Affaire Boulin

Affaire Boulin

Affaire Robert Boulin

L'affaire Boulin est le nom donné à la mort, aux enquêtes et aux interrogations qui ont suivi le décès de Robert Boulin, ministre du Travail en exercice du gouvernement français. Son corps a été retrouvé le 30 octobre 1979 dans un étang de la forêt de Rambouillet. L'information judiciaire s'est achevée par un non-lieu en concluant au suicide mais cette thèse n'a pas été unanimement acceptée, l'existence de manquements dans l'enquête ayant pu être soutenue. La famille de Robert Boulin, notamment sa fille Fabienne Boulin-Burgeat, est convaincue que son père a été assassiné. Son combat est relayé par de nombreux journalistes, notamment de l'Humanité, Canal +, de Libération, de Minute et France Inter.

Sommaire

Les faits

En 1979, sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing, Robert Boulin est ministre du Travail du troisième gouvernement Raymond Barre. À l'automne 1979, des lettres anonymes parviennent aux sièges de plusieurs journaux. Elles accusent Robert Boulin d'avoir acquis de manière illégale une garrigue à Ramatuelle (Var), sur laquelle il a fait bâtir une résidence secondaire. Le journal d'extrême droite Minute est le premier à attaquer vigoureusement le ministre. Boulin choisit de riposter, déclarant au micro d'Europe 1 le dimanche 21 octobre : « Que voulez-vous que je réponde ? J'ai l'âme et la conscience tranquilles et j'ai été exemplaire. Peut-être encore plus que vous ne le pensez, parce qu'il y a des choses que je ne peux pas dire ici.  » Le 30 octobre 1979 à 8h40, le corps de Robert Boulin est retrouvé dans l'Étang Rompu, au plein cœur de la forêt de Rambouillet (Yvelines). Son cadavre se trouve à cinq mètres de la berge, et gît dans un endroit où la profondeur est de 50 cm.

La chronologie

  • 30 octobre 1979 : Le corps de Robert Boulin est retrouvé à 8h40 dans 50 centimètres d’eau de l’Étang Rompu, près de la forêt de Rambouillet. Le SRPJ de Versailles chargé de l’enquête conclut d'abord au suicide par noyade après absorption de barbituriques, puis, dans un deuxième temps, après ingestion de Valium. La publication des articles de presse, suite aux lettres anonymes, aurait rendu Robert Boulin dépressif. Il aurait alors ingéré une grande quantité de Valium, pénétré dans l'étang et se serait noyé.
  • octobre 1980 : Disparition des prélèvements de sang de Robert Boulin[1]. Le docteur Le Breton, responsable de l'institut médico-légal décide alors par précaution de cadenasser le frigo contenant les derniers prélèvements d’organes du ministre.
  • mai 1983 : Colette Boulin affirme sur TF1 qu’elle n’a jamais cru à la thèse du suicide de son mari et qu’après sa mort, on a fait pression sur elle pour qu’elle se taise. Le magazine Paris-Match publie des photos du corps du ministre tirées du dossier judiciaire.
  • juin 1983 : La famille Boulin, conseillée par leur avocat Jacques Vergès, dépose plainte contre X pour homicide volontaire.
  • 28 septembre 1983 : Afin de pouvoir prouver la noyade, Jacques Vergès demande au juge d’instruction Michel Maestroni, du Tribunal de Versailles, un examen anatomo-pathologique, pour comparer les particules contenues dans les poumons du ministre avec des prélèvements d’eau de l’Étang Rompu. Cette analyse ne sera jamais effectuée suite à la disparition des poumons et les prélèvements d’organes, conservés à l'institut médico-légal seront tous détruits[2].
  • 16 novembre 1983 : Une deuxième autopsie à l’hôpital Pellegrin de Bordeaux, à la demande de la famille, après exhumation du corps, met en évidence la présence de plusieurs fractures au visage non-mentionnées lors de la première autopsie en 1979. Les légistes constatent que le corps a subi des soins de thanatopraxie et d’embaumement, sans que la famille en soit informée. Ceci est contraire aux lois françaises et aurait eu pour effet de maquiller les traces de coups. Les légistes considèrent qu’il y a eu « traumatisme appuyé du massif facial du vivant de Robert Boulin » sans conclure, pour autant, que ce traumatisme ait pu être mortel.
    Claude Richir, ancien responsable du laboratoire de l’hôpital Pellegrin, déclare avoir constaté une fracture des os propres du nez, pouvant difficilement résulter d'une chute. On doit, selon lui, envisager la possibilité d'une mort «consécutive à de petites hémorragies multiples diffuses dans le cerveau, comme chez les boxeurs après un KO mortel».
  • 15 janvier 1984 : Bertrand Boulin déclare à la presse avoir vu des dossiers sortis par son père avant sa mort, en septembre 1979, concernant Elf, Dassault, la Sécurité sociale et l’Arabie saoudite. Ces dossiers ne seront jamais retrouvés. Laetitia Sanguinetti, la fille d’Alexandre Sanguinetti, avance que : «D'après ce que papa m'a dit les dossiers de Boulin concernaient une série de facturations diverses et variées de grosses sociétés, françaises ou étrangères, qui servaient au financement occulte des partis, et notamment au RPR.»[3].
  • 18 janvier 1984 : Sur les marches du Palais de justice de Paris, la famille Boulin accuse le procureur de la République de Versailles, Robert Barbat, de « forfaiture », suite aux nombreuses irrégularités et anomalies de l'enquête. Robert Badinter, garde des Sceaux, porte plainte pour « diffamation » contre la famille Boulin.
  • mars 1984 : L’affaire Boulin est dépaysée au Tribunal de grande instance de Paris. Le magistrat Yves Corneloup reprend le dossier, en liaison avec la Brigade criminelle.
  • octobre 1985 : Découverte d'une écoute téléphonique du maire de Saint-Léger-en-Yvelines démontrant que l’heure de décès de Robert Boulin a été rectifiée sur ordre du Procureur de la République de Versailles.
  • 7 novembre 1985 : Déposition de l’adjoint au maire Serge Tirlet qui décrit les traumatismes au visage de Robert Boulin, qu'il avait lui-même constatés au bord de l'Étang Rompu.
  • 30 avril 1987 : Avec son nouveau conseil, René Boyer, la famille Boulin demande au garde des Sceaux, Albin Chalandon, l'aide judiciaire pour financer les coûts d'exhumation des bocaux contenant les derniers prélèvements d’organes du ministre censés se trouver sous un monument à la gloire des donneurs d’organes au cimetière de Thiais.
  • juillet 1987 : L’hebdomadaire L’Express annonce que le réfrigérateur cadenassé de l’institut médico-légal contenant une partie des prélèvements de poumons de Robert Boulin a été fracturé, puis vidé de son contenu.
  • 28 octobre 1987 : Le juge Corneloup interroge sur commission rogatoire Henri Tournet, l’homme qui a vendu le terrain de Ramatuelle à Robert Boulin, vivant à Ibiza. Malgré les demandes réitérées de la famille à différents ministres de la justice, l’extradition d’Henri Tournet n’a jamais été requise.
    Le magistrat demande à la Brigade criminelle de retrouver le postier de Montfort-l'Amaury pour éclaircir l’épisode des lettres posthumes[4]. Selon la Brigade criminelle c'est impossible car il est en Guadeloupe. Le postier, retrouvé par des journalistes en consultant l’annuaire, était en fait affecté à un poste en Bretagne.
  • novembre 1987 : Après des fouilles infructueuses au cimetière de Thiais, la famille Boulin découvre que les ultimes prélèvements d’organes du ministre n'y sont pas enterrés, contrairement à ce que la Justice et la police lui indiquaient depuis plusieurs mois.
  • 8 janvier 1988 : Dans L’Express,[5] James Sarrazin révèle que la position des lividités cadavériques sur le dos de Robert Boulin indique que le corps du ministre a été déplacé après sa mort. Un pool de journalistes de plusieurs médias se constitue pour tenter de tirer au clair les conditions de la mort de Robert Boulin.
  • mars 1988 : Le magistrat Alain Verleene reprend le dossier Boulin.
  • juin 1988 : La famille Boulin porte plainte pour « destruction de preuves »[2].
  • 20 septembre 1991 : Ordonnance de non-lieu rendue par la juge d’instruction, Laurence Vichnievsky, seulement neuf jours après que le dossier lui a été confié.
  • 24 mars 1992 : Confirmation du non-lieu « en l'état » par la chambre d’accusation de la Cour d’appel de Paris, présidée par Martine Anzani.
  • 15 décembre 1992 : La Cour de cassation confirme le non-lieu, ouvrant un délai de 10 ans avant une éventuelle prescription.
  • 4 juillet 1995 : La Justice rend une ordonnance de non-lieu suite à la plainte pour « destruction de preuves » déposée par la famille Boulin à la suite de la disparition des prélèvements anatomo-pathologiques[2].
  • novembre 1999 : Le magazine Golias, sous la signature de Francis Christophe, publie une contre-enquête détaillée remettant en cause la version du suicide[6].
  • 15 janvier 2002 : L’émission 90 minutes sur Canal +[7] apporte de nouveaux éléments infirmant la thèse du suicide : le témoignage du colonel de gendarmerie (Jean Pépin) qui a sorti le corps de l’eau, d’une spécialiste en toxicologie (Juliette Garat) qui a analysé le sang du ministre.
  • 30 octobre 2002 : La Justice annonce l’audition de nouveaux témoins dans l’affaire Boulin. Cette nouvelle enquête préliminaire interrompt la prescription.
  • 13 décembre 2002 : Témoignage de Jacques Douté dans le journal Sud Ouest[8] expliquant avoir été prévenu de la mort de Robert Boulin dès le 29 octobre 1979, à 20 heures.
  • 4 janvier 2006 : Fin des nouvelles auditions devant un officier de police judiciaire de Nanterre. 28 personnes ont été entendues entre 2002 et 2006 mais il n'y a pas réouverture d’information judiciaire.
  • 16 octobre 2007 : Le procureur général de la Cour d'appel de Paris, Laurent Le Mesle, a rejeté une nouvelle demande de réouverture du dossier effectuée par Fabienne Boulin-Burgeat.

Les contre-enquêtes

Un certain nombre de contre-enquêtes effectuées par des journalistes semblent avoir mis au jour des incohérences dans les conclusions de l'information judiciaire, de nature à réfuter la thèse du suicide. Fabienne Boulin, fille de Robert Boulin a répertorié 75 anomalies dans le traitement de l'affaire [9]'[10]. Les principaux points des différentes contre enquêtes sont traités ci dessous.

À propos des menaces de mort

Jacques Paquet, ancien chef de cabinet de Robert Boulin, témoigne de menaces très précises venant de membres du SAC dirigé par Charles Pasqua, conseiller influent de Jacques Chirac, lors du passage de Boulin au ministère de l’Économie et des Finances (mars 1977-mars 1978)[11].

Les menaces écrites adressées à Robert Boulin, conservées par son inspecteur de police, ne furent jamais versées au dossier. De multiples témoignages font état de menaces physiques à l'encontre du ministre[12].

À propos de la nouvelle de la mort

Jacques Douté, un proche de Robert Boulin alors en compagnie de deux personnes, reçoit un coup de téléphone le 29 octobre 1979 (la veille), vers 20 h à son restaurant de Libourne lui indiquant qu’« il est mort »[13]. Version confirmée par Bernard Sube, photographe pour l’actuel conseil général de Gironde[14].

Guy Aubert, collaborateur du ministre, est allé vers 20 h le 29 octobre 1979 (la veille) au domicile de Robert Boulin et déclare à Colette Boulin : « Robert est mort »[15]'[16].

Le chef de cabinet de Robert Boulin, accompagné d’Éric Burgeat, conseiller technique et gendre du Ministre, signalent peu après minuit au ministère de l’Intérieur, puis à Matignon la disparition du ministre. D’après le dossier pénal, les premières recherches sont lancées le 30 octobre à 6 h 25 du matin et le corps n'est retrouvé qu'à 8 h 40 par une brigade de gendarmerie. Pourtant, dès 2 heures du matin, l’information de la découverte du corps remonte au sommet de l’État[17].
Yann Gaillard, directeur de cabinet de Robert Boulin, est convoqué à Matignon vers 2 h du matin par Philippe Mestre, directeur de cabinet du Premier Ministre. Celui-ci reçoit, devant Yann Gaillard, un coup de téléphone. Après avoir raccroché Philippe Mestre confie : « On a retrouvé le corps »[18]'[19]. Un témoignage démenti par Philippe Mestre.

L’ancien Premier ministre Raymond Barre, déclare dans son livre « L’expérience du Pouvoir »[20]'[21] avoir été prévenu vers 3 h du matin « que l’on a retrouvé le corps de Boulin dans un étang de la forêt de Rambouillet » et que le ministre s’est donné la mort en se noyant après avoir avalé des barbituriques.

Christian Bonnet, ministre de l'Intérieur au moment des faits, affirme lui aussi avoir été alerté de la mort de Robert Boulin « entre 2 h et 3 h du matin »[22].

Marie-Thérèse Guignier, administratrice de biens judiciaires, ex-membre des cabinets ministériels de Robert Boulin et intime des milieux gaullistes, est réveillée dans la nuit du 29 au 30 octobre 1979, entre 1 h 30 et 2 h du matin, par un ami proche, Louis-Bruno Chalret, à l'époque Procureur général près la Cour d'appel de Versailles. Chalret lui apprend que l'on a retrouvé le corps de Robert Boulin dans les étangs de Hollande. « Et là, déclare-t-elle, il se couvre, il appelle tout le monde sur le REGIS (le réseau téléphonique interministériel de l'époque), c'est-à-dire l’Élysée, Matignon, probablement l’Intérieur et la Chancellerie ».
Lié au SAC et aux réseaux Foccart, Louis-Bruno Chalret s’est immédiatement rendu sur place avec une équipe d’hommes sûrs : « On a tout fait minutieusement, comme il fallait. J’ai tout surveillé. Rien n’a été laissé au hasard », dit-il à Marie-Thérèse Guignier, en qualifiant cette affaire de « truc à emmerdes ». Son amie résume ainsi le rôle actif qu’il a pu jouer cette nuit là : « Il était l’homme qu’il fallait pour ce genre de choses »[23].

Victor Chapot, proche conseiller du Président de la République de l’époque, Valéry Giscard d’Estaing, déclare, lui, avoir appris la mort de Robert Boulin à 9 h du matin par un coup de téléphone d'Henri Martinet, un ancien collaborateur du ministre. Il se serait alors « précipité chez Giscard qui apprend la nouvelle au téléphone au même moment »[24]. Valéry Giscard d'Estaing, dans son livre de mémoires Le pouvoir et la vie, dit avoir appris la mort de son ministre à 11 h 30 du matin.

À propos du corps

Le corps est retrouvé bouche fermée, ce qui irait à l’encontre d’un suicide par noyade. Les enquêteurs ne s’intéressent pas à la position en « coffre de voiture » du corps, avec les jambes légèrement repliées et un seul bras levé, dont les rigidités semblent cassées.

Les partisans de la thèse du meurtre relèvent aussi que l'absence de vase et de boue sur le bas du pantalon et sur les chaussures indiquerait qu'il n'a pas pu entrer dans l'étang par ses propres moyens. Selon Madame Anzani[25], les pompiers ont traîné le corps sur le sol ce qui aurait eu pour effet de nettoyer le tout. Une boucle d’une des chaussures du ministre est manquante et ne sera jamais retrouvée.

Le gilet de Robert Boulin est entièrement décousu dans le dos mais les vêtements ne seront pas analysés durant l’enquête préliminaire. Le portefeuille est resté sec, mais aucune information ne fut donnée sur l’endroit où il a été retrouvé.

Il semble anormal que le corps, une fois ramené sur la rive, ait été déplacé avant que les premières constatations n'aient été faites par un médecin-légiste.

À propos de la voiture

Le toit de la voiture est légèrement ouvert alors que les portes de la voiture sont fermées à clé.

La voiture est sale et couverte de boue. Pourtant, elle se trouve non loin d’une route départementale et dans un chemin empierré, non boueux. Cependant, Georges Restoueix, garde forestier responsable du secteur nord de la forêt de Rambouillet de 1971 à 1991, officier de réserve, certifie qu’à l’époque un colonel à la retraite lui a confié avoir vu, vers 23 h le 29 octobre 1979, au bord de la route, sur le terre-plein au-dessus de l’Étang Rompu, la voiture du ministre. Bien que celle-ci ait été retrouvée en contre-bas[26].

Divers éléments ne seront pas analysés : une tâche suspecte sur le tapis de sol, des traces de doigt sur la carrosserie, des mégots de gauloises[27]. Un dossier portant la mention « à n’ouvrir que sur ordre formel de ma part » est retrouvé vide dans la voiture du ministre.

Frédéric Mesnier, beau-frère de Bertrand Boulin, explique que le véhicule du ministre « avait été réparé sur l’aile arrière-gauche, ainsi qu’une partie de la jupe arrière », alors qu’officiellement, la Peugeot 305 de Robert Boulin n’a jamais été accidentée[28].

Quand la voiture est rendue à la famille, celle-ci retrouve des cassettes de dictaphone sous la banquette arrière de la voiture, malgré la fouille préalable de la voiture lors de l'enquête..

À propos de l'autopsie

Les photographies de l’identité judiciaire révèlent que Robert Boulin porte une entaille à la limite du poignet et de l’avant-bras droit. Il a été démontré que celui-ci ne s’était fait aucune blessure à cet endroit jusqu’au départ de son domicile. Ce fait n’a pas donné lieu à une analyse ou une expertise. L’ordonnance de non-lieu ne fait pas état de cette blessure.
L’ancien assistant des légistes bordelais ayant procédé à la deuxième autopsie du corps de Robert Boulin, le 16 novembre 1983, confie avoir été « surpris » et « choqué » par ce qu’il a clairement identifié comme une « trace de corde circulaire au poignet droit » de Robert Boulin. Il a également vu « un hématome derrière la boîte crânienne » du ministre : hématome gélatineux, bleuté, qui n'était pas un dépôt cadavérique. Selon lui, cette « face postérieure aplatie » ne peut s’expliquer par la position dans le cercueil. Sa conclusion est : « Pour moi, il a été assommé ! »[29].

Des épistaxis (saignements de nez) sont constatées à la sortie du cadavre de l’eau, ce qui serait la preuve de coups portés antérieurement à la mort.

La seconde autopsie découvrira des traces de violence. Pourtant, aucune trace de sang n’aurait été constatée ni sur le costume, ni sur les lieux de la découverte du corps.

À propos des circonstances

Le bristol

Un bristol retrouvé sur le tableau de bord de la voiture indique : « embrassez éperdument ma femme ». Aucune recherche d’empreinte sur le bristol ne sera effectuée. Il est aussi indiqué sur le bristol « la clé de ma voiture est dans ma poche droite » mais la clé est pourtant retrouvée par terre non loin de la voiture.[réf. nécessaire]

Circonstances

Quand Robert Boulin quitte, pour la dernière fois, son domicile vers 15 h 30, la corbeille à papier sous son bureau était vide.[réf. nécessaire] Pourtant, au début de la nuit, la famille retrouve dans cette même corbeille des papiers déchirés annonçant le suicide.
Le 29 octobre au soir, de nombreux « collaborateurs » et relations du ministre débarquent au domicile des Boulin et passent dans le bureau personnel du ministre. Notamment Guy Aubert, Roger Thiery et Patrice Blank, que Robert Boulin avait chargé des contacts avec la presse. L’enquête préliminaire ne jugera pas utile de les auditionner.[réf. nécessaire]

Aucune audition ne pourra être faite des policiers en faction devant le domicile de Neuilly de Robert Boulin. Quand le juge Corneloup a décidé de rechercher ces policiers pour les interroger afin de reconstituer précisément les allées et venues au domicile de Robert Boulin dans la soirée du 29 octobre.[réf. nécessaire] Une fois prouvée la présence de ces policiers en faction 24 h sur 24, ce sont les registres de présence du commissariat de Neuilly qui ont disparu. [réf. nécessaire]

Quelques jours après la disparition de Robert Boulin, toutes les archives du ministre entreposées à son domicile-bureau de Libourne sont transportées aux fins de destruction dans un établissement libournais spécialisé.[réf. nécessaire]

À propos des courriers

Robert Boulin le 29 octobre écrit une lettre, constituée d'éléments de son dossier sur la défense de Ramatuelle. En fin de matinée, il envoie son officier de sécurité, l’inspecteur Autié, remettre ce document en mains propres à Monsieur Patrice Blank, son conseiller pour la presse, et Maître Alain Maillot, son avocat. Ces deux lettres ne seront réclamées que des années plus tard par la justice.

La lettre dite posthume comportant quatre feuillets, reçue par plusieurs destinataires (Alain Peyrefitte[30], Gérard César, Jacques Chaban-Delmas[31], Pierre Simon[32]) reprend pour l’essentiel un argumentaire sur l’affaire de Ramatuelle. La première phrase de la première page, « j’ai décidé de mettre fin à mes jours » est décalée horizontalement et verticalement du texte. Or cette phrase, ainsi que les quatre dernières lignes, elles-mêmes isolées sur un dernier feuillet séparé, sont les seuls passages de la lettre à faire référence à une intention suicidaire.[réf. nécessaire] L’original de ces lettres dites posthumes est resté introuvable. Françoise Lecomte, ancienne secrétaire du ministre, témoigne que le jour même de sa mort, le 29 octobre 1979, Robert Boulin lui fait taper une lettre qui ressemble mot pour mot à la lettre posthume attribuée, un peu plus tard, au ministre, excepté les mentions suicidaires du début et de la fin[33]. Toutes les lettres sont des photocopies à l’exception de quelques mots manuscrits et de la signature. Les lettres dites posthumes sont tapées sur un papier à en-tête obsolète du « Ministère du Travail » que Robert Boulin n’utilisait plus à cette époque, ayant à sa disposition le nouveau papier à en-tête du « Ministère du Travail et de la Participation ». Il est possible qu'il ait gardé l'ancien papier comme brouillon. Le rouleau encreur de la machine à écrire du bureau de Robert Boulin, où aurait pu être tapées ses lettres dites posthumes, ne fut pas saisi immédiatement. L’inspecteur qui interroge Éric Burgeat, le 30 octobre 1979, tape sa déposition sur la machine du ministre[34]. Elle sera saisie plus tard, et disparaîtra dans les locaux de la police judicaire sans avoir été analysée.

À propos de la version du suicide

Selon Fabienne Boulin-Burgeat, fille de Robert Boulin, il est établi par les auditions que le corps du ministre portait des traces de coups et « preuve est faite » que des preuves ont été dissimulées avant l'enquête judiciaire.
« De nouveaux témoignages confirment que Robert Boulin a été assassiné, victime d'un complot politique. (...) Nous ne cessons de rassembler les preuves tangibles que mon père a été assassiné et je vois mal comment la justice de la République pourrait continuer à les dénier », a-t-elle déclaré le 16 avril 2007[35].

Le journaliste Philippe Alexandre ne croit plus aujourd’hui à la thèse du suicide : «C’est une affaire vraiment TRÈS politique, dit-il. L’élimination de Robert Boulin est un fait politique extrêmement important. Et ça, j’ai mis du temps à m’en apercevoir. »[36].

Maurice Robert (mort le 9 novembre 2005), ancien membre du SDECE, proche de Jacques Foccart, chargé du service « Afrique » chez Elf, ambassadeur au Gabon en novembre 1979, estime qu’il s’agit de l’ «un des crimes les plus mystérieux. La version du suicide ne tient pas la route, dit-il. Boulin a été tué. Assassiné. Dans cette affaire, il y a des gens tout à fait douteux.»[37].

Notes et références

  1. Le scellé contenant le sang de Robert Boulin est volé sans effraction dans les locaux mêmes de l’institut médico-légal. L’enquête effectuée après dépôt de plainte par l’expert responsable de l’institut médico-légal n’est pas versée au dossier pénal et n’a pas abouti.
  2. a , b  et c Le Préfet de police de Paris, Monsieur Jean Daubigny, ordonne la destruction de la série bis des prélèvements. La destruction est exécutée par Michelle Rudler, directrice de l’institut médico-légal, sans que la famille ni le magistrat instructeur n’en soient avertis alors que seule l'autorité judiciaire est habilitée à prendre cette décision. Un courrier de l’expert de l'institut médico-légal dépositaire des scellés, le Professeur Roger Le Breton, avait pourtant averti le préfet Jean Daubigny de toutes ces modalités et insistait sur la nécessité de conserver ces prélèvements. La partie civile porte alors plainte pour « destruction de preuves ». La justice reconnaîtra l’élément de fait (les preuves ont bien été detruites) et la demande fondée en droit (les pièces ne devaient pas être détruites), mais la partie civile sera déboutée, « l’intention de nuire » n’étant pas reconnue.
  3. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p. 357-358, Fayard, Paris, 2007
  4. Toutes les enveloppes retrouvées des lettres dites posthumes font le même poids, alors que selon la déposition du postier de Montfort-l'Amaury où Robert Boulin aurait déposé ces lettres, certaines faisaient moins de 20 grammes et d’autres plus de 20 grammes.
  5. « Le faux suicide de Robert Boulin »
  6. Francis Christophe, L'affaire Boulin, 20 ans après : le grand maquillage, Golias magazine, no 69, novembre-décembre 1999
  7. « Robert Boulin : le suicide était un crime » reportage de Canal+ de 2002
  8. «Un silence trop lourd »
  9. article du nouvel obs
  10. liste des anomalies
  11. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p. 326, Fayard, Paris, 2007
  12. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.323, 367-368, 383-395, 390, Fayard, Paris, 2007
  13. «Un silence trop lourd », journal Sud Ouest du 13 décembre 2002
  14. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.254, Fayard, Paris, 2007
  15. Colette Boulin sur TF1 en mai 1983
  16. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.254-260, Fayard, Paris, 2007
  17. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, Fayard, Paris, 2007
  18. Yann Gaillard, Adieu Colbert, 2000
  19. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p. 239-240, Fayard, Paris, 2007
  20. Raymond Barre, L'Expérience du Pouvoir, (entretiens avec Jean Bothorel), page 175, Fayard
  21. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.241-242-243, Fayard, Paris, 2007
  22. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.242-243, Fayard, Paris, 2007
  23. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.243-244-245, Fayard, Paris, 2007
  24. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.250, Fayard, Paris, 2007
  25. présidente de la chambre d’accusation de la Cour d’appel de Paris, dans son ordonnance de non-lieu en 1992
  26. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.216, Fayard, Paris, 2007
  27. Robert Boulin ne fumait pas de cigarettes
  28. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.220, Fayard, Paris, 2007
  29. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.180, 192-193 Fayard, Paris, 2007
  30. alors Garde des Sceaux
  31. Pierre Pascal, ancien conseiller spécial de Jacques Chaban-Delmas précise que la lettre est arrivée le mardi 30 octobre à 9h30 du matin. (« Un homme à abattre », p. 278)
  32. l’ami franc-maçon de Robert Boulin, explique que le jour de la découverte du corps, «le procureur ou le commissaire de Versailles» l’appelle «le matin» pour lui dire qu’il va «recevoir au courrier du soir une lettre de Boulin.» (« Un homme à abattre », p. 277)
  33. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.301-304, Fayard, Paris, 2007
  34. comme l’indique la déposition elle-même
  35. le Figaro, 16 avril 2007
  36. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.324, Fayard, Paris, 2007
  37. Benoit Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, p.421, Fayard, Paris, 2007

Voir aussi

Liens internes

Liens externes

Bibliographie

  • Benoît Collombat, Un homme à abattre : Contre-enquête sur la mort de Robert Boulin, Fayard, Paris, 2007
  • Hamedi Karine, « Scandale et suicide politiques. Destin croisé de Pierre Bérégovoy et Robert Boulin », Thèse de sciences politiques, L'harmattan, mai 1999, ISBN 2-7384-7818-2
  • Christophe Deloire, Cadavres sous influence : les morts mystérieuses de la Ve République, Edition Jean-Claude Lattès, Paris, 2003.
  • François-Xavier Verschave, Noir silence, Les arènes, Paris, 2001.
  • Pierre Péan, L'homme de l'ombre, éléments d'enquête autour de Jacques Foccart, Fayard, Paris, 1990
  • Patrick Rambaud, Mort d’un ministre, Grasset, 1985.
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