Michel de Laumur

Michel de Laumur, né à Paris le 20 février 1730, baptisé le 22 paroisse Saint-Eustache guillotiné à Paris le 4 germinal an II, est un militaire français impliqué dans les complots contre-révolutionnaires.

Fils de Guy de Laumur, sieur de La porte, et Julienne Le Boucher demeurant rue du Gros-Chenêt. Piqueur du marquis de Livry, le premier maître d’hôtel du roi, il fut initié au monde du jeu où il fit ses premières armes et éprouva ses premiers désagréments. Endetté, il n’eut pas d’autre choix que de s’exiler et de voyager.

Officier en Inde

Il arriva en Inde et s’engagea comme volontaire en 1753 dans le régiment de Lally, puis fut nommé lieutenant en second le 10 novembre 1756. Il fit toutes les campagnes de l’Inde avec d’Aché et Suffren et participa notamment au siège de Mafras où il fut blessé. Monté en grade, il devient capitaine d’infanterie puis aide de camp du général Lally-Tollendal, commandant de Calicut^[1]. Il se maria richement à Pondichéry, le 19 juin 1759, avec Marie-Suzanne Cordier, âgée de dix-neuf ans, fille de Jean Cordier qui "fut tué dans l’Inde au service du roi". Capitaine d’une compagnie d’ouvriers dans la Légion de l’Ile de France, capitaine au régiment de Bourbon (130/12/1772) puis celui de l’Ile de France (10/8/1775), il s’installa à l’Ile de France (Maurice).

Revenu à Paris dans les années 1776 sous le nom de marquis de Laumur, chevalier de Saint-Louis en 1777, il affichait un très grand luxe et fréquenta le milieu des banquiers de jeu de la cour. Ayant donné sa démission pour raisons de santé en 1782, il fit valoir ses droits à l’obtention d’une pension qu’il obtint. Il retourna ensuite à l’Île de France où il acquit des plantations et donna sa fille unique en mariage à l’un des nombreux enfants Monneron, Pierre Antoine, banquier. Ce mariage par lequel Laumur se rattachait à la grande banque, eut lieu à Port-Louis, le 21 novembre 1786, et le ménage vint à Paris pendant la Révolution : Monneron fut, avec trois de ses frères député à l’Assemblée nationale et membre du comité colonial, et mourut en cours de mandature.

Acquis aux idées de l’économie libérale, Michel de Laumur était lui aussi venu s’établir à Paris, et il prit un appartement chez M. Bourdet, rue Croix des Petits Champs. Il appartint au groupe de pression des propriétaires coloniaux. Constitutionnel, il fut membre du club de Valois et fréquenta la société interlope du Palais-Royal, y retrouvant ses amis le marquis de Travanet et le marquis de Livry, tous les deux anciens banquiers de jeux de la cour et devenu des membres de la Bande noire. Il ne pouvait manquer de rencontrer aussi Maximilien Radix de Sainte-Foix à qui il aurait offert ses services.

Laumur et les ministres de la Guerre Dumouriez et Pache

Quand le général Dumouriez obtint de Louis XVI le ministère des affaires étrangères puis celui de la guerre, il fit nommer Laumur lieutenant colonel du 105^e Régiment d’Infanterie, et son premier aide de camp lorsque Dumouriez entama la campagne de Belgique. Le 18 novembre 1792, Dumouriez insistait auprès de Jean-Nicolas Pache, nouveau ministre de la Guerre, pour que son protégé obtienne le grade de maréchal de camp, mais il dut attendre.

Fin 1792, Laumur songeait à retourner en Inde et, croyant pouvoir partir, il alla "embrasser son ami et son général, Dumouriez". Il avait déjà obtenu la le commandement de la place de Karikal et, toujours grâce à Jean-Nicolas Pache qui plaçait les aristocrates à des postes clés, il obtint, comme prévu, d’être nommé gouverneur de Pondichéry (3/1/1793). Une intervention de Gaspard Monge - ministre de la Marine et des colonies placé par son ami Pache - en sa faveur le 6 mars 1793 lui permit enfin d’obtenir la nomination tant attendue de Maréchal de camp pour être employé dans les colonies.

Mais par suite de la mort de Louis XVI et l’entrée en guerre de la Russie, puis de l’Angleterre, de la Hollande et de l’Espagne les projets de commandement en Inde tournèrent court.

Converti aux thèses de l’exagération révolutionnaire, il feignit de désavouer le général Dumouriez après sa défection. Au mieux avec les banquiers du quartier Vivienne, la société créole de Paris (Hosten, Monneron, etc.) et les banquiers de jeu du Palais-Royal, Laumur qui partageaient leurs intérêts, semble avoir joué un rôle d’intermédiaire ou de coordonnateur entre eux et les administrateurs du ministère de la Guerre qu’il côtoyait dans les bureaux de la Guerre.

On le voyait aussi bien aux Cordeliers que dans l’entourage de Pache et autres hauts fonctionnaires du ministère de la Guerre, avec le général Philippe Ronsin également, lequel s’était prodigieusement enrichi depuis le 10 août 1792, et sans doute pas seulement avec sa solde. Or le soir venu, Laumur retrouvait sa société d’origine, la sienne, celle de ses deux amies créoles, M^mes d’Eprémesnil et de Bonneuil, qui le recevaient à des soirées dansantes, rue Neuve-Sainte-Catherine où, paraît-il, on se réjouissait des revers de l’armée républicaine.

Un jour, rue Grange-Batelière, Michel de Laumur rencontra le ci-devant comte Raymond de Verninac, ministre de la République en Suède et gendre de Caron de Beaumarchais. Il lui parla imprudemment de l’insurrection projetée au club des Cordeliers et de l’intention des insurgents de nommer un Grand Juge qui devait être Jean-Nicolas Pache.

Michel de Laumur était donc bien initié au secret de la grande conspiration des exagérés dont le but était de renverser la Convention sinon de l’épurer drastiquement.

Au Tribunal révolutionnaire

Laumur fut arrêté le 23 ventôse an II pour avoir été cité dans l’instruction du procès des Exagérés. Renvoyé avec eux au Tribunal révolutionnaire, il fut condamné à mort. Il semble que l’élément probant de cette condamnation émane du ci-devant comte de Verninac qui fut assigné par Fouquier-Tinville comme témoin. Pour éviter des ennuis, il rendit compte des confidences que Laumur lui avait faites : « …il dit que, s’étant entretenu avec l’accusé de la séance des Cordeliers, et lui ayant demandé la raison pour laquelle on avait voilé les Droits de l’Homme, Laumur lui avait répondu : « Ils veulent établir un grand juge, et c’est Pache qu’ils désignent : il s’agirait d’abattre cinq ou six têtes… » »

Il monta à l’échafaud avec les Hébertistes. On dit que, quand il fut sur la plate-forme, Vincent et Ronsin dirent à son sujet : « Sans la maladresse de ce jean-foutre là (entendre au sens de « lâche »), nous aurions cependant réussi ! »

(papiers AN, W514)

Bibliographie

• Agnès de Place, Dictionnaire Généalogique & armorial de L'Inde Française, Paris 1997
• Alexandre Tuetey, Répertoire des sources manuscrites de l’histoire de Paris pendant la Révolution, vol. XI.
• Comte d’Espinchal, Notes inédites.
• Comte de Vaublanc, Mémoires.

Liens externes

• Sa généalogie sur Geneanet

Notes

1. ↑ in Dictionnaire Généalogique & armorial de L'Inde Française, d'Agnès de Place, Paris 1997