Grimoire

Grimoire

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Un grimoire est un livre composé de recettes de potions, de sorts et autres choses magiques.

Définition par Claude Lecouteux : le grimoire est un « livre de magie » qui « se présente comme un mélange de recettes diverses, aussi bien pour guérir certains maux que pour conjurer ou invoquer les démons, obtenir tel avantage, fabriquer des talismans et des amulettes, lever ou jeter des sorts, etc. » ; le grimoire appartient à « un type d'écrits anathémisés par l'Église » [1].

Les critères sont donc les suivants : c'est un livre qui parle de magie, qui s'adresse à des magiciens ou sorciers, qui contient des formules, qui est condamné par l'Église. Exemple:

« De l'amour réciproque de l'homme et de la femme. Comme il n'y a rien de plus naturel à l'homme d'aimer & de se faire aimer, je commencerai l'auverture de mon petit trésor par les secrets qui conduisent à cette fin (...). Tirez de votre sang un vendredi du printemps ; mettez-le sécher au four dans un petit pot, comme est dit ci-dessus, avec les deux couillons d'un lièvre & le foie d'une colombe : réduisez le tout en poudre fine, & en faites avaler à la personne sur qui vous aurez quelque dessein, environ la quantité d'une demi-drachme; & si l'effet ne suit pas à la première fois, réitérez jusqu'à trois fois, & vous serez aimé." »

— Albert Petit, Secrets merveilleux de la magie naturelle et cabalistique du petit Albert


Sommaire

Étymologie

Le terme ne désignait pas originellement la grammaire (l'absence d'une preuve vérifiable et irréfutable le fait dire). Grammaire venant du latin "grammatica", il ne peut en conséquent pas en être la racine, pas plus que "grimace" ou "galimatias" (cf. à ce sujet aux anciens dictionnaires dans la collection numérique Gallica.bnf.fr, et plus spécifiquement le dictionnaire de 1625 de M.P.de Brosse édité par Claude Larjot, page 1553 contenant les "grammatices". Or, si nous jetons un coup d'œil au dictionnaire Latin de Félix Gaffiot, "grammatice" signifie conformément aux règles de grammaire et renvoie au terme "grammatica". Une autre piste démontre, si besoin en était que, le grimoire est objet de magie et non d'apprentissage de la langue française ou latine, il s'agit du grimoire publié à Memphis chez Alibeck l'ancien en 1517 (date et lieu présentés comme tels) qui mentionne le terme "Grimorium Verum". S'il faut de même en croire la langue grecque (selon le dictionnaire Grec d'André Coromelas, 1856, idem en ce qui regarde le dictionnaire 1852 de Fr. Noël), le terme grimoire est [βίδλίον μαγίλής , σολoμoνiχή] c’est-à-dire : un livre de magie de Salomon). Le fait que le Grimoire contient des noms d'Anges, de Démons, lettres, mots et alphabets magiques sans oublier les signatures des Esprits, mais également des appellations correspondant à Jésus, à Dieu, vient en grande partie de l'influence judéo-chrétienne et de la situation propre engrangée par l'inquisition! Une autre démonstration peut prouver à elle seule qu'il ne s'agit pas d'un précis de grammaire, la floraison linguistique au sein du grimoire appartient à presque toutes les cultures du monde (un précis de grammaire est en général adapté à une seule langue à la fois), on trouve par exemple du grec, tel "Soter" qui signifie Sauveur ; de l'hébreux comme Adonay, du latin comme "Paracletus", l'italien a également sa place avec cette formule pour empêcher une personne de dormir toute la nuit empruntée à Honorius : cinque furono li appicati, linque, linque furono li tana liati vi scongiro per Béelzebut che linque vi fate ache date a tormentar il cuore et le visuere etc.

Ces myriades de noms et de langues se retrouvent en abondance à l'intérieur de ces nombreux livres (Gremoire du Pape Honorius, Enchiridion du Pape Léon, Le véritable Dragon Noir etc.)et souvent déformés d'un livre à l'autre; Soter devient Sother, Otheos devient ô Theos. Ce mélange étrange, et les quelques fautes de recopies (parfois intentionnelles, ce qui n'est pas toujours le cas) avaient pour but d'égarer soit le profane soit un Inquisiteur, voire les deux.

Histoire

Les premiers grimoires apparaissent au milieu du XIII° siècle (ou XII° selon d'autres). On en trouve la liste chez divers auteurs, dont Roger Bacon, Guillaume d'Auvergne dans son De legibus et son De universo, Pietro d'Abano.

Les condamnations de l'Église pleuvent. Le pape Paul IV, en 1557, condamne divers livres de magie : ainsi commence l'Index librorum prohibitorum, qui listera jusqu'en 1966.

Ces livres furent imprimés dès le XVI° s.

Ces ouvrages ont fasciné de nombreux écrivains, parmi lesquels Milton dans Le paradis perdu, Goethe dans son Faust, Gérard de Nerval, Lovecraft.

Typologie

Les prescriptions (codées) sont tantôt savantes tantôt populaires ; elles relèvent tantôt de la magie blanche, de la théurgie (magie divine), de la médecine, donc d'un but positif, tantôt de la magie noire, de la sorcellerie, du satanisme, donc d'un but destructif. On trouve des grimoires d'astrologie (Picatrix), de magie, de médecine (Le médecin du pauvre), de talismanie (Enchiridion du pape Léon), de satanisme (Grimoire du pape Honorius, Le dragon rouge), etc.

Bibliographie

Liste de grimoires

  • Cyranides (vers 100) : texte grec : D. Kaimakis, Cyranides, Meisenheim-am-Glan, 1976 ; en traduction latine : Louis Delatte, Textes latins et vieux français relatifs aux Kyranides, Liège, Droz, 1942, 316 p. P. 1-206. C'est un recueil de recettes magiques. [1]
  • Pseudo-al-Majrîtî (Picatrix), Le but des sages dans la magie (Ghâyat al-hakîm fi'l-sihr) (Picatrix) (vers 1050), trad. de la version latine (1256) : Le Picatrix. Un traité de magie médiéval, Turnhout (Belgique), Brepols, "Miroir du Moyen-Âge", 2003, 383 p. Extraits en ligne : [2]
  • Le Grand Albert (avec des morceaux remontant en partie à Albert le Grand, au milieu du XIIIe s.). Édi. classique : Admirables secrets d'Albert le Grand, contenant plusieurs traités sur la conception des femmes et les vertus des herbes, des pierres précieuses et des animaux, Cologne, 1703. Édi. par Claude Seignolle : Les Évangiles du diable. Le Grand et le Petit Albert, Paris, Robert Laffont, coll. "Bouquins", 1999, 1050 p., pp. 687-806 (Le Grand Albert), 807-895 (Secrets merveilleux de la magie naturelle et cabalistique du Petit Albert). Extraits en ligne du Grand Albert [3].
  • Enchiridion Leonis papae. Enchiridion du pape Léon (1525, 1601, mais daté de 800, entre Charlemagne et le pape Léon III). Première trad. fr. 1579. Enchiridion du pape Léon : pentacles protecteurs de Pape Léon III, Bussière, coll. "Diffusion scientifique", 1990. Très estimé d'Éliphas Lévi, qui y voit "un recueil de prières allégoriques ayant pour clef les pentacles les plus mystérieux de la kabbale" (Histoire de la magie, IV, 3). Art de découvrir son "propre génie" (son bon ange).
  • Grimoire du pape Honorius le Grand, avec un recueil des plus rares secrets (1670, en réalité après 1728 ; daté du pape Honorius III vers 1220) [4] [5], Bussière, coll. « Grimoires de magie », 1995, 132 p. Le diable y est montré comme un instrument de puissance.
  • Le Livre de Romain (Romanus-Büchlein). Grimoire très répandu en Allemagne du XVIIe à la fin du XXe s. Extraits dans Cl. Lecouteux, Le livre des grimoires, p. 224-247.
  • Véritables clavicules de Salomon (vers 1700, mais daté de 1517), Bussière, coll. « Grimoires de magie », 1998, 100 p. Les vrais clavicules du roi Salomon [6]
  • Clavicules de Rabbi Salomon et Le livre de la Clavicule de Salomon Roy des Hébreux (fin du XVII° s.)[2]
  • Le Petit Albert ou Le secret des secrets de nature (1ère éd. 1706). Édi. classique : Secrets merveilleux de la magie naturelle et cabalistique du Petit Albert, traduits exactement sur l'original latin qui a pour titre : Alberti Parvi Lucii Libellus de mirabilibus naturae arcanis [7]. Le grand et le Petit Albert, Trajectoire, 1999, 391 p.
  • Le véritable Dragon rouge, où il est traité de l'art de commander les esprits infernaux, aériens et terrestres, faire apparaître les morts, lire dans les astres, découvrir les trésors, sources minières, etc. (1750 - ?) , Bussière, 1999, 105 p. D'après Éliphas Lévi, ce grimoire serait détenteur des clefs de la magie noire, et Papus affirmait que c'était un des rares traités qui détaillait le moyen de faire des pactes avec les démons.
  • La poule noire. Sciences des talismans et anneaux magiques, art de la nécromancie et de la cabale, pour conjurer les esprit aériens et infernaux, les sylphes, les ondins, les gnomes : acquérir la connaissance des sciences secrètes ; découvrir les trésors et obtenir le pouvoir de commander à tous les êtres, déjouer tous les maléfices et sortilèges (XVIIIe s.). In François Ribadeau-Dumas, Grimoires et rituels magiques (1972) ; Le véritable dragon rouge plus la poule noire, De Boree, 2008.

Études sur les grimoires

  • Claude Lecouteux, Le Livre des grimoires. De la magie au Moyen Âge, 2002, Imago, 3° éd. revue 2008. Extraits et commentaires.
  • François Ribadeau-Dumas, Grimoires et rituels magiques (1972), Pré aux clercs, 2008, 529 p. Édition des grands grimoires : Livre des conjurations du pape Honorius, Enchiridion du pape Léon III, Le Dragon rouge", La Poule noire ou le livre de la science du Bien et du Mal, Le Génie et le Trésor du Vieillard des Pyramides, La Chouette noire (suite de la narration du Vieillard), le Rituel de Haute Magie du Pseudo-Henri-Corneille Agrippa de Nettesheim.
  • Pierre Saintyves, Les grimoires à oraisons magiques, Nourry, 1926.

Notes et références

  1. Claude Lecouteux, Le Livre des grimoires, 2002, Imago, 3° éd. revue 2008 p. 9)
  2. Extraits : Robert-Léon Wagner, "Sorcier" et "Magicien". Contribution à l'histoire du vocabulaire de la magie, Droz, 1939, p. 269-276.

Voir aussi

Articles connexes

Liens externes

  • [8] grimoires

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