. Il comporte 37 gènes, codant 13 protéines, 22 ARN de transfert et 2 ARN ribosomaux. Les mitochondries possèdent les mêmes gènes chez la drosophile et chez les mammifères, mais la disposition des gènes dans le génome mitochondrial est différente chez les deux espèces. Les séquences codantes représentent 57% du génome.

Le génome mitochondrial de levure

Le levure de boulanger possède un génome mitochondrial long de 86kb comportant 43 gènes, codant 19 protéines, 25 ARN de transfert et 2 ARN ribosomaux. Les séquences codantes représentent 23% du génome.

Les gènes du génome mitochondrial de levure
gènes codant une protéine ARNt(Codon) ARNr Autre
COX1 Pro(UGG) Try(UCA) RRN15S RPM1
AI5_α Glu(UUC) Ser(UGA) RRN21S
AI4 Thr(UGU) Cys(GCA)
AI3 His(GUg) Leu(UAA)
AI1 Gln(UUG) Lys(UUU)
AI5_β Arg(UCU) Gly(UCC)
ATP8 Asp(GUC)
ATP6 Arg(ACG)
COB Ile(GAU)
BI4 Asn(GUU)
BI3 Phe(GAA)
BI2 Thr
OLI1 Val(UAC)
VAR1 Met(CAU)1
SCEI Met(CAU)2
COX2 Tyr(GUA)
Mat Ala(UGC)
COX3 Ser(GCU)

Le génome mitochondrial d'Arabidopsis thaliana

Chez Arabidopsis thaliana, le génome mitochondrial fait 367kb, il comporte en tout 60 gènes, dont 33 codant des protéines, 3 codant des ARN ribosomaux et 21 codant des ARN de transfert[4]. Ces gènes ne couvrent que 10% du génome, 10% supplémentaires sont représentés par 74 ORFs de plus de 300 paires de bases sans homologie particulière avec des gènes connus, et pour lesquels aucune protéine produite n'a été observée jusqu'à présent. Les gènes sont souvent organisés en petites unités de transcription, ce qui confère un aspect très particulier au génome mitochondrial. Celui-ci présente une faible densité de gènes, environ un gène pour 8kb, et le regroupement de ces gènes, sur de petites séquences, crée des zones du génome pouvant aller jusqu'à 27kb ne comportant que des ORFs putatives ou quelques ARNt. Trois zones répétées couvrent 7% du génome, 8% se retrouvent dans les introns, 5% représentent des traces de transposons ou sont d'origine chloroplastique, laissant donc 60% du génome sans origine ou fonction évidente. La collection d'ARN de transfert n'est pas complète, elle ne couvre que 14 acides aminés et 22 codons, les ARNt correspondant aux six acides aminés restant doivent donc être importés du noyau (alanine, arginine, histidine, leucine, phénylalanine, thréonine et valine). Il est à noter que sur les 22 ARNt compris dans le génome mitochondrial, 4 sont d'origine chloroplastique. Sur les 33 gènes codant des protéines, 6 codent des protéines ribosomales, un gène code une maturase, une protéine n'a pas encore de fonction connue (mttB), et tous les autres gènes codent des sous-unités de la chaîne de transfert d'électrons ou des protéines impliquées dans la synthèse du cytochrome C. Il n'y a donc aucun gène relatif à la transcription, ni ARN polymérase ni facteur de transcription, toutes les protéines impliquées dans ces processus doivent donc être importées du noyau.

Variation du code génétique

Les mitochondries utilisent un code génétique différent du code génétique universel, utilisé par la très grande majorité des organismes vivants. En fait il existe 17 codes génétiques différents, dont 11 pour les mitochondries de différents organismes[5]. Il faut noter que les associations entre espèces et code génétique mitochondrial sont en constante évolution au grès des séquençage de nouveaux génome mitochondrial. Par exemple le code n°5 appelé "code mitochondrial des invertébrés" est confirmé pour des espèces comme Caenorhabditis elegans ou la drosophile (avec l'exception de l'absence de codon AGG), mais par exemple, ce n'est pas le cas pour les oursins qui ont leur propre code (n°9).

Exceptions au code génétique universel chez différentes mitochondries
Organisme Codon Standard Variation
Vertébré AGA, AGG Arginine Stop
AUA Isoleucine Methionine
UGA Stop Tryptophane
Invertebrés AGA, AGG Arginine Serine
AUA Isoleucine Methionine
UGA Stop Tryptophan
Levure AUA Isoleucine Methionine
UGA Stop Tryptophane
CUA Leucine Threonine

La stérilité mâle cytoplasmique

La stérilité mâle cytoplasmique est un phénomène par lequel une plante dioïque se retrouve dans l’incapacité de produire des gamètes mâles fertiles. Le terme cytoplasmique évoque le fait que le phénotype est provoqué par un facteur porté par le génome mitochondrial. Ce processus a deux intérêts majeurs en agronomie : faciliter la production de descendance hybride chez des plantes naturellement autogame, et bénéficier ainsi du phénomène de vigueur hybride ou hétérosis, mais aussi pour les semenciers de distribuer des plantes ne pouvant donner une descendance utilisable pour un nouveau semis. Dans la nature le phénomène de stérilité mâle cytoplasmique est contre balancé par l’apparition de facteurs de restauration de la fertilité, codés par le noyau.

Analyses génétiques

Le génome mitochondriale est utilisé pour deux types d'analyse génétique au moins. Elle permet à l'étude des filiations mère-enfant d'une part et d'autre part à la datation des lignées. Ainsi des études du début des années 2000 ont montré que toutes les mitochondries humaines auraient une origine africaine commune datée de environ -150 000 ans[Note 1].

Le principe de ces datations est que l'ADN mitochondriale mute spontanément et uniformément au fil des générations. Ainsi la fréquence des différences entre deux ADN mitochondriales permet d'évaluer la date à laquelle ces deux ADN étaient identiques. Il n'y a pas d'échange, chez l'homme au moins, car ces gènes proviennent uniquement de la mère.

Voir aussi

Notes

  1. La diversité ADN mitochondriale est plus importante dans les populations africaines. Les groupes, forcements plus réduits et donc moins diversifié, ont donc quittés la population africaine originale pour coloniser la planète. C'est la théorie de l'Ève mitochondriale.

Références

  1. (en) David Day, A. Harvey Millar, James Whelan, Plant Mitochondria: From Genome to Function, springer, 2004, 325 p. (ISBN 1402023995) [présentation en ligne], « Mitochondrial morphology, Dynamics and Inheritance », p. The mitochondrion we know today is the result, therefore, of 2 billion years of evolution of this symbiosis 
  2. (en) Aubrey D.N.J. de Grey, « Forces maintaining organellar genomes: is any as strong as genetic code disparity or hydrophobicity? », dans Bioessays, vol. 27, no 4, 15 mars 2005, p. 436-446 [texte intégral lien DOI] 
  3. (en) Beata Kmiec, Magdalena Woloszynska , Hanna Janska, « Heteroplasmy as a common state of mitochondrial genetic information in plants and animals », dans Current Genetics, vol. 50, no 3, septembre 2006, p. 149-159 [texte intégral lien DOI] 
  4. (en) M. Unseld, JR. Marienfeld, P. Brandt et A. Brennicke, « The mitochondrial genome of Arabidopsis thaliana contains 57 genes in 366,924 nucleotides », dans Nature genetics, vol. 15, no 1, janvier 1997, p. 57-61 (ISSN 1061-4036) [texte intégral] 
  5. (en) The Genetic Codes sur Pubmed

Voir aussi

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