Eudes Le Maire

Eudes Le Maire
Eudes le Maire et sa famille
Eudes le Maire et sa famille
Bas de vitrail de l'Église St Étienne du Mont[1]
Il s'agit d'une représentation, plus de 500 ans après, d'Eudes et de sa famille : de droite à gauche on distingue Eudes le Maire, quatre de ses enfants, sa femme puis deux de ses filles. Les armes de Jérusalem sont visibles sur les prie-dieux sur lesquels sont agenouillés les époux. Il a probablement été érigé au XVIIe siècle à l'initiative de Claude Hardy - descendant de Simone Chartier et Macé Hardy - qui y serait enterré

Eudes, dit le Maire, dit de Chalo-Saint-Mard est un régisseur du domaine royal de Chalo-Saint-Mars, près d'Etampes mentionné par une charte de Philippe Ier dont la date n'est pas certaine, la fin du document ayant été interpolée ultérieurement, comme l'a montré Noël Valois dont les conclusions n'ont jamais été remises en question par quelque historien que ce soit.

Sommaire

Contenu réel de la charte de Philippe Ier

Le texte cependant est clair. Eudes part en pélerinage à Jérusalem. A cette occasion le roi promet en son absence de protéger ses enfants. Il lui accorde qui plus est un privilège assez courant en ce temps-là. Eudes est major de Chalo, régisseur du domaine, et serf lui-même semi-libre (latin famulus). Si ses descendants mâles épousent des serves, il les affranchit; en revanche si ses descendantes épousent des serfs du roi elles resteront serves, elles et leur descendance (Curieusement ce passage particulièrement clair n'a pas été trafiqué par les prétendus descendants d'Eudes; ils se sont contentés de le traduire à leur manière, en leur faisant dire exactement le contraire du texte latin, et personne n'est allé vérifier jusqu'au XVIe siècle, où des doutes se font jours). De plus la régie de Chalo est donnée en fief aux descendants d'Eudes; ils ne seront justiciables devant aucun autre de leurs pairs, sauf si c'est au nom du roi, et on ne pourra leur imposer aucune taxation dans toute l'étendue du domaine du roi, c'est-à-dire évidemment d'après le contexte, dans toute l'étendue du domaine royal de Chalo. Enfin leurs pairs d'Etampes sont priés de leur prêter main forte, car Chalo est "marche" (marchia), c'est-à-dire une zone tampon entre le domaine du roi et celui du puissant comte de Chartres.

Utilisation de ce texte

A partir du XVe siècle certaines familles d'origine étampoise prétendirent descendre d'Eudes et parvinrent à faire croire que ce texte exonérait tous les descendants d'Eudes de quelque forme d'imposition que ce soit à travers toute le royaume de France. Le succès de cette extravagante falsification n'est pas encore tout à fait expliqué.

Légende d'Eudes de Chalo développée par ses prétendus descendants et reprise par certains historiens anciens

Ces familles embellirent progressivement l'histoire et vers le XVIe siècle on commence à nous raconter que c'est à la place du roi lui-même qu'Eudes avait fait le voyage de Jérusalem, ce qui expliquerait l'extraordinaire faveur qui lui aurait été consentie. Voici l'une des versions modernes de cette légende que les généalogistes se sont efforcés jusqu'à notre époque et en dépit de toute vraisemblance de colorer de réalisme historique. Le 27 mai 1092, Philippe Ier répudie son épouse Berthe de Hollande pour se remarier avec Bertrade de Montfort, qu'il a enlevé au comte d'Anjou Foulque IV le Réchin. Cela lui vaut d'être excommunié le 16 octobre 1094 par le concile d'Autun pour bigamie (ainsi que pour d'autres accusations telles que usurpation des biens de l'Église et simonie). Cette excommunication est confirmée par le pape Urbain II le 27 novembre 1097, alors qu'il prêche la première croisade lors du concile de Clermont. Frappé d'anathème, le Roi ne peut participer à la croisade. C'est son frère Hugues de Vermandois qui en sera un des principaux protagoniste. Serviteur du Roi, voire son chacelier, Eudes de Chalo s'offre d'accomplir la croisade pour son souverain. Il propose d'accomplir le vœu de Philippe Ier d'aller au Saint Sépulcre de Jérusalem, en son nom. En récompense de ce service, le roi de France promet à Eudes une charte contenant un certain nombre de privilèges pour lui et ses descendants. Dans d'autres versions, Chalo aurait vécu sous Philippe le Bel.

Le pèlerinage d'Eudes le Maire

Voici de quelle manière différents historiens tels que André Favyn[2] en 1612 dans "Histoire de Navarre", Gilles-André de La Rocque en 1678 dans le "Traité de la Noblesse" [3], Dom Basile Fleureau en 1683 dans "Les Antiquités de la ville et du duché d'Etampes" [4], Maxime de Montrond en 1836 avec "Essais Historiques sur la ville d'Etampes" [5], François Guizot en 1839 avec "Chartes et pièces relatives à l'histoire d'Etampes" [6], Léon Marquis en  1881 avec "Les rues d'Etampes et ses monuments", etc ... racontent l'histoire d'Eudes le Maire :

Le roi Philippe I° avait fait le voeu d'aller, armé de toutes pièces, visiter le tombeau du Christ à Jérusalem, de suspendre ses armes dans le temple et de l'enrichir de ses dons ; mais les prélats et les seigneurs du royaume, prévoyant les dangers qu'occasionnerait son absence, s'efforcèrent de le retenir. Alors, un de ses serviteurs nommé Eudes Le Maire, dit Chalo Saint Mard, né à Étampes, offrit d'entreprendre lui-même le voyage à la place du roi. Il partit à pied, armé de toutes pièces, comme dans un jour de bataille, et portant dans sa main un cierge qu'il allumait en certaines occasion. Il alla en cet équipage à pied jusqu'à Jérusalem, sans se dépouiller, ni ôter le heaume et le casque. Il employa, dit-on, 2 ans à faire ce pèlerinage, tant pour la longueur et la difficulté des chemins, qu'à cause de la pesanteur de son armure, qu'il laissa suspendue dans le temple du Saint Sépulcre, ou plusieurs années après on la voyait encore, ainsi qu'un tableau d'airain, mémorial de son voeu.
Il eut un fils Ansolde et 5 filles.
En témoignage d'estime et de satisfaction pour le service signalé qui lui était rendu, Philippe I° par une charte datée du Palais d'Etampes, Mars 1083, lui accorda, ainsi qu'à ses 6 enfants et à tous leurs descendants, tant en ligne masculine que féminine, de très beaux privilèges, dont le plus remarquable était que tout fiscalin ou serf du roi qui épouserait une des filles de Chalo serait affranchi de toute servitude, ce qui a fait dire, mais peut-être à tort, que les filles de cette famille anoblissaient leurs maris. 
La franchise aurait été remise à Eudes bien avant son départ, dès mars 1085. En 1095, le départ du croisé est imminent, Eudes le Maire confie sa famille au Comte de Flandre, alors en charge de la Couronne de France. En effet, en raison de ses nombreuses exactions Philippe Ier est alors en exil à Londres, auprès des fils de Guillaume le Conquérant. Parti vers 1097, Eudes de Chalo revient à l'automne 1099 de la Terre Sainte, après avoir accompli la mission que le roi lui avait confiée : décorer le Saint Sépulcre d'un ex-voto de bronze, ainsi que de son armure.''

Eudes le Maire est cité dans l'Encyclopédie de Diderot et d'Alembert, à l'article concernant la définition de "Noblesse par Lettres", qui sont des lettres d'anoblissement accordées par le Prince.

Le privilège de Chalo Saint Mard

L'original de la charte du privilège, datée de mars 1083 selon les uns et de mars 1085 selon les autres n'est pas parvenu jusqu'à nous. Mais en 1248, sous le règne de Saint Louis, trois abbés de Paris déclarent avoir vu et lu l'original, auquel ils ont déclaré conforme la copie qui leur fut soumise et qui servit de base dans les actes des différents gouvernements qui ont succédé à celui de Saint Louis. Ce procédé jeta la suspicion auprès de certains historiens sur le contenu véritable de la charte d'origine.

Noël Valois écrivit dans l'Annuaire Bulletin de la société de l'Histoire de France - en 1886[7] puis en 1896[8] - des réquisitoires contre le privilège de Chalo Saint Mard. Tout en insistant sur les nombreuses confirmations effectuées par les différents rois de France, il décrit les différentes tentatives de François Ier et Henri IV notamment à l'encontre du privilège. Il le qualifie même de "mystification".

Malgré les doutes soulevés par les historiens sur l'existence des privilèges prétendument accordés par cette charte de Philippe Ier, les prétendus descendants d'Eudes le Maire ont bénéficié pendant plus de plus d'un siècle d'avantages importants. Il s'agit surtout de l'exonération de la plupart des droits et des impôts, tant par terre que par eau. La liste des exemptions fiscale est décrite par le prieur de Mondoville  (Bibliothèque Nationale, manuscrits français 24, 126) : les péages, barrages, ports, passages, placeages, entrée du vin, huitième, douzième, vingtième, taille, taillon, fortifications, criées, emprunts travers, coutumes, boues, chandelles, gardes, droits d'entrée, gabelles, tous autres droits, charges de tutelle, curatelle, commissions et autres charges et servitudes quelconques. Une condition accessoire au privilège astreint les descendants d'Eudes à la défense d'Étampes par ses bastions Ouest, pendant au moins trois siècles (François Guizot - extrait de Cour d'Histoire moderne T.VI : "... Le roi ordonne en outre, à ses serviteurs d'Etampes, de garder la chambre de Challou, vu que les gens de Challou doivent faire la garde à Etampes, et, que leur chambre y étant établies, ils y feront meilleur garde ..." [6]).

La descendance d'Eudes le Maire

Des six prétendus enfants d'Eudes, la légende ne donne que deux noms.

Le premier est celui de son fils Ansoud, qui participa selon certains auteurs (lesquels?) à la première croisade. Né vers 1080, il rejoint en 1099 le Duc de Normandie Robert de Courteheuse et Godefroy de Bouillon. Il aurait selon certains généalogistes parmi ses descendants des chevaliers (son fils Gilebert, co-seigneur de Thieux), des croisés (son petit-fils Pierre Fruement, qui part lors de la troisième croisade en 1189 face à Saladin), et des gentilhommes (son arrière-petit-fils Manassé, qui participe à la bataille de Bouvines en 1214, avec Philippe Auguste) Il est l'ancêtre du chevalier Lancelot de Saint Mard, Maréchal de France en 1270 sous le règne de Saint-Louis.

Parmi les cinq filles, la seule dont on cite le prénom et la postérité est Epiphanie (Tiphaine) de Saint Mard, dont prétend descendre la puissante famille Chartier. Tiphaine, Dame de Chalo Saint Mars, aurait épousé vers 1103 à Étampes Alain Chartier, dit le Fiscalin. Celui-ci aurait été Receveur Général du Fisc du Roi Philippe Ier depuis 1102. Ce couple serait à l'origine d'une nombreuse descendance, parmi lesquels on compte entre autres Godefroy de Boissy (dont le testament est à l'origine de la fondation du Collège de Boissy[9]), Guillaume Chartier (conseiller au Parlement, évêque de Paris en 1447, qui a participé au procès de réhabilitation de Jeanne d'Arc); et selon certains auteurs peut-être Alain et Jean Chartier[10].

Claude Hardy fait également partie de leur postérité

Sources

  1. Notice sur une antiquité de l'Eglise de Saint-Etienne-du-Mont Journal de l'Institut Historique - Tome 5 par Auguste Vallet (1836)
  2. Histoire de Navarre André Favyn - 1612 (transcription)
  3. Traité de la noblesse, de ses différentes espèces... par messire Gilles-André de La Roque, chevalier, seigneur de La Lontière, chapitre XIV
  4. La franchise de Challo saint Mard dans Antiquitez d’Estampes I, 24a Dom Basile Fleureau - 1668
  5. Histoire d'Eudes-le-Maire, dit Chalo Saint-Mard Essais historiques sur la ville d'Etampes (Seine et Oise) - Maxime de Montrond, Tome 1, p 75
  6. a et b Histoire d'Étampes Cours d'histoire moderne par M. Guizot - 1829-1832, p 288.
  7. Annuaire-bulletin de la Société de l'histoire de France - Le privilège de Chalo-Saint-Mard, p. 185 Noël Valois - 1886
  8. Annuaire-bulletin de la Société de l'histoire de France - Note complémentaire sur le privilège de Chalo-Saint-Mard, p. 182 Noël Valois - 1896
  9. Le Collège de Boissy - Histoire de la rue Suger Histoire de Paris rue par rue, maison par maison, par Charles Lefeuve, 1875 - Tome 2 page 286
  10. Recherches sur la filiation de Guillaume, Alain et Jean CHARTIER (leur Généalogie de 1290 à 1900) Annuaire du Conseil Héraldique de France par Francis Pérot, 1900


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