Foulque le jeune

Foulque le jeune

Foulque V d'Anjou

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Foulque V d'Anjou, dit le Jeune, né vers 1091 à Angers, mort le 10 novembre 1143 ou 1144 à Acre, fut comte d'Anjou et de Tours de 1109 à 1129, comte du Maine de 1110 à 1129, puis roi de Jérusalem de 1131 à 1143. Il était de la famille des Ingelgeriens et fils cadet de Foulque IV le Réchin, comte d'Anjou et de Tours, et de Bertrade de Montfort.

Sommaire

Biographie

Enfance

Sa mère est la cinquième épouse de son père et avait été épousée à la suite d'un marchandage entre Foulques le Réchin, Robert II Courteheuse, duc de Normandie et Guillaume, comte d'Évreux : Foulques aidait Robert à mater la révolte des Mançois, Robert acceptait de rendre à Guillaume les terres de son oncle Raoul de Gacé et Guillaume accordait à Foulques la main de sa pupille Bertrade, que ses contemporains considèrent d'une très grande beauté. Foulque nait peu après de ce mariage, mais l'ambition de Bertrade ne s'arrête pas au comté d'Anjou et considérant que son mariage est nul puis que la précédente épouse de Foulques est encore en vie, Bertrade abandonne son mari et rejoint Philippe Ier, roi de France en emmenant son fils avec lui[1].

Foulque le jeune vit à la cour royale à Paris pendant que son beau-père et sa mère encourent les foudres de l'Église et sont excommuniés par le pape Urbain II, celui qui appelle en 1095 la chrétienté à délivrer les Lieux Saints. Ce n'est qu'en 1104 que Bertrade, touchée par le prêche de Robert d'Arbrissel se soumet aux décisions de l'Église et se retire à Fontevraud[2].

Il semble que Foulque le jeune reste encore à la cour du roi, mais en 1106, son demi-frère Geoffroy Martel, héritier du comte d'Anjou, se révolte contre son père et est assassiné au siège de Candé. Foulque le jeune, devenu héritier, quitte alors Paris pour rejoindre son père et est associé au gouvernement du comté. Il n'a que quinze ans, et son père Foulque le Réchin meurt trois ans plus tard, en 1109[3].

Comte d'Anjou et du Maine

En rouge foncé, les fiefs de Foulques d'Anjou : Anjou, Touraine et Maine.

Bien qu’il se démarque de ses ancêtres par sa douceur, son affabilité et sa loyauté, il n’en reste pas moins un seigneur attaché à maintenir la puissance de ses états et passe sa vie à mater et réduire ses vassaux les plus turbulents, notamment ceux d'Amboise, à l’instar de son contemporain, le roi de France Louis VI le Gros. Il prend ainsi les châteaux forts de Doué et de l’Isle-Bouchard (1109), de Brissac (1112), de Montbazon (1118) et de Montreuil-Bellay (1124)[4]. Il réprime également les tentatives d’indépendances des bourgeois, freine les mouvements d’émancipation communale et se fait obéir de la féodalité ecclésiastique[5].

Juste après son avènement, il épouse Erembourg, fille et héritière d'Hélie de Beaugency, comte du Maine. Ce mariage rattache définitivement le Maine à l'Anjou, mais le contraint à mener une politique louvoyante entre Henri Ier Beauclerc, roi d'Angleterre et duc de Normandie, et Louis VI le Gros, roi de France [5].

Mais son action ne se limite pas à une politique intérieure, et il intervient dans le conflit qui oppose les héritiers de Guillaume le Conquérant. Il s’allie au roi Louis VI le Gros, reçoit en échange la charge de sénéchal et soutient avec son roi la cause de Guillaume Cliton, prétendant au duché de Normandie contre son oncle Henri Ier Beauclerc, roi d’Angleterre. En 1112, l’aide de Louis VI lui permet de conserver le Maine envahit par Henri Beauclerc. En 1113, il se rapproche du roi anglais et fiance sa fille Mathilde[6] à Guillaume Adelin, fils d’Henri Beauclerc. En 1116, il revient à l’alliance capétienne et combat Thibaut IV de Blois, neveu d’Henri et ennemi de Louis VI, puis participe à la campagne de Louis VI en faveur de Guillaume Cliton et contre Henri. La mort au combat du comte Baudouin VII de Flandre (1119), autre soutien de Guillaume Cliton, incitent Louis et Foulque à conclure un accord avec Henri Beauclerc, et Guillaume Adelin épouse Mathilde[5].

Foulque profite de cette paix pour effectuer un pèlerinage à Jérusalem qu’il atteint en mai 1120 et où il se fait apprécier par sa valeur, son courage et sa piété. Quand il rentre en Europe, il apprend que Guillaume Adelin était mort le 25 novembre 1120 dans le naufrage de la Blanche-Nef, et qu’Henri Beauclerc refuse de rendre la dot. Foulque soutient de nouveau les prétentions de Guillaume Cliton, qu’il marie en 1123 à sa seconde fille Sibylle et lui donne le Maine en dot, mais le pape intervient et annule le mariage le 26 août 1124[5].

Foulque n’en continue pas moins à soutenir Guillaume Cliton, mais la situation change encore 1127. D’une part, Charles le Bon, comte de Flandre est assassiné le 2 mars 1127, et Guillaume Cliton, petit-fils de Mathilde de Flandre et beau-frère de Louis VI le Gros par son second mariage, revendique le comté de Flandre. D’autre part, Mathilde, l’unique enfant légitime d’Henri Beauclerc, veuve de l’empereur Henri V depuis 1125, est reconnue héritière du royaume d’Angleterre par son père qui propose sa main à Geoffroy, fils aîné de Foulques. L’accord est rapidement conclu et le mariage est célébré au Mans le 17 juin 1128, jetant ainsi les bases de l’empire plantagenêt. Trois mois plus tôt, le 31 mai 1128, Foulque avait pris la croix et, après une dernière visite à Fontrevault où s’était retirée sa fille Mathilde, veuve de Guillaume Adelin, confie tous ses domaines à son fils et part définitivement en Terre Sainte, au début de l’année 1129[5],[4].

Héritier du royaume de Jérusalem

mariage entre Foulque d'Anjou et Mélisende de Jérusalem

En effet, de l’autre côté de la Méditerranée, le roi Baudouin II de Jérusalem, prend de l’âge, n’a pas de fils pour lui succéder et cherche un héritier à marier à sa fille aîné Mélisende. En 1127, il envoie son connétable Guillaume de Bures et Gautier de Brisebarre, seigneur de Beyrouth demander conseil auprès du roi Louis VI de France, lequel désigne le comte Foulque V d'Anjou. Le choix est heureux, car le comportement, la piété et la vaillance de Foulque lors de son pèlerinage de 1120 avait valu l’admiration de tous. De plus, Baudouin connaissait par ses contacts en Occident les qualités d’administrateur, de chef guerrier et savait également qu’il était veuf depuis 1126. Foulque aborde à Saint-Jean-d'Acre au milieu du printemps et épouse Mélisende de Jérusalem le 2 juin 1129[7].

La première intervention de Foulque en tant qu'héritier du royaume est d'assister son beau-père qui tente de conquérir Damas. Tughtekin, le précédent atabeg, est mort le 12 février 1128 et son fils Taj el-Moluk Buri lui a succédé sans difficulté, mais les Nizarites s'implantent et contrôlent peu à peu son entourage. De confession chiite et haïssant les sunnites, ils commencent à comploter et à négocier avec les Francs pour leur livrer la ville. Baudouin II se prépare à cette éventualité quand la population de Damas se révolte et massacre les Nizarites en septembre 1129, faisant échouer les plans de Baudouin II, qui tente néanmoins le siège de la ville, mais y renonce le 5 décembre 1129 à cause de pluies diluviennes qui rendent le sol boueux et impraticable[8],[9].

En février 1130, le prince Bohémond II d'Antioche est tué en Cilicie par les Turcs. Il ne laisse qu'une enfant, Constance, pour lui succéder sous la régence de sa veuve Alix de Jérusalem, fille de Baudouin II. Mais Alix ne veut pas se contenter de la régence, mais veut diriger directement la principauté et, prévoyant l'opposition de son père et des principaux barons, envoie un messager à Zengi, atabeg de Mossoul et d'Alep lui demandant sa protection. Heureusement, le messager est intercepté, et Baudouin et Foulque se rendent à Antioche pour y mettre de l'ordre. Alix est exilée à Laodicée[10],[11].

Roi de Jérusalem

Les États latins d'Orient en 1135.

Baudouin II meurt à Jérusalem le 21 août 1131 et la succession ne pose aucun problème. Reconnu roi sans difficulté par la Haute Cour du royaume, Foulque et Mélisende sont sacrés roi et reine au Saint Sépulchre le 14 septembre 1131[12],[13]. Le comte Josselin Ier d'Édesse meurt la même année et son fils Josselin II, un piètre guerrier, lui succède, et préfère séjourner à Turbessel plutôt qu'à Édesse, qu'il juge trop exposé. A Lodicée, Alix noue des alliances avec Guillaume, châtelain de Sahyun, Josselin II et Pons de Tripoli pour reprendre le pouvoir à Antioche. Les barons d'Antioche, apprenant le complot, appellent Foulque qui vient avec son armée, mais à qui le comte Pons de Tripoli refuse le passage dans ses états. Afin d'éviter une effusion de sang qui profiterait à Zengi, Foulque embarque à Beyrouth pour Saint-Siméon, arrive à Antioche où il empêche les intrigues d'Alix. Puis il attaque Rugia, d'où le comte Pons espère envahir la principauté d'Antioche, et l'oblige à la reddition et à la soumission. Foulques reste ensuite quelques temps à Antioche pour régler les affaires de la principauté, dont il est régent, puis confie l'administration à Renaud Masoier, connétable d'Antioche[14].

Espérant profiter des troubles internes, des bandes turcomanes envahissent la principauté d'Antioche, d'où ils sont repoussés, puis le comté de Tripoli où ils battent Pons et l'obligent à se réfugier dans Montferrand. Avertie, son épouse Cécile de France, demi-sœur de Foulques[15], se précipite à Jérusalem pour demander secours à son frère. Foulques arrive à temps pour obliger les Turcomans à lever le siège de Montferrand, puis bat les troupes d'Alep à Qinnesrin[16].

Les années qui suivent sont militairement calmes, car Zengi est occupés par les luttes entre les califes abbassides de Bagdad et les sultans seldjoukides, et n'intervient pas en Syrie jusqu'en 1137 et les Francs en profitent pour construire des forts permettant d'assurer la sécurité des routes[17].

Parmi les principaux barons du royaume figure Hugues II du Puiset, comte de Jaffa, un cousin et un ami d'enfance de la reine, et les esprits malveillants les accusaient d'avoir une liaison. Peu à peu se forment deux camps, les partisans du roi et ceux du comte de Jaffa. Gautier de Grenier, seigneur de Césarée, beau-fils du comte de Jaffa hostile à son beau-père, l'accuse de trahison et lui lance un défi. Hugues l'accepte, mais ne se présente pas le jour fixé pour le duel judiciaire et est déclaré coupable. Pris de peur, Hugues de Jaffa se réfugie à Ascalon sous la protection des Égyptiens, mais ses vassaux refusent l'alliance égyptienne et l'abandonnent. Hugues est alors obligé de se soumettre, et est exilé pour une durée de trois ans. Au moment de s'embarquer, il est attaqué par un chevalier breton et grièvement blessé. Voulant couper court aux accusations d'avoir commandité le meurtre et aux risques d'émeutes, Foulque fait juger le coupable par la Haute Cour des barons et ordonne que l'exécution soit publique et qu'on ne lui coupe pas la langue, pour lui permettre de parler jusqu'au bout, et la loyauté du roi dans cette affaire est reconnue par tous. Hugues du Puiset se rétablit, contre tout attente et se rend en Sicile, où il meurt peu après. Mais le courroux de Mélisende de Jérusalem s'exerce longtemps sur les protagonistes, au point que certains craignent pour leur vie, avant qu'il ne finisse par s'apaiser[18],[19].

Mélisende profite de son ascendant sur son mari, qui cherche à se faire pardonner, pour le faire autoriser le retour de sa sœur Alix à Antioche. Le nouveau patriarche, Raoul de Domfront, en lutte contre son clergé, trouve en elle une alliée et ne s'oppose pas à son retour, mais Foulque contre ce retour et cette complaisance en négociant le mariage de la princesse Constance avec Raymond de Poitiers (1136)[20].

Mort de Foulque suite à une chute de cheval. Guillaume de Tyr, XIIIe siècle

Zengi, ayant réglé les affaires irakiennes, reprend l'offensive contre les Francs qui sont acculés à la défensive, mais l'empêchent de s'emparer de Damas (février 1135) et de Homs (juillet 1137). Il attaque ensuite Montferrand, bat Foulque qui conduit une armée de secours l'oblige à se réfugier dans la forteresse et le pousse à livrer la place forte en échange de la vie sauve et de la liberté, malgré l'arrivée d'une autre armée de secours (août 1137)[21],[22].

C'est à cette époque que Jean II Comnène, empereur byzantin, intervient en Cilicie, puis assiège Antioche. Ayant besoin de toute l'aide militaire contre Zengi, Foulque et Raymond acceptent de reconnaitre la suzeraineté byzantine sur Antioche, concluent une alliance et envisagent une expédition de conquête d'Alep. Mais la mésentente franco byzantine fait échouer le siège de Shaizar en mai 1138 et Jean Comnène repart à Byzance[23],[24]. Pour compenser le départ de cet allié, Foulque conclue un pacte d'assistance avec Mu'in ad-Din Unur, régent de Damas, également menacé par Zengi[25],[26].

Afin de renforcer la sécurité du royaume vis à vis des incursions égyptiennes, Foulque ordonne la construction de forteresse à Ibelin, Blanche-Garde, Bethgibelin et Moab[27]. Il meurt à Acre le 10 novembre 1143 d'une chute de cheval, laissant deux fils mineurs, les futurs Baudouin III et Amaury Ier[28].

Mariage et enfants

Il avait épousé en premières noces en 1110 Erembourg († 14-1-1126), comtesse du Maine, fille d'Hélie de Beaugency, comte du Maine, et de Mathilde de Château-Du-Loir, et avait eu :

Veuf, il se remaria avec Mélisende de Jérusalem (1101 † 1161), fille de Baudouin II, roi de Jérusalem, et de Morfia de Malatya. Ils eurent :

Précédé par Foulque V d'Anjou Suivi par
Foulque IV le Réchin
comte d'Anjou et de Tours
1109-1129
Geoffroy V le Bel ou Plantagenêt
Hélie de Beaugency
comte du Maine
1110-1129
avec Erembourg du Maine
Baudouin II
roi de Jérusalem
1131-1143
avec Mélisende de Jérusalem
Baudouin III

Notes et références

  1. Gobry 2003, p. 16-8
  2. Gobry 2003, p. 19-26 et 55-63
  3. FranceBalade.
  4. a  et b Grousset 1935, p. 13.
  5. a , b , c , d  et e Balteau 1936, p. 1269 et Levron 1965, p. 183.
  6. D’abord prénommée Alice ou Isabelle, elle adopte le prénom de Mathilde à son mariage (Foundation for Medieval Genealogy).
  7. Grousset 1934, p. 688.
  8. Grousset 1934, p. 689-696.
  9. Maalouf 1983, p. 131-4
  10. Grousset 1934, p. 702-7.
  11. Maalouf 1983, p. 138-9
  12. Grousset 1934, p. 707-8.
  13. Grousset 1935, p. 14.
  14. Grousset 1935, p. 16-21.
  15. Ils ont tous deux Bertrade de Montfort pour mère.
  16. Grousset 1935, p. 22-6.
  17. Grousset 1935, p. 26-9.
  18. Grousset 1935, p. 34-40.
  19. Maalouf 1983, p. 140
  20. Grousset 1935, p. 40-48.
  21. Grousset 1935, p. 64-87.
  22. Maalouf 1983, p. 147-8
  23. Grousset 1935, p. 87-125.
  24. Maalouf 1983, p. 148-151
  25. Grousset 1935, p. 125-146.
  26. Maalouf 1983, p. 152-8
  27. Grousset 1935, p. 154-160.
  28. Grousset 1935, p. 163-5.

Annexes

Sources de la partie française de sa vie

  • Ivan Gobry, Histoire des Rois de France, Louis VI, père de Louis VII, Pygmalion, Paris, 2003, 366 p. (ISBN 2-85704-843-2) 
  • J. Balteau, « ANJOU (Comtes d’) » dans Dictionnaire de Biographie Française, vol. 2, Paris, 1936 [détail des éditions]  , col. 1263-1271
  • Notice « Foulque V », dans leJacques Levron et Pierre d’Herbecourt et , Dictionnaire historique, géographique et biographique de Maine et Loire et de l’ancienne province d’Anjou, t. 2, Angers, 1965, p. 183 

Source de la partie orientale de sa vie

  • René Grousset, Histoire des croisades et du royaume franc de Jérusalem, Perrin, Paris, 1936 (réimpr. 1999) 
    • I. 1095-1130 – L’anarchie musulmane, 1934 (ISBN 2-262-02548-7)
    • II. 1131-1187 – L’équilibre, 1935 (ISBN 2-262-02568-1)
  • Amin Maalouf, Les croisades vues par les arabes, J’ai lu, 1983 (ISBN 978-2-290-11916-7) 

Bibliographie

Articles connexes

Liens externes

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