Jean Bouvier

Jean Bouvier
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Jean Bouvier (1920-1987) est un historien français. Il a été professeur à l'École Pratique des Hautes Études et aux universités de Vincennes et de la Sorbonne.

D'inspiration marxiste, il a été l'un des pionniers de l'histoire du temps présent. Ses recherches, attentives aux transformations de la société, ont porté principalement sur l'économie et particulièrement sur la banque. Il s'est toujours efforcé de fonder ses travaux sur une analyse critique des observations statistiques.

Professeur rigoureux et sachant respecter ses élèves, il a formé des centaines d’étudiants et des dizaines de chercheurs.

Sommaire

L'historien

Né dans une famille de petits commerçants lyonnais, Jean Bouvier put, grâce à son instituteur, obtenir une bourse qui lui permit d'accéder aux études secondaires. A l'issue de celles-ci, après s'être présenté au concours de l'Ecole Normale Supérieure, il entreprit des études d'histoire à l'Université de Lyon.

Pour échapper au STO il participa à la Résistance à partir de 1943, où il fut coursier de l'état-major de Lyon de l'Armée secrète, à défaut d'avoir pu rejoindre les FTP, qui avaient sa préférence.

Après-guerre il réussit quatrième le concours de l'agrégation d'histoire. Professeur très apprécié de ses élèves, il enseigna en lycée à Lyon puis à Paris. Attiré par la recherche, il commença d'abord par travailler sur les questions ferroviaires, puis il entreprit une thèse de doctorat d'Etat sous la direction de Charles-Henri Pouthas sur la naissance du Crédit lyonnais, ayant réussi à avoir accès clandestinement pendant huit ans aux archives de cette banque.

En 1953 il fut détaché au CNRS pour terminer sa thèse, qu'il soutint en 1959. Recruté alors par Fernand Braudel comme directeur d'études à la VIe section de l'Ecole Pratique des Hautes Etudes, il y exerça de 1960 à 1963. Mais son goût pour l'enseignement le poussa à quitter ce poste et à devenir maître de conférences puis professeur à l'université.

Il exerça d'abord à Brest, puis à Lille. L'expérience du mouvement de 1968 et son désir de se rapprocher de Paris le décidèrent à devenir l'un des membres fondateurs du Centre universitaire expérimental de Vincennes (devenu l'Université Paris VIII) aux côtés d'historiens comme Jacques Droz, Jacques Julliard et Madeleine Rebérioux. En 1974, il créa avec Maurice Lévy-Leboyer le DEA d'histoire économique. En 1977, succédant à Pierre Vilar, il devint professeur à l'Université Paris I (Panthéon-Sorbonne) jusqu'à sa retraite en 1984.

Jean Bouvier fut engagé dans de nombreuses activités collectives, en particulier dans la direction d'ouvrages et de revues, telles que Le Mouvement Social, la Revue économique, Vingtième siècle, la Revue internationale d'histoire de la banque. En 1978, il devint l'un des principaux conseillers de l'Institut d'histoire du temps présent du CNRS. En 1982, ses collègues le portèrent à la présidence de la section d'histoire moderne et contemporaine du Conseil Supérieur Provisoire des Universités, où son équité fut fut reconnue par tous. Il participa également à plusieurs émissions de radio et de télévision, en particulier à France-Culture où il créa une émission d'histoire économique et sociale, "Le temps qui change", qu'il anima en compagnie d'Alain Plessis et de Jacques Marseille, qui avait été son élève. En 1985, empêché de se déplacer par la maladie, c'est à son domicile qu'il reçut des mains de René Girault sa décoration de chevalier de la légion d'honneur.

Le Centre Jean-Bouvier d'histoire économique et sociale du département d'histoire de l'université Paris VIII, placé sous la responsabilité de Michel Margairaz, se place dans la filiation de Jean Bouvier et Ernest Labrousse. L'Association pour le développement de l'histoire économique (ADHE), fondée en 1989 par Jacques Marseille, décerne le prix Jean-Bouvier qui récompense une maîtrise d'histoire économique.

Le militant

Jean Bouvier adhéra aux Jeunesses communistes dès le lycée, en 1935, et il vécut intensément les bagarres, meetings et manifestations du Front Populaire.

En 1953, l'année de la mort de Staline, il publia aux Editions sociales avec son collègue Jean Gacon, en militant communiste convaincu, un livre intitulé La vérité sur 1939, dans lequel il prétendait réfuter scientifiquement l'annexe secrète du pacte germano-soviétique. Cet ouvrage lui valut l'estime du Comité central du parti communiste, qui le consulta en 1957 avant les congrès des syndicats d'enseignants. Il reconnut publiquement son erreur par la suite, en de nombreuses occasions, lorqu'il eut commencé à s'éloigner du PCF.

Comme pour beaucoup d'autres, les révélations du rapport Khrouchtchëv, venant conforter les doutes qui l'habitaient déjà, puis la répression par l'armée soviétique du soulèvement hongrois de 1956 furent pour Jean Bouvier une tragédie personnelle. Il s'adressa un peu plus tard à la direction du PCF pour tenter d'obtenir de celui-ci une prise de distance publique envers l'URSS, mais le refus qu'il essuya marqua alors sa rupture intellectuelle avec le parti. Mais ce furent les événements de mai 68 en France et la répression du Printemps de Prague qui l'amenèrent à la rupture définitive avec les instances officielles du PCF en 1969.

Il ne cessa pas pour autant de participer aux recherches et aux débats de l'Institut Maurice Thorez et, en 1969, il fonda, en compagnie d'autres intellectuels issus du PCF, comme Paul Noirot et Madeleine Rebérioux, la revue mensuelle Politique aujourd'hui, dans laquelle il écrivit à plusieurs reprises. Il garda de nombreux liens avec les intellectuels restés dans le parti ou comme lui ex-communistes. Dans les débats politiques des années 1970 et 1980 il fut un partisan constant de l'Union de la gauche. A la fin de sa vie, il se rapprocha d'un socialisme réformiste.

Ouvrages de Jean Bouvier

  • Le Krach de l’Union Générale, 1960.
  • Finance et financiers de l'ancien régime (avec Henry Germain-Martin), PUF, 1964
  • Le Mouvement du profit en France au XIXe siècle[1] (avec François Furet et Marcel Gillet), Éditions de l'EHESS, 1965, ISBN 2713201543
  • Les Rothschild[2], Club français du livre, 1967, ISBN 2870271123
  • Naissance d'une banque : le Crédit lyonnais, Flammarion, 1968
  • Les deux scandales de Panama, Gallimard, 1973, ISBN 2070288676
  • Deux siècles de fiscalité française de Robert Schnerb (avec Jacques Wolff), Mouton, 1973
  • Initiation au vocabulaire et aux mécanismes économiques contemporains, XIXe-XXe siècle, CDU SEDES, 1982, ISBN 2718121378
  • États, fisc, économie (avec Jean-Claude Perrot), Actes du Ve congrès de l'Association française des historiens économistes, Sorbonne, 1985
  • La France restaurée, 1944-1954 (avec François Bloch-Lainé), Fayard, 1986, ISBN 2213018030
  • L’Impérialisme à la française : 1914-1960 (avec René Girault et Jacques Thobie), La Découverte, 1986, ISBN
  • L’Historien sur son métier : Études économiques XIXe-XXe siècles, EAC, 1989, ISBN 2881241948
  • Le Crédit lyonnais de 1863 à 1882 : les années de formation d'une banque de dépôt[3], Éditions de l'EHESS, 1999, ISBN 2-7132-1278-2

Bibliographie

  • Patrick Fridenson, « L'élan de Jean Bouvier », Le Mouvement social, no 142 (jan.-mar., 1988)
  • Patrick Fridenson et André Straus : Jean Bouvier, in Dictionnaire biographique du Mouvement Ouvrier et du Mouvement social, sous la direction de Claude Pennetier, Editions Ouvrières, Paris, 2006.
  • Alain Plessis , « Jean Bouvier (1920-1987) L’histoire et l’économie. » Revue d'Histoire Moderne et Contemporaine, T. 35e, No. 4, oct. – déc., 1988.

Notes et références

  1. Le profit, moteur de l’économie capitaliste, fait ici l’objet d’une enquête sur l’économie française du XIXe siècle à partir d’éléments statistiques, bilans de grandes sociétés et documents comptables. Elle prouve la solidité des hypothèses de François Simiand et Nikolai Kondratieff et permet de critiquer celle de Rostow avant de conclure sur la répartition du profit entre les entreprises et leurs actionnaires et sur l’essor du haut capitalisme à la « belle époque ».
  2. Tout en se livrant à une analyse fouillée des circonstances et des démarches qui ont abouti à la fondation d’un empire financier au XIXe siècle, Jean Bouvier retrace l’histoire d’une étonnante dynastie. Elle confirme que le capitalisme familial a montré une grande capacité de résistance, de dynamisme et d’adaptation.
  3. Les archives du Crédit lyonnais pour la période 1863-1882 permettent de retracer les débuts d’une entreprise bancaire en partant de ses propres documents. Au cours de cette période, il existe des continuités économiques indéniables mais aussi des mutations, fort visibles dans le secteur bancaire, bien connues dans leurs traits et leurs effets généraux mais ignorées dans leurs processus concrets. Le Crédit lyonnais, considéré provisoirement en tant que « banque de dépôts », apparaît alors comme un instrument nouveau de crédit, comme une invention – mais dont ses créateurs ne furent pas les inventeurs.

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