Expédition de Madagascar

Expédition de Madagascar
Bombardement de Tamatave le 11 juin 1883, dans Le Monde Illustré.

L'expédition de Madagascar est une intervention militaire qui a conduit à la colonisation de Madagascar par la France. Il y eut en fait deux expéditions, la première en 1881-1882 et la seconde en 1894-1895, qui aboutit à la signature d'un protectorat. Des révoltes locales furent ensuite combattues par le général Gallieni fin 1897.

Sommaire

La France sur la scène internationale

Les « événements de Madagascar » selon Le Petit Journal (1895), qui ne dépeint pas la guerre mais l'exode des colons

Durant ces années, la France est isolée face à la politique de Bismarck, soucieux de lui barrer toute possibilité de revanche. La politique du chancelier de la nouvelle Allemagne est donc l'une des causes qui poussent la France à rechercher des « aventures » outre-mer, comme au Tonkin et à Madagascar.

Les expéditions coloniales sont principalement l’œuvre des républicains arrivés au pouvoir durant les années 1880, avec la dissolution du parti monarchiste. Les expéditions coloniales sont, pour la France, un moyen de rétablir sa place dans le monde, après la perte de l’Alsace-Lorraine lors de la défaite de 1870. Cette politique est surtout encouragée par les milieux d’affaires et les militaires. Les premiers cherchent de nouveaux débouchés suite à la crise économique qui frappe l’Europe. Les seconds veulent redorer leur blason et s'illustrer. Les parlementaires sont souvent pris de court face aux événements et aux initiatives des militaires.

Statut de Madagascar

Avant l’intervention française de 1881-1882, l’île ne subit que peu d'influences européennes. Sous les règnes des reines Ranavalona II (1808-1883) et Ranavalona III (1883-1895), du royaume Merina, alors hégémonique sur l’île, le Premier ministre Rainilaiarivony tente d’utiliser les tensions entre Européens pour protéger l’indépendance du pays et de le moderniser avec des cadres occidentaux. On retiendra le rôle de Jean Laborde, un naufragé devenu très sollicité à la cour royale d'Antananarivo, la capitale du royaume Merina, et qui créa des manufactures de bougies, de savon, de verre, de fusils, et de canons.

La France est frustrée par l’influence britannique, dont les missionnaires protestants ont obtenu la conversion de la reine en 1869. Paris ne peut donc que repousser les demandes des élites de La Réunion qui réclament une intervention.

Première expédition

Une gravure de 1895 qui perpétue l'idéologie coloniale.

En 1881-1882 s’ouvre une première crise avec le royaume Merinas à la suite d’une démonstration de force anglaise devant Madagascar déclenchant un avertissement de la France sur Tananarive. Paris négocie, malgré les demandes de fermeté de La Réunion. Tananarive se montre ferme, espérant qu'une délégation en Europe obtiendra le soutien de l'une ou l'autre puissance, et refuse à la France et la succession de Laborde (dont la France réclamait les usines), les îles au nord-est de Madagascar, considérées comme propriété de la reine.

Avec la chute du cabinet Duclerc, remplacé par le cabinet Fallières qui dure de janvier à février 1883, le ministère de la Marine est confié à François de Mahy, un Réunionnais. Il adresse au royaume Merina un ultimatum qui demande la satisfaction des demandes françaises et un protectorat sur l’île. Cet ultimatum ayant été rejeté, l’amiral Pierre fait occuper Majunga (16 mai) et Tamatave (10 juin). Mais, ses forces étant simultanément engagées au Tonkin, la France ne peut aller plus loin et occuper Tananarive. L’amiral Galibier prend possession de Fort-Dauphin / Tôlanaro, Vohémar/Iharana et Morondava.

Les protestations britanniques croissent face à ces empiétements. En décembre 1885 est signé un compromis : la France reconnaît l’État malgache contre une lourde indemnité et le port de Diego Suarez (Antsiranana), tandis que le royaume Merina accepte que la France « préside aux relations extérieures de Madagascar », à défaut du titre de protectorat. Le texte est flou et prête à interprétation des deux côtés. On parle d'un « protectorat fantôme ».

Seconde expédition

L’affaire de Madagascar revient sur le devant de la scène avec la signature d’une convention franco-britannique le 5 août 1890. Contre la reconnaissance par la France du protectorat britannique sur Zanzibar, le Royaume-Uni fait de même pour le protectorat français sur Madagascar. En novembre, l’Allemagne rejoint l’accord contre la reconnaissance de ses droits sur l’Afrique orientale allemande. Les Malgaches sont désemparés, des troubles éclatent qui voient l’assassinat de plusieurs Européens.

En 1892, le parti colonial demande l’application du protectorat sur l’île. Les Réunionnais, par la voix de leur député Mahy, demandent une annexion pure et simple. Le 22 janvier 1894, le gouvernement Casimir Périer, répond favorablement à ces demandes et se dit prêt à prendre des mesures graves. Les parlementaires votent à l’unanimité un chèque en blanc au gouvernement pour « maintenir notre situation et nos droits, rétablir l’ordre, protéger nos nationaux, faire respecter le drapeau ».

Cependant, le gouvernement, qui hésite encore, ne fait que renforcer les garnisons des comptoirs français et envoie une escadre navale, tentant une dernière démarche diplomatique pour établir un véritable protectorat. Après le refus de la reine le 22 octobre 1894, la France procède à l’évacuation de ses ressortissants le 25 ; la guerre est déclarée.

Le gouvernement envoie une expédition de 15 000 hommes, qui est présentée comme une grande affaire nationale à l’opinion publique française. Le 12 décembre, l’escadre de l’amiral Bienaimé occupe Tamatave et débarque à Majunga. Le corps expéditionnaire est dirigé par le général Duchesne, ancien du Tonkin et d’Algérie et le chef des services de renseignements du corps expéditionnaire est le lieutenant-colonel Léon de Beylié.

L’expédition souffre terriblement de son manque de préparation. Les hommes manquent de quinine contre le paludisme. Alors que le corps n’a perdu que 25 hommes au combat, 5 756 meurent de maladie. L'expédition, qui est la plus meurtrière de toutes, perd près de 40 % de ses effectifs.

L'absence de résistance organisée des Malgaches ainsi que la prise de Tananarive le 30 septembre 1895 permettent la mise en place d’un protectorat le 1er octobre, mais au prix de la naissance d'un fort mouvement anticolonial. Ce protectorat ne convient pas aux Réunionnais et au parti colonial, qui réclamaient l’annexion. Par décision unilatérale, par décret du 11 décembre 1895 et la loi du 6 août 1896, Madagascar est annexé et rattaché au ministère des Colonies. L’île s’embrase alors dès septembre 1896 et Paris envoie le général Gallieni, investi de tous les pouvoirs civils et militaires, afin de rétablir l’ordre. Il devient gouverneur général. Grâce à sa tactique de la tache d’huile, il pacifie la région et, début 1897, l’insurrection est considérée comme vaincue.

Ranavalona III est déposée en 1897.

Photos

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Voir aussi

Notes et références


Bibliographie

  • Jacques Thobie et Gilbert Meynier, Histoire de la France coloniale, tome II : L'Apogée : 1871-1931, Paris, Pocket, 1996, 629 p.
  • Denise Bouche, Histoire de la colonisation Française, tome 2 : Flux et reflux, Paris, Fayard, 1991, 607 p.

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