Meuse (fleuve)

Meuse (fleuve)
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Meuse
(Maas, Maes, Moûse, Mosa)
La Meuse à Monthermé
La Meuse à Monthermé
Bassin de la Meuse.svg

Le bassin de la Meuse
Caractéristiques
Longueur 950 km
Bassin 36 000 km2
Bassin collecteur Meuse
Débit moyen 400 m3⋅s-1
Régime pluvial océanique
Cours
Source Pouilly-en-Bassigny (France)
 · Altitude 409 m
 · Coordonnées 47° 58′ 28″ N 5° 38′ 01″ E / 47.97435, 5.6335388 (Source - Meuse (fleuve))
Embouchure mer du Nord (Haringvliet)
 · Localisation Hollande-Méridionale
 · Coordonnées 51° 42′ 52″ N 4° 24′ 21″ E / 51.714373, 4.40586 (Embouchure - Meuse (fleuve))
Géographie
Principaux affluents
 · Rive gauche Bar, Sormonne, Viroin, Molignée, Sambre, Mehaigne, Légia, Geer, Dieze
 · Rive droite Mouzon, Vair, Aroffe, Chiers, Semois, Lesse, Bocq, Hoyoux, Ourthe, Gueule, Swalm, Roer, Niers
Pays traversés Drapeau de France France Drapeau de Belgique Belgique Drapeau : Pays-Bas Pays-Bas
Principales villes Neufchâteau, Commercy, Verdun, Sedan, Charleville-Mézières, Nouzonville, Revin, Givet, Dinant, Namur, Andenne, Huy, Liège, Maasmechelen, Maastricht, Ruremonde, Venlo

La Meuse (néerlandais et allemand : Maas ; wallon : Moûse ; latin, italien, espagnol et portugais : Mosa), est un fleuve européen de 950 km de long dont le bassin, relativement étroit, est orienté Sud-Nord. Elle traverse la France, la Belgique et les Pays-Bas et se jette dans la mer du Nord. Elle prend sa source à 409 m d’altitude.

Le bassin versant de la Meuse a une superficie de 36 000 km2, dont un tiers en Région wallonne : un accord a été signé en 2002 (Accord international sur la Meuse ou accord de Gand) par cette entité fédérée de la Belgique avec la France, la Région flamande, le Grand-Duché de Luxembourg, les Pays-Bas et l’Allemagne en vue de gérer toutes les questions relatives à ce cours d’eau, jusque dans la manière dont les autorités politiques concernées s’entendent pour en préserver les intérêts qu’elles partagent. La carte jointe à l'accord ne mentionne d'ailleurs pour la Belgique que ces entités, même si les parties contractantes ont tenu ensuite, pour des raisons formelles, à ce que l’État belge y figure aussi.

La Meuse a constitué l’une des frontières ouest du Saint-Empire romain germanique de sa création au IXe siècle jusqu’à l’annexion de la majeure partie de l’Alsace et de la Lorraine à la France par le traité de Westphalie en 1648, et celle de la principauté de Liège à la France en 1792.

C’est à ce fleuve que fait allusion la première strophe du Deutschlandlied (« chant d’Allemagne »)[1], retirée en 1945, qui dit que l’Allemagne s’étend

Von der Maas bis an die Memel
Von der Etsch bis an den Belt
« De la Meuse jusqu’au Niémen »,
« De l’Adige jusqu’au Petit Belt ».

Sommaire

Géographie

La Meuse en France

Source de la Meuse à Pouilly-en-Bassigny.
Boucle de la Meuse à Monthermé.

La Meuse prend sa source en France dans le Bassigny au Sud du département de Haute-Marne (région Champagne-Ardenne) à Pouilly-en-Bassigny (commune du Châtelet-sur-Meuse). La Seine, la Marne et l'Aube prennent leur source non loin de celle de la Meuse, sur le Plateau de Langres.

Le fleuve quitte rapidement le département de la Haute-Marne pour rejoindre la Lorraine dont il traverse deux départements. Dans les Vosges, il baigne Bazoilles-sur-Meuse où il se perd dans le sous-sol pour ressurgir à Neufchâteau. Au niveau de Neufchâteau, la Meuse quitte une plaine argileuse pour pénétrer le front des côtes de Meuse et couler dans une vallée étroite et calcaire. Elle passe au pied de la basilique du Bois-Chenu et auprès de la maison de Jeanne d'Arc à Domrémy-la-Pucelle. Dans le département de la Meuse, qui lui doit son nom, elle poursuit son cours dans une étroite vallée au sol calcaire, recevant les eaux de courts affluents. Elle arrose Commercy, Saint-Mihiel, Verdun, Dun-sur-Meuse où le fleuve quitte les côtes de Meuse pour rejoindre la plaine argileuse de la Woëvre. Il y serpente alors sur un terrain à très faible pente. À Stenay la Meuse pénètre de nouveau dans une vallée étroite et traverse un nouveau front de côtes, l'extrémité nord des côtes de Moselle.

La Meuse traverse les Ardennes. Elle continue à serpenter dans une vallée de plus en plus étroite. Elle arrose Mouzon dont le centre est une île entourée des bras de la Meuse. Le fleuve rejoint ensuite une plaine herbeuse et argileuse de nouveau assez large. Il reçoit la Chiers par la droite avant de traverser la ville de Sedan et de continuer son parcours vers le nord. Il bute alors sur les contreforts du Massif ardennais et vire à 180 ° vers le sud puis peu après plein ouest, en longeant l'ancien massif montagneux couvert de forêts. Peu après, il reçoit l'eau de la Bar par la gauche. À Charleville-Mézières, la Meuse semble hésiter sur son cours lors de la traversée de la ville : elle fait trois boucles d'ouest en est avant de reprendre la direction du nord. Elle pénètre alors dans le massif de l'Ardenne par une vallée très étroite dont les pentes sont densément boisées. Elle traverse maintenant des sols schisteux, noirs. À partir de là, les méandres sont nombreux jusqu'à la sortie de l'Ardenne.

La Meuse traverse Nouzonville, Bogny-sur-Meuse, puis Monthermé, où elle reçoit la rivière Semois en rive droite et où de nombreux points de vue (le plus haut surplombe la vallée de 230 m) permettent d'admirer les alentours, enfin Revin, construite sur trois méandres. À proximité de la ville, deux lacs à différentes altitudes permettent le fonctionnement d'une Station de Transfert d’Énergie par Pompage/Turbinage (STEP) d'une puissance de 1 000 MW.

Elle traverse Fumay, l'ancienne cité de l'ardoise avant de passer par Givet, dernière commune française avant la frontière et près de laquelle se trouve la Centrale nucléaire de Chooz. Lorsqu'elle quitte le territoire français, la Meuse a parcouru 486 km en suivant grossièrement une direction Sud-Nord[2].

La Meuse à Laifour dans les Ardennes françaises.

La Meuse en Belgique

La Meuse entre en Belgique au niveau de Heer à une altitude de 98 m. Elle traverse la province de Namur et y poursuit sa traversée de l'Ardenne via la Fagne, où elle baigne Hastière, et le Condroz où elle reçoit la Lesse sur la droite. Elle passe entre les rochers et les jardins de Freÿr, puis arrose Dinant et Yvoir. À Namur, la Meuse reçoit la Sambre par la gauche et prend la direction de l'est. Elle a quitté l'Ardenne et coule entre Condroz et Hesbaye. Avant de quitter la province, elle arrose Andenne.

Dans la province de Liège, la Meuse traverse l'ancien bassin houiller wallon. Elle arrose Huy, reçoit le Hoyoux et la Mehaigne et fournit du refroidissement à la centrale nucléaire de Tihange. À Liège, elle reçoit l'Ourthe par la droite et coule de nouveau vers le Nord. Le fleuve quitte la Région wallonne à Visé, après un parcours de 128 km et à une altitude de 47 m. De Namur à Visé, la Meuse sert à la production d'électricité avec six centrales hydroélectriques.

Après une brève incursion aux Pays-Bas, via Maastricht, la Meuse sert de frontière entre la Belgique au niveau de la province du Limbourg, et les Pays-Bas. Elle arrose Maasmechelen puis Maaseik, avant de quitter définitivement le territoire belge qu'elle a parcouru au total sur 183 km.

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La Meuse aux Pays-Bas

La Meuse à Maastricht.
La Meuse avec des bateaux.

Après avoir commencé à faire office de frontière entre la province belge de Liège et la province néerlandaise de Limbourg à Eijsden, la Meuse arrose la ville néerlandaise de Maastricht. À partir de là, elle fait office de frontière entre la province flamande de Limbourg et son homonyme néerlandaise, jusqu'à une dizaine de kilomètres après Maaseik, où la frontière néerlando-belge s’oriente vers l'ouest. La Meuse poursuit son cours vers le nord, en s’orientant légèrement vers l'est et la frontière néerlando-allemande, qu'elle suivra sur une centaine de kilomètres. Après avoir passé la ville limbourgeoise de Roermond à l'ouest, et traversé la ville de Venlo, elle parcourt encore une cinquantaine de kilomètres jusqu'à la frontière entre les provinces de Limbourg et de Brabant-Septentrional. Elle s’incurve pour prendre la direction de l'ouest, pour servir de frontière entre les provinces de Gueldre (au nord) et de Brabant-Septentrional. Un peu plus au nord, un des principaux bras du Rhin, le Waal, s'écoule plus ou moins parallèlement vers l'ouest. Le Rhin inférieur coule encore plus loin au nord. Le Waal et la Meuse sont reliés par le Canal de la Meuse au Waal au niveau de Nimègue. Le fleuve continue à s'écouler droit vers l'ouest. Son nom change plusieurs fois, avant qu'il se jette dans la mer. Ces noms sont successivement :

  • la Bergsche Maas ou Meuse de Bergen, elle reçoit toute l’eau de la Meuse depuis son ouverture en 1904, auparavant celle-ci s’écoulait via l’Afgedamde Maas ou Meuse barrée,
  • l’Amer,
  • le Hollands Diep qui reçoit aussi une partie des eaux du Waal via la Nouvelle Merwede, celle-ci ayant traversé en partie le Biesbosch,
  • l'île d'Overflakkee sépare le flux en deux bras de mer : au nord, le Haringvliet et au sud le Volkerak, puis le Krammer et le Grevelingenmeer (ce dernier n’est plus un bras de mer, car il est fermé. C’est pourquoi il est appelé "meer", ce que signifie "lac").

Actuellement, l’embouchure de la Meuse est donc le bras de mer Haringvliet. Celui-ci se trouve à une distance considérable au sud du Nieuwe Waterweg, l’embouchure principale du Rhin, qui se jette dans la mer du Nord une trentaine de kilomètres après être passé au sud de Rotterdam. Plusieurs bras de d’eau qui correspondent à l’ancien cours de la Meuse portent encore son nom, même si l’eau provenant réellement du fleuve ne les traverse plus :

  • la Vieille Meuse (Oude Maas) qui se sépare du Waal à l’est de son embouchure dans le Haringvliet. Ce bras se dirige vers ce Nieuwe Waterweg
  • la Meuse de Brielle (Brielse Maas)
  • la Nouvelle Meuse (Nieuwe Maas) qui traverse Rotterdam. Cependant l’eau qui coule dans la Nouvelle Meuse provient en grande partie du Rhin, ce qui fait qu’on doit appeler Rotterdam une ville du Rhin (Rijnstad) plutôt qu’une ville Mosane (Maasstad).

L'embouchure de la Meuse forme avec celle de l’Escaut (Schelde) et celle du Rhin un large delta, partiellement barré par les ouvrages du plan Delta, avant de se jeter dans la mer du Nord au bout d’un cours de 950 km."

Abusivement, la Meuse est souvent considérée comme une rivière confluente du Rhin et non un fleuve en lui-même. En particulier, elle ne fait pas partie des grands fleuves français enseignés à l'école primaire en France car elle n'y fait que la moitié de son parcours total. Par contre, en Belgique et aux Pays-Bas, elle est considérée comme un fleuve important car elle sert de façon primordiale au transport de marchandises et a façonné l'histoire et la géographie de ces pays.

Affluents

La Meuse traversant des régions très arrosées (massif des Ardennes entre autres) possède des affluents nombreux et souvent abondants mais assez courts.

Article détaillé : Bassin versant de la Meuse.

Ses principaux affluents sont : le Mouzon, le Vair, la Chiers, la Semois, la Lesse, le Bocq, le Hoyoux, l'Ourthe et la Roer sur la rive droite, la Bar, la Sormonne, le Viroin, la Molignée, la Sambre, la Mehaigne et le Geer sur la rive gauche.

Hydrologie

Le fleuve admet de Rotterdam jusqu'au port autonome de Liège les bateaux de type rhénan (2 500 tonnes) et les barges 2 x 4 500 tonnes.

Il est ensuite navigable pour les péniches de 1 350 tonnes jusqu'à Givet.

Sur le territoire français, il est canalisé — en empruntant parfois le Canal de l'Est, branche Nord — de Givet à Saint-Mihiel au gabarit Freycinet (250 tonnes à 1,80 m d'enfoncement).

En amont il suit son cours naturel, soumis à des étiages bas et des crues importantes et n'est plus navigable que par portions.

Le Canal des Ardennes relie la Meuse à l'Aisne et donc à la Seine.

Le canal Albert relie la Meuse (à partir de Liège) à l'Escaut (et Anvers), en passant par le bouchon de Lanaye.

Le projet avorté du canal de l'Ourthe prend également naissance à Liège. Il devait initialement permettre d'atteindre le bassin rhénan et desservir l'actuel Luxembourg grâce à une liaison Meuse-Moselle.

La Meuse est parcourue par de nombreuses embarcations de plaisance. Ses profonds méandres lors de la traversée du massif des Ardennes sont autant de lieux touristiques.

Les débits

  • Le débit moyen observé à Heer (commune d'Hastière), peu en aval de Givet, à la frontière franco-belge, entre 1995 et 2004 est de 163,2 m³ par seconde, avec un maximum moyen de 221,0 m³ en 2001, et un minimum moyen de 100,3 en 1996[8].
  • Le débit moyen à Namêche, peu en aval de Namur, observé durant la même période 1995-2004, est de 210,8 m³ par seconde, avec un maximum moyen de 297,1 m³ en 2001, et un minimum moyen de 122,0 en 1996.

Les débits à la frontière franco-belge

La Meuse n'est pas un fleuve très régulier. Son débit a été observé durant 56 ans (1953-2008), à Chooz, localité du département des Ardennes située en amont de la ville de Givet, c'est-à-dire à peu de distance de la frontière franco-belge[9]. La surface ainsi étudiée est de 10 120 km2, mais ne comprend pas les bassins de la Houille, de l'Alyse et de quelques autres ruisseaux.

Le débit moyen interannuel ou module du fleuve à Chooz est de 144 m³ par seconde (non compris les débits de la Houille, de l'Alyse, etc.).

La Meuse présente des fluctuations saisonnières de débit bien marquées. Les hautes eaux se déroulent en hiver et au tout début du printemps, et se caractérisent par des débits mensuels moyens allant de 225 à 277 m³ par seconde, de décembre à mars inclus (avec un maximum en février). À partir du mois d'avril, le débit diminue rapidement jusqu'aux basses eaux d'été qui ont lieu de juin à octobre, entraînant une baisse du débit mensuel moyen jusqu'au plancher de 51,4 m³ au mois d'août et 50,5 m³ au mois de septembre. Mais ces moyennes mensuelles cachent des fluctuations plus prononcées sur de courtes périodes ou selon les années.

Débit moyen mensuel (en m³/s) mesuré à la station hydrologique de Chooz à la frontière franco-belge
données calculées sur 56 ans

Aux étiages, le VCN3 peut chuter jusque 11 m³ par seconde en cas de période quinquennale sèche, ce qui peut être considéré comme sévère pour un aussi puissant cours d'eau.

Quant aux crues, elles peuvent être extrêmement importantes. Les QIX 2 et QIX 5 valent respectivement 690 et 950 m³ par seconde. Le QIX 10 ou débit instantané calculé de crue décennale est de 1 100 m³ par seconde, le QIX 20 de 1 300 m³, tandis que le QIX 50 se monte à 1 500 m³ par seconde. Ce qui signifie par exemple que tous les 50 ans (en moyenne), il faut s'attendre à une crue de l'ordre de 1 500 m³ par seconde, ce qui correspond au débit moyen du Rhône à Valence après avoir reçu les eaux de l'Isère.

Le débit instantané maximal enregistré à Chooz a été de 1 610 m³ par seconde le 30 janvier 1995, tandis que la valeur journalière maximale était de 1 560 m³ par seconde le même jour. Si l'on compare la première de ces valeurs à l'échelle des QIX du fleuve, l'on constate que cette crue était nettement supérieure au niveau cinquantennal défini par le QIX 50, et donc tout à fait exceptionnelle.

La Meuse est un fleuve abondant. La lame d'eau écoulée dans cette partie essentiellement française de son bassin versant est de 452 millimètres annuellement, ce qui est nettement supérieur à la moyenne d'ensemble de la France (320 millimètres). Le débit spécifique (ou Qsp) atteint de ce fait le chiffre robuste de 14,3 litres par seconde et par kilomètre carré de bassin.

La Meuse en crue à Ruremonde (Pays-Bas) en janvier 2011.

Particularité géomorphologique

La traversée du sud au nord du massif ardennais par le cours de la Meuse est une particularité remarquable de ce fleuve. Habituellement, les cours d'eau partent d'un massif pour rejoindre la plaine et ensuite la mer.

Le creusement de cette vallée est dû à une chronologie particulière des évènements géomorphologiques de la région :

  • Durant l'Oligocène, il y eut une ouverture du fossé rhénan accompagnée d'une surrection (soulèvement) de ses épaulements, la Forêt-Noire et les Vosges. À partir des Vosges s'organise un réseau hydrographique : Meuse, Moselle, Meurthe ; (la Moselle était, il y a plusieurs millions d'années, un affluent de la Meuse, se jetant dans ce fleuve à hauteur de Pagny-sur-Meuse qui a subi une capture au profit du Rhin).
  • Au cours de ces derniers millions d'années, par flambage de la croûte, le massif ardennais s'est soulevé, là où passait déjà la Meuse. Cette surrection lente (moins d'1 mm par an) a néanmoins permis au fleuve de conserver par érosion son niveau de base en creusant au fil des années une profonde vallée dans le massif des Ardennes.

Cela explique comment ce cours d'eau a pu garder sa pente alors que le relief l'entourant a pris une pente inverse ! Cela explique également la profondeur du ravinement que représente la vallée de la Meuse dans les Ardennes.

Selon certains auteurs, cette situation est instable. Le réseau hydrographique du bassin devrait — dans un avenir lointain — se réorganiser au détriment de la Meuse. D'une part, la partie inférieure de son cours en France deviendra un affluent de l'Aisne, donc de la Seine, dévié vers le sud à l'entrée de l'Ardenne par la vallée de la Bar. D'autre part, son cours supérieur deviendra un affluent de la Moselle, et donc du Rhin, à partir du fossé de Neufchâteau.

Histoire

Toponymie

La première trace écrite mentionnant le fleuve est le latin Mosa. Cependant, le nom du fleuve est antérieur à la période romaine et remonte au moins à la période celtique. En effet, le nom de la ville de Mouzon signifie « le marché de la Meuse » en celtique (Moso-magus). L'étymologie de Mosa est inconnue[10]. Sur la Table de Peutinger, la Meuse n'est pas appelée Mosa, mais Flumen Patabus.

Du latin Mosa est issu l'adjectif français mosan[11]. Divers toponymes sont également dérivé du nom du fleuve : outre Mouzon, on peut citer la Moselle et Maastricht (en latin Mosa Trajectum).

Le sac de Dinant et de Liège

Artère économique de premier ordre depuis l'Antiquité, la Meuse garda son influence dans les échanges commerciaux noués pendant la période mérovingienne, comme en témoigne la diffusion de techniques et de motifs, attestée dans les fouilles archéologiques. Elle fut aussi la colonne vertébrale de l'évêché de Liège, devenu principauté épiscopale dans la seconde moitié du Moyen Âge. Ainsi l'autorité du Prince-évêque s'étendait-elle sur des faubourgs (ou des villes entières) reliés entre eux par le fleuve : Dinant, Namur, Andenne, Huy. Dans chacune de ces villes, un pont et une église dédiée à Notre-Dame percevaient un droit de passage, alimentant le trésor épiscopal.

Profitant de cet axe commercial, l'orfèvrerie mosane (et notamment la dinanderie, soit le travail du laiton) se développa pendant tout le Moyen Âge. La "légende historique" rapporte que la pratique de la dinanderie opposa Bouvignes à Dinant ; Philippe de Commynes l'a bien raconté dans ses chroniques et Jules Michelet en a été frappé. C'est à la même époque que Philippe le Bon, duc de Bourgogne prit la ville en 1466, l'incendia et fit massacrer ses habitants en les jetant liés deux par deux dans la Meuse. Deux ans plus tard, Liège, subissait le même sort. Dinant et Liège faisaient toutes les deux partie de la Principauté de Liège alors que Bouvignes faisait partie du Comté de Namur, déjà bourguignon. Plus qu'une querelle de clocher, il faut y voir des motifs politico-économiques dépassant largement le microcosme dinantais : qui contrôle le fleuve, contrôle l'économie.

Fleuve industriel

Industrielle, la Meuse l'est déjà au Moyen Âge et certains historiens découpent ainsi une zone industrielle qui va de Dinant à Liège. Elle le deviendra encore plus avec la Révolution industrielle. Les forges et fourneaux de l'Ardenne qui transformèrent le fer à partir du charbon de bois durant des siècles, vont voir leur travail transporté par des petites rivières rapides qu'ils utilisaient pour leur industrie, vers les plus grandes comme la Sambre (qui se jette dans la Meuse à Namur) et la Meuse. Au cours d'une seconde révolution industrielle, que l'on peut faire débuter avec l'avènement de la Belgique, la deuxième puissance industrielle au monde va s'édifier, de Charleroi à Liège, à la verticale des bassins houillers anglais, du Nord français et de la Lorraine franco-allemande. Seule la Haute Meuse échappera à la fièvre houillère, supplantée par la Sambre reliant Charleroi aux débouchés de la Mer du Nord. Progressivement, la sidérurgie prit le pas sur l'extraction minière en Belgique, suivant toujours les bassins de la Meuse médiane et de la Sambre. Cette sidérurgie, aujourd'hui en déclin, subsiste toujours malgré tout et a été intégrée dans l'accord Mittal-Arcelor mais souffre de la concurrence internationale et de la crise économique de 2008.

Le cauchemar de 1914

Fleuve tragique, la Meuse a été chaque fois sur le parcours des invasions et des rivalités européennes. Le 23 août 1914, les 100e, 101e, 103e, 108e, 178e, 182e régiments d'infanterie de l’armée impériale allemande, après avoir été rejetés sur la rive est de la Meuse par les soldats français de Franchet d'Esperey (parmi lesquels le lieutenant De Gaulle), les rejettent définitivement sur l'autre rive. Lors de l'assaut français, réussi, la population a fraternisé avec les soldats de Franchet d'Esperey et chanté de multiples fois La Marseillaise. Comme en d'autres villes de Belgique ou de France, les Allemands sont persuadés (à tort) qu'ils ont affaire à des francs-tireurs (souvenirs du conflit de 1870, hantise qui devient hallucination). À Dinant, leur « fausse croyance sincère »[12] va transformer la ville en enfer de Bosch : plusieurs quartiers seront entièrement détruits par le feu. On compte 674 victimes civiles fusillées par les régiments allemands, le plus important massacre se situe en août 1914.

Mai 1940

En 1939, la France a déclaré la guerre à l'Allemagne et se prépare à repousser l'invasion de celle-ci. Dans le cadre du plan défensif Français, la Meuse joue un rôle important puisque c'est sur une bonne partie de son cours supérieur (en France, mais aussi jusqu'à Namur, en Belgique) que le Haut Commandement Français compte arrêter les Allemands.

Prenant de vitesse les Français, en mai 1940, c'est un peu au nord de Dinant, à Leffe ainsi qu'à Houx, que les premiers fantassins allemands suivis des chars de Rommel passent la Meuse. Le lendemain, les troupes allemandes de Guderian franchissent également la Meuse à Sedan lors de la Percée de Sedan. Les Français n'ayant pu combler la brèche ouverte dans leur défense, les unités blindés allemandes s'y engouffrent et provoquent l'effondrement du plan défensif français, et des forces alliés dans le nord de la France qui vont être prises à revers dans les semaines qui suivent. La bataille de France est déjà virtuellement perdue. Le Fort d'Ében-Émael, réputé imprenable, fut pris par une action combinée de planeurs et parachutistes allemands le 11 mai 1940, soit au lendemain de l'attaque allemande du 10 mai. Pourtant le 13 et le 14 mai, l'armée française se battra pour repousser l'invasion, notamment à Haut-le-Wastia (sur les hauteurs à l'ouest de Dinant), avec un tel héroïsme que la population du village est demeurée longtemps liée aux anciens de 40 à qui, spontanément, elle éleva un monument. Le 16 mai, le général Gamelin informe le Gouvernement de Paul Reynaud qu'il ne peut plus assurer la sécurité de Paris. L'armée belge qui a déjà évacué la position fortifiée de Liège, menacée d'encerclement, se retire aussi de Namur. Seuls les troupes de forteresse à Liège et Namur demeurent en place et se battront héroïquement. L'armée belge se retire sur la ligne kW puis sur l'Escaut. Enfin, plus loin, sur une rivière franco-flamande où elle livrera sa dernière bataille, la bataille de la Lys.

La Meuse européenne

Récemment (2002 Accord international sur la Meuse (Accord de Gand).}, la France, les Pays-Bas, la Région flamande et la Région wallonne, ont signé un accord international sur la Meuse qui assure la cogestion du fleuve par les deux États et les deux régions belges.

Culture

L’Art mosan

La Meuse, qui traverse l'Est de la Belgique de part en part, a donné son nom à l’art mosan qui regroupe un ensemble de productions entre le Saint-Empire romain germanique et la France de 900 à 1600, principalement dans l'ancien diocèse de Liège (400-1559) et qui permet de mettre en perspective l'Histoire de la Wallonie et de la Principauté de Liège dans une longue durée culturelle avec l'architecture et les belles collégiales d'Hastière, de Nivelles, de St-Barthélémy à Liège, le travail du bois, de l'ivoire, des métaux (les fonts baptismaux de St-Barthélémy, la dinanderie, par exemple).

Hommages littéraires

Charles Péguy a mis ces vers dans la bouche de Jeanne d'Arc, née à Domrémy sur la Meuse :

Adieu Meuse endormeuse et douce à mon enfance,
Qui demeures aux prés où tu coules tout bas.
Meuse adieu : j'ai déjà commencé ma partance
En des pays nouveaux où tu ne coules pas.

Dans son livre Une certaine idée de la Wallonie, qu'il a tenu à illustrer par une peinture d'Henri Blès, Paul-Henry Gendebien décrit la démarche intellectuelle du grand peintre mosan en pensant à tous les lieux en Europe où l'on peut voir ses œuvres : « L'Europe voit qu'un paysage du maître wallon - qui est mosan et qui ne peut qu'être mosan - est aussi le paysage par excellence, ce qui le hisse par le fait même au rang d'image de l'Univers. »

André Dhôtel est un Mosan qui, de la Meuse française à la Meuse belge, a écrit ce roman extraordinaire dont Bayard est le héros, Le Pays où l’on n’arrive jamais. Il y a dans ce livre, curieusement, le fantasme de la mer et des grandes villes flamandes ou néerlandaises où la Meuse rejoint la mer parmi les cathédrales et les beffrois.

Il existe de nombreux liens tout au long du parcours de la Meuse tant dans son parcours français que belge. Rita Lejeune a dressé la carte des toponymes liés à la légende de Bayard, du Plateau de Langres à Maastricht.

Jacques Brel évoque la Meuse dans Je suis un soir d'été ou encore dans Il neige sur Liège.

Dominique A cite la Meuse dans sa chanson La pleureuse, soulignant le côté sombre du cours d'eau comparé au bleu du Danube.

En plombeur de ces dames
Ou en consolateur,
Si tu y trouves ton compte
J'inonderai ton cœur.
Et que le beau Danube
Se transforme en la Meuse
Et je suis ta pleureuse
Oui, je suis ta pleureuse
Pour toujours ta pleureuse.

Philippe De Riemaecker Dans La Mosane tisse une tendre complicité entre le fleuve et ses écrits : À cet endroit précis, la Meuse s’arrête quelques instants, le temps d’une respiration, perturbée qu’elle est par une écluse et bordée d'une imitation sauvage,que les hommes ont placés là, pour le plaisir des yeux et des enfants. Ce bout de terre apprivoisée s'étends sur une bonne distance et s’étendrait davantage s’il n’était arrêté par un alignement de bâtisses imposantes d’une architecture recherchée et particulière à cette région. Il y a de l’harmonie à ce paysage bon enfant dans lequel une bourgeoisie de bon goût a trouvé refuge. Au centre de ce paysage se découpe une maison dite « de Maître », gardée par une haie en fer forgé, vers laquelle plongent deux volées d’escaliers faites de pierres arrachées à la colline

Galerie

Voir aussi

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Liens externes

Bibliographie

  • Jules Michelet, Histoire de France (Tome VI) in Œuvres complètes de Michelet, édition définitive et corrigée, Flammarion, Paris, 1893-1898.
  • Jules Michelet, Journal, Gallimard, Paris, 1959-1976 (Tome I).
  • Félix Rousseau (historien wallon), La Meuse et le pays mosan en Belgique. Leur importance historique avant le XIIIe siècle, (Éditions Culture et civilisation, Bruxelles 1977.
  • Philippe de Commynes, Mémoires in Historiens et chroniqueurs du Moyen Âge, Gallimard, Paris, 1952
  • Paul Berben et Bernard Isselin, Les panzers passent la Meuse, Laffont, Paris, 1967 et Editions J'ai lu Leur aventure N°A209.
  • Félix Rousseau (historien wallon), L'Art Mosan, Duculot, Gembloux, 1970
  • Catalogue de l'exposition Rhin-Meuse, Bruxelles, Cologne, 1972.
  • Félix Rousseau, La Wallonie, terre romane, Institut Destrée, Charleroi, 1977.
  • Rita Lejeune, Les légendes épiques in La Wallonie, le pays et les hommes (Tome I, Lettres, arts, culture), La Renaissance du livre, Bruxelles, 1974-1986, pages 119-135.
  • John Horne et Alan Cramer, Les Atrocités allemandes, Tallandier, Paris, 2005.
  • Marc Suttor, Vie et dynamique d'un fleuve. La Meuse de Sedan à Maastricht (des origines à 1600) (Bibliothèque du Moyen Âge, 24), Turnhout, De Boeck & Larcier s.a., 2006. ISBN 2-8041-5041-0.
  • Patrick Beurard-Valdoye, "MOSSA" (éd. Al Dante, 2002), poésie.

Notes et références

  1. La troisième strophe du Deutschlandlied est l’hymne national allemand officiel.
  2. SANDRE, « Fiche canal de l'est (B---0000): La Meuse en France ». Consulté le 10 mai 2010
  3. Banque Hydro - station B1340010 - La Meuse à Vaucouleurs (ne pas cocher la case "Station en service")
  4. Banque Hydro - station B2130010 - La Meuse à Commercy (ne pas cocher la case "Station en service")
  5. Banque Hydro - station B2220010 - La Meuse à Saint-Mihiel (ne pas cocher la case "Station en service")
  6. Banque Hydro - station B3150020 - La Meuse à Stenay (ne pas cocher la case "Station en service")
  7. Banque Hydro - station B5600010 - La Meuse à Montcy-Notre-Dame (ne pas cocher la case "Station en service")
  8. Région wallonne - débit des principaux cours d'eau [xls]
  9. Banque Hydro - Station B7200010 - La Meuse à Chooz (Île Graviat) (option Synthèse)
  10. Jean Loicq, « Avant le latin, la Gaule Belgique », dans Daniel Blampain et al. (dir.) Le Français en Belgique, Duculot, Bruxelles, 1997, p. 8.
  11. Trésor de la langue française informatisé.
  12. comme le disent deux historiens irlandais, John Horne et Alan Kramer, dans Les Atrocités allemandes (Tallandier, Paris, 2005)

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Contenu soumis à la licence CC-BY-SA. Source : Article Meuse (fleuve) de Wikipédia en français (auteurs)

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